Le tabou du nombre des fonctionnaires

Dans la concurrence internationale, la France manque d’un atout essentiel : des dirigeants politiques prêts à appliquer à leur pays les réformes qui ont fait leurs preuves en Allemagne

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Le tabou du nombre des fonctionnaires

Publié le 4 octobre 2022
- A +

Bruno Le Maire déclarait à Radio Classique le 14 mai 2019 :

Je reste déterminé à ce que nous tenions nos engagements de réduction du nombre de fonctionnaires.

L’engagement était une baisse de 120 000 postes pendant le quinquennat 2017-2022. La détermination de Bruno Le Maire était louable mais selon les chiffres officiels, la réalité est une hausse de 176 000.

Il n’y a pas eu de réaction à cette rupture d’engagement, car le nombre des fonctionnaires est un sujet tabou. Certes il est bien connu : 5,6 millions de fonctionnaires de l’État, des collectivités locales et des hôpitaux. Mais il faut bien chercher dans une annexe du budget de l’État voté par le Parlement pour trouver le nombre des « quasi-fonctionnaires ».

Contrairement à ce que croient la plupart des Français, les enseignants du privé, les salariés des universités, du CNRS, de Pôle Emploi, de la Sécurité sociale, de La Poste, de la Caisse des dépôts et des autres « opérateurs de l’État » ne sont pas fonctionnaires. Le personnel des associations à financement majoritairement public n’est pas davantage fonctionnaire, ni celui des entreprises publiques comme EDF ou la SNCF. Le nombre officiel des quasi-fonctionnaires figurant dans cette annexe du budget est, sans y inclure les entreprises publiques, de 1,4 million. Le nombre total de fonctionnaires et quasi-fonctionnaires français est donc de 5,6 + 1,4 = 7 millions.

Le chiffre officiel des fonctionnaires allemands est de 4,6 millions. Pour être à égalité avec l’Allemagne, à population égale, la France devrait compter 3,6 millions de fonctionnaires, soit 3,4 millions de moins. La rémunération des fonctionnaires allemands est ainsi inférieure de 5,6 % du PIB à celle des Français.

Certes l’Allemagne a trois millions d’enfants d’âge scolaire de moins que la France. Mais la part des écoles publiques y est plus forte qu’en France (sauf pour les maternelles), les autoroutes y sont publiques, comme la distribution d’eau et l’assainissement, et la plupart des maisons de retraite. Et elle a davantage de vieux à entretenir. Ses dépenses publiques devraient être plus élevées que celles de la France.

La principale explication de notre excès de fonctionnaires est que les fonctionnaires allemands travaillent davantage que les fonctionnaires français : 40 heures par semaine, contre moins de 35 en France. Leurs enseignants sont présents à temps plein dans leur école (43 heures dans le secondaire). Ils partent en retraite trois ans plus tard que les enseignants français. L’absentéisme dans la fonction publique y est inférieur à celui de la France. Sur une vie entière, le temps de travail des fonctionnaires français est ainsi inférieur de 30 % à celui des fonctionnaires allemands.

Deuxième explication : le succès d’un ministre ou d’un directeur d’administration français tient à ses yeux à l’augmentation de son budget et de ses effectifs. Aucun ministre, aucun directeur n’a été promu pour avoir baissé ses effectifs.

Aussi, d’après l’INSEE, la France embauche chaque année 450 000 fonctionnaires. Un gel des embauches pendant plusieurs années, comme l’ont fait les Anglais et les Italiens, permettrait le rapprochement avec l’Allemagne. Mais le tabou du nombre de fonctionnaires nous empêche de suivre cette voie, puisque le budget 2023 augmente leur nombre de 10 764.

Dans la concurrence internationale, la France manque d’un atout essentiel : des dirigeants politiques prêts à appliquer à leur pays les réformes qui ont fait leurs preuves en Allemagne et dans les pays développés qui ont réussi en quelques années à diminuer leurs dépenses publiques de plus de 10 % de leur PIB : Canada, Irlande, Suède, Pays-Bas, Finlande, Danemark.

Il faudra pour cela commencer par lever le tabou du nombre des fonctionnaires.

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  • Insee 2018 :
    ± 5 630 000 Ponctionnaires : État 45%, Territoriale 34%, Hospitalière 21%.
    ± 1 500 000 Ponctionnaires associatifs : emplois équivalent temps plein pour 170 000 associations.

    Mais ne faut-il pas rajouter organismes et entreprises publics : La Poste, SNCF, RATP, EDF, GDF, Aéroports de Paris, etc. ?
    Ou ceux privés financés par les collectivités publiques ?
    À la louche ± 1 500 000 Emplois ?

