Par Chloé Lemoine.
« Banquier chez Rotschild », voire « le banquier de Rotschild » : durant les mois de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a été affublé de cette étiquette comme une véritable scie musicale, avec plus ou moins de bonheur.
Ses études de philosophie n’ont certes pas été éludées, ni le fait qu’il ait été l’assistant éditorial de Paul Ricœur pendant deux ans. Toutefois, alors que le banquier de Rotschild a nourri une imagination débordante, étrangement l’assistant de Paul Ricœur beaucoup moins.
Ce qui est intéressant n’est pas tant qu’il ait été l’assistant d’un grand philosophe, mais précisément de ce philosophe-là et, de surcroît, qu’il l’ait été, de son propre aveu, par la grâce d’une « pure coïncidence » (Entretien avec E. Macron, Les Matins, France culture, 27/01/2017).
Mais qui était Paul Ricœur ?
Paul Ricœur a bâti ce qu’il est convenu d’appeler une « philosophie des conflits ». L’objet de sa recherche a consisté à se confronter aux apories de la pensée, c’est-à -dire aux distinctions considérées comme irréductibles, pour en tirer une réalité structurante pour l’Homme.
Il considérait qu’il ne sert à rien de chercher à réduire une contradiction car cela aboutit nécessairement à une simplification de l’opposition et, en définitive, à son appauvrissement ; et qu’au contraire en prendre acte et s’en nourrir mène à une pensée enrichie et structurée.
Pour prendre un thème particulièrement en vogue dans la dernière campagne présidentielle, le journal Le Monde a posé la question : « qu’est-ce qu’être Français ? », à des personnes rencontrées au hasard dans la rue.
Plusieurs réalités ont semblé s’imposer : être Français, c’était, pour certains, avoir la nationalité française, pour d’autres, être nés en France ou vivre en France, ou encore être nés de parents français, et ainsi de suite. Dans un contexte fortement politisé, l’antagonisme entre droit du sang et droit du sol s’est imposé.
Être Français en situation
Une autre question intéressante aurait été : « Vous êtes-vous déjà ressenti comme étant Français et dans quelle situation ? ».
Les réponses auraient été nécessairement différentes.
C’est ainsi, par exemple, qu’on pourrait imaginer qu’un Français se concevrait comme tel alors qu’il est à l’étranger et qu’on lui propose de manger, en guise de dessert, un croissant acheté « très cher », « dans une boulangerie française à l’autre bout de la ville ».
Ce n’est pas nécessairement la rareté du produit, son coût ou même sa médiocre qualité qui ferait que le Français se ressente comme tel dans cette situation.
En bonne logique, il devrait se sentir touché par le geste amical de son hôte étranger. Par politesse, il tairait donc le fait que les croissants se consomment « normalement » au petit déjeuner, et non au dîner…
Ce qui structure l’identité
« Normalement », c’est-à -dire « à la manière française de se nourrir », une « manière » qui structure fondamentalement l’identité française. C’est en effet dans cette manière fondamentale de manger son croissant, évidente, quasiment sacrée, que le Français aurait subrepticement, presque imperceptiblement, ressenti son identité française.
Il aurait trouvé chez l’autre et grâce à son amitié, un aspect structurant de son identité. C’est donc par ou grâce à l’autre que le Français se serait ressenti lui-même comme étant Français.
De là à dire que l’identité française pourrait se construire dans la culture étrangère est un pas que nous franchirons allègrement, puisque c’est le détour par la culture étrangère qui permettrait en définitive de définir un aspect de l’identité française.
Paul Ricœur morcelait ses objets d’étude pour en tirer une interprétation fondatrice, estimant que c’est dans une tête d’épingle qu’une contradiction a priori insoluble pouvait révéler toute sa richesse et aboutir, en définitive, par un mouvement inverse de l’abstraction à des vérités fondatrices pour l’Homme.
Des cultures françaises
Pour en revenir à notre exemple précédent, notre Français, de retour dans sa mère Patrie, pourrait se rendre au restaurant pour déguster un couscous, en souvenir de l’amitié offerte par son hôte étranger. Contre toute attente, dans cette situation, seul face à son plat – et non plus confronté à l’autre dans sa différence, il ne penserait pas une seule fois à sa qualité de Français.
Serait-ce dans cette perspective qu’Emmanuel Macron se situe lorsqu’il affirme qu’il n’existe pas une mais des cultures françaises ?
Dès lors, que souhaite-t-il tirer au plan pratique de la fin des partis traditionnels de droite et de gauche qu’il appelle de ses vœux ?
