Le plus choquant, ce n’est pas tant les cadeaux faits aux rentiers qui attirent la focalisation de tous les médias, mais que les plus pauvres doivent s’acquitter en moyenne d’environ 265 euros de taxes indirectes par mois.
Par Aymeric Pontier.
L’Institut des Politiques Publiques (IPP), qui vient tout juste d’être créé dans le cadre d’un partenariat entre PSE-École d’Économie de Paris et le Centre de Recherche en Économie et Statistique (CREST), frappe d’emblée très fort avec une étude sur la fiscalité et la redistribution sociale en France. Cet institut est, ne le cachons pas, assez orienté en faveur d’une forte intervention publique, bien qu’il se défende d’avoir une quelconque approche partisane. Cette précision est, il me semble, importante pour la suite.
Les prélèvements obligatoires qui pèsent sur la population
Cette étude est basée sur les travaux de Camille Landais, Thomas Piketty et Emmanuel Saez, qui ont mis au point la première version du modèle utilisé par l’IPP. Ce qui peut poser problème à première vue. Pendant la promotion de son ouvrage l’année dernière, Thomas Piketty a en effet passé son temps à présenter dans les médias une courbe ne prenant pas en compte les transferts sociaux vers les plus pauvres, et décrivant une sorte de France fictive où il n’y aurait pas de redistribution sociale. Fort heureusement, l’IPP n’a pas commis la même erreur, et met avant les deux courbes, avant et après redistribution !
Voici la courbe qui nous intéresse, celle des prélèvements obligatoires en fonction des revenus, après les transferts sociaux en espèces (prestations familiales, allocation logement et minima sociaux), et qui n’intègre évidemment pas les transferts en nature qui sont indivisibles :
Comme on peut le voir avec cette comparaison, sans la redistribution sociale, le système fiscal français serait basé sur une imposition globale proportionnelle, oscillant faiblement autour de 45% de l’ensemble des revenus des ménages. Ce sont les transferts forcés qui permettent une certaine progressivité du système fiscalo-social, que l’on peut observer sur le second graphique. Ainsi, la taxation globale va de 25% pour les 10% de français les plus pauvres jusqu’à 40% pour les 10% les plus riches. Et tout juste 35% pour les 0,1% les plus aisés, ces derniers ayant des sources de revenus très différentes du reste de la population, basées à plus de 80% sur le capital et non sur le travail. Ceci étant dit, les récentes hausses d’impôts pesant sur cette catégorie, relative à la taxation du capital, ont déjà sérieusement dû résorber cette dégressivité observée sur les chiffres de l’année 2010…
Focus sur la fiscalité des plus pauvres
Mais selon moi, le plus choquant, ce n’est pas tant les cadeaux faits aux rentiers qui attirent la focalisation de tous les médias. Mais un autre tableau de données, presque passé inaperçu, et qui concerne l’ensemble des prélèvements fiscaux indirects, les taxes indirectes pour être précis (les taxes sur la valeur ajoutée, l’essence, le tabac, les alcools et les assurances), en fonction des déciles de revenus. Certes, c’est moins « vendeur » et moins « visuel », mais c’est autrement plus instructif !
On apprend ainsi que les 10% de français ayant les plus bas revenus doivent s’acquitter en moyenne de pas moins de 3200 € annuels de taxes indirectes, soit environ 265 euros par mois ! Pour des gens qui gagnent moins que le SMIC ! Pour donner une idée de ce que ça représente, c’est l’équivalent de la totalité de l’allocation logement pour un célibataire, ou encore plus de la moitié du RSA ! Ce que l’État « Providence » donne d’une main, il le reprend de l’autre…
—-
Sur le web
RT @Contrepoints: Quand l’État rackette les pauvres de 265 euros par mois : http://t.co/KFSQfz3c
A l’auteur :
Même l’impôt peant sur les 0.1 % les plus aisés est biaisé.
si vous avez lu le livre de Mr Picketty (qui est parfaitement communiste) vous savez la parfaite mauvaise foi de ce monsieur.
Il fait plusieurs suppositions parfaitement fausses :
pour les 0.1 % les plus aisés, il leur attribue des revenus fictifs, ce qui fait baisser artificielement leur taux d’imposition.
Pour les revenus du capital, cad els dividendes, il ne tient pas compte de l’IS (33 % et bientôt 35 %), alors que l’IS est tjrs payé in fine par les actionnaires, une entreprise étant une personne morale, cad transparente fiscalement.
Donc, rien qu’en rajoutant 33 % à 35 %, nous obtenons un taux d’imposition de 68 % pour les riches, cad une progressivité effroyable.
Enfin, pour finir, je rappelle que la progressivité de l’impôt sur le revenu ainsi que l’impôt sur le patrimoine/héritage nous vient du manifeste du parti communiste, et non de la déclaration des droits de l’homme (art 13 : flat tax).
En ce sens, on ne peut accepter ces préceptes qui sont faux, injustes et conduisent à la destruction de la société.
