Berlin sur les traces de la RDA : les dangers de l’expropriation immobilière

Trente-trois ans après la chute de la RDA, Berlin réexamine l’idée d’expropriation, une politique qui avait pourtant mené à une crise du logement sous le régime socialiste. Cette décision pourrait non seulement paralyser le marché immobilier berlinois, mais aussi diminuer l’attractivité de l’Allemagne pour les investisseurs.

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Berlin sur les traces de la RDA : les dangers de l’expropriation immobilière

Publié le 3 juillet 2023
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Erich Honecker, président du Conseil d’État de l’Allemagne de l’Est jusqu’en 1989, avait-il raison ? « Ni un bœuf ni un âne ne peuvent arrêter le progrès du socialisme », prédisait-il avec assurance.

Mais il n’aurait probablement jamais imaginé que 33 ans après la fin de la dictature est-allemande, l’expropriation des sociétés de logement serait à nouveau à l’ordre du jour.
Pourtant, une majorité de Berlinois s’est prononcée en faveur de l’expropriation lors d’un référendum organisé dans toute la ville le 26 septembre 2021.

La demande de municipalisation des logements locatifs appartenant aux grandes sociétés immobilières a recueilli 57,6 % des voix. Le gouvernement n’étant pas légalement lié par le résultat du référendum, il a été décidé de nommer d’abord une commission d’ « experts » chargée de clarifier la légalité de la prise en charge par l’État de la propriété des grandes sociétés immobilières. Cette commission a conclu que leur nationalisation était compatible avec la Constitution allemande.

Cette décision n’est toutefois pas une surprise, car la commission était composée de trois représentants de chacun des partis de gauche au pouvoir à l’époque – le SPD, les Verts et Die Linke – ainsi que de trois membres de l’initiative de gauche qui a fait campagne pour le référendum, Expropriate Deutsche Wohnen & Co.

L’expropriation des sociétés de logement aurait un effet désastreux.

D’ores et déjà, de nombreux investisseurs immobiliers se détournent de Berlin, après avoir été déstabilisés par le plafonnement des loyers de la ville, qui obligeait les propriétaires à réduire les loyers convenus par contrat et interdisait leurs augmentations. Bien que le plafonnement des loyers ait été annulé par la plus haute juridiction allemande, la Cour constitutionnelle fédérale, l’incertitude demeure. Les débats plus récents sur l’expropriation à grande échelle ont jeté de l’huile sur le feu de l’incertitude. En cas d’expropriation effective, Berlin serait probablement perçue par les investisseurs de la même manière que le Venezuela.

Les investisseurs internationaux se retirent déjà de plus en plus de l’Allemagne. Pour la cinquième année consécutive, les investissements ont de nouveau diminué l’année dernière, tombant à leur plus bas niveau depuis 2013, comme l’a récemment révélé une étude du cabinet d’audit et de conseil EY. Une étude de l’Institut de l’économie allemande (IW) a révélé qu’en 2022, 132 milliards de dollars d’investissements directs ont été transférés à l’étranger au lieu d’être investis en Allemagne. Il s’agit de la plus importante sortie de capitaux parmi les 46 pays étudiés !

Rien d’étonnant à cela.

Dans le passé, les principaux avantages concurrentiels de l’Allemagne étaient sa main-d’œuvre bien formée, ses infrastructures bien développées et un État de droit offrant un degré élevé de sécurité juridique. Rien de tout cela ne s’applique aujourd’hui. Les travailleurs qualifiés qui émigrent d’Allemagne sont plus nombreux que ceux qui y immigrent. Parmi les pays de l’OCDE, l’Allemagne a le troisième taux d’émigration le plus élevé. De plus, 75 % des personnes qui quittent le pays sont des diplômés de l’université.

