Déchets nucléaires : “R7T7” pour les “siècles des siècles”

Le cylindre d’acier et de verre “R7T7” mérite d’être connu car il permet de confiner les déchets nucléaires les plus radioactifs.

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Marcoule by kmaschke(CC BY-SA 2.0)

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Déchets nucléaires : “R7T7” pour les “siècles des siècles”

Publié le 20 août 2017
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Par Michel Gay.

Plus fin et élancé1 que le robot “R2D2” du film “La guerre des étoiles”, le cylindre d’acier et de verre “R7T7” est beaucoup moins célèbre2. Il mérite pourtant d’être connu car il permet de confiner les déchets nucléaires les plus radioactifs dans les profondeurs de la terre (à 500 mètres) pour “les siècles des siècles”.

Extraits des combustibles des réacteurs nucléaires, les produits de fission et les “actinides mineurs” sont appelés déchets “de haute activité à vie longue” (HA-VL). Vitrifiés dans R7T7, ils ne représentent que 0,2 % du volume total des déchets nucléaires, mais ils concentrent 98% de la radioactivité. Ils ne contiennent ni uranium ni plutonium. Ces derniers en ont été retirés pour être soit recyclés, soit entreposés en attente d’une valorisation dans de futurs réacteurs dits “à neutrons rapides” de quatrième génération.

Le premier cylindre de verre R7T7 (contenant 60 kg de déchets HA-VL pour 340 kg de verre et recouvert d’une peau d’acier), a été fabriqué en 1978 à Marcoule (Gard).

R7T7 sera “amorphe” pendant des millions d’années

Le verre R7T7 résiste à tous les types de radiations et à la chaleur. Des études sur des verres basaltiques naturels ont montré qu’il restera stable pendant… des millions d’années.

Initialement, l’intense radioactivité qui se déroule à l’intérieur du cylindre chauffe le verre qui se comporte comme un radiateur de 3000 watts (W). Sa puissance décroît ensuite lentement (170 W après 100 ans, et seulement 30 W après 300 ans).

La température doit rester inférieure à 90°C dans les galeries creusées à 500 mètres de profondeur. Donc plus l’entreposage en surface dure longtemps, moins le stockage géologique demande d’espace entre les colis pour répartir la chaleur. Cette longue attente en surface diminue donc aussi les coûts en diminuant le volume d’accueil.

Près de 1000 conteneurs spéciaux de déchets vitrifiés sont produits chaque année à La Hague. Ils refroidissent ensuite pendant quelques dizaines d’années (60 à 100 ans, peut-être 300 ans) dans des puits ventilés naturellement.

Lorsque l’autorisation sera délivrée, ils seront stockés de manière réversible pendant 100 ans dans des alvéoles souterraines à Bure, dans la Meuse. Ensuite, ils y resteront confinés définitivement conformément aux orientations définies par la loi de juin 2006 et le code de l’environnement.

Dans quelques milliers d’années, après avoir traversé les parois de béton et d’acier du colis, l’eau arrivera au contact du verre qui, en se dissolvant, formera un gel protecteur (phénomène de lixiviation). Les expériences menées et des constats historiques, notamment prés de Montpellier sur le site basaltique et argileux de Salagou, ont montré une dissolution d’un millimètre d’épaisseur chaque … 100 000 ans !

Le déplacement “raisonnable” maximum estimé des éléments les plus solubles est de deux ou trois mètres sur plusieurs milliers d’années. La dangerosité de leur radioactivité aura alors quasiment disparu… et ils seront toujours à environ 500 mètres sous terre.

Cependant, supposons que tous les cas les plus défavorables se présentent les uns après les autres. La dose maximale qui remonterait alors en surface après (au minimum) 100 000 ans ne  représenterait… rien !

En réalité, elle représenterait 100 000 fois moins que la radioactivité naturelle, c’est-à-dire une promenade à pied d’un quart d’heure sur un parcours granitique en Bretagne, ou dans le Massif-Central, ou dans les Alpes. Cette dose représente aussi un bain dans une piscine de stations thermales dont les eaux radioactives soignent les curistes3

Oui, l’humanité peut gérer les déchets nucléaires

Aujourd’hui, il n’y a plus de verrou scientifique ou technique qui empêcherait une gestion sûre et définitive des déchets de haute activité dans un stockage en formation géologique profonde.

En France et dans le monde entier, la science a confirmé la fiabilité des modes de gestion choisis pour les déchets nucléaires “HA-VL”. La solution pérenne et sûre du stockage dans les couches géologiques profondes sera mise en œuvre en France dans quelques dizaines d’années pour laisser le temps à R7T7 de refroidir.

Cette solution est déjà mise en œuvre en Suède.

Le débat et la controverse dureront cependant encore probablement longtemps. Des déclarations fracassantes d’experts, parfois autoproclamés, en mal d’audience ou de subventions, continueront de défrayer la chronique. La difficulté des décideurs sera de s’extraire de ces échanges, peut-être intellectuellement satisfaisants (pour certains) mais improductifs, afin de prendre des décisions.

Il faut confier à la nature la prévention de ce risque plutôt qu’à la société et aux futures générations.

L’énergie nucléaire continuera à être source de vie et de richesses pour les nations qui auront les ressources humaines et les moyens technologiques d’accéder à cet extraordinaire don de la nature. Elle est aussi un moyen d’économiser les combustibles fossiles dont les autres pays auront un besoin vital pendant encore longtemps.

Un avenir durable pour tous inclut forcément le nucléaire dans la réflexion4, et le verre durable R7T7 fait partie de la solution “pour les siècles des siècles”.

