L’encadrement des loyers crée une grave crise du logement

La loi prévoit des amendes de 5000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale en cas de non-respect des dispositions de l’encadrement des loyers.

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L’encadrement des loyers crée une grave crise du logement

Publié le 30 septembre 2022
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L’encadrement des loyers a été réactivé par le vote de la loi Elan fin 2018. Il vise à limiter le montant des loyers dans les communes situées dans les zones tendues. Dans ces communes le loyer à la relocation va être bloqué à une valeur maximum, appelée valeur de référence majorée, calculée à partir de valeurs fournies par l’observatoire des loyers de chaque agglomération. (Détail du système).

Les obligations sont si nombreuses et complexes que les petits bailleurs privés devront passer de nombreuses heures à assimiler le principe où s’assurer le concours de professionnels pour ne pas risquer de se retrouver hors la loi, avec les conséquences financières induites.

En effet, la loi prévoit des amendes de 5000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale en cas de non-respect des dispositions de l’encadrement des loyers. Ceci n’est pas un encouragement pour les investisseurs immobiliers, mais une incitation à vendre pour les bailleurs.

Il faut préciser que ces mesures ne s’adressent pas aux HLM, aux logements conventionnés ANAH, aux meublés de tourisme, aux sous-locations.

 

Une équation insoluble pour les bailleurs

Avant 2025, les propriétaires de bâtiments privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kilowatt/heure par m² et par an, doivent avoir fait l’objet d’une rénovation énergétique.

Attention, il s’agit ici d’énergie primaire, qui pour l’électricité est assujettie à un coefficient de 2,3. Ainsi, pour ce calcul, la consommation réelle au compteur est multipliée par 2,3 pour le calcul du DPE.

Depuis le 24 août 2022 pour les logements classés F ou G, nus ou meublés à usage de résidence principale du locataire et pour tous les contrats conclus, renouvelés ou tacitement reconduits, leurs loyers ne pourront faire l’objet d’aucune hausse. De plus, à compter de 2028, les logements classés G seront interdits à la location, et ceux classés F en 2034.

Si l’on considère la complexité de réalisation des travaux de mise aux normes énergétiques et leur coût prohibitif, il semble que le gouvernement et les décideurs n’ont pas pris en compte l’impossibilité que rencontreront la majorité des bailleurs concernés pour se conformer à des exigences contradictoires.

Comment les bailleurs pourront-ils financer des travaux conséquents si le montant des loyers est figé dans les zones tendues ? On pourrait se dire que les zones tendues ne sont pas toute la France, mais les mesures de restriction énergétique vont retirer du marché locatif une très grande quantité de logements par l’impossibilité d’amortir les frais de mise aux normes ou simplement l’impossibilité technique matérielle.

De plus, les nouvelles règles du DPE c’est la plus mauvaise valeur du classement énergétique ou de l’effet de serre qui sera retenue, pour évincer les chauffages au fioul, gaz ou bois. L’électricité se trouve donc promue, mais avec le coefficient d’énergie primaire précité et ses effets délétères.

 

Une classification énergétique aléatoire, mais obligatoire

Le diagnostic lui-même a fait l’objet de polémiques sérieuses. Le nouveau DPE, initié par un arrêté du 2 juillet 2018 a vu sa date de mise en vigueur reportée du 1er avril 2019 au 1er janvier 2020 par un arrêté publié le 22 mars 2019 au Journal Officiel. Une nouvelle version a été rendue obligatoire au 1er juillet 2021, mais devant les nombreux bugs et incohérences du nouveau logiciel, sa mise en application a été reportée au 1er novembre 2021.

Dans une étude publiée le 22 septembre dernier, l’association Que Choisir met en exergue les incohérences et inexactitudes des DPE.

Elle a analysé 34 diagnostics réalisés dans 7 maisons situées dans différentes régions de France. Six d’entre elles se sont vu attribuer des classes différentes selon le diagnostiqueur, allant de B à E pour une même maison basse consommation.

De même, les estimations de travaux, légalement exigées par la réglementation, varient d’un peu plus de 3000 euros à 10 fois plus pour un autre diagnostiqueur pour le même bien.

Il faut préciser que si le propriétaire ne peut pas fournir les factures des travaux ayant un rapport avec le confort énergétique, le diagnostiqueur ne prend pas en compte les éléments existants, même s’ils sont apparents (expérience vécue). Comment un bailleur peut-il fournir les factures d’énergie de son locataire, alors que la loi n’impose pas à ce dernier de les fournir ?