    Soit une Armée mexicaine de ± 8 630 000 Salariés.

    • ce n’est pas le nombre. le problème c’est l’impossibilté d’évaluer la « compétitivité »..

      on devrait toujours commencer par bien discuter si il ya une mission de service public à remplir… quelque chose que le privé ne peut pas faire..
      parce qu’au final la justification cette armée c’est, la majeure partie du temps, aider une frange de la population qui sans elle ne pourrait pas se payer qui des soins qui des transports qui l’éducation du gamin qui sont électricité..
      Or un chèque peut le faire.. et il est faire d’évaluer si ça suffit…du fait de l’existence de prix de marché..

      • @jacques mais le nombre (poids dans les urnes , inversement proportionnel au poids dans les burnes des politiciens) fait que cette évaluation (rien que le souffle de ce mot rend raide le cheveux de fonctionnaire le plus frisé) impossible .

    • « Mais ne faut-il pas rajouter organismes et entreprises publics : La Poste, SNCF, RATP, EDF, GDF, Aéroports de Paris, etc. ? »
      Vous oubliez la Sécurité Sociale ! 🙂
      La mère des réformes est d’obliger un fonctionnaire à démissionner quand il fait de la politique. Un député ne peut pas, à la fois voter le budget de l’Etat et en être le bénéficiaire direct. C’est de la corruption.

      • La mère des réforme est de supprimer le statut de la fonction publique le supprimer le monopole de la Sécu de supprimer la retraite par répartition d’extirper le pétanisme de la France voilà la mère des réformes

        • Et pour ça, la grand mère des réformes : couper complètement le cordon entre politique et médias, interdire totalement tout financement des médias par les organismes vivant des impôts, interdire à tout journaliste ou personne vivant avec un journaliste de faire de la politique. Tant que la presse est une agence de comm’ de l’Etat, des politiciens et des fonctionnaires les reformes ne pourront pas être faites..

  • Les fonctionnaires votent majoritairement à gauche, donc ça ne peut que continuer.

  • C’est une erreur de se focaliser sur le nombre de fonctionnaires. S’il y a moins de fonctionnaires mais plus d’intérimaires ou de cdd ça reviendra au même et ça coûtera même plus cher à la collectivité.

    Ce qui compte réellement c’est de revoir le périmètre de l’action de l’Etat et des collectivités locales. A quand la disparition des départements par exemple ?

    Il serait bon aussi qu’il n’y ait plus de recasage de copains dans la haute fonction publique et que leur recrutement soit revu.

    • @nom « C’est une erreur de se focaliser sur le nombre de fonctionnaires » faux ou alors il faut leur retirer le droit de vote , ou exiger leur démission s’ils exercent un pouvoir politique , ou les deux .

      • Il faudrait surtout commencer par élaguer dans la quantité touffue de réglementations administratives inutiles et redondantes, les comités Théodule et autres verrues administrativo-politiques, et à partir de là ne pas renouveler les postes de ponctionnaires partis (trop tôt?) à la retraite et donc devenus inutiles à la bonne marche de l’Etat. Cela serait déjà un début prometteur permettant de commencer à croire les belles promesses de nos élus, non?

      • Effectivement, ceux qui vivent de l’argent public ne devraient pas pouvoir en décider l’utilisation. Les fonctionnaires, en échangent de leurs privilèges devraient perdre le droit de vote et le droit à être élus.

    • Il faut se focaliser sur le nombre à cause de l’argent que cela coûte !
      1) un employé qui sait que sa rémunération ne dépend pas des efforts qu’il fourni, va automatiquement travailler moins. La caricature étant le Conseil Général du 13, régulièrement épinglé pour un absentéisme délirant.
      2) l’administration ce sont des fiches, des procédures, du papier.. des technologies du 20ème siècle, à une époque on le public attend une qualité de service de type Uber/Prime. L’informatisation devrait IMMEDIATEMENT permettre de supprimer la bureaucratie (comme aujourd’hui dans les banques).

      • Il faut effectivement pouvoir se séparer de quelqu’un qui ne fait rien ou mal son travail.

        Mais je ne suis pas d’accord pour dire que qu’il y a une corrélation entre travail fourni et salaire. Beaucoup de fonctionnaires le sont devenus plus par sacerdoce que pour la sécurité de l’emploi ou des vacances. Je pense aux policiers, pompiers, gendarmes, infirmieres ou profs. Je ne pense pas qu’ils ménagent leurs efforts et bien au contraire puisque ce sont les professions où il y a le plus de burn out, suicides et d’heures supplémentaires non payées ou récupérées.

