Le service minimum, une conception étatiste des libéraux belges ?

Le service minimum ne fait pas l’unanimité chez les libéraux, comme le souligne la Belgique où la coalition suédoise entend le mettre en place dans les transports.

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Grève à la SNCB en juin 2014 (Crédits Indianapattijn, licence Creative Commons)

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Le service minimum, une conception étatiste des libéraux belges ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 18 août 2014
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Par Christopher Mariën[*], depuis la Belgique.

Grève à la SNCB en juin 2014 (Crédits Indianapattijn, licence Creative Commons)
Panneau d’affichage lors de la dernière grève de la SNCB

Il y a peu nous apprenions que la coalition suédoise avait mis en place un accord de gouvernement dans lequel le service minimum, en cas de grève à la SNCB, pourrait être mis en place. Ce dispositif prôné par tous les partis de la coalition, dont les libéraux, est-il véritablement libéral ?

Le service minimum serait mis en place afin d’éviter l’utilisation abusive du droit de grève. Il est vrai que les services publics de transport, SNCB et TEC, utilisent ce dispositif à tort et à travers. Le problème ne se poserait-il pas dans ce fameux droit de grève ? Si nous considérons que la grève est un rassemblement d’individus consentants cherchant à s’exprimer de façon pacifique pour faire entendre leurs revendications, la grève rentre parfaitement dans l’idéologie libérale. Mais que penser du droit de grève ? Cette action menée par des individus libres et consentants se retrouve cadrée juridiquement par l’État, ce droit cadre la liberté des employés, mais aussi de l’employeur qui ne peut licencier un employé gréviste. Prenons l’exemple du TEC, cette entreprise publique de transport est régulièrement touchée par des grèves, même si les conditions de travail sont parfois difficiles, la légitimité de chacune des grèves menées est-elle prouvée ? L’employeur, l’État dans le cas présent, ne peut licencier les récidivistes et doit en subir les conséquences : perte de crédibilité auprès de sa clientèle et remboursement de celle-ci.

Constatons que le service minimum n’est rien d’autre qu’un autre dispositif de l’État pour combler les lacunes du droit de grève. De plus, ce service minimum va à l’encontre des principes du libéralisme, ce dispositif est coercitif, l’employeur, l’État dans le cas présent, devra imposer à des employés de travailler contre leur gré. Comment choisir l’employé devant travailler contre son gré et quel employé faisant grève librement ? Comme son nom l’indique, le service sera minimum, l’État devra donc choisir quelles sont les lignes à desservir en priorité.  De plus, ce procédé possède aussi ces lacunes, il a été pensé pour contrer les grèves dites « sauvages », mais comme cela l’impose, elles ne sont pas dites à l’avance, l’État pour imposer son service minimum devrait donc être au courant d’une façon ou d’une autre de cette grève amenant ainsi à plus de coercition. Et pour mettre en place ce service en cas de grève sauvage, l’État devra imposer à des grévistes d’interrompre leur manifestation pour pouvoir desservir les lignes imposées par ce même État.  Rappelons aussi que le client devra être prévenu de cette grève, mais aussi des lignes desservies en précisant les lignes en question, l’heure, le nombre de bus mis à disposition, leurs trajets (seront-ils délimités d’une autre façon ?).

Même si l’intention derrière ce système semble louable, il est vrai qu’il peut être fortement désagréable d’attendre son bus ou son train et d’apprendre à la dernière minute que celui-ci ne passera pas, ce procédé n’est rien d’autre que l’arbre qui cache la forêt. Le problème est plus persistant, et ramène à la défaillance de certains services publics. Si nous considérons l’État comme un employeur parmi d’autres employeurs du privé, il se doit de gérer ses services, comme le ferait toute entreprise. Le patron engage un individu dans un but de meilleur rendement, mais si cet individu fait mal son travail ou profite de certains dispositifs pour alléger le travail qui lui est demandé, l’employeur a le droit de le congédier et d’engager une autre personne s’il le souhaite. Or, l’État n’agit pas de la sorte, la preuve en est avec ses nombreux services publics et notamment ceux des transports en commun et du rail. Tout d’abord, le financement de ceux-ci est catastrophique, l’État n’investit pas assez par rapport à la demande et cela se ressent dans le service presté, mais aussi chez les travailleurs qui, mécontents de leur condition, font grève. La vraie question à se poser serait sans doute de se demander si l’État, à l’heure actuelle, est fait pour gérer de tels services à la population.

[*]Christopher Mariën est un blogueur belge. Il s’attaque à l’actualité politique par la dérision.

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  • Un problème est qu’il s’agit de transports publics en monopole et non privés en concurrence, ce qui change fortement la nature de la grève.

    • Il faut simplement interdire aux fonctionnaires de faire grève, comme c’est le cas dans plusieurs États américains. La grève, ça concerne les relations entre des employés et un employeur privé, si les fonctionnaires ne sont pas contents de leur situation, qu’ils se trouvent un boulot honnête.

      • En même temps l’état-employeur a envie d’embaucher, il faut bien que les éventuels candidats aient bel et bien envie de candidater : ce n’est pas comme si tout le monde rêvait d’être fonctionnaire.

