Le Projet de loi de finances pour l’année prochaine (PLF 2025) est désormais connu. Selon l’introduction rédigée par les deux ministres de Bercy, à savoir Antoine Armand à l’Économie et Laurent Saint-Martin au Budget, « il n’y aura ni cure d’austérité, ni matraquage fiscal. » Cependant, à regarder les éléments effectivement publiés, on aurait plutôt tendance à penser que si la cure d’austérité fondamentalement nécessaire sera au final légère, il y aura bel et bien matraquage fiscal.
On sait que face à une situation des finances publiques très dégradée, avec un déficit public attendu à 6,1 % cette année, le gouvernement avait annoncé un « effort » de 60 milliards d’euros au total pour 2025, 40 milliards portant sur des baisses de dépenses et 20 milliards sur des hausses d’impôts. On sait aussi que cet effort était calculé par rapport à une évolution « en tendance » qui aurait propulsé le déficit à 7 % en 2025. Examinons ce qu’il en est réellement.
Pour commencer, voici les principaux chiffres de nos comptes publics :
Principales données de nos finances publiques(*) et PLF 2025
Sources : Dépenses publiques – Prélèvements obligatoires – Déficits publics – Dette publique – Croissance – Inflation – PLF 2025.
Mise à jour : 11 octobre 2024.
Unités : Habitants en millions – PIB en milliards d’euros courants – Dépenses publiques, prélèvements obligatoires, déficit public et dette publique en milliards d’euros courants et en % par rapport au PIB.
Note : 2024 est une estimation de fin d’année et 2025 la prévision du PLF. Pour ces 2 années, les données soulignées sont issues du PLF, les autres sont calculées à partir des premières.
Voici maintenant les quelques commentaires rapides que ce PLF 2025 suggère :
Dépenses publiques
Les dépenses publiques augmenteraient de 2,1 % entre 2024 et 2025, soit plus vite que l’inflation prévue à 1,8 %. En volume, leur croissance ne serait que de 0,4 %, ce qui permettrait de ramener leur ratio par rapport au PIB de 56,8 % en 2024 à 56,4 % en 2025.
Méfiance cependant, car le PLF tient compte, par exemple, d’un effort de 5 milliards demandé aux collectivités territoriales sur lequel le gouvernement a peu d’emprise si ce n’est par son pouvoir de persuasion. Dans son avis sur le PLF 2025, le Haut Conseil des Finances publiques (HCFP) estime que dans l’ensemble, les annonces de maîtrise des dépenses sont très fragiles compte tenu du peu d’informations divulguées quant à leurs modalités concrètes.
Effectifs de la fonction publique d’État
Les syndicats de l’Éducation nationale se sont bruyamment émus de la suppression annoncée de 4 000 postes d’enseignants, mais il faut savoir que ces baisses toucheront essentiellement l’école primaire où l’on observe depuis 2017 une baisse des effectifs d’élèves. De ce fait, le taux d’encadrement des élèves ne devrait pas en être affecté. Dans le même temps, 2 000 postes d’accompagnants d’élèves en situation de handicap seront créés.
Dans leur ensemble, les effectifs de la fonction publique d’État baisseraient de 2 201 équivalents temps plein (ETP) en 2025. On frôle le ridicule. Sur un volume total de 2,5 millions ETP (chiffre 2022), c’est l’épaisseur du trait. Du reste, une fois le PLF connu, le quotidien Libération classé à gauche titrait : « Budget 2025 : pas de grande vague de suppressions de postes de fonctionnaires en vue ». Une façon particulièrement convaincante de réaliser que l’austérité n’est pas vraiment la caractéristique première des projets gouvernementaux en la matière.
Prélèvements obligatoires
Les prélèvements obligatoires vont augmenter de 60 milliards d’euros en 2025. Cela représente une croissance de 4,8 % en valeur et de 3 % une fois déflatée. En fait, ils seront même plus élevés, et la baisse des dépenses moindre, car ainsi que le signale le HCFP, le gouvernement a classé en baisse des dépenses des suppressions d’exonération de charges sociales patronales, alors qu’il s’agit en fait d’une hausse des prélèvements.
Ils pourraient également augmenter via les amendements que le gouvernement compte déposer lui-même lors de l’examen du texte au Parlement.
Déficit public
Solde des dépenses et des recettes, le déficit public représenterait 5 % du PIB en 2025 après 6,1 % cette année. Rappelons que selon le programme de stabilité de l’Union européenne, il ne doit pas excéder 3 % du PIB. La part structurelle de ce déficit, c’est-à-dire la part sur laquelle la conjoncture économique n’a pas d’influence, passerait de 5,6 % à 4,5 % du PIB.
Toutefois, la fragilité des baisses de dépenses évoquée plus haut induit par ricochet une grande fragilité dans les prévisions de déficit ainsi que dans la trajectoire des finances publiques que les nouveaux ministres voient revenir sous le seuil des 3 % en 2029. Une échéance qui est reculée de deux ans tous les ans…
Dette publique
On peut commencer par remarquer en lecture directe que la dette publique aura cru de plus de 1 000 milliards d’euros entre l’élection d’Emmanuel Macron en 2017 et cette fin d’année 2024, soit une augmentation de presque 50 % ! C’est tellement vertigineux, cela traduit une telle perte de maîtrise sur nos comptes publics, malgré mille déclarations contraires de nos précédents ministres, qu’on peut légitimement se demander s’il reste encore une once de sérieux à Bercy.