        Dans d’autres domaines comme la recherche, un fonctionnaire gagnerait infiniment plus en allant dans le privé.

        La plupart des fonctionnaires pensent œuvrer pour le bien du pays et non pas à la rémunération .

  • Vous vous trompez il y a un point majeure où nos dirigeants ont copié, suivi et mis en place la même chose que l’Allemagne. C’est l’énergie dite renouvelables essentiellemnt des éoliennes et la destruction de notre indépendance énérgétique avec le démentéllement et le non entretiens de nos centrales nucléaires. L’Allemagne a tout manigeancé en particulier via les organitions ueropéennes infiltrées par les khmers verts allemands et nos bons dirigeants ont obtempérés comme de bon petits soldats qu’ils sont face à l’Allemagne. Pour le moment on ne sait pas pourquoi ils l’on fait puisque la solution allemande est une abéhréhation technologique qui ne fonctionne pas et ne fonctionnera jamais. Il serait bon d’enquéter sur cette affaire qui va tuer le peu d’industries qui nous reste. Mais vous voyez quant ils le veulent nos dirigeants savent faire comme les allemands.

  • Il n y a pas que le nombre et leur prolifération qui sont scandaleux.
    Vous oubliez le cumul des avantages de toutes sortes : primes sans rapport avec l activite ou la « performance », retraite, temps de travail journalier et annuel, réductions de prix, sécurité de l emploi, avantages emprunteur et assurance, responsabilité hyper partagée, impunité, et j en passe

  • Ah le marronier des fonctionnaires … C est bien beau de dire qu il y en a trop et qu ils travaillent pas assez ou sont trop payé mais il faudrait descendre sur terre !
    1) l etat a deja du mal a recruter pour certains postes (par ex les profs). C est bien la preuve que le package n est pas attractif : 1800 € pour se faire expedier a paris, ca fait pas rever. On arrive juste a recruter ceux qui n ont pas le choix (aka les mauvais) ou ceux qui ont la foi
    2) si on veut vraiment reduire les couts, il ne faut pas reduire le nombre de fonctionnaires mais reduire le perimetre de l etat. Sinon on va juste remplace des fonctionnaires par des contrat de droit privé et ca coutera juste plus cher (ben oui, les gens sont pas stupides. si vous dites qu ils peuvent de faire virer a court terme, ils vont demander plus). Et la l article reste deseperement vide. De quel secteur l etat va t il se retirer ?
    3) le salaire des fonctionnaires c est qu une petite partie des couts (https://fr.statista.com/statistiques/475725/depenses-etat-remuneration-salaries-service-public-france/) En 2019, ca representait approximativement 12.8 % des depenses (128 millard/1000 millards). si on veut baisser les depenses, ca pas la ou il faut jouer en priorite mais sur les soins medicaux (2eme poste) et les pension de retraites (premier poste de depense, 25 %, le double du cout des fonctionnaires)

    -1
    • Ça ne sert à rien de recruter des enseignants : les élèves ont tous le bac !!!
      Et je rappelle qu’ils sont 1 million à travailler à l’éducation nationale pour enseigner à moins de 16 millions d’élèves/étudiants. Ça fait une moyenne de 1 enseignant pour 16 élèves.
      Mais moyenne en réalité : 1 enseignant pour 32 élèves.
      Conclusion : on manque d’enseignants.

  • 5/5…
    Le problème devient comment trouver du travail à un très grand nombre de personnes si on restreint drastiquement le nombre de fonctionnaires ?.
    Tout simplement en alignant strictement les droits sociaux des travailleurs embauchés directement ou indirectement par l’état sur ceux des autres !
    A l’exception de l’armée et de la justice.
    Pour certaines professions, les primes de dangerosité ou de pénibilité devraient compenser cette révolution copernicienne…

  • Plutôt que de recopier, voici un lien IFRAP qui en dit long :
    https://www.ifrap.org/fonction-publique-et-administration/1980-2019-quelle-evolution-des-effectifs-de-la-fonction-publique
    et un de la Cour des Comptes :
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2009/12/16/le-nombre-de-fonctionnaires-a-augmente-de-36-depuis-1980_1281657_3224.html
    Très forte hausse du nombre dans les colpub et les hôpitaux !
    çà en fait des électeurs : fonctionnaires, retraités fonctionnaires et pourquoi pas conjoints de fonctionnaires, ?

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