Droit à l’erreur : une réforme cosmétique pour les contribuables

Le projet de loi sur le droit à l’erreur est loin de la révolution annoncée par le gouvernement.

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Droit à l’erreur : une réforme cosmétique pour les contribuables

Publié le 27 janvier 2018
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Un article de l’Institut Fiscal Vauban

Selon un adage bien connu, errare humanum est (l’erreur est humaine). Aussi, le président de la République souhaite-t-il, conformément à sa promesse phare de campagne, consacrer le droit à l’erreur des administrés en général et des contribuables en particulier. Bien que l’intention doive être saluée, il apparaît que ce droit à l’erreur ne devrait pas bouleverser les relations entre les contribuables et l’administration fiscale.

Rappelons tout d’abord que le droit à l’erreur s’inscrit dans la continuité de nombreuses autres réformes ou velléités de réformes, qui ont toutes eu comme ambition d’améliorer les relations entre l’administration fiscale et les contribuables. Parmi ces réformes, on peut citer la loi du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières, dite loi «AICARDI», l’ordonnance du 7 décembre 2005, relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l’harmonisation et l’aménagement du régime des pénalités, ainsi que la loi du 12 novembre 2013.

Une approche restrictive

Les notions d’erreur et de «bonne foi» s’inscrivent assurément comme les pierres angulaires de la future réforme. Or celles-ci sont entendues bien plus restrictivement par l’administration fiscale que par les hommes politiques et l’opinion publique.

S’agissant tout d’abord de la notion d’erreur : l’administration a une propension récurrente à considérer que ce qui pourrait être considéré par tout un chacun comme de simples erreurs (un retard ou une omission déclarative par exemple) constituent en réalité des «manquements délibérés», autrement dit des fautes volontaires, lesquelles excluent nécessairement la bonne foi des contribuables.

La «bonne foi» renvoie en effet, selon l’administration fiscale, à un comportement de droiture, caractérisé par la souscription volontaire et correcte aux obligations fiscales. Seuls les contribuables ayant souscrit correctement ces dernières peuvent ainsi être considérés comme étant de bonne foi.

En revanche, les contribuables qui omettent de respecter leurs obligations fiscales, soit par défaillance déclarative, soit par dissimulations de ressources, ou par la mise en oeuvre de moyens abusifs pour détourner l’impôt sont systématiquement considérés comme étant de mauvaise foi. Il va sans dire que le projet de loi ne prévoit pas d’étendre la présomption de «bonne foi» aux contribuables ayant omis de remplir leurs obligations fiscales.

Des dispositifs fiscaux existent déjà

Les contribuables de bonne foi sont, comme ceux de mauvaise foi, visés par les pénalités fiscales. Celles-ci correspondent à l’ensemble constitué des majorations, des amendes et de l’intérêt de retard actuellement fixé à 0,40 % par mois, soit 4,80 % par an. Ce taux devrait toutefois être réduit de moitié pour s’élever à l’avenir à 2,40 % par an. Ceci reste encore élevé par rapport au taux auquel se finance l’État, à savoir moins de 1 %.

Contrairement aux contribuables de mauvaise foi, ceux de bonne foi peuvent cependant demander à en être déchargés par le biais de deux dispositifs fiscaux. Tout d’abord par le biais de la remise gracieuse de pénalités, laquelle permet à l’administration fiscale d’accorder, sur demande du contribuable reconnu de bonne foi, des remises totales ou partielles d’amendes ou de majorations fiscales ainsi que d’intérêts de retard.

Les demandes gracieuses des contribuables ne sont soumises à aucune condition au regard des délais de présentation. Elles peuvent donc être formées à toute époque, après la mise en recouvrement de l’impôt ou de la pénalité dont l’abandon ou l’atténuation sont sollicités.

Ensuite, par le biais de la relance amiable, laquelle permet aux contribuables pour lesquels l’administration fiscale a détecté une discordance entre les sommes déclarées et les informations que lui fournissent les tiers déclarants (employeurs, caisses de retraite, etc.), dont la nature et le montant des écarts constatés permettent de penser qu’il s’agit de simples erreurs commises de bonne foi, de recevoir dans l’année même où ils ont déclaré leurs revenus, une lettre leur demandant de vérifier et, le cas échéant, de régulariser leur déclaration.

Ceux qui considèrent que leur déclaration doit être corrigée à la hausse l’indiquent à l’administration par retour de courrier. Cette régularisation, qui concerne environ 800.000 personnes par an, ne fait l’objet d’aucune sanction ni intérêt de retard.

Une loi pas très pertinente

Force est de constater que le droit en vigueur prévoit d’ores et déjà que les contribuables diligents, à savoir ceux ayant souscrit leurs obligations fiscales, sont présumés de bonne foi. Par suite, on peut se demander pourquoi le projet de loi prévoit d’instaurer une présomption de bonne foi des contribuables… qui existe déjà, sachant qu’il n’entend pas étendre cette présomption aux contribuables non diligents qui sont actuellement les seuls à être présumés de mauvaise foi.

Au reste, le droit en vigueur réserve déjà aux contribuables de bonne foi un traitement favorable dès lors que ces derniers peuvent être, sur demande, exonérés de l’ensemble des pénalités fiscales (majorations et intérêts de retard). On peut donc légitimement s’interroger sur la pertinence de la réforme envisagée par le gouvernement dès lors que celle-ci ne devrait nullement bouleverser les relations entre l’administration fiscale et les contribuables.

 

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