Tel un diable sorti d’une boîte, Javier Gerardo Milei surgit sur la scène politique argentine sous le drapeau du libéralisme. Une très bonne nouvelle dans un pays dominé par les péronistes, une mafia politique vaguement keynesienne et franchement calamiteuse associée à des syndicats puissants.
S’il était élu à l’élection présidentielle du 22 octobre prochain, hypothèse incertaine mais pas impossible, Milei introduirait un choc libéral inédit dans un pays de tradition autoritaire.
Cet homme de 52 ans dont le parti s’appelle La Libertad Avanza (« La liberté avance ») rassemble actuellement 17 % des intentions de vote et se trouve en troisième position derrière Frente de Todos, (« Le Front de tout le monde »), l’organisation péroniste qui n’a toujours pas désigné son candidat en raison des bisbilles habituelles entre Cristina Kirchner et le président Alberto Fernández (25 %), et Juntos por el Cambio (« Ensemble pour le changement »), une coalition qui rassemble les fidèles, mais aussi les déçus de l’ancien président Mauricio Macri (27 %).
Face à ces adversaires, Milei tranche non seulement par ses idées, mais aussi par son comportement. Très demandé sur les chaînes de télévision et soutenu principalement par de jeunes électeurs de moins de trente ans, le candidat libéral (que la gauche qualifie d’extrême droite) apparait sur les plateaux tout de cuir vêtu, un regard perçant et une masse de cheveux bruns coiffée comme un casque. Il dénonce les politiciens qu’il traite de « rats » formant « une caste de parasites » et insulte tout interlocuteur qui n’est pas d’accord avec lui. « Zurdos de mierda », leur dit-il, « gauchistes de merde ».
Son programme est radical
Suppression de la Banque centrale, privatisation des monnaies (et espérance déclarée du retour du dollar américain), mais aussi un tantinet complotiste. Il croit à la théorie du « marxisme culturel » qui prétend qu’un complot d’intellectuels marxistes venu de « l’école de Francfort » s’active à saper les sociétés occidentales, leurs valeurs chrétiennes et leur conservatisme traditionnel.
Pour lui, le réchauffement climatique, le féminisme et le mouvement LGTB sont au cœur de ce « marxisme culturel ». Cette théorie n’est cependant pas exempte de relents antisémites totalement étrangers au libéralisme.
D’où la question de savoir si Milei est un vrai libéral ou s’il raconte n’importe quoi. Pour un libéral, il est toujours difficile de questionner le libéralisme des autres. Mais Milei démontre dans ses choix un certain autoritarisme et des erreurs de jugement.
Par exemple, il considère que Carlos Menem a été le meilleur président de l’Argentine. Or ce dernier, au pouvoir de 1989 à 1999, était un politicien notoirement corrompu et condamné en 2015 à quatre ans et demi de prison auxquelles il échappera grâce à son immunité parlementaire. Par ailleurs, au début de son premier mandat, Menem a autorisé la parité entre le peso argentin et le dollar américain, une tragique illusion qui a fait baisser l’inflation et a attiré des capitaux étrangers, mais ce faisant a créé une énorme « bulle » financière qui éclatera en l’an 2000 et que l’Argentine continue à payer très cher. Dans une tribune dans El Pais, Mario Vargas Llosas avait écrit que les réformes de Menem « étaient un rideau de fumée cachant la corruption ».
Milei s’égare donc avec Menem mais avance tout de même des propositions libérales. Ce célibataire ne pense rien de bon du mariage, mais ne s’oppose pas au mariage gay. Il se montre libéral également face à la prostitution qu’il considère « un service comme un autre ». Mais il condamne l’avortement par un raisonnement spécieux affirmant que si la femme est propriétaire de son corps, celui de son futur enfant est un « autre corps » qui ne lui appartient pas. Il est par ailleurs en faveur du port d’armes, sujet délicat pour les libéraux.
Il est jugé essentiel par certains libertariens, mais le libéralisme classique peut l’estimer contraire au contrat social qui réserve à l’État le monopole de la force. Le libre usage des armes aux États-Unis induit des massacres réguliers commis dans des collèges ou des supermarchés pour de sombres raisons n’ayant rien à voir avec la défense de nos libertés.
