Baromètre twitter des personnalités politiques : Lisnard doit passer la seconde !

À travers une analyse des réseaux sociaux des femmes et hommes politiques, Pierrik Halaven dresse un état du rapport de force politique français.

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Baromètre twitter des personnalités politiques : Lisnard doit passer la seconde !

Publié le 9 novembre 2023
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Notre dernier baromètre avait été publié le 19 avril dernier. Six mois plus tard, nous refaisions un « relevé de température » avec une nouveauté consistant à regarder aussi du côté des réseaux sociaux populaires : Facebook, TikTok et Instagram !

Notre méthode est simple. Elle consiste à mesurer la progression des abonnés sur X (ex Twitter) le media social de l’information en temps réel où sont présents tous les politiques, sans exception. Chaque personnalité politique y développe son propre canal de communication pour diffuser ses annonces, ses communiqués, son actualité. Près de 13 millions d’utilisateurs français sont actifs tous les mois sur X. Certes, les seniors y sont sous-représentés. Mais ces chiffres en millions font de Twitter un média social hyper populaire (MBappé a 13 millions d’abonnés et progresse de un million sur la période analysée…).

On parvient ainsi à approcher la force de traction, le momentum des uns et des autres.

Quid des autres médias sociaux ? Globalement, on y retrouve une hiérarchie assez proche des positions acquises sur Twitter. Nous avons pour cela complété le Top 50 (cf tableau) des plus gros comptes sur Twitter par le classement tous médias sociaux confondus (en dernière colonne). Nous insisterons sur les écarts notables entre ces deux classements dans l’analyse détaillée.

Ces derniers mois, le monde politique a été agité par de multiples évènements. Citons notamment la fin de la réforme des retraites, les émeutes de juillet dernier suivies du remaniement gouvernemental, l’inflation toujours présente, plusieurs déclarations de candidature pour la campagne des élections européennes, sans oublier malheureusement la grave crise israélo-palestinienne qui s’ajoute à la guerre en Ukraine.

En complément des sondages mainstream, effectuons pour Contrepoints ce nouveau tour d’horizon exclusif des progressions en nombre d’abonnés sur Twitter, depuis le 9 avril 2023, des principaux hommes politiques. Comme la fois dernière, nous commencerons par les has been, ensuite par la Ligue 1 puis balayerons le champ politique de l’extrême gauche à la droite nationale.

Progression en nombre d’abonnés

 

Les has been

Hidalgo, Castex, Montebourg, Taubira, Barnier, Pécresse… Les personnalités qui n’occupent plus le devant de la scène perdent des abonnés. Certes, en quantité faible, mais nous savons que rares sont les abonnés qui passent à l’acte du désabonnement. Sans surprise, ils perdent chacun quelques milliers ou centaines de followers. Les deux anciens présidents de la République subissent le même sort. Les efforts de Sarkozy pour continuer à occuper l’espace politique (publication du deuxième tome de ses mémoires fin août) ne sont pas couronnés de succès.

Xavier Bertrand, François Bayrou et le nouveau sénateur Yannick Jadot perdent aussi des abonnés, ce qui est inquiétant s’ils aspiraient encore à jouer les premiers rôles. Preuve qu’ils rejoignent aussi la catégorie des has been ?

 

Top 10 : des surprises si on intègre Facebook, Insta et TikTok

Dans le club très fermés des plus de deux millions de followers sur X, Emmanuel Macron bénéficie toujours de son statut présidentiel. Sa progression se limite à 2,3 % (contre 15,6 % sur la période précédente) ; cela fait tout de même 214 994 abonnés supplémentaires ! Marine Le Pen reste n°2 avec une progression très limitée (+0,7 %), mais se rapproche de la barre des trois millions d’abonnés. Elle devance Mélencon de 200 000 abonnés, lequel est en décélération (+1,5 % contre + 9 % précédemment), mais qui gagne néanmoins 39 000 abonnés (3e position tout de même).

Si on étend cette Ligue 1 au Top 10 du classement en nombre d’abonnés (au-dessus de 700 000), alors on note la prédominance d’Édouard Philippe proche de la barre du million, mais dont la progression est infime. Cela démontre sans doute le caractère lisse de sa présence médiatique (notamment lors de la publication de son récent essai). À moins qu’il ait atteint son maximum.

Bruno Le Maire grignote des abonnés, il est le dernier du Top 10. Sur les médias sociaux comme dans les sondages, il reste incontestablement l’homme fort du parti Renaissance.

