Propriétaire ou squatteur, mais toujours vache à lait

La récente campagne du ministère de la Justice montre à quel point la législation et la justice française méprisent les propriétaires.

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Propriétaire ou squatteur, mais toujours vache à lait

Publié le 9 novembre 2023
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Selon que vous serez propriétaire ou locataire, les jugements vous donneront tort ou raison, pourrait-on dire en paraphrasant Jean de La Fontaine[1].

Un propriétaire victime d’un squatteur l’a bien compris et a su astucieusement retourner la situation à son profit en devenant lui-même squatteur de… son propre bien.

De nombreux médias ont relayé ce nouveau fait divers. Face à un locataire mauvais payeur, le propriétaire n’a pas hésité à utiliser les propres méthodes des squatteurs : profitant de l’absence de son locataire, il a occupé son propre bien durant 48 heures, puis a changé la serrure. Dès lors, en tant qu’occupant sans titre, le droit lui devient plus favorable qu’en tant que propriétaire-bailleur lésé.

Certes, la loi a récemment changé[2] après plusieurs affaires de squat qui mettaient en évidence l’inégalité de droits entre propriétaire et occupant sans titre. Les sanctions à l’encontre des squatteurs ont depuis triplé : trois ans de prison et 45 000 euros d’amendes. Mais il s’agit plus d’une illusion que d’un vrai changement.

Pour deux raisons.

La première est que les sanctions ne s’appliquent qu’à l’issue d’une procédure, et que cette procédure est tellement longue que le propriétaire bailleur se retrouve en difficulté. Peu lui chaut que son squatteur paye une amende et qu’il loge « gratuitement » en prison si tant est d’ailleurs que le jugement soit exécuté.

La seconde est révélatrice de l’esprit de l’appareil étatique. Ainsi, le Conseil constitutionnel a invalidé l’article qui prévoyait que le propriétaire d’un logement squatté soit exonéré de son obligation d’entretien. Un classique de la politique du « en même temps » : on fait semblant de durcir les sanctions mais « en même temps », le fond reste inchangé… Le propriétaire paie la casse.

 

L’esprit de la loi selon le ministère de la Justice

Récemment, une campagne (payée par l’argent des contribuables) a fait tiquer l’Union nationale des propriétaires immobiliers : ces derniers sont présentés comme des oppresseurs aux côtés des patrons et des divorcés, comme l’illustre cette affiche.

 

Remarquez au passage que les victimes du patron ou de l’« ex » sont féminines, mais que celle du propriétaire est un homme, et que le méchant propriétaire-expulseur est une femme.

Digression : j’ai particulièrement apprécié l’humour de ce pastiche.

Précision : une expulsion est une décision de justice qui s’obtient après des années de procédures (et d’impayés). Puis, entre un jugement d’expulsion et son exécution, des années peuvent encore s’écouler. Enfin, un simple fonctionnaire de préfecture peut faire mettre aux oubliettes un jugement, sans justification.

Le ministère de la Justice met donc à disposition un fil de conseil téléphonique pour celui qui enfreint la justice, est condamné, mais désire se maintenir dans les lieux.

C’est ce qu’on appelle désormais l’État de droit : les codes ne cessent de s’allonger, les délais aussi et les « deux poids deux mesures » se multiplient. Le droit du locataire et de l’occupant sans titre est supérieur au droit de propriété.

 

Des juges nourris à la lutte des classes et irresponsables

Dans Une justice politique Régis de Castelnau dresse un portrait au vitriol de la magistrature et de son idéologie qui consiste à adopter une attitude de dépénalisation de la délinquance de ceux qui appartiennent aux bonnes catégories qualifiées de « victimes » : immigré vs « Gaulois », locataire vs propriétaire, employé vs patron…

Finalement, peu importent les lois ; des étudiants recrutés à bac +5, biberonnés par l’École de la magistrature de Bordeaux à l’aune de la lutte des classes, ressortent après trois ans avec un « permis de juger ». Ignorants des rouages du monde économique – et même de ceux de la sphère publique selon Régis de Castelnau – ces moralistes autoproclamés sont également irresponsables, et leurs dérives ne rencontrent aucune limite comme le démontre l’affaire du mur des cons.

 

Le propriétaire : une vache à lait qu’on élève jusqu’à l’abattoir

Malgré cette inégalité de droits et ce déni de justice, l’État entend multiplier les propriétaires, flattant en cela les aspirations de la majorité des ménages pour qui posséder son toit reste une priorité.