« Le libre usage des armes aux États-Unis induit des massacres réguliers commis dans des collèges ou des supermarchés »
Il y a des massacres partout ailleurs aussi, mais avec d’autres armes : un camion à Nice, une hache dans les crèches flamandes, un couteau de chef dans les rues de Tokyo, etc… Le taux de meurtre américain est égal au français et personnellement je préfère mourir par balle plutôt qu’avec un marteau par exemple.
Remarque intéressante car l’effet dissuasif sur la criminalité du port d’arme a déjà été largement documenté et démontrer
Manifestement, l’auteur de l’article s’excuse de ne pas etre de gauche. Si Meili est antisemite, cela serait bien de le montrer a l’aide d’exemples precis. Enfin, l’abolition de la banque centrale d’Argentine est la seule ouverture possible a une economie argentine prospere
Un tres mauvais article.
Je ne vois pas comment un libéral peut décemment s’opposer au port d’armes.
Premièrement, l’Etat est du point de vue libéral l’organisation collective de la légitime défense, pas un Dieu devant lequel on doit se prosterner. L’Etat reçoit donc son mandat du peuple pour le protéger par des réponses collectives (police, armée, justice), mais pas pour lui sucrer ses biens acquis légitimement, comme des armes achetées ou fabriquées.
Deuxièmement, si les armes sont dangereuses (c’est d’ailleurs bien là leur fonction première) et doivent donc être réservées à l’Etat, ça veut dire que d’une part tout ce qui est potentiellement dangereux peut être interdit par l’Etat (le couteau, la hache, le tournevis, la brosse à dents taillée en pointe, les protéines parce que ça aide à développer du muscle…) et que d’autre part les agents de l’Etat ne sont pas des citoyens de même nature que les autres et sont incapables de mal utiliser leurs armes (à mourir de rire quand on voit le nombre d’accidents des policiers français avec leurs armes à feu, ils sont 10 fois plus dangereux que les chasseurs).
Enfin, de quoi je me mêle ? Si je n’ai pas le droit « pour mon bien » d’avoir une arme, il faut que des fonctionnaires viennent me fouiller « pour mon bien » de temps en temps afin de m’emprisonner si j’ai cherché à me défendre : les conséquences sont vraiment très libérales aussi…
Je ne connais pas ces candidats argentins, mais j’ai l’impression que le pays a beaucoup de mal politiquement depuis des décennies, englué dans des régimes corrompus et/ou très socialistes.
Visiblement celui-ci a dans le fond de bonnes idées, réellement libérales, et la suppression de la banque centrale est je pense essentielle pour l’économie argentine (l’inflation délirante la ruine systématiquement). Il semble adopter une communication à la Trump, n’hésitant pas à dire n’importe quoi pour faire du buzz et voir comment c’est reçu. Ce n’est pas très intellectuel, mais ce n’est pas le but : au contraire, il s’agit de s’allier les déçus du système qui rejettent l’establishment. Difficile pour un libéral de faire son trou dans un monde politique qui par nature s’en méfie, il préfère donc chasser l’électeur anti-système.
L’antisémitisme de rejeter le bloc « éco-LGBT », c’est du grand n’importe quoi : les études racialistes et genristes de ce courant sont les premières à traiter les juifs de « privilégiés », comme des hommes blancs hétéros cis ordinaires, mais ils ont le droit parce que de gauche, donc c’est pour notre bien à tous. Si on dit qu’on va gazer les « riches » pour partager, ce n’est plus antisémite mais ça fera les mêmes dégâts…
L’argument sur l’avortement est effectivement mauvais, mais pour le coup partagé par certains libéraux. Chacun est en effet propriétaire de son propre corps, et peut en faire ce qu’il veut, et l’enfant à naitre ne peut simplement pas survivre seul avant une certaine maturité : aux Pays-Bas, l’avortement peut être pratiqué n’importe quand pendant la grossesse, mais ne cherche pas à tuer l’enfant, il est simplement sorti de la mère et s’il vit par lui-même il peut être adopté.