L’approche consistant à ajouter Facebook, Instagram et TikTok modifie le Top 10 : Mélenchon et Le Pen permutent leurs places respectives (2e et 3e), et surtout on remarque la position spectaculaire de Jordan Bardella : 7e ! De même, Marion Maréchal est 9e et devance Éric Zemmour qui détient néanmoins une belle 11e place (14e en ne comptant que ses abonnés Twitter). Enfin, François Ruffin, le dauphin de Mélenchon, est 8e.

À noter que nous avons omis d’inclure le suivi de Ségolène Royal, que nous pensions retirée de la politique. Celle qui mena une campagne présidentielle efficace en 2007, reste éternellement tentée par un retour en politique, d’une part en étant désormais invitée régulière de Cyril Hanouna dans TPMP, et d’autre part en se proposant fin août pour mener une hypothétique liste commune de la gauche aux prochaines élections européennes. Sego, qui détient encore 775 746 abonnés sur Twitter (de quoi être dans la Ligue 1 ») mais aussi 244 000 followers sur Facebook, a du savoir-faire, du flair, et a manifestement compris que la formule gagnante en termes de popularité (comme nous le verrons pour les meilleurs de ce classement) consistait à leverager ses passages sur des émissions populaires grâce à l’exploitation des meilleurs extraits via ses comptes sur les médias sociaux. Nous mesurerons cela la prochaine fois.

Top 50 en nombre d’abonnés sur X

 

LFI, écologistes : toujours très actifs

Révélation politique de l’année 2022, Sandrine Rousseau continuer de gagner des abonnés. Elle est de nouveau celle qui progresse le plus en pourcentage (+ 24,3 %). Elle est suivie de près par Mathilde Panot qui sort du lot avec une progression de 15,3 % (et quasi autant de nouveaux abonnés que Rousseau en absolu). Ruffin se tasse et progresse moins vite que sur la période précédente.

L’agit-prop et les propos musclés fonctionnent plus que jamais.

À ce sujet, voici le lien d’une intervention du député LFI Louis Boyard qui explique avec brio les fondements de la stratégie de son parti sur les médias sociaux. L’élu-influenceur, que l’on pourrait qualifier de « social media natif » décrit la stratégie du « blocus-challenge » pendant la réforme des retraites, et montre toute sa dextérité dans la maîtrise des médias sociaux.

 

La PS compagnie toujours aux abonnés absents

Les poids lourds du Parti socialiste restent des poids plumes sur Twitter. Aucun représentant de cette mouvance ne connaît d’embellie.

 

« Minorité présidentielle » : Attal perce mais reste loin dans le classement

Huitième en termes de pourcentage de progression, et 13e en nombre de nouveaux abonnés, Attal apparaît comme l’un des gagnants de cette séquence. À la tête de l’une des plus grandes organisations au monde (eh oui, l’Éducation nationale), avec une séquence sur l’abaya unanimement saluée, le jeune et télégénique ministre sort du lot, et deviendrait même premier ministrable, voire candidat putatif en 2027, selon les sondages publiés par les médias subventionnés.

Mais la réalité sur les médias sociaux est plus nuancée. 168 443 abonnés pour quelqu’un qui est au gouvernement depuis 2018, c’est peu. Est-il trop techno ? Trop propre ? Trop parisien ? D’après notre approche, il a plus de chemin à parcourir que ce qu’on croit pour devenir mass market.

Intéressons-nous aussi à Gérald Darmanin, autre poids lourd de la minorité présidentielle (pour reprendre la célèbre formule de Charles de Courson !). Il progresse moins vite que sur la séquence précédente. Son honorable progression de 9,3 % prouve qu’il a habilement négocié la crise des émeutes de juillet dernier. Cela lui permet de franchir allégement la barre des 400 000 abonnés.

Remarquons enfin la présence limite nobody d’Élisabeth Borne. Avec moins de 300 000 abonnés, malgré une couverture médiatique intense en raison de son statut, elle impacte très peu en comparaison de ses prédécesseurs.

 

LR : toujours au purgatoire !

Du côté de LR, c’est dur…

Wauquiez reste un flop sur les médias sociaux, malgré une communication probablement confiée à des professionnels (progression limitée à 1095 abonnés !). Il n’est pas sorti de sa traversée du désert, et personne ne réagit à ses quelques apparitions nationales pourtant millimétrées.

Ciotti, pourtant président de LR, n’imprime plus sur les médias sociaux.