        • « ce n’est pas comme si tout le monde rêvait d’être fonctionnaire »

          Malheureusement, si. En France et en Belgique, les campagnes de recrutement de fonctionnaires font toujours salle comble.

          • Moi de ce que j’ai compris c’est que les résultats des concours n’étaient pas vraiment positifs. Evidemment qu’il y a plein de gens qui veulent être fonctionnaires, il y a des gens qui veulent avoir un emploi. Mais soyons réalistes, ceux qui peuvent mettre en compétition secteur public et secteur privé auront tendance à être plus intéressés pas le secteur privé. Enfin c’est ce que je vois autour de moi.

            • Il faut donc privatiser ces bidules. Ce n’est pas utile à l’état qui n’arrive pas à les gérer.

              • Oui. Mais je ne suis pas certain que cela règle tous les problèmes. Je pense que la stratégie de l’externalisation est bonne (y compris pour les entreprises privées), mais cela coûte cher.
                Je pense aussi qu’avant la privatisation on pourrait faire une dénationalisation, tant l’échelle nationale est rarement opportune.

  • Et si les « libéraux » du MR parlaient plutôt de libéralisation et de fin des subventions (2 milliards pour la SNCB, 500 millions pour les TEC !!!) plutôt que de détourner l’attention avec des gadgets idiots comme le service minimum ?

  • Droit de grève de l’employé / Droit de licenciement de l’employeur… Je crois que le problème réside dans l’exclusivité du contrat de travail et dans la définition d’un temps de travail qui va avec (30/32/35/39/42… ça n’a aucune importance).

    Dernièrement je lisais un article qui parlait de contrats dits « flexibles » où la durée et l’heure de travail n’étaient pas connues à l’avance… ça aurait été parfait s’il n’y avait pas eu une clause de disponibilité, annihilant de ce fait toute idée de flexibilité.
    Alors évidemment personne ne met de pistolet sur la tempe des employés pour signer ou non tel ou tel contrat, mais je pense qu’à partir du moment où on fait signer un peu n’importe quoi, on se retrouve à gérer un peu n’importe quoi.

    • Le « droit de grève », ça n’existe pas. Il y a la liberté d’association qui vaut pour les employeurs comme pour les employés, point.

  • En fait le droit de grève rentre parfaitement dans le modèle libéral, ce qui ne fonctionne pas c’est le mélange d’un tas de chose, le droit de grève, le non respect par les gréviste du droit au travail, la sécurité de l’emploi, tout ça fait que certains individus s’arrogent le droit d’user et d’abuser de ses libertés bafouant les libertés d’autrui…

    on en reviens à la problématique de la liberté des uns qui doit s’arrêter la ou vous savez…

    • Le droit de faire grève rentre tout à fait dans une vision libérale du monde du travail, c’est sûr. Mais seulement si le patron et l’employé l’ont inclut dans le contrat de travail qui les lie. Et cela ne sera, hors intervention de l’Etat, le cas que si l’employeur peut licencier comme il veut. Et encore.

      Bref, le droit de grève ne cadre pas si bien que ça avec le libéralisme. Le principe serait plutôt « si vous n’êtes pas content de votre employeur, de vos conditions de travail, etc. démissionnez. Ou menacez l’employeur de le faire. » Pas besoin de grève, donc de violation de votre contrat de travail (qui stipule normalement que vous êtes payés en échange de votre travail. Si le travail n’est pas effectué ou si le salaire n’est pas versé, le contrat est annulé, généralement avec compensation pour la partie lésée).

      • Et si l’employé à le droit de faire^grève, l’employeur a le droit de faire un black-out.

        Je pense que si l’employé n’est pas content de son travail, eh bien, il en change. Point.

        Et s’il ne trouve pas, il n’a qu’a créer sa propre entreprise. Il verra comme c’est facile.

  • Le plus court chemin est de limiter le droit de grève à deux situations: si l’employeur l’accepte contractuellement et si l’employeur est le premier à violer le contrat de travail. Rappelons qu’une grève est une violation du contrat de travail en soi.
    Que les activités de l’Etat soient privatisées est une question annexe, de même que la question du statut des fonctionnaires.

  • Absolument personne n’est contraint d’aller travailler aux TEC. Chaque employé des TEC est parfaitement libre de démissionner quand il le souhaite, s’il n’est pas satisfait des conditions de travail ou du règlement de l’entreprise (publique). Personne n’est contraint à quoi que ce soit, à part la clientèle des TEC : les TEC bénéficiant d’un monopole bétonné par l’Etat sur le transport du bétail humain, les clients des TEC (le bétail) ne peuvent choisir de monter dans un bus d’une compagnie concurrente lorsqu’il y a grève aux TEC, puisque l’Etat interdit la concurrence. Les clients – scotchés aux TEC par le monopole – sont donc contraints par la loi de rejoindre leur lieu de travail à pied, parfois en marchant plusieurs heures, pour satisfaire les droizacquis des agents monopolistes des services publics.

    Ce qui est antilibéral, c’est l’interdiction de la concurrence. Pas un règlement de travail que nul n’est obligé d’accepter, puisque nul n’est obligé de travailler là où ce règlement est d’application.

  • Les commentaires sont fermés.

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