Par Éric Verhaeghe.

Les politiques de libre-échange ont-elles vécu ? Le prétendu plaidoyer français en faveur de l’arrêt des négociations avec les États-Unis pour le traité transatlantique peut le laisser croire. Mais la réalité est un peu plus complexe… et opaque, de telle sorte que la fin des grands traités n’est pas encore pour demain. Jean-Marc Ayrault vient de le confirmer.
Pourquoi la France s’attaque au TAFTA
On sait désormais pourquoi la France demande officiellement la fin des négociations sur le TAFTA : l’accord ne sera pas signé avant le départ d’Obama, et l’homme ou la femme qui lui succèdera voudra probablement imprimer sa marque au texte. Les discussions auront lieu durant la campagne des présidentielles en France. Au cas où François Hollande parviendrait à être candidat, il n’a évidemment pas envie de devoir traiter ce sujet symbolique. De bonne guerre, il propose donc une interruption des négociations de façon pour ainsi dire préventive.
Le rétropédalage de Jean-Marc Ayrault
Toutefois, ce vendredi, en visite en Slovaquie, Jean-Marc Ayrault est revenu sur les annonces de François Hollande et les a démenties. Ayrault en a d’ailleurs profité pour dire du bien du traité avec le Canada, comme ses amis Allemands. L’annonce de la fin du TAFTA ressemble donc à un enfumage suprême.
L’Allemagne n’a pas dit son dernier mot
Toujours officiellement, le vice-chancelier allemand Siegmar Gabriel, social-démocrate, soutient la demande française en expliquant urbi et orbi que le traité transatlantique est mort. Ce petit coup de pouce entre sociaux-démocrates est bien sympathique et fait chaud au coeur. Il n’ébranle néanmoins pas la détermination de la Chancelière Merkel, qui continue à dire plein de bien de ce texte :
“Il est dans notre intérêt de ne pas rétrograder derrière d’autres régions du monde, comme par exemple les régions asiatiques qui ont déjà conclu un tel accord avec les États-Unis”, avant de poursuivre : “je pense qu’un tel accord offre des chances de créations d’emplois pour nous et nous avons besoin d’emplois de façon urgente en Europe”.
L’ambiguïté de Sigmar Gabriel
Non seulement l’Allemagne n’a pas vraiment renoncé au TAFTA, mais le même Sigmar Gabriel qui a prêté un renfort à la France sur ce sujet, prend une position totalement inverse sur le traité UE-Canada qui lui vaut, en Allemagne, le surnom de “Zigzag-politicien”. Il ne faudrait pas imaginer que le ralliement de Gabriel à la position française s’inspire d’un renoncement au libre-échange (pas plus que la position socialiste en France d’ailleurs). Elle est juste un élément de circonstance qui ne touche pas “au coeur” des objectifs commerciaux européens.
La lutte contre le traité canadien commence
Précisément, sur ce petit frère du traité transatlantique qu’est le CETA (accord Europe-Canada), l’engouement profond du gouvernement européen reste le même. Et ce n’est pas l’action de groupe menée en Allemagne, devant la Cour de Karlsruhe, ni les revendications des agriculteurs, qui vont arrêter le mouvement. Artis Pabriks, député démocrate-chrétien letton en charge du dossier au Parlement européen, vient de l‘expliquer clairement :
“L’accord économique et commercial global est un accord négocié entre le Canada et l’Union européenne très complet et extrêmement moderne. Il constitue un exemple pour de futurs accords commerciaux et repose sur une compréhension entre des partenaires qui partagent de nombreuses valeurs.”
Le libre-échange, un credo inusable
Contrairement à une idée répandue, l’inspiration libre-échangiste n’a donc pas quitté l’Europe, et beaucoup de ses décideurs continuent à promouvoir de grands accords commerciaux inter-régionaux qui permettent d’intensifier les échanges entre sphères multilatérales. Croire à un reflux durable du libre-échange est donc un enfumage dans les grandes largeurs.
Mais de quel libre-échange parlons-nous ?
En revanche, le problème est de savoir de quoi on parle au juste quand on évoque la notion de libre-échange aujourd’hui. Dans la pratique, les accords qui sont négociés visent à faciliter les échanges de biens et de marchandises, mais ils excluent systématiquement la libre circulation des personnes. Nous sommes donc loin de l’esprit des physiocrates, et en particulier de François Quesnay, qui posaient un principe général de libre circulation. Autrement dit, le libre échange n’est certainement pas une doctrine de la libre circulation.
La mort de Schengen et le libre-échange
On remarquera d’ailleurs que la première mort du TTIP vient d’un phénomène totalement extérieur : la montée du terrorisme international, favorisée par la crise des réfugiés, a mis un terme à toute forme de candeur sur la question de la libre circulation des personnes. Sur ce point, le libre-échange tel qu’on a pu l’entendre avant les années 1970, est bien mort. Mais on évitera de dire la même chose des autres aspects de cette doctrine économique, encore très structurante pour l’Europe.
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Les belles paroles s’adressent aux électeurs (qui deviennent méfiants devant le mondialisme qui se profile dont l’Europe est le laboratoire: gouvernement supra-étatique non démocratique).
Les actes, c’est autre chose. Les différents accords et traités concourent tous au même projet.
L’Europe est un engrenage où il est quasi-impossible de revenir en arrière.
En fait, les commentaires de la presse ne changent pas: Si la France continue à négocier (le TAFTA), c’est parce qu’elle est faible! Si elle renonce, c’est de la “politique politicienne”!… C’est toujours systématiquement NEGATIF!… Si Hollande cause, il ne devrait pas! S’il ne cause pas, c’est de la faiblesse!… Marre de ce négativisme systématique, dont “Contrepoint” est un échantillon particulièrement “éclairant”! Il est vrai que, quand on roule pour un “poulain” “qui est pour tout ce qui est contre et contre tout ce qui est pour…”
Et pour quel poulain roule contrepoints d’apres vous ?
vu ce que pèse désormais la France dans le monde…