Bien que les diagnostiqueurs soient formés, certifiés, agréés par les pouvoirs publics, cette étude démontre que classement DPE s’assimile à une loterie qui peut ruiner un propriétaire. S’opposer à un classement DPE par voie judiciaire est une entreprise de très longue haleine, coûteuse en moyens de preuves qui ne donnera pas au propriétaire la possibilité de louer son logement durant la procédure.

Mais il faut contraindre les propriétaires… pour économiser l’énergie et le confort des locataires.

 

Certains maires veulent astreindre au plafonnement des loyers.

En 2018, le maire D’Ivry disait au micro de France 2 :

« Dans une ville comme Ivry, j’estime qu’il faudrait que la moyenne des loyers aujourd’hui baisse de plus de 35 % pour que ça devienne raisonnable au regard de la moyenne des revenus du territoire ».

Le maire de Villeurbanne, constatant que nombre d’annonces immobilières ne respectaient pas le cadre légal, a écrit le 19 septembre dernier à la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) pour lui demander de missionner ses agents pour contrôler les agences immobilières et les plateformes proposant des logements. Il a demandé concomitamment à la chambre de commerce de radier les professionnels de l’immobilier qui seraient signalés par la DGCCRF.

La municipalité de Lyon a dévolu huit agents à une tâche de recherche et de surveillance similaires.

Faire baisser les loyers de 35 % comme le demandait le maire d’Ivry, dans un contexte d’inflation évolutive d’environ 6 %, mais qui peut exploser en fonction du contexte géopolitique, et imposer des travaux ruineux de mise aux normes c’est demander aux bailleurs de supporter seuls la lutte pour les économies d’énergie au seul profit des locataires dont le confort serait amélioré et les loyers diminués.

 

Quelles seront les conséquences ?

Nul ne peut être contraint à dépenser plus qu’il ne dispose, ni être obligé de faire faillite. La plupart des propriétaires bailleurs privés sont des personnes, souvent âgées et avec des retraites au-dessous du seuil de pauvreté, qui n’auront d’autre choix que d’abandonner la location.

La vacance des logements va encore progresser, la taxe sur les logements vacants se révélant un moindre mal par rapport à une mise aux normes pour un loyer encadré. Les zones tendues vont se généraliser. Les logements disponibles se raréfieront et la crise du logement s’aggravera.

Une autre option s’offre aux bailleurs pris dans la tourmente. Vendre leurs biens, mais un bien hors des normes est fortement dévalorisé. C’est une opportunité pour les accédants propriétaires occupants, pour lesquels la mise aux normes n’est pas encore aussi contraignante ni planifiée.

Les pouvoirs publics ont déjà programmé cette érosion des prix. Pour les propriétaires incapables de réaliser la mise aux normes (notamment dans les copropriétés) un opérateur missionné (HLM ?) pourra racheter leur bien (à un prix évidemment bas) et faire effectuer les travaux nécessaires (avec les subventions ad hoc) et le revendre ensuite à un prix « maitrisé ». Cela se nomme le portage ciblé.

On peut penser que pour l’intérêt collectif (économie d’énergie) on peut priver un propriétaire de son bien, à un prix qui évite l’application de l’article 545 du Code civil, pour faire supporter à la communauté les frais de la mise aux normes (subventions issues des impôts).

Le rêve de propriété des Français semble bien illusoire, et nombre de propriétaires ruinés se retrouveront locataires… s’il reste des logements pour tout le monde !?

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  • Il faut rappeler que l’économie française n’a déjà plus que de lointains rapports avec une économie non-dirigée : une inflation à 6 % quand le reste du monde occidental oscille entre 9 et 11 % en est la preuve immédiate

  • Je mangeais avec un notaire et un avocat il y a peu . A propos de ces mesures du gouvernement, il m’assuraient que les locations de taudis jamais entretenus par leurs
    propriétaires étaient légion, et que certaines locations étaient réellement indignes. Ne pensez vous pas que la cupidité de certains nuit à la majorité des bailleurs. Cependant je reste convaincu de l’absurdité des blocages des prix ou des loyers.

