Par Gabriel Delauney.
Comme nous le savons tous, l’instruction est en danger dans notre pays.
L’instruction en France : le constat accablant
Si l’on en croit les chiffres de 2015 fournis par la Journée Défense et Citoyenneté auxquels participèrent 770 000 jeunes français âgés de 16 à 25 ans, « 80,7 % des jeunes Français et Françaises de 17 ans maîtrisent les apprentissages fondamentaux de la langue française. Près de 10 % des jeunes sont des lecteurs inefficaces ».
La lecture demeure une activité laborieuse pour 9,4 % des jeunes et les acquis en lecture sont très fragiles pour 9,9 % d’entre eux, qui de ce fait, n’accèdent pas à la compréhension des textes. Chez les jeunes hommes, la part des individus en grande difficulté de lecture atteint 11,3 %, chez les jeunes femmes il atteint 8,4 %. (Source)
Pour ne rien arranger, les consignes sont claires, pas de redoublements, du moins pas dans le primaire.
Nous avons qui plus est l’un des pires systèmes en termes de lutte contre les inégalités, et les Français s’en désolidarisent.
Le manque de confiance des Français, voire le ressentiment qu’ils éprouvent, est perceptible par nombre de faits divers ; l’Éducation Nationale est rongée par des agressions de professeurs, des agressions sexuelles sur les enfants, le harcèlement…
Cela n’est pas étonnant car un système qui tend (malgré-lui ?) à produire des individus de plus en plus détachés de la culture et du savoir, gloire de l’Homme, ne peut que s’effondrer sous la sauvagerie.
L’Éducation nationale ressemble au Titanic venant de percuter le fatal iceberg. S’il n’y avait que ces terribles ombres au tableau, les fissures de la coque pourraient encore être colmatées. Mais nous sommes dans un sanctuaire, dans la couveuse des valeurs officielles où chaque battement d’ailes d’un ministère provoque une tempête dans le pays.
L’arabe, le grec ancien, le latin à l’école ? La suppression des notes ? Quel enseignement de l’Histoire ? Quelles mathématiques ? Quelle histoire ? Quelle orthographe ? Quels rythmes scolaires ? Quels examens ? Faut-il le redoublement ? Faut-il un uniforme ? Qu’apprend-on à nos enfants en cours de sciences ? Comment nos enfants apprennent-ils à lire ?
Et puis quelles sont les opinions des enseignants ?
Comment sortir de l’ornière éducative
Et si la solution se trouvait dans la liberté de création d’enseignements scolaires ? Bien sûr, ce rêve aurait nécessité une mise à niveau personnelle dans bien des domaines, beaucoup d’investissements en temps, des ressources financières pas nécessairement abondantes mais bien solides.
Enfin, faire preuve de suffisamment de passion et de crédibilité pour susciter la confiance de parents inquiets aurait été indispensable.
Mais ce sera semble-t-il un rêve, car l’État a produit ce qu’il sait faire de mieux, à savoir des règles absurdes.
Pour créer un établissement du primaire, le directeur doit :
- Être âgé de plus de 21 ans
- Être de nationalité française ou d’un État membre de la Communauté européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’espace économique européen
- Avoir atteint le niveau du baccalauréat
- Être en possession de capacités juridiques
Ces normes sont déjà critiquables. Passons outre celles qui pourraient se défendre, et concentrons-nous sur les autres obligations légales.
1/ Être obligatoirement d’une nationalité européenne n’est t-il pas discriminant ? Imaginez être un Sénégalais vivant en France, insatisfait du fait que ses enfants et ceux de ses compatriotes ne puissent pas apprendre correctement les maths, le français et la culture française, ni même leur langue d’origine via l’Éducation Nationale… Voilà une loi contre productive.
2/ Avoir le baccalauréat n’est pas une garantie de compétences. Des personnes sont talentueuses dans la vulgarisation et n’ont pas encore passé le baccalauréat, ou ne l’ont jamais obtenu.
Mais revenons à la structure (collège/lycée) correspondant à la période où l’élève est formé à davantage de matières, et où il est plus autonome, plus mature.
Pour créer un établissement du secondaire, le directeur doit, en vertu de la loi :
- Être âgé de plus de 25 ans
- Être de nationalité française ou être ressortissant de l’UE (dommage pour le Sénégalais).