Dans cette logique, toute tentative de synthèse semble vouée à l’échec et, en définitive, les deux quinquennats précédents l’ont durement éprouvé, l’un par calcul politique, l’autre par pente naturelle.
Tenter la synthèse ou provoquer une dissolution des partis constituerait une véritable trahison de la philosophie des conflits. Mais est-ce le souhait d’Emmanuel Macron, lui qui a créé un mouvement à ses initiales ne revendiquant pas le nom ou le statut de parti, lui qui proclame refuser tout parti… pris et qui prétend revenir à l’unité nationale par le jeu d’un va-et-vient et de détours entre des idées (interventionnisme versus libéralisme, progressisme versus conservatisme, etc.) qui, précisément, structurent les identités des partis existants.
Reste à savoir si cela lui sera pardonné.
« qu’est-ce qu’être Français ? »,
Les noms (« gentilés » ou « ethnonymes ») désignant les habitants d’un pays, d’une province, d’une localité…. (Note de l’expéditeur : et même donc d’un quartier de grande ville !!! Et aussi d’une fraction de continent, etc. ) prennent la majuscule initiale : les Français, les Anglais, les Poitevins, les Parisiens.
Les noms de langues correspondants gardent une minuscule : parler le français, l’anglais, le poitevin…
L’adjectif garde la minuscule : la population française, la cuisine anglaise, le
Marais poitevin, le Bassin parisien.
L’usage est incomplètement fixé et les codes typographiques diffèrent quant au traitement de l’attribut : Il est anglais (adjectif) ou Il est Anglais (nom). L’Imprimerie nationale tranche en faveur du nom, comme on le fait par exemple en allemand (Sie ist Franzüsin).
L’Académie considère que l’on a affaire à un adjectif, que l’on ne dira jamais Elle est Suissesse, mais Elle est suisse, et met donc la minuscule : Ils sont albanais, corses… Elle n’est pas parisienne.
Arroseur arrosé, Française s’écrit en allemand Französin…
ROTHSCHILD prend deux H, puisque c’est le forme et non le fond qui est en cause.
Il me semble que Macron ne refuse pas tout parti puisqu’il vient précisément de créer le sien! Et il semblerait que, de surcroît, ce soit le plus riche!
@ Mariah
Pour être juste, il a fondé le mouvement « en marche » mais a immédiatement démissionné du parti, dès sa fondation, ce qui correspond à sa largeur d’esprit nécessaire quand on veut être le président de tous les Français (qui n’ont pas inventé le croissant, importé du « kipferl » autrichien, introduit à Paris, grâce à la « Boulangerie Viennoise » de August Zang et Ernest Schwarzer, pas vraiment français)!
Qui n’a pas vu qu’il soignait ses relations internationales avec D.Trump, V.Poutine, et « Bruxelles » (OTAN et Union Européennes)? La mondialisation s’installe par les mentalités.
« De là à dire que l’identité française pourrait se construire dans la culture étrangère est un pas que nous franchirons allègrement puisque c’est le détour par la culture étrangère qui permettrait en définitive de définir un aspect de l’identité française. »
Excessif probablement. L’identité française se construit pendant la jeunesse : dans la vie familiale en France, dans l’enseignement en France, par les amitiés, les coutumes, les traditions, la culture, la langue, etc. Mille et mille choses.
En partant vivre à l’étranger après avoir vécu en France depuis sa naissance et pendant plusieurs décennies, ce qui apparaît ce sont les différences. L’individu prend alors conscience avec une acuité toute particulière de la singularité française. Il relativise, il compare, mais son identité n’est pas affectée en profondeur. Elle émerge avec plus de clarté, mais elle était bien là .
L’identité française se construit dans la culture française, bien évidemment. Mais elle est mieux ressentie par la confrontation avec d’autres identités culturelles.
Le jeune Macron a été semble-t-il autant l’assistant de Paul Ricoeur que Stephane Hessel a participer à la rédaction de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme.
Ma source documebtaire est toutefois limité car il s’agit de la retransmission d’une interview de Paul Ricoeur qui remerciait Emmanuel Macron pour la diligence et la bonne humeur qu’il avait mis à mettre de l’ordre dans les papiers du philosophe
Le choc des photos aidant, est-il permis de demander combien coûtent au contribuable les cinq (plus ceux qu’on ne voit pas?) gardes républicains qui encadrent monsieur Macron?
Un tel faste n’est-il pas une insulte à tous ceux qui continuent à se serrer la ceinture et de plus en plus, comme le retraité que je suis (CSG!)?