L’infrastructure de l’Allemagne est dans un état catastrophique après 16 ans de gouvernance d’Angela Merkel. Les politiques énergétiques idéologiques ont fait grimper les prix de l’électricité plus haut que dans presque tous les autres pays, ce qui a conduit des entreprises comme BASF à donner la priorité aux investissements en Chine. Si les investisseurs internationaux doivent maintenant ajouter le spectre des nationalisations à leurs inquiétudes, cela signifierait la fin de la sécurité juridique et la fin de l’Allemagne en tant que destination attrayante pour les investissements. Quiconque vit à Berlin sait qu’il est pratiquement impossible de trouver un nouvel appartement. Le marché du logement locatif est pratiquement à l’arrêt. Récemment, les loyers ont augmenté plus rapidement que dans n’importe quelle autre ville d’Allemagne. Tout cela est le résultat désastreux des politiques de logement socialistes du SPD, des Verts et de Die Linke.

La nationalisation ne créerait pas un seul nouvel appartement, elle ne ferait que recréer les conditions du marché du logement de l’Allemagne de l’Est socialiste (anciennement RDA).

Les partisans de l’expropriation estiment que le seul bon logement est celui qui appartient à l’État. Les recettes qui ont été expérimentées à Berlin ces dernières années, ou qui vont l’être, remontent toutes à l’époque de la RDA qui appliquait un plafonnement des loyers (qui, il est vrai, a vu le jour sous Adolf Hitler et y a été simplement maintenu). La majorité des appartements locatifs appartenaient à l’État. Et le résultat ?

Après des décennies de régime national-socialiste et socialiste, le parc immobilier de la RDA et de Berlin était dans un état désastreux.

En 1989, lorsque la RDA s’est finalement effondrée, 65 % des appartements étaient encore chauffés avec des poêles à charbon, 24 % n’avaient pas de toilettes et 18 % n’avaient pas de salle de bains. Les ascenseurs, les balcons et les cuisines modernes étaient encore plus rares. Pas moins de 40 % des immeubles d’habitation ont été considérés comme gravement endommagés et 11 % étaient totalement inhabitables. Le socialisme entraîne une pénurie de logements, hier comme aujourd’hui.

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  • L’Allemagne est LA preuve s’il en fallait une qu’une gouvernance Ecolo-Ultra pro Europe-pro immigration est le meilleur moyen d’aller dans le mur, parce que pour un pays tirant sa richesse de son tissus industriel et de la qualité de ses citoyens qualifiés, tuer l’économie et l’innovation à coup de règlementations anti-ceci, anti-cela tout en ouvrant largement les portes à des gens qui viendront puiser dans les ressources sociales de l’Etat sans lui apporter la moindre compétence, tout en, sinon réduisant mais au moins bloquant les salaires, c’est le meilleur moyen de voir rapidement les gens qualifiés et les entreprises de pointes s’en aller et être remplacés par, aux mieux des inutiles, voire même de dangereux parasites.

    Maintenant exproprier les sociétés de logements, pourquoi pas ? mais surtout pourquoi ? faire baisser les loyers, sans doutes, faire diminuer les prix de l’accès à la propriété peut-être, mais surtout effrayer les investisseurs, ce qui, dans un pays dont les entreprises et les ouvriers et scientifiques s’en vont, n’est pas la top idée, surtout qu’avec les sanctions et le blocage voire la confiscation des avoirs russes, une grosse partie des investisseur était déjà réticente.

    Mais bon, l’idée Européenne et écologique est si belle sur le papier, que ça vaut bien la ruine d’un pays. Et mettre l’économie allemande à genoux, on sait ce que ça peut donner, il y a quelques décennies, quand les mecs avaient besoin d’un brouette pleine de marks pour acheter un pain, 10 ans après un petit moustachu mettait l’Europe à feux et à sangs, et au passage provoquait la mort de 50 000 000 de malheureux …

  • Les prétendus États de droit deviennent chaque jour un peu plus des états de droit…public! Et ce droit est profondément subordinateur. Aujourd’hui plus personne ne voit la différence (droit privé-droit public)
    Schreklich!
    Pour rappel : l’état de droit (Rule of Law) est un état qui est soumis au droit, et ce droit lui est antérieur et supérieur!

  • Allemagne et France main dans la main dans la débilité gauchiste ?
    J’y crois pas. L’Allemagne a encore du chemin pour nous rattraper.