Avoir le baccalauréat - Avoir un casier judiciaire vierge, tout comme celui souhaitant fonder une école
- Faire une déclaration au rectorat
- Enfin, le directeur doit également pouvoir justifier de 5 années d’expérience en tant que professeur ou surveillant dans un établissement du second degré, ce qui ajoute à l’écueil des 25 ans…
Que dire sur la disposition la plus polémique ?
Pourquoi cinq années à l’Éducation nationale pour ouvrir une école privée ?
Mais la vraie question est de savoir pourquoi forcer les aspirants fondateurs de collèges à avoir 5 ans d’expérience à l’Éducation nationale ?
Tous les vulgarisateurs de savoir sur youtube ont-ils passé ne serait-ce qu’une – et non pas cinq – année dans le rôle d’un enseignant ? Ce n’est évidemment pas le cas, et quand bien même, cela ne saurait en aucun cas servir d’argument juridique. Ils sont pourtant aujourd’hui les principaux relais de la connaissance, que ce soit dans les domaines de l’histoire de l’art, de la linguistique, de l’histoire, de la musique, du français, des mathématiques, de la biologie, de l’astronomie, de la physique… des milliers d’hommes et de femmes partagent en toute convivialité leurs connaissances à de larges pans de la société.
On l’aura compris, ces directives sur l’âge et l’expérience ne sont pas seulement arbitraires, elles sont aussi infantilisantes : « vous n’allez tout de même pas enseigner sans avoir connu l’expérience de l’enseignement, vous risquez de commettre des erreurs ».
Laissez-nous faire nos propres erreurs, ne nous dissuadez pas d’en faire alors que votre enseigne, votre histoire et vos programmes en fourmillent !
Cette volonté de mise à l’épreuve pendant cinq années est bien moins motivée par la prévoyance que par un désir de bâillonner tout apprenti enseignant, lequel, par ses efforts et aptitudes, pourrait révéler les lacunes du système étatique.
Durant ces cinq années il vous faudra appliquer des programmes dont vous désapprouverez la pédagogie et/ou le contenu tout en espérant que les lois ne changent pas en votre défaveur ; voilà qui donne envie de s’engager pour avoir le droit de prétendre à créer sa structure !
Toutes ces dispositions légales endommagent les capacités intellectuelles et culturelles nationales, car l’uniformisation actuelle ne suscite pas l’émulation nécessaire pour provoquer un sursaut qualitatif et quantitatif au sein des programmes scolaires étatiques.
C’est rageant, car comme en toute chose la solution est dans la liberté.
Que la liberté scolaire soit et vous verrez se créer des établissements où le français et l’arabe seront enseignés sans aucune polémique ; il en ira de même avec l’esperanto, le japonais, le russe, le turc… Chacun pourra enseigner ou apprendre la langue de ses ancêtres, ou celle qui lui plaît, tout en acquérant une bonne connaissance du français. Plus besoin d’un cahier des charges restreint ou orienté par clientélisme électoral.
Des établissements pourraient multiplier les matières enseignées, comme des ateliers de découvertes des sciences où les élèves pourraient approcher la linguistique, l’entomologie, l’archéologie, la vexillologie, la sigillographie…
Des établissements verraient le jour, formant tous leurs élèves au dessin, à la peinture, à la poésie, à tous les arts, ainsi qu’à quelques métiers manuels.
Toutes ces entités scolaires, concurrentes de ce qui restera de l’Éducation nationale sitôt les chaînes brisées, amélioreront et diversifieront sans cesse leurs programmes, tout en tentant d’atteindre le plus large public possible.
Il nous faut réclamer le droit pour chacun (exception faite des prédateurs et meurtriers) de créer des établissements scolaires du premier et second degrés, sans considération sur le niveau d’études ou la nationalité.
« Just legalize everything and let Darwin do the rest » disait Georges Carlin.
On déplorera bien sûr l’apparition de groupes de fanatiques, plus ou moins restreints, et comme il en existe déjà en France ou aux États-Unis ; l’égarement de certains est un phénomène prévisible dans tout système clos qui s’ouvre ; il suffit d’y être préparés.
Il est évident à tout esprit un peu ouvert que la seule solution pour une éducation de qualité, c’est la concurrence (comme pour presque tout). Un système à la sudédoise avec le chèque éducation (l’éducation continue à être payée par nos impôts et taxes) mais chaque parent choisit l’école qui lui semble la meilleure. Au bout de quelques années, les mauvais établissements ont fait faillite, faute d’élèves et donc de financement.
C’est précisément l’intelligence que notre gauche ne veut surtout pas libérer, car plus personne ne voterait pour elle!