Par Jacques Gautron.
Pour ou contre le cumul des mandats ? Être pour ou contre, c’est déjà bien, mais ne serait-il pas plus utile de savoir pourquoi le cumul est devenu une habitude en France ? Ensuite on pourra peut-être parler des meilleures solutions à apporter.
Avant de donner la parole aux deux parties, éliminons déjà l’argument qui fausse toute discussion apaisée sur le sujet : le problème des avantages pécuniaires. En effet, ces avantages sont limités par les plafonds et il faut bien reconnaître que le revenu et les avantages cumulés correspondent en général à un travail effectué, quelle qu’en soit la valeur reconnue. Il ne vient à l’idée de personne de penser qu’un maire, à la fois député, membre d’un Conseil général ou régional se tourne les pouces. Pour ses administrés, il n’est pas assez présent dans sa commune, c’est évident, mais dans la plupart des cas, c’est bien parce qu’il siège ou intervient ailleurs. Donc pour la clarté de l’exposé, oublions cet aspect financier, même s’il n’est pas neutre. Il faudrait dans ce cas d’ailleurs plutôt revoir la rétribution de tous les élus, sans doute trop faible pour un maire de petite commune et outrageusement trop importante pour un sénateur inutile, peu efficace, sinon absent.
Les arguments des partisans du cumul
Si je suis seulement député, j’oublie les problèmes de terrain. Je perds la proximité des gens, je deviens incapable de représenter la France et ma circonscription dans la diversité de ses habitants et de son environnement.
Si je suis seulement maire, je ne peux pas défendre les dossiers de ma commune auprès du département, de la région, et bien sûr des ministères. Et surtout, point sur lequel les administrés sont très sensibles, je ne peux pas plaider efficacement les demandes de subventions. Les contribuables, pourtant, ne savent en général pas qu’ils paient aussi les subventions.
Les arguments des opposants au cumul
On ne peut être partout à la fois, et on ne peut bien accomplir plusieurs fonctions et missions en même temps. Si je suis maire, je me dois 100 % à ma commune et à ses administrés. Je dois être présent et/ou joignable à tout instant. Si je suis seulement président d’un Conseil général ou régional, c’est pour m’occuper uniquement des affaires du département ou de la région. Si je suis député, c’est pour voter les lois après y avoir travaillé sérieusement en commission. Pour cela, je dois être présent à Paris au moins quatre jours par semaine, la fin de semaine suffit alors pour rencontrer les électeurs de ma circonscription.
Donc maintenant que nous connaissons les principaux arguments des deux parties, nous sommes peut-être tentés de penser qu’ils ont tous raison. Notre indulgence est d’ailleurs plus souvent tournée vers les cumulards, l’hyperactivité est plus visible que l’efficacité ! En effet, pense-t-on, pour être utile à sa commune, il est bien nécessaire de passer du temps au département, à la région et à Paris. Et pour être un député efficace, il faut passer du temps dans sa circonscription.
Ne rien changer au bon vieux système des cumuls ?
Si le maire et son Conseil municipal avaient toute autorité opérationnelle et financière de gérer seulement ce qui concerne leur commune, pourquoi devraient-ils passer du temps en dehors du territoire sur lequel ils ont été élus ?
Ici, je vais parler de subsidiarité ascendante. Or sait-on ce que cela signifie ?
Pour simplifier, c’est un système selon lequel tout ce qui peut être décidé au niveau de la commune, par le maire, son Conseil municipal et la population, régulièrement informée et interrogée (par référendum y compris d’initiative populaire), n’a aucun besoin de concerner un quelconque niveau supérieur de la pyramide centralisatrice. Notons toutefois une évolution importante dans les mentalités : l’idée de millefeuille administratif coûteux et inefficace commence à être dénoncée, profitons-en !
La démonstration vaut pour tous les niveaux. En admettant que le niveau départemental soit conservé, sa compétence peut très bien être définie sur tous les aspects mieux gérés à ce niveau qu’à celui de la commune, mais sans concerner la région. Ainsi, nous arrivons bien sûr à l’État dont les compétences très naturellement se limitent et se concentrent, pour plus d’efficience et moins de dépenses, à la défense intérieure et extérieure, à la diplomatie et à la justice.
Alors, et pour finir, je ne veux pas oublier nos députés et sénateurs. Ne seraient-ils pas plus efficaces, tout en étant moins nombreux, s’ils faisaient simplement bénéficier les Français de leurs expériences acquises au cours de leur vie professionnelle et/ou politique débarrassées des contingences quotidiennes induites par des problèmes mal gérés par les niveaux mal décentralisés depuis l’État jusqu’aux plus petites communes.
Deux points pour compléter cet exposé. La décentralisation doit être totale pour les ressources financières. Les impôts communaux paient les besoins de la commune et ainsi de suite pour le département, la région et l’État. Quant aux services publics aujourd’hui gérés par l’État, ils pourraient bien sûr être rendus, pour la plupart, par des organismes privés.
