Par Éric Verhaeghe.
Pour les entreprises, l’automne 2016 sera probablement celui de la curée fiscale. Sur ce point, il faut absolument lire le document diffusé lors de sa présentation à la presse, par le comité national de lutte contre la fraude, du bilan annuel sur le sujet.
Toutes les entreprises sont des fraudeuses en puissance
Le comité national de lutte contre la fraude, sous couvert de réprimer l’évasion fiscale, érige en doctrine une méthode de contrôle extrêmement intrusive. On lira en particulier ces lignes qui font froid dans le dos, notamment sur le « double sandwich irlandais » ou sur le redressement des prix de transfert. Dans la pratique, l’administration fiscale entend démasquer les délocalisations abusives, notamment selon le schéma ci-dessous (sur les prix de transfert) :
Le gouvernement annonce donc de sérieuses tracasseries administratives qui évitent toutes la question essentielle qu’il faudrait se poser : pourquoi le consentement à l’impôt pose-t-il autant problème dans un monde globalisé ? Le lien entre les entreprises et la dépense publique n’est pas prêt de se reconstruire.
On comprend progressivement que les stratégies d’optimisation vont devenir de plus en plus complexes à mettre en œuvre. Et, comme il se doit, l’ardeur de l’administration frappera durement les entreprises les moins équipées pour y faire face. Et comme il se doit les plus grandes entreprises devraient avoir moins de peine pour y recourir.
Le big data au service du contrôle fiscal
La lecture du rapport sur la fraude réserve quelques autres surprises, contre le recours au data mining pour repérer les fraudeurs. Voici ce qu’en dit le rapport (p. 16) :
« En outre, depuis le 1er septembre 2016, des pôles interrégionaux spécialisés dans l’analyse-risque ont été mis en place. Ces équipes utilisent les bases de données constituées par les déclarations fiscales pour repérer des risques, par exemple des incohérences et des ruptures de comportement, et faire des propositions de programmation de contrôles dans les domaines de la fiscalité des particuliers et de la fiscalité des professionnels. »
On aimerait que ces analyses de bases de données soient mises aussi au service de la protection des citoyens et des entreprises, notamment pour leur éviter des procédures inutiles. Malheureusement, le zèle de l’administration s’exprime mieux dans le contrôle que dans l’aide aux acteurs de bonne foi.
La fraude au détachement, le nouveau sujet qui fâche
Parallèlement, l’administration sociale a intensifié ses contrôles contre la fraude au détachement. La mesure a particulièrement frappé le BTP (qui a regroupé les 3/4 des contrôles). L’inspection du travail s’en est donné à cœur joie. Les sanctions ont été durcies.
Le mot d’ordre est clair : il faut contrôler !
Bercy voudrait piocher dans la trésorerie des entreprises
Autre attention touchante de la part du ministère des Finances cette semaine : l’ambition, révélée par Les Échos, de piocher dans la trésorerie des entreprises pour boucler des fins de mois difficiles, notamment en alourdissant le dernier acompte dû sur l’impôt sur les sociétés. Cette mesure, qui touchera les grandes entreprises, n’est pas du goût de la CGPME, ni du MEDEF.
Elle illustre en tout cas, une fois de plus, l’instabilité fiscale qui touche les entreprises, tout spécialement à l’approche des échéances électorales où le gouvernement cherche à financer les cadeaux qu’il réserve à ses électeurs.
L’émotion politique domine la raison économique
Ces mauvaises nouvelles contre-balancent les effets d’annonce tout à fait démagogiques sur le sauvetage industriel français. La fermeture probable du site d’Alstom a permis de renouveler abondamment ces promesses qu’aucun politique n’est capable de tenir. Dans le cas de l’affaire Alstom, les entrepreneurs ont une nouvelle fois pu mesurer les multiples visages, souvent contradictoires, de l’action publique.
Ainsi, il y a quelques mois encore, le gouvernement retardait l’appel d’offres, en principe attribué à Alstom, pour la rénovation des lignes non-TGV en France. Le patron d’Alstom avait pourtant prévenu que ce retard mettrait le site de Belfort en difficulté, et les syndicats avaient, en mars, abondamment colporté ce message. Ces avertissements n’ont pas ému, en leur temps, le gouvernement qui a fait mine de découvrir tardivement les événements…
Le résultat de ces opérations est bien connu : la SNCF sera prochainement sommée de remplir le carnet de commandes d’Alstom, aux frais des voyageurs et des contribuables.
La curée fiscale se rapproche
Dans ce contexte tendu où l’État se défile systématiquement face à ses responsabilités, la présentation prochaine du projet de loi de finances, suivie de peu par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, risque de réserver quelques désagréables surprises. Officiellement, les contours du texte sont fixés, notamment avec une baisse par palier du taux de l’impôt sur les sociétés. Restent à voir les détails qui pourraient être piquants. Méfiance !
La Corse essuie les plâtres
Dans cette saison fiscale souvent si dangereuse, la Corse bénéficie d’une date d’ouverture spéciale, et tout à fait précoce. Un référé de la Cour des Comptes a appelé à mettre fin à des anomalies locales, notamment sur la taxe sur la circulation du vin, et autres menues fredaines. La Cour a par ailleurs relevé que les Corses payaient moins leurs impôts que les autres Français.
On voit d’emblée dans quel état d’esprit se trouvent les institutions publiques françaises.
N’allez pas chercher bien loin un phénomène bien français la France est championne du gaspillage et devrait botter quels que culs de son administration et arrêter de vouloir rafistoler quand il faut changer et innover le système fiscal .
« L’instabilité fiscale continue. Les particuliers pourraient aussi en pâtir. » Merci à Eric VERHAEGHE de contribuer à faire prendre conscience aux lecteurs de la dangerosité de notre système étatique hyper centralisé qui est aussi un système étatique anti démocratique.
Il ne faut pas perdre de vue que l’hystérie fiscale de notre président Hollande et de sa cour a été déclenchée par une élection présidentielle remportée à la majorité des électeurs.
De fait, il faut se rendre à l’évidence, le système décisionnel des dépenses étatiques et, par contrecoup, le système des prélèvements étatiques, sont hors de portée du pouvoir de contrôle des citoyens.
Le fond du problème réside dans cette absence de contrôle de l’action de nos gouvernants qui fait que la France est engagée dans la voie sans issue du sous développement industriel et de la paupérisation généralisée à tous les niveaux de la société. Une situation qui nous attire la compassion de nos voisins suisses puisqu’ils nous gratifient, gentiment je pense, de « petits français »…