Nous ne suivons pas encore la progression de François Xavier Bellamy. Notons néanmoins qu’avec 127000 abonnés, et avec lui aussi une maîtrise professionnelle de sa communication (extraits de ses interventions souvent réussies à l’Assemblée européenne), il reste discret.

Zoomons sur David Lisnard. Le nouveau champion français du libéralisme a encore marqué des points au cours des derniers mois. Présence médiatique, rédaction de tribunes, inauguration de la permanence de son parti Nouvelle Énergie à la rentrée. C’est l’homme qui monte chez LR !

Conséquence directe : le maire de Cannes est la 8e personnalité la plus performante en termes de pourcentage d’augmentation du nombre d’abonnés (+ 9,6 %) mais seulement 17e en nombre de nouveaux abonnés (10 545). Cela étant, Lisnard n’est ni en Ligue 1, ni en Ligue 2. Avec un total de seulement 120 295 abonnés, il reste en National (l’ancienne Division 3). Il demeure en absolu dans les 10 derniers du Top 50 sur X (et dans les 13 derniers, tous médias sociaux confondus).

Ses early adopters ne se limiteraient-ils pas essentiellement à des libéraux déjà gagnés à la cause ? Lors de l’inauguration de son local parisien, on retrouvait le ban et l’arrière-ban du libéralisme français. Ils étaient tous là : de Madelin à Longuet ou Novelli, des représentants de Génération Libre à d’anciens d’Idées Action. Les tribunes de Lisnard publiées dans le quotidien L’Opinion sont solides, ses interventions sur les chaînes d’info ou dans les matinales des radios nationales convaincantes. Mais qui lit L’Opinion ? Qui regarde ou écoute encore ces émissions ? Une minorité de compatriotes. Des millions de Français s’en sont détournés depuis longtemps, et picorent l’info tel du snacking, quasi exclusivement via les médias sociaux. Et là, le compte de Lisnard n’y est pas encore.

David, aviez-vous parcouru notre étude précédente d’avril 2023 ?

Nous expliquions : «… une notoriété mass market, au-delà du cercle des early adopters, met du temps à se construire. Il faut lâcher les coups sur la durée, la prudence n’est pas de mise. »

Denis Lisnard, le père de David, a fait toute sa carrière de joueur professionnel de football en Division2. David, allez plus loin que votre papa ! Nous vous souhaitons de passer un jour en Ligue 1. De devenir une « marque » grand public, d’accéder à la grande popularité. Cela passe nécessairement par une très large audience sur les médias sociaux.

Sur le fond, Lisnard doit trouver des axes de communication qui – sans remettre en cause sa ligne politique et son honnêteté intellectuelle – lui permettent d’attirer les foules. Commenter les affres de la bureaucratie et de la dette, c’est très bien. Proposer des actions fortes fera la différence. L’accès au logement, par exemple, qui se transforme en drame national, pourrait en être un, car les solutions libérales (déréglementer, arrêter de privilégier le locataire par rapport au propriétaire) sont les seules qui marchent. À quand par exemple une journée « moratoire day » exigeant un moratoire sur la loi portant sur l’interdiction à la location des passoires thermiques, avec le soutien de milliers de maires  ? Eh oui, il faudrait aussi exploiter davantage ce leadership en tant que président de l’Association des maires de France.

Sur la forme, Lisnard doit multiplier les coups, les capsules vidéo courtes et impactantes (en s’inspirant de Bardella ou Messiha dont nous parlons ci-dessous), pour rediffuser ensuite sur les médias sociaux, investir TikTok, miser sur des militants malins, spécialistes en content management, maîtrisant les codes des médias sociaux, et flairant les bons coups.

À titre de benchmark, il pourra aussi étudier les pratiques du candidat libéral aux élections présidentielles en Argentine, Javier Milei. Quelle est la méthode de l’homme politique antisystème pour atteindre 1,2 million d’abonnés sur Twitter et 7,6 millions au total sur l’ensemble des médias sociaux dans un pays de seulement 46 millions d’habitants ?

Pour achever cette amicale diatribe, constatons que Lisnard (comme Édouard Philippe !) n’a pas encore pris l’abonnement Premium à Twitter, qui permet de bénéficier du fameux badge bleu, ainsi qu’un certain nombre d’avantages (tweets plus longs…) ! Le badge gris doit même lui être accessible en tant que président de l’Association des maires de France. À ce niveau, on n’est pas en division nationale, mais encore chez les amateurs… Voilà, c’était la séquence qui aime bien, châtie bien !

