Le “chômage fantôme” européen

Les derniers chiffres du chômage sont très inquiétants, mais ce qui l’est encore plus, c’est d’analyser le “chômage fantôme”.

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Le “chômage fantôme” européen

Publié le 11 février 2023
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Par Daniel Lacalle.

Le dernier rapport sur l’emploi aux États-Unis fait apparaître des points forts et des points faibles.

Le nombre total d’emplois salariés non agricoles a augmenté de 223 000 en décembre, et le taux de chômage est tombé à 3,5 %. Toutefois, le marché du travail américain continue d’afficher une croissance négative des salaires réels, le ratio emploi/population est de 60,1 % et le taux de participation à la population active est de 62,3 %. Selon le Bureau of Labor Statistics (BLS), ces deux mesures ont enregistré peu de changements nets depuis le début de 2022 et restent chacune à 1 point de pourcentage en dessous de leur valeur en février 2020.

Les chiffres de l’emploi aux États-Unis sont constamment disséqués par les analystes et il existe une critique salutaire dans la recherche indépendante qui aide certainement énormément à comprendre la santé du marché du travail. Cependant, la situation est bien pire dans l’Union européenne.

Les derniers chiffres du chômage sont très inquiétants, mais ce qui l’est encore plus, c’est d’analyser le “chômage fantôme”.

Dans son dernier rapport Economic Outlook or Europe 2023-24, UBS montre la différence significative entre le chômage officiel dans la zone euro et le chômage caché provenant des travailleurs catégorisés au chômage et des travailleurs sans emploi qui ne comptent pas comme chômeurs officiels. Le taux de chômage officiel dans la zone euro est toujours élevé, à 6,5 %. Le taux de chômage le plus élevé est celui de l’Espagne (12,5 %), suivi de la Grèce (11,4 %) et de l’Italie (7,8 %).

Le chômage des jeunes est également très élevé. Leur taux de chômage moyen dans l’Union européenne s’élève à 15,1 %, avec en tête l’Espagne (32,3 %), la Grèce (31,3 %) et l’Italie (23 %).

Toutefois, selon UBS, le chômage fictif dans la zone euro s’élève à 8,8 %, avec l’Espagne à 15 %, l’Italie à 8 % et l’Allemagne bien au-dessus de 5 %, alors que le taux officiel est de 3 %.

Les économies européennes excluent les travailleurs inoccupés du taux de chômage officiel de diverses manières. Il s’agit notamment de déduire du chiffre du chômage les personnes qui ne travaillent pas mais bénéficient d’une formation et de mini-emplois, ainsi que celles qui ont un contrat à long terme mais ne travaillent que quelques mois par an. Ils n’apparaissent pas comme chômeurs même s’ils ont accès aux allocations de chômage.

Quelle que soit la façon dont on veut regarder ces chiffres, ils montrent les erreurs d’une intervention lourde et de la rigidité du marché du travail. La première source de rigidité est le coût du travail. Les taxes élevées sur la sécurité sociale et le travail font qu’il est plus difficile pour les entreprises de réduire le chômage. Le cout fiscal sur le travail est si élevé dans des pays comme l’Espagne et la Grèce qu’une entreprise paie près de 1800 euros sur un salaire net de 1000 euros. Si l’on y ajoute un grand nombre de charges réglementaires et de pénalités, on constate qu’un système conçu pour protéger les travailleurs laisse en fait des millions de personnes sur le carreau, en particulier les jeunes.

Il existe également des obstacles importants à la réduction du chômage, notamment les impôts directs et indirects très élevés sur les sociétés, ainsi que les barrières linguistiques et culturelles.

Le programme européen d’emplois précaires a été largement salué comme un excellent moyen de protéger les travailleurs pendant les confinements malencontreux de la crise du covid. S’il a certainement permis de réduire le taux de chômage officiel, le chômage virtuel a augmenté pour atteindre 21,7 %. Aux États-Unis, un marché du travail très flexible a tout de même vu le chômage passer à 14,7 % en avril 2020. Cependant, aux États-Unis, la réouverture a entraîné une réduction rapide avec une croissance plus rapide des salaires, tandis qu’en zone euro, la croissance des salaires est restée faible et continue d’être négative en termes réels, avec une perte importante du pouvoir d’achat des salaires aggravée par le pic inflationniste de 2021-22. Alors qu’aux États-Unis, la croissance des salaires réels a diminué de 1,1 % selon le BLS, dans la zone euro, le chiffre nominal au troisième trimestre 2022 n’était que de 2,1 % de croissance des salaires, ce qui signifie un chiffre réel négatif de 6,8 %.