    • La loi ALUR, la tolérance effective du squat, la surfiscalité foncière et les velléités de réappropriation publique du socle foncier du bâti ne sont que la version française éminemment hypocrite de la nationalisation de l’immobilier.

  • On a vu en France en 1981 ce qu’a donne la nationalisation des societes. Du jour au lendemain des sociétés qui marchaient bien se sont retrouvées au bord de la faillite, dirigées par des copains du pouvoir incompétents, et le personnel, qui se crotantt à l’abri, avait levé le pied.

  • Les fonds immobiliers, voire les fonds « vautours » sont en train de détruire de marché immobilier au Portugal où il est aujourd’ hui pratiquement impossible de louer ou acheter un appartement, à ses citoyens. Grace aux « Golden Visa » les prix sont devenus hautement speculatifs au point que pour un citoyen national cela est devenu presque impossible. Ajoutons que les taux d’ intérêt montent de plus en plus…
    De l’ autre côté du monde, l’ Australie a tout simplement défendu que les citoyens étrangers, non habitants, ne peuvent pas acheter de l’ immobilier ! Un peu radical.
    D’ un autre côté, la Constitution portugaise « garantie » le droit à une habitation digne : seulement cette garantie de l’ État doit être assurée par l’ État. Comment : en assurant lui-même la construction des immeubles. Laisser quelque chose de si important comme le logement de ses citoyens dans les mains des entrepreneurs privés, car ceux-ci visent le maximum de profits, ne semble pas une bonne idée. D’ ailleurs, avant 1974 l’ État (qui n’ était pas socialiste, du tout)a construit beaucoup, pour, exactement, garantir ce droit constitutionnel. Il ne s’ agit donc pas de confisquer qui ou quoi que ce soit, ni de plafonner quoi que ce soit: il s’ agit de permettre à tous les citoyens d’ avoir sa propre habitation dans des conditions accessibles.

    •  » D’ ailleurs, avant 1974 l’ État (qui n’ était pas socialiste, du tout) a construit beaucoup ».
      Je me demande bien ce que c’est devenu tout cela… Ce ne serait pas devenu les cités HLM invivables où l’on parque les étrangers et qui sont des zones de non droit?
      Justement leur style me rappelle Berlin Est comme par hasard.
      Avant 1974, vous savez l’époque avec les loyers plafonnés (la loi de « 47 »), le monopole des radios, des chaines publiques, le prix du pain décrété par l’état, la constitution de 46… Pas socialiste du tout donc…
      La socialisation de la France remonte avant cela, cela a été progressif, à partir de la 1ère guerre mondiale. Et un gros coup en avant avec Vichy. Puis un gros coup avec Mitterrand.

    • l’Australie n’est pas la seule à interdire l’acquisition de propriétés à des étrangers non-résidents.
      La Suisse a adopté une loi similaire (Lex Friedrich) dans les années 60 et réformée dans les années 90 (Lex Koller).

  • Précisions complémentaires :
    – il s’agirait de l’expropriation de sociétés privées possédant plus de 3000 logements
    – l’idée d’expropriation émanent des associations de locataires et non des partis plutôt frileux sur le sujet, puisque plus de 85% des berlinois sont locataires,
    – la demande des locataires seraient une cogestion municipalité/locataires
    – la gauche a massivement participé à la privatisation du parc dans les années 2000.
    – une tradition historique de loyers faibles sur Berlin,

    • Mais alorspourquoi la municipalité ne rachèterait pas simplement des logements à ces sociétés en ayant plus de 3000? (sans répondra à la question, pourquoi?)
      Quand à la tradition « historique » de loyers faibles à Berlin, il y a une solution: des logements de mauvaise qualité! Bref, le manque de logements est incompréhensible car Berlin est une ville peu dense, donc construire est plus facile. De plus, les prix sont sensiblement plus faibles qu’ailleurs en Allemagne…

      • Il serait question d’une expropriation avec indemnisation estimée à 28 Mlds. C’est pas gagné vu le montant..

  • la solution est toujours la même : construire plus de logements…

  • Nous bâtirons le boulevard du triomphe du socialisme.
    Alors surgira l’homme nouveau.
    Eau et gaz à tous les étages.

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