 

Droite nationale : Bardella accélère encore, le retour de Zemmour, Maréchal fait le job, Villiers à bas bruit

Et le vainqueur toute catégorie en termes de dynamique sur X reste… Jordan Bardella qui enregistre la plus forte progression de ce classement (à l’exception de Macron, hors concours) en nombre avec pratiquement 50 000 nouveaux abonnés. Bardella s’installe progressivement dans la catégorie des poids lourds du paysage politique français, d’autant qu’il est très fort sur les autres médias sociaux (cf plus haut).

À noter la technique de Bardella consistant à diffuser des extraits où il prend le dessus sur ses adversaires lors de débats télévisés. Des vraies battles, le MMA de la politique ! Un polémiste comme Jean Messiha adopte la même stratégie (il serait environ 27e du classement s’il était comptabilisé).

Surprise de ce classement, Éric Zemmour « imprime » de nouveau. Alors qu’il restait scotché dans les deux derniers baromètres, il reprend son ascension en progressant de 11 %, et en allant chercher 44449 nouveaux abonnés (dans le trio de tête après Macron et Bardella). Ses interventions musclées, notamment au moment des troubles de l’ordre public de juillet, expliquent ce regain de couleur.

Sa dauphine, Marion Maréchal, a toujours plus d’abonnés que lui, bénéficiant d’une présence plus ancienne sur Twitter (due à sa précocité avec son élection en tant que députée en 2012). Sa progression est plus forte que dans la phase précédente grâce à sa présence médiatique plus intense. Mais ce n’est pas spectaculaire. Son retour au premier plan pâtit de sa traversée du désert, et du manque de lisibilité de son ralliement à Reconquête.

Enfin, notons la progression à bas bruit et non anecdotique de Philippe de Villiers.

En 2015, le nouveau directeur de la rédaction du JDD, Geoffroy Lejeune avait publié un roman d’anticipation Une élection ordinaire (éditions Ring), préfigurant l’entrée en politique de l’ancien journaliste Éric Zemmour. Ce fut visionnaire. Zemmour transforma ses saillies quotidiennes sur CNews en une candidature surprise aux présidentielles. Et si pour les élections de 2027, l’astucieux Lejeune misait en secret cette fois sur un come back du créateur du Puy du Fou ? L’émission hebdomadaire de ce dernier sur CNews, en présence de Lejeune, marche bien. Elle lui permet de multiplier les capsules vidéo sur Twitter. Et Villiers, pourtant rangé des voitures à 74 ans, se retrouve bon quatrième dans le classement des pourcentages de progression ! Un recours possible ?

Pour les lecteurs fidèles de Contrepoints, nous ferons une digression en rappelant qu’en 1986, alors secrétaire d’État auprès du ministre de la Culture et de la communication, Villiers se déclarait clairement libéral. Pour lui, le libéralisme signifiait l’expérience et la création, la petite initiative face à l’étatisme (cf son portrait de l’époque sur le site de l’INA). En 1992, dans l’émission « L’heure de vérité », le même Villiers conseillait aux jeunes de lire Tocqueville, Hayek, Soljenitsyne et Vaclav Havel.

En conclusion, sur la base d’une telle photographie, risquons-nous à un pronostic.

Le Pen et Mélenchon seraient aujourd’hui au second tour des prochaines élections présidentielles. Leurs réussites sont collectives. Ils chassent tous deux en meute. Leurs adjoints font aussi des beaux scores. Ils ont des back ups possibles avec Bardella et Ruffin.

Pour espérer jouer un rôle clé, les autres forces en présence n’ont pas le choix. Elles doivent se muscler en vue de gagner, ou de peser dans la perspective d’éventuelles alliances. Rendez-vous en avril prochain à l’occasion des élections européennes pour l’actualisation de cette étude !

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  • Pauvre Lisnard. Le monde politique est bien ingrat. Car voilà quelqu’un dont le dynamisme s’inspire de l’homme fort de la droite. Vous savez, celui qui voulait karchériser les « cités ».
    Lui, a javellisé les rues de sa ville, en plein covid, et passé ses plages à l’eau oxygénée.
    La force et la propreté. Un beau programme, non ?

  • Avatar
    The Real Franky Bee
    10 novembre 2023 at 3 h 48 min

    Juste derrière Dupont-Aignan et Le Maire sur les réseaux sociaux : autant dire totalement insignifiant.

  • Les commentaires sont fermés.

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