Von mises disait que l’impôt progressif est une spoliation légale des plus méritants, c’est cette vision qu’il faut retenir, elle est philosophiquement et économiquement juste.
Excusez moi pour la longueur de ce post.
Il est tres bien votre post et pas trop long. Il est precis.
Bonjour Stéphane,
Tout d’abord, merci pour votre réaction. Je vais répondre point par point.
Sur les revenus fictifs, l’IFRAP a fait le calcul, et a redressé la courbe. Elle devient c’est vrai légèrement plus progressive, de l’ordre de deux à trois points de taxation globale supplémentaires. Voir la courbe 4 dans ce document : http://www.ifrap.org/IMG/pdf/Note_sur_la_progressivite_de_notre_systeme_fiscal_-_Fondation_iFRAP.pdf
En ce qui concerne l’impôt sur les sociétés, vous avez en partie raison. Il faut toujours s’interroger : Qui paie vraiment l’impôt ? Pour l’IS, il semble que ce soit surtout les actionnaires sous la forme d’une baisse des dividendes, les salariés sous la forme d’une diminution des salaires, et les consommateurs sous la forme d’une augmentation des prix. Donc pas « uniquement » les actionnaires. De plus, si les actionnaires des entreprises font partie pour la majorité d’entre eux des catégories très aisées, certains appartiennent aussi aux classes moyennes via les PEA par exemple.
Ainsi, contrairement à ce que vous indiquez, l’IS ne pèse pas en « totalité » sur les français les plus riches, seulement une partie. En aucun cas, on ne peut donc parvenir à une taxation à 68%… Difficile de déterminer la somme exacte que ça représente, sûrement plusieurs points de taxation globale en plus. La courbe prend alors une allure bien plus progressive, mais de là à dire qu’elle est effroyable, je vous laisse seul juge…
Aymeric, outre les remarques très pertinentes de Stéphane, vous pouvez observer que les quantiles n’ont pas la même largeur, premier signe de la volonté de manipulation des auteurs de ces études.
Je vous invite à présent à considérer uniquement le dernier quantile, en vous souvenant que les statisticiens travaillent à partir d’échantillons. Le dernier quantile, déterminé à partir de moins de 30 individus pour un échantillonnage au millième de la population française, probablement moins d’une dizaine, ne peut pas être représentatif du groupe qu’il tente de décrire. En effet, au-delà de sa faiblesse statistique, un si petit nombre d’informations se prête aisément au choix d’inclusion du statisticien, par picorage, sachant qu’un seul individu statistique plutôt qu’un autre pourra altérer significativement le résultat du quantile pour finir par justifier la thèse qu’on souhaitait préalablement présenter, ou n’importe quelle autre thèse d’ailleurs, en dehors de toute réalité. Dit autrement, le niveau de prélèvements qu’il présente est nécessairement faux : il dépend uniquement de la (mauvaise) volonté de l’auteur de l’étude.
On passera outre le caractère illégal d’un échantillon tellement étroit que ces informations, à l’évidence, ne peuvent pas être rendues anonymes. Comment la CNIL a-t-elle pu autoriser cela, en contradiction manifeste avec sa mission de protection ?
La manipulation des statistiques est une ancienne et très vilaine manie marxiste. On pourrait presque parler de tradition, sinon de nécessité. Aymeric, malheureusement, vous êtes tombés dans le piège tendu par les idéologues, simplement en leur donnant de l’importance.
Il faut même aller plus loin et poser le fait que la distinction entre taxation des « revenus du capital » et « revenus du travail », « taxe sur la consommation » , « taxe sur l’investissement » sont des distinctions qui n’ont pas d’existence en pratique. C’est une absurdité de raisonner en ces termes, qui découle de l’inculture économique totale des élites politiques et de l’opinion. C’est s’imaginer qu’il est possible d’isoler une seule des parties d’une longue chaîne d’échanges et de ne frapper que celle-ci.
On s’en rend bien compte à partir de n’importe quel cas tout simple. Imaginons à l’échelle d’un quartier par exemple, que je suis associé d’une boulangerie et que les clients de celle-ci se voient frappés de nouveaux prélèvements sur les revenus du travail. Il s’ensuit que ces clients vont probablement réduire leur consommation de pain et de viennoiseries, entre autres, et que les profits de la boulangerie vont diminuer, et par voie de conséquence mes propres revenus du capital.
Evidemment pour le statisticien de l’INSEE ou le brave économiste étatiste, le taux de prélèvement sur mes revenus du capital n’aura pas bougé. « Ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas », on en revient toujours aux mêmes grands penseurs.
RT @Contrepoints: Quand l’État rackette les pauvres de 265 euros par mois : http://t.co/KFSQfz3c
« Quand l’État rackette les pauvres de 265 euros par mois » http://t.co/OiTsHqZO via @Contrepoints
RT @Contrepoints: Quand l’État rackette les pauvres de 265 euros par mois : http://t.co/KFSQfz3c
Les commentaires sont fermés.