Ainsi, le prêt à taux zéro (PTZ) fait partie des mesures fétiches d’aide d’accès à la propriété qui devrait être étendu en 2024 aux classes moyennes[3]. Mais, « en même temps », le champ du PTZ sera limité à l’achat d’appartements neufs en zones tendues ou, dans les autres zones, à l’acquisition de logements anciens sous condition de rénovation.

Il est vrai qu’un propriétaire foncier devient un contribuable taillable et corvéable à merci qui a le mérite d’être plus visible et moins mobile qu’un autre. Il connaîtra les joies d’acquitter des taxes foncières toujours croissantes, des droits de mutation, et même l’impôt sur la mort. Si notre propriétaire à succès rejoint le camp ignominieux des propriétaires-bailleurs pour arrondir sa retraite, une nouvelle pluie de taxes et contraintes réglementaires s’abattra sur sa tête. Peut-être, un jour, obtiendra-t-il son bâton de maréchal : acquitter l’impôt sur la fortune immobilière qui sanctionne des plus-values illusoires. Celles-ci ne sont en effet que les stigmates de la création monétaire. L’impôt sur la fortune est l’impôt emblématique de la lutte des classes. Inefficace, il coûte plus qu’il ne rapporte à l’appareil étatique, mais il est si doux de nuire à ceux que l’on envie…

[1] Les animaux malades de la peste :« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cours vous rendront blanc ou noir »

[2] Loi dite anti-squat, validée par le Conseil constitutionnel en juillet 2023

[3] définies par Bruno Le Maire comme celles ayant un revenu compris entre 2500 euros et 4500 euros mensuel

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  • À quoi bon appliquer des amendes aux squatters? Il n’ auront pas de quoi payer…

  • Un jour qui ne sera pas comme un autre, un propriétaire pètera les plombs et tuera son squatter. Ce jour là, il aura fait un exemple qui pourra être suivi par tous les autres propriétaires. Que fera alors l’État ? Mettra-t-il en prison 50.000 propriétaires qui suivront son exemple et feront justice eux-mêmes ou va-t-il légiférer ?
    En attendant, les pôôôôvres squatters peuvent remercier Mitterrand.
    Dans notre pays, il vaut mieux être un voyou qu’un honnête citoyen. Ça paye plus et mieux.

  • Et en même temps ont s’étonne de la multiplication des meublés touristique

  • La 1ére Loi facilitant le squatt, obligeant un propriétaire à passer par la Justice pour expulser un squatter (y compris pour récupérer son logement personnel squatté après une absence) date de 1991. Si son principe de base n’a jamais été « retouché » c’est qu’elle répondait bien à une intention maligne, à savoir commencer à grignotter le droit de propriété pour les plus modestes. Toutes les tentatives timides pour faire sauter ce verrou de la procédure judiciaire pour expulser un squatter, ont toutes été contrecarrées de façon discrète en commission des Lois depuis 2010. Seuls quelques dispositifs procéduraux ont été mis en place (laissant la décision à l’arbitraire d’un fonctionnaire et juste pour le squat d’une résidence principale…) ont été mis en place de façon voyante mais JAMAIS la loi n’a été révisée….Seuls des évènements très graves pourraient nous débarrasser de la voyoucratie législative veillant sur cette loi scélérate comme le lait sur le feu. Si vous voulez en savoir plus sur certains intervenants discrets auxquels nous devons cet été de fait : https://levenindelavouivre.wordpress.com/2021/02/13/squat-qui-veut-la-peau-du-droit-de-propriete/

    • Grignoter le droit de propriété, je ne crois pas que ce soit l’intention réelle. Il s’agit simplement d’accorder un « droit à », le droit à vivre aux dépens des autres, au nom de la solidarité et de l’égoïsme « immoral » de ceux qui refuseraient ou conditionneraient leur aide. L’abolition de la propriété signifierait la disparition des propriétaires à piller, et beaucoup des assistés en sont conscients.

  • L’exemple du propriétaire qui squatte sa propre location parce qu’un locataire ne paie plus son loyer, est très intéressante.
    Cela pourrait donner des idées de création d’entreprise de services un peu particulière : vous payez une entreprise qui enverra un squatteur rémunéré pour occuper le logement d’un locataire indélicat pdt qq mois. Cela permet de constater l’absence d’occupation du logement par le locataire et de constater les éventuels frais de remise en état (exit la caution). Et hop, bien récupéré. Cela coûterait bcp moins que d’entamer une procédure longue et aléatoire pouvant tomber dès que le locataire se met à payer un ou deux loyers avant de cesser à nouveau de payer.
    Il faut juste vérifier si le propriétaire n’est pas obligé de reloger un locataire dont le logement est squatté…

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