Il y a de nombreux défis différents à prendre en compte et les comparaisons sont toujours difficiles. Mais il y a une tendance négative indéniable en Europe qui est une conséquence directe de l’augmentation constante de l’intervention dans l’économie : un chômage élevé chez les jeunes, un chômage beaucoup plus élevé sur les marchés du travail rigides par rapport aux marchés plus flexibles, et une tendance inquiétante de destruction du pouvoir d’achat des salaires. Mes amis des États-Unis devraient en prendre note. Si vous copiez les politiques économiques européennes, vous obtenez des niveaux de chômage et de salaires réels européens.

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  • Ce n’est pas le taux de chômage qu’il faut analyser mais le taux d’emploi dans le secteur privé et concurrentiel, et son évolution dans le temps

  • Le taux d’emploi en France pourrait augmenter rapidement s’il y avait une politique du travail et non de l’assistanat.
    Mais voilà, c’est le contraire auquel on assiste. On fait donc venir des immigrés pour conserver l’assistanat. Donc aucune perspective d’augmenter le taux d’emploi.
    Tant que l’assistanat favorise l’oisiveté (revenu cumulé proche du SMIC), inutile de se lever le matin pour travailler 8h par jour.

    • La relation taux d’emploi/immigration est plus complexe que vous le suggérer. En Suisse le taux d’emploi est un des plus élevé d’Europe, pourtant la part étrangère de main d’oeuvre représente 27% contre un plus de 6% pour la France (source OIT). L’immigration est avant tout liée au dynamisme de l’économie et des salaires, et la France n’est pas le pays le plus attirant sur ce point.
      Sinon oui il faut remonter le taux d’emploi. Et si trop d’aides deviennent contre productives, il devient également de plus en plus compliqué de travailler car accéder au travail génére déjà beaucoup d’effort et donc de la fatigue.

      • L’immigration est attirée par l’emploi. En Suisse, il y a plus d’emplois que de Suisses POUVANT y postuler. En France il y a plus d’emplois que de français VOULANT y postuler.
        Dans les 2 pays il y a des emplois à pourvoir ; mais en France c’est uniquement dû à la paresse assistée des gens.
        Et si le travail génère de la fatigue pour les français, pourquoi les immigrés les acceptent-ils ? Serions nous des esclavagistes pour faire faire le boulot fatiguant aux autres ?
        La réalité c’est que quand on n’a pas d’argent et qu’on a faim, on travaille ; quand on reçoit de l’argent grace à l’assistanat, pas besoin de travailler pour manger. Qui peut croire qu’une personne peut rester 5ans au RSA sans trouver un job, même de serveur ou plongeur dans un hôtel ou faire des ménages. Il n’y a rien de dégradant à faire ces jobs.

        • Je partage votre point de vue mais il semblerait qu’il ne soit pas convenable de le dire.

          • Je partage aussi le point de vue de JR, mais tant qu’on acceptera de taire la réalité, au motif qu’il n’est pas convenable de la dire, alors rien ne changera. Le jour ou on acceptera d’appeler un chat, un chat, et un parasite, un parasite, alors peut être que les choses commenceront à évoluer.

        • JR,
          Si vous lisez ce que je n’ai pas écrit alors on ne se comprendra pas. Je n’ai pas écrit que travailler fatiguait mais ACCEDER au travail en raison de la pression bureaucratique et normative étatiques et même dans les entreprises.
          Sinon vous avez raison dans les emplois non pourvus il y a la composante assistanat mais aussi celle d’une tendance de fond (on ne veut plus travailler comme avant) qu’on retrouve même en Suisse (et ailleurs en occident) et peut être encore d’autres aspect moins visibles. Vous le savez très bien, avec les affaires humaines, les choses toujours nuancées et multicausales. Ou alors vous faites de la simplification politique et là on patine dans la semoule avec des débats interminables sur de mauvais sujets.

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