Squats : le Conseil constitutionnel transforme les coupables en victimes

Dans une décision aussi inattendue que déconcertante, le Conseil constitutionnel vient de bouleverser la loi anti-squat. Les propriétaires, désormais sur le fil du rasoir, portent la responsabilité des dommages résultant d’un défaut d’entretien de leur bien squatté.

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Squats : le Conseil constitutionnel transforme les coupables en victimes

Publié le 5 août 2023
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Le Conseil constitutionnel vient de prendre une décision lourde de conséquences : lors de l’examen de la loi anti-squat qu’il a validée, il a censuré l’article 7 qui libérait le propriétaire d’un bien squatté de son obligation d’entretien, et l’exonérait en cas de dommage résultant d’un défaut d’entretien.

Pour justifier sa décision, il s’est ainsi rangé derrière l’article 1244 du Code civil qui prévoit que « le propriétaire d’un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction. »

 

Protéger les victimes 

Le Conseil constitutionnel se défend d’avoir statué en protection des squatteurs : « la censure de l’article 7 de la loi [anti-squat] a pour seul effet de maintenir l’état du droit en ce domaine », en laissant l’article 1244 du Code civil inchangé.

Il ajoute que cet article 7 prévoyait d’exonérer le propriétaire de la responsabilité du dommage à un tiers résultant d’un défaut d’entretien. « Les squatteurs, difficiles à identifier et souvent dans une situation matérielle précaire, ne présentent pas les mêmes garanties que le propriétaire, notamment en matière d’assurance ».

En un mot, le Conseil constitutionnel entend s’assurer de l’indemnisation des victimes. Les propriétaires sont des nantis qui doivent supporter les préjudices causés par ce qu’ils possèdent. Entre autres exemples, un propriétaire de voiture peut être condamné pour des dommages causés par celle-ci avant même qu’il n’ait eu connaissance du vol et qu’il n’ait pu porter plainte.

Cette situation peut engendrer toutes les audaces : des cambrioleurs qui tentaient d’entrer dans un domicile sont mis en fuite par le propriétaire qui tire un coup de feu en l’air : ils portent plainte. Heureusement, au final, le propriétaire est relaxé.

Mais dans certains cas, le propriétaire est condamné, tel cet agriculteur qui, demandant à quatre jeunes en moto-cross qui délabraient ses cultures de partir, a dû faire retraite devant leur agressivité. Il est revenu et a tiré un coup de fusil en l’air. Il a été condamné à cinq mois de prison avec sursis et à la confiscation de ses armes. Il faut préciser que les agissements de ces perturbateurs avaient été signalés à plusieurs reprises aux forces de l’ordre, sans résultat.

 

Dangereux renversement des valeurs 

Dans le cas des squats, qui est la victime ? Les squatteurs ou le propriétaire qui se voit dépossédé de l’usage de son bien ? Sans compter les dégradations qu’ils laissent lorsqu’enfin, après de longues et fastidieuses procédures judiciaires, ils peuvent être légalement expulsés.

Selon la philosophie du Conseil constitutionnel, ils sont exonérés de leurs responsabilités du fait de leur insolvabilité.

Malgré un jugement d’expulsion, une locataire s’est maintenue dans les lieux et est tombée d’une fenêtre dont la balustrade a cédé. Devant la première instance de juridiction, puis en cours d’appel et en cassation ensuite, elle a obtenu la condamnation de la propriétaire pour défaut d’entretien.

Comment cette propriétaire pouvait-elle connaître cette défaillance, peut-être créée par un défaut d’entretien par la locataire elle-même ?

Il faut savoir que, par définition, les squatteurs n’ont pas envie de rencontrer les propriétaires et ne sont pas enclins à leur mentionner les anomalies ou les non-conformités des logements qu’ils envahissent. De plus, dès qu’ils sont installés dans les lieux, la loi les protège puisqu’un propriétaire qui tenterait de récupérer son bien en changeant les serrures pendant leur absence sera condamné au titre de violation de domicile.

 

Une décision aux effets pervers 

L’article 7 qui a été censuré était pourtant porteur d’une logique évidente : il prévoyait que pendant la période d’occupation illicite, en cas de dommage résultant du mauvais entretien du bien ou de dommage causé à un tiers, la responsabilité en incombe dès lors à l’occupant sans droit ni titre du bien immobilier.

Cet article 7 était parfaitement conforme au respect de la propriété, et totalement dissuasif de l’appropriation ou de la dégradation du bien d’autrui.

Afin de prévenir les malfaiteurs contre leurs propres méfaits, il y a davantage de garantie d’indemnisations à laisser celles-ci à la charge des propriétaires. Squatteurs, volez, cassez, vous ne serez pas punis car insolvables, et indemnisés car considérés comme victimes de vos propres dégradations. Dans quelle idéologie vivent nos plus hauts législateurs pour aboutir à de telles énormités ?

À moins que derrière cette décision, une analyse plus sournoise se fasse jour. Comme les propriétaires occupants sont moins directement contraints que les bailleurs par la mise aux normes énergétiques et de décence de leurs logements, cette « jurisprudence » du Conseil constitutionnel ouvre aux squatteurs la voie pour exiger des propriétaires spoliés la mise aux normes énergétiques et de décence des logements qu’ils occupent illégalement.