    -1
    • Non, je ne le pense pas. Si certaines locations sont indignes, c’est d’abord parce qu’il n’y en a pas assez de dignes sur le marché à leur faire concurrence. Et s’il n’y en a pas assez sur le marché, c’est parce que les propriétaires ne s’y retrouveraient pas. Pourquoi ne s’y retrouveraient-ils pas ? Parce que les différents prélèvements et les règlements kafkaïens empêchent qu’il soit rentable de mettre un logement en location à un loyer décent. Avec une concurrence non-faussée, la cupidité excessive vous exclut du marché.

    • Si l’État ne donnait pas priorité aux squatters et virait les mauvais payeurs comme dans tous les pays, les gens plus pauvres honnêtes n’auraient pas besoin de justifier leur salaire, d’une caution, etc pour louer un appartement décent qu’un propriétaire préférera naturellement louer à un plus riche à situation plus stable.
      C’est là le seul problème des locations indécentes. Vous allez à l’étranger, personne ne vous demande quoique ce soit pour louer. Mais en cas de non payement, vous êtes mis dehors. Et le marché reste fluide et en total accord avec les revenus de leurs citoyens. Les Suisses, les Allemands, les luxembourgeois,… n’ont aucun problème pour trouver une location.
      Quant à fixer les loyers, il faudrait aussi fixer les prix des réparations : plombier, électriciens, gardiens, syndics, ravalement, et tout autre intervenant. Bref, le soviétisme.
      Le problème est que Mitterrand dans son incompétence qui l’a toujours caractérisé, à décidé d’un toit pour tout le monde au frais des petits propriétaire car avec tout l’argent qu’il a jeté par les fenêtres,(nationalisation,RMI, retraite à 60 ans, multiplication des fonctionnaires…), il n’en avait plus pour sa politique sociale.
      Le socialisme s’est dépenser l’argent des autres ; jusqu’au moment où les autres s’en vont. Et après, c’est emprunter à tout va. Jusqu’au moment où le FMI sifflera la fin de la récréation comme en Grèce.

    • Ce que je vois aussi ce sont des propriétaires-occupants végétant dans leur taudis parce que le locataire du studio aux normes acheté pour compléter leur micro-retraite ne paye pas ses loyers, casse tout et finit par squatter avec la complicité des pouvoirs publics.

  • Les logements qui seront classé F et G pourront-ils être squatté, les propriétaires resteront ils responsables d’éventuels accidents du ou des squatteurs qui passeraient par la fenêtre « voir cour de cassation ».

  • Santé, énergie, industrie, sécurité, éducation, et maintenant logement, tout ce que le gouvernement touche et règlemente tourne au désastre, et plus ça rate, comme les shadoks, plus ça continue. Non content de ruiner les petits propriétaires et retraités avec les factures d’énergie, il va ruiner ceux qui avaient économisé sous à sous pour acquérir un petit bien et le louer pour arrondir leur retraite, tout en empêchant ceux qui ont peu de moyens de louer un appartement, notamment dans les zones dites tendues.

  • Les épargnants prendront des actions européennes et asiatiques.
    Au final, la fRance l’aura dans le fion.

  • Il faut préciser que ces mesures ne s’adressent pas […] aux sous-locations.
    c’est donc la porte ouverte aux dérives (failles habituelles d’une loi mal pensée, mal votée et mal mise en application):
    1) Le locataire pourra sous-louer bien plus cher que son propre loyer. Il v s’enrichir sur le dos du propriétaire.
    2) Le propriétaire pourra faire un faux loyer à membre de la famille par exemple, qui sous-louera bien plus cher.
    Bref, encore une idiotie des nos élus et hauts-fonctionnaires incompétents !

  • Dans les commentaires, je vois pleins de gens qui s’imaginent des scénarios compliqués, chercher des failles dans la loi etc. La réalité de la location, notamment les petits apparts insalubres, est qu’ils sont souvent déjà loués non déclarés.
    Ironiquement, d’après moi le grand perdant dans cette affaire va être l’état. Il pousse les bailleurs à ne pas déclarer, à ne pas passer par une agence (les agents immobiliers luttent déjà contre le DPE par une absence totale de zèle sur leur vérification…), à faire de la location saisonnière (il n’y a pas que Airbnb…). Déjà qu’un contrat de location en bonne et due forme ne protège de rien (pas du squat, pas des loyers impayés, pas des dégradations), cela ne va que faire pousser l’économie informelle. Mais l’état pourra se féliciter, il y aura beaucoup moins de passoires thermiques louées (officiellement…)

  • Les commentaires sont fermés.

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