Profitons des prochaines élections municipales pour défendre cette idée, ne laissons pas passer cette occasion !
il y a aussi le cumul/rente des mandats dans le temps : pas plus de deux mandats de maire, député. Un seul mandat de sénateur… Cela aiderait au renouvellement du personnel politique.
Deux commentaires:
1. Un argument contre le cumul des mandats: le conflit d’intérêt.
Par exemple, député-maire: il y a deux conflits d’intérêt. Il faut rappeler qu’un député « à l’Assemblée nationale et dans sa circonscription, chaque député agit et parle au nom de l’intérêt général et non pas au nom d’un parti politique, d’un groupe d’intérêt ou d’une région. » (cf. http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/travail_depute.asp)
Donc signifier que le député agit pour sa circonscription relève d’un premier conflit d’intérêt. Ensuite, s’il est maire et député, il pourrait être tenté de favoriser sa commune au sein de sa circonscription et au détriment des autres communes de sa circonscription.
Cette notion de conflit d’intérêt ne devrait pas être anodine à un libéral attaché aux contre-pouvoirs.
2. Subsidiarité ascendante ?
J’abonderais volontiers dans votre sens sur la « subsidiarité ascendante ». Mais les Maires en veulent-ils vraiment? Et leurs électeurs?
Prenons l’exemple de ces Maires qui ont endetté leurs communes avec les fameux emprunts Dexia, au mieux par incompétence, plus vraisemblablement pour assurer leur ré-élection (après, on verra bien…).
Qu’en est-il advenu de leur responsabilité?
Rien ne peut avaliser (de vassal) les Baronnies (de Barons) que sont devenus les territoires (de terres) de France. Autant de manières de mettre sous la coupe les moindres faits et gestes d’une population. Si la concurrence économique est une bonne chose les concurrences politiques et des institutions le sont tout autant.
Si nous sortions du domaine politique ? Un gérant de PME, souvent avec du personnel moindre que nombres de mairies, à part l’administration, ses règlements, lois, décrets, ses inspecteurs divers et variés, a un ennemi juré : le temps qui s’égraine trop vite, et qui lui manque sans arrêt, s’il veut mener à bien sa mission.
Le plus souvent, même en travaillant à mi-temps 12h/24 ! Cela est souvent insuffisant.
Qui peut croire, qu’un député/maire, toujours président de moult organisations, peut il trouver le temps être compétant ?
Je prends un exemple au hasard : lequel d’entre nous, quand on nous présente le parapheur, signe un seul courrier sans en connaître la teneur, ou si ce n’est pas le cas, ne prends pas le temps de le lire avant de signer ? Ceux qui d’entre nous, se sont trouvés dans le bureau d’un élu, à ce moment, restes toujours un peu interloqués, de les voir signer, sans avoir pris la peine de savoir de quoi il s’agissait ! et souvent, il s’agit de lettres bien plus importantes que celles qui félicitent, la centenaire de la maison de retraite du coin !
En effet, pas besoin de limiter le nombre des mandats, il suffit d’une part d’interdire le cumul des indemnités, et d’autre part de rendre intégralement responsable de chaque acte le plus haut échelon qui l’a signé. Les cumulards se calmeraient tout seuls.
C’est normal Tea, tout est question de responsabilité. Les élus ne sont jamais responsables (c’est soit la faute de la banque, soit des élus précédents, soit le n°xx de la boite à excuses), alors qu’ailleurs, une personne, dont la signature équivaut à engager sa responsabilité, risque gros…
« signe un seul courrier sans en connaître la teneur, ou si ce n’est pas le cas, ne prends pas le temps de le lire avant de signer ? »
Borloo a signé ainsi l’autorisation pour les « gaz de schiste ».
Enfin, c’est ce qu’il raconte.
Il faut dire que Borloo n’a jamais été très intéressé par les questions d’hydrocarbures, même pendant la crise d’approvisionnement en essence.
Rajoutons une bonne niche fiscale pour les cumulars :
Salaire 1, declaration de revenu 1, impot 1 (sur les tranches basses)
…
Salaire N, declaration de revenu N, impot N (sur les tranches basses)
Beaucoup plus avantageur qu’une seule déclaration avec salaire 1+…+N dedans.
D’où des cumulars qui cumulent massivement….
Le problème est il le cumul, ou la confusion ?
Etre exécutant et législateur, c’est contraire au principe de séparation des pouvoirs. Et la justice ne nous offre même pas la possibilité de contester cette confusion.
Absolument d’accord: Le problème est la non subsidiarité.
Pas besoin de supprimer des niveaux pour optimiser l’organisation (et supprimer bien des postes!).
Passé 2 mandats dans le temps, un élu est il toujours représentatif du peuple? N’est il pas plus intéressé par garder sa place avec ses avantages, ses relations avec les lobbys et son pouvoir personnel que par l’intérêt général?
en cumulant plusieurs mandat en même temps il y a bien sûr le conflit d’intérêts flagrant!! mais aussi la concentration du pouvoir dans les mêmes mains et au fil des années on se retrouve complètement déconnectés de nos élus, la démocratie, ce n’est pas ça… 🙁
Article ISO, comme l’auteur…