Ce qui est certain, c’est que cette décision inique ouvre la voie à une multitude de procédures judiciaires, car le propriétaire aura à prouver que le mauvais entretien ou la dégradation seront du fait des squatteurs avec la quasi-impossibilité matérielle d’en apporter les preuves. Donc, nouvelle opportunité d’indemniser les squatteurs pour le préjudice moral causé par la procédure judiciaire…

J’avais écrit il y a quelque temps un article où je démontrais que l’insécurité était une industrie d’État
Les retombées de TVA et d’impôts sur les revenus des acteurs de la chaîne judiciaire semblent primer sur une saine gestion de la paix sociale.

Peu de chance donc de voir solutionner le problème, sauf s’il s’amplifie au point de devenir socialement insupportable…

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  • La France, sous la direction d’un « young global leader », en la personne de Monsieur Macron, s’efforce de raviver l’interdiction de la propriété dans un pays où la bourgeoisie a incité le peuple à se révolter à dessein, pour finalement le priver aujourd’hui d’un droit naturel.

  • « une décision aussi inattendue que déconcertante »

    déconcertante pourquoi pas, mais inattendue….vraiment ?

    A moins de vivre dans une grotte depuis 40 ans, il faut être aveugle pour ne pas voir le travail de sape de la proprité privée organisé par l’état.

    La france est un pays socialiste avec une population globalement marxiste.
    Le but ultime est de supprimer la propriété privée.
    D’où toutes les brimades dans l’immobilier (contrôle des loyers, diagnotics energie BS, interdiction de louer etc.. etc..)

  • « Fin de la propriété privée » un des points du Manifeste du parti communiste de Marx…

  • D’un autre côté, c’est une décision logique à partir du moment où la loi ne déclarait pas responsable le préfet qui empêche le propriétaire de récupérer son bien et d’exercer lui-même sa responsabilité de propriétaire.

  • Mais si le squatter est responsable de la dégradation, il sera poursuivi par le propriétaire. D’où l’importance de l’état des lieux en début de bail. S’il s’agit d’un squatter rentré dans une maison fermée, le propriétaire peut invoquer le fait que le bâtiment était impropre à l’habitation.
    Enfin, pour constater les dégradations, le squatter devra permettre au propriétaire de rentrer dans les lieux pour constatations et là, ça risque de virer au drame voir au crime…

    • « Mais si le squatter est responsable de la dégradation »
      Peu importe car le dit squatter est insolvable, donc aucun espoir de rentrer un jour dans ses fonds.

  • Vous ne possèderez plus rien et vous serez heureux.
    Le président du CC n’est-il pas riche propriétaire d’œuvres d’art et le meilleur d’entre nous qui a laissé tomber sa bonne ville de Bordeaux aux poches bien remplies de retraites administratives multiples et de sa paie supplémentaire de 14.000€ par mois. D’ailleurs tous les deux d’anciens repris de justice. On comprend et protège les confrères…

    • Les conseillers constitutionnels ci-devant ne sont pas propriétaires de biens immeubles mis à la location pour vivre tellement ils sont gavés par les retraites et traitements administratifs qu’ils ont voté et profitent au maximum. Ce sont les nouveaux féodaux du XX et XXI e siècles. Ils participent à la mise à sac progressive de notre pays. Avec Macron et son équipe les choses s’accélèrent cependant avec le redoutable combat qu’ils vont mener pour le climat.
      Comme ils ont tout raté depuis 50 ans osez le climat un combat à leur niveau. Don Quichotte

    • Employer le mot « mafia » n’est pas abusif!

  • Pour prendre de telles décisions ne serait-ce des squatteurs qui logent et décident au conseil constitutionnel ? Quel pays invivable !

  • La nuit du 4 août 1789, celle de l’abolition des privilèges et des droits féodaux . Une commémoration par le conseil constitutionnel ? Je me pose la question tant cette décision est incompréhensible !

  • Bravo à Mr Paquereau pour avoir bien sur expliquer le problème de l’annulation de l’article 7.
    Le pire, c’est que cet article venait annuler une jurisprudence qui était appliqué par tous les juges ( le propriétaire est l’éternel coupable ) mais qui était peu connu des squatteurs et des locataires qui ne payaient pas. Suite à la publicité sur le refus de cet article, tous les squatteurs et les locataires mauvais payeurs sont maintenant prévenus qu’il peuvent dégrader le logement jusqu’à le rendre dangereux, pour eux comme pour les voisins et les passants, et le propriétaire sera tenu responsable .. et eux innocentés. Ils ont donc fait savoir comment casser définitivement l’immobilier et le marché locatif français !

  • Ce genre de décision parfaitement inique et scandaleuse ne servira qu’à alimenter la colère populaire qui ne manquera pas de se déclencher lorsque l’élément catalyseur arrivera…

  • « prouver que le mauvais entretien ou la dégradation seront du fait des squatteurs ». Il n’est pas indiqué que si ces dégradations sont le fait des squatteurs, alors le propriétaire n’en n’est pas responsable. Si le logement que j’occupe a été dégradé, il faut qu’il soit réparé. En effet, des conditions décentes de logements peuvent être exigées. Si le proprio n’est pas content, il n’a qu’à vendre! De toute façon il est riche, du coup je ne vois pas le problème!
    Ca me rappelle une histoire de vol que j’avais subi: je dis à la police, les coupables vont ils rembourser les dégâts? Ne vous inquiétez pas, votre assurance va vous couvrir! Sauf que la prime d’assurance, c’est moi qui la couvre…

    • Dans un monde normal, l’assurance se retourne contre les coupables et en obtient les réparations pour votre compte. Mais chez nous, les assureurs sont d’infâmes profiteurs capitalistes qu’il convient de punir en brûlant leurs agences et en taxant leur chiffre d’affaires.

  • Les commentaires sont fermés.

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