  1. Hauteur 1,4 mètre pour un diamètre de 40 centimètres.
  2. Voir le livre de Stéphane GIN “Les déchets nucléaires : quel avenir ?” (Dunod / 2006) https://www.amazon.fr/Les-d%C3%A9chets-nucl%C3%A9aires-Quel-avenir/dp/2100503634
  3. Voir le livre paru en octobre 2016 “Sous-exposé ! Et si les radiations étaient bonnes pour vous ?” http://www.vive-le-nucleaire-heureux.com/
  4. Voir le livre paru en mars 2016 “Vive le nucléaire heureux !” http://www.vive-le-nucleaire-heureux.com/
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  • Le coût de ce retraitement est-il intégré dans les factures EDF des abonnés? Ou est ce la cerise sur le gâteau ?

    • Je vous laisse décider si la dette constituée par EDF découle de la fabrication de ces cylindres depuis 35 ans ou du rachat depuis 15 ans à des producteurs d’électricité intermittente à des tarifs à 5 ou 10 fois le prix du marché. Sur la facture, il n’y a pas de distinction entre ce qui équilibre les dépenses et ce qui manque et oblige EDF à s’endetter.

      • EDF est une entreprise publique, donc déficitaire. Et on nous dit que grâce au nucléaire on a le coût le plus bas du KWH, je voulais juste savoir si le retraitement était intégré dans ce coût et la maintenance à venir aussi ? De la même manière le construction et le démantèlement des centrales est-il aussi compris dans le prix du KW? Si ce n’était pas le cas il serait facile de dire que le KW nucléaire est moins cher puisqu’il n’intègre pas tous les coûts occasionnés en aval et en amont.

        • Je voulais juste répondre qu’à partir du moment où le prix du kWh est fixé arbitrairement, on ne peut pas dire ce qui est compris dedans et ce qui n’y est pas.

          • @ MichelO
            Donc il est facile de prétendre que la France à +/- 75% nucléaire a un prix très bas de son électricité, alors que EDF-Areva, est à 85% d’actionnaire étatique, état qui fixe le prix du kwh!

            Cette fable a assez duré! Le coût de démantèlement est aussi inconnu: à mon avis, les Français, leurs enfants et petits enfants n’ont pas fini de payer pour les démantèlement déjà à prévoir, donc pour votre électricité atuelle “pas chère” … sauf au coeur de M.Gay!

        • @chicotier
          il serait intéressant de savoir s’il est possible d’intégrer dans le coût du Kwh actuel toutes les lubies écologistes de précaution imposées par ces ayatollahs lorsqu’ils prennent un tant soit peu de pouvoir.
          Questions, lors de l’achat de votre appartement ou maison, avez vous intégré le coût de sa déconstruction ?
          Lorsque vous circulez sur les routes qui sont des rubans d’asphalte, de goudron et autres produits bitumineux posés sur Gaïa mère nature, êtes vous préoccupé par leur rendu à la nature ?
          Quand vous allez aux toilettes, d’uriner et déféquer dans l’eau potable, ça vous fait quoi, vous utilisez du PQ bio pour soulager votre conscience en même temps ?

    • Les changements permanent de législation ne peuvent être calculés à l’avance.

  • Merci pour cet article très explicite.
    Le principal risque restant est le facteur humain, selon moi, surtout à cause des guerres.

  • Vu de mon zinc, je ne comprends pas pourquoi on s’échine à trouver des solutions qui demandent des décisions pour dans 100 000 ans (alors que la classe politique ne voit pas à plus de 5 ans d’avance). Il me semble que le priorité des priorités de la recherche dans tous les pays “nucléaires” serait de trouver une façon de neutraliser rapidement les déchets nucléaires. C’est impossible ? Avant toutes les grandes inventions, les “scientifiques” disent cela.

  • La description de la méthode, de ses avantages, et de sa sécurité, devrait rassurer tous les hommes raisonnables. Les termes “nucléaire heureux” ne sont pas indispensables. La démonstration qu’une solution fiable à très long terme existe ne convaincra pas ceux qui refusent le nucléaire et tous autres moyen de production stable et garantie. On entendra encore des Ségolène Royal ou des Nicolas Hulot réclamer les fermetures de toutes les centrales.

  • “Vitrifiés dans R7T7, ils ne représentent que 0,2 % du volume total des déchets nucléaires” : et les 99.8% autres, on vous les emballe dans du papier journal

    • Ils sont déjà “emballés” définitivement dans des centres de stockages et ils ne sont pas (ou peu) dangereux.

    • A noter que parmi les “déchets radioactifs”, vous avez par exemple le carrelage. Ainsi, on fait entrer du carrelage dans la centrale pour refaire le sol de la cantine. Si on en a en trop, on le met à la poubelle. Sauf que le carrelage est radioactif et dépasse les seuils que l’on autorise à une centrale nucléaire pour un déchet classique. Il entre alors dans le cycle de traitement des déchets radioactifs.
      Oui, je parle bien du même carrelage que celui que vous posez dans votre cuisine (qui est donc radioactive…)

  • Petite précision : on parle d’emballages qui en réalité s’appellent des CSD-V (Conteneurs de Stockage de Déchets – Vitrifiés), terminologie utilisée dans le monde du nucléaire et de manière internationale (terminologie COGEMA – AREVA) car ces conteneurs sont retournés à leurs propriétaires : les électriciens qui possèdent les combustibles irradiés qui ont été retraités.
    R7 et T7 sont en fait les 2 Ateliers de vitrification de La Hague (celui de Marcoule s’appelle l’AVM) et on ne parle jamais de cylindres R7-T7.

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