Dans son avis, le HCFP souligne que depuis la période Covid, le mouvement de désendettement a été globalement plus important dans les autres pays de l’Union européenne. En conséquence, la France est désormais le troisième pays le plus endetté de la zone euro derrière la Grèce et l’Italie (graphique ci-dessous), avec un niveau prévu pour 2025 similaire à ce qu’il fut au cœur du Covid en 2020 (115 % par rapport au PIB). Ajoutez la hausse des taux d’intérêt de ces trois dernières années et vous obtenez un renchérissement notable de la charge de la dette qui pèse sur les dépenses et limite encore plus les marges de manœuvre du gouvernement.
Facteurs supplémentaires de fragilité aux yeux du HCFP, les niveaux d’inflation (1,8 %) et de croissance (1,1 %) retenus pour 2025 semblent un peu trop élevés. De ce fait, le scénario concocté par le gouvernement, quoique fort peu austère du côté des dépenses et beaucoup plus musclé du côté des recettes, pourrait s’avérer encore trop optimiste.
Une chose est cependant certaine. Malgré la reconnaissance en introduction du PLF que « la situation de nos finances publiques est grave » et que « c’est par la hausse de la dépense que nos finances publiques se sont dégradées », la lecture des chiffres annoncés indique clairement que le gouvernement Barnier n’a pas vraiment cherché à affronter l’ampleur de la dérive des dépenses publiques. La question du rétablissement des comptes est abordée par son versant fiscalité, comme au temps de François Hollande. Autant de moins pour les forces productives du pays, autant de moins pour la croissance.
Rappelons-nous ce que disait Vauban (1633-1707) en son temps, dans une France déjà battue par les impôts : « l’argent du royaume le mieux employé est celui qui demeure entre les mains des particuliers où il n’est jamais inutile ni oisif. » On en est loin.
(*) Pour les définitions des principales grandeurs de nos comptes publics, on pourra se reporter à l’article : Budget 2016 : opérations de contes à comptes (17 sept. 2015).
Une piste d’économies ne semblant même pas envisagée est la transition écologique.
Il suffirait de ne reconduire aucune subvention à partir du 1er janvier 2025. Il y aurait des mécontents, voire des gens dans la rue mais il faut savoir ce que l’on veut.
Je n’ai rien demandé quand j’ai fait installer une pompe à chaleur pas plus que quand j’ai déroulé une couche supplémentaire de laine de verre dans mes combles.
Si l’Etat cessait de nous prendre pour ses enfants et de s’immiscer dans nos vies, nous serions tous plus heureux.
Il faudrait surtout arrêter le développement très coûteux de l’éolien qui ne sert à rien, sauf à gonfler les poches des industriels de ce secteur avec l’argent des français.
Comme prévu, ces messieurs ce sont répandus en bavardages grandiloquants avec pour seul résultats une hausse des impôts qui va dégrader encore davantage notre économie mal en point. Et faire baisser les rentrées fiscales!
Il est parfaitement exact que la hausse des taux confiscatoires a pour effet (Laffer) à moyen terme de diminuer la recette fiscale. Le problème est que la loi des finances est rétroactive puisque les nouveaux taux de 2025 s’appliqueront aux revenus passés de 2024 et va donc augmenter les recettes de 2025 mais diminuer celles des années suivantes à cause de la rétroaction des agents économiques spoliés.
43 ans de myopie politique, c’est long!
Il n’y a aucune austérité, même légère, une austérité est une baisse de dépense or elles vont encore croître de 2,1%, plus que l’inflation attendue. Comme d’habitude il n’y a que léger ralentissement de la hausse des dépenses !!!
Je suis sûr que si tu présentes notre situation et les solutions proposées pour résoudre nos problèmes, même un enfant de primaire répondrait sans trop d’hésitation que c’est du n’importe quoi…
Nous sommes dans l émotion et l irrationnel donc proposer du rationel et du pragmatisme se heurte à un mur….😄😄😄
Finalement, le seul moyen réellement efficace serait soit de quitter ce pays, soit d’organiser son insolvabilité. Mais, la vraie question serait plutôt : à quand un Nuremberg des délinquances politiques ? Pour quelle raison le couple Macron/Lemaire ne répondrait-il pas d’une gestion catastrophique du pays ? Car, l’oligarchie mondialiste protège les siens.
Les élections servent à sanctionner la mauvaise gestion du pays……😁😁😁😁
Les gaulois retombent dans leurs vieux travers où les sempiternelles recettes qui ont lamentablement échoué sont remises a l ordre du jour
Tant que la démagogie régnera sans partage…. aucune décision courageuse ne sera prise…😄😄😄😄
Merci Nathalie pour cet article clair. Au-delà des discussions sur la part de la réduction des dépenses publiques vs l’augmentation des recettes fiscales qui est très manipulable comme le fait le gouvernement (i.e. comment comptabiliser les suppressions de charges patronales et autres réductions.) le mieux est de regarder l’évolution de la dette. En effet, la dette de l’Etat ne ment pas : elle est la variable résiduelle de la gestion de l’Etat. Et ici, le constat est édifiant !
Ils vont casser l’économie de la France ce qui diminuera encore plus les rentrées fiscales. Ils font excactement l’inverse de ce qui devrait. Etre aussi bêtes confirme à quel point les politiciens sont complètement inconscients!