Comment l’État français étouffe la philanthropie

France : seul pays européen où les fondations sont rationnées par l’État.

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Comment l’État français étouffe la philanthropie

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 7 juillet 2015
- A +

Par Bernard Zimmern.

Injustice statue credits wrote (CC BY-NC 2.0)
Injustice statue credits wrote (CC BY-NC 2.0)

La France est le seul pays européen où les fondations sont rationnées par l’Etat. Ce n’est pas une évidence si l’on se contente de lire les tableaux publiés par l’European Foundation Center1, où d’autres pays importants comme l’Allemagne, le Danemark, la Belgique, exigent aussi, comme la France, un accord préalable du gouvernement avant leur création. La seule différence c’est que dans tous ces pays, l’accord est quasiment automatique, mais pas en France où seulement dix fondations de plein exercice sont approuvées tous les ans. Pour comprendre cette affirmation, il faut bien faire la différence entre une fondation et une association. Une fondation est un organisme à but non lucratif qui permet en particulier de recevoir des legs ou des dons très importants, alors que l’association ne peut pas recevoir ni de legs ni de dons plus importants que les dons dits manuels.

En France il est virtuellement impossible à une association de faire de la philanthropie lourde comme une clinique, une université ou un centre de recherche important, qui exigent des dons se traduisant en millions plutôt qu’en dizaines d’euros. Tel n’est pas le cas dans les autres pays européens, et même en Suisse, où une déclaration préalable est nécessaire mais automatiquement approuvée si la fondation de départ établit des statuts conformes aux normes préétablies. À titre de comparaison, la petite Suisse avec ses 8 millions d’habitants crée 300 fondations par an2, contre 10 pour la France, et sa population fait des dons à ses fondations d’environ 1,7 milliard d’euros par an3 alors qu’en France les 950 fondations existantes et les 1.200 fondations abritées ne reçoivent qu’un milliard et quelques4, soit dix fois moins à population égale.

L’un des paradoxes de cette situation est que la plupart des pays exigent des capitaux très minimes pour l’établissement d’une fondation (au grand maximum 100.000 euros comme c’est le cas en Italie) alors que le Conseil d’État exige au minimum 1 million et demi d’euros en France. Le tableau ci-dessous récapitule les seuils minimum pour les principaux pays occidentaux et montre bien à quel point la France se situe en décalage par rapport aux autres.

 

Ceci caractérise comment la bureaucratie française a étouffé la création de fondations en France pour éviter de voir apparaitre un concurrent qui mettrait en évidence l’incapacité de cette bureaucratie à faire face correctement aux besoins collectifs.

Il s’agit là d’un sujet essentiel pour l’avenir de notre société et en 2017 des changements profonds doivent être réalisés si nous ne voulons pas que notre démocratie disparaisse.


Sur le web

  1. Comparative Highlights of Foundation Laws, European Foundation Center, p.7.
  2. Rapport sur les fondations en suisse 2015, CEPS Forschung und Praxis – Volume 14, p.4.
  3. https://ceps.unibas.ch/en/services/philanthropy-in-numbers/
  4. Rapport de la Fondation de France et du Centre français des fonds et fondations : « Les fonds et fondations en France de 2001 à 2010 ».
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