Second tour ? Macron, Le Pen… et Mélenchon !

L’ombre des idées de Mélenchon va continuer à planer sur le second tour Macron-Le Pen. Un combat d’antilibéraux.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 2
Meeting Mélenchon Parc des expos (70) By: Blandine Le Cain - CC BY 2.0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Second tour ? Macron, Le Pen… et Mélenchon !

Publié le 13 avril 2022
- A +

Pourquoi suis-je aussi déprimée ? Le résultat de dimanche dernier était attendu. La remontada de Jean-Luc Mélenchon aussi. On savait bien qu’il n’y aurait pas la moindre petite bribe de libéralisme à se mettre sous la dent lors de cette élection. Et puis le duel Macron-Le Pen, c’est du connu, on l’a déjà eu en 2017…

Enfin, oui et non. Car à l’époque, les deux nominés étaient serrés de près par deux concurrents de poids électoral assez proche, l’extrême gauche avec Mélenchon ET un projet de démocratie plus libérale avec François Fillon. Tandis qu’aujourd’hui, il ne reste plus que Mélenchon.

Un combat d’antilibéraux

Par curiosité, je suis allée relire ce que j’avais écrit il y a cinq ans après le premier tour :

« Ce sera donc Macron Le Pen. Comme prévu. Hélas. Car Macron n’est pas un vrai libéral. Il ne conçoit aucune liberté sans la tutelle de l’État. […] La combinaison idéale du second tour aurait été Macron-Fillon (sans ses casseroles). La confrontation avec Marine Le Pen n’est pas très intéressante. Le Front national est un parti extrémiste très étatiste et protectionniste, très proche des conceptions marxistes de Jean-Luc Mélenchon. […] Le vrai débat qui aurait dû prendre place, le seul qui aurait eu un sens dans l’objectif de redresser la France, c’était le match entre la gauche social-démocrate et la droite un tant soit peu libérale. »

Ce débat, nous ne l’avons pas eu et nous l’aurons encore moins aujourd’hui.

Emmanuel Macron a amplement démontré, sur le plan économique comme sur le plan des libertés individuelles, qu’il manquait totalement d’épaisseur libérale. Il en a seulement certains discours et certaines apparences, mais dans les faits, dans les comptes et dans les lois, l’État a accru son périmètre économique et ses prétentions à dire le bien et le mal.

Petite anecdote amusante qui vous le confirmera : lors de la soirée électorale de dimanche dernier sur TF1, Ségolène Royal s’est lancée dans une grande diatribe moralisatrice contre les egos surdimensionnés de la gauche non-mélenchonienne qui ont empêché le leader Insoumis d’accéder au second tour pour mettre fin au néolibéralisme débridé du pouvoir actuel.

Réponse de Daniel Cohn-Bendit, macroniste depuis 2017 :

D’abord, sur le néolibéralisme, Ségolène, le quoi qu’il en coûte, c’est le contraire du néolibéralisme, c’est du keynésianisme. Il faut pas dire n’importe quoi. » (vers 3 h 03′)

Bref, l’affaire devrait être entendue : Emmanuel Macron n’est pas libéral, ses plus fervents supporters l’admettent ouvertement et en tirent une vraie satisfaction morale.

Du côté de Marine Le Pen, rien n’a vraiment changé non plus. La dédiabolisation qu’on nous vante partout a surtout consisté à se démarquer d’Éric Zemmour qui venait piétiner ses plates-bandes identitaires, à en dire le moins possible sur le reste et à se rattraper aux branches du pouvoir d’achat en fin de campagne alors que Jean-Luc Mélenchon commençait à menacer sérieusement sa seconde place.

Son projet reste globalement étatiste, protectionniste et dépensier – ce qui n’est déjà pas très joyeux – et se double d’une admiration pitoyable à l’égard de Vladimir Poutine. C’était déjà le cas en 2017, mais l’invasion de l’Ukraine par la Russie rend la chose parfaitement insupportable et montre bien vers quel illibéralisme brutal et dominateur vont les sympathies profondes de Mme Le Pen.

Une droite qui a raté une occasion de se reconstruire

Quant à la droite, son échec de 2017 était une bonne occasion de se reconstruire sur une base programmatique solide et originale, donc à tendance libérale, face aux trois collectivismes/keynésianismes qui l’entouraient. C’était d’autant plus faisable que lors des législatives de juin 2017, Les Républicains ont conservé des groupes parlementaires suffisamment étoffés pour devenir une force d’opposition moderne et agissante (un peu sur le modèle de ce qu’a proposé Rafik Smati).

Or, rien de tout ceci n’a eu lieu. L’échec de Fillon a juste été l’occasion de remiser les éléments libéraux de son programme à la cave et de revenir à un discours complètement creux sur le gaullisme social, les valeurs de la droite et l’ADN du parti sans qu’on sache trop de quoi il était question. Concrètement, les LR et leur candidate Valérie Pécresse n’ont pas arrêté de courir en tous sens, une fois vers l’extrême droite, une fois vers Emmanuel Macron, essayant à la fois de jouer les opposants soi disant responsables tout en allant dans le sens du vent.

On s’en est fort bien rendu compte à l’occasion du cafouillage du parti lors du vote sur le pass vaccinal et en de multiples autres circonstances de la campagne – comme l’idée aberrante de la banque du droit à l’échec par exemple : l’État vous prête de l’argent pour développer un projet et si vous ne réussissez pas, vous ne remboursez pas ! Valérie Pécresse appelle cela « redonner le goût du risque à notre jeunesse ». On croit rêver, mais non.

Résultat concret, la droite est balayée. La crainte de voir sortir des urnes un second tour Mélenchon-Le Pen a clairement joué dans les derniers jours précédant le vote, et peut-être même jusque dans l’isoloir, mais avant cela, Mme Pécresse était tombée à 7 ou 8 %, par la faute d’une campagne en zigzag à laquelle plus personne ni elle-même ne comprenait plus rien.

Mélenchon et LFI comme arbitres du second tour

Il ne nous reste donc plus que Mélenchon pour arbitrer le second tour. Presque 22 % des suffrages exprimés quand le suivant est à 7 % seulement, 7,7 millions de voix contre 7,1 en 2017, seulement 420 000 voix de retard sur Marine Le Pen – notre « fonctionnaire de la révolution » ne va pas rester silencieux.

Or que dit-il habituellement ? De merveilleuses paroles comme « l’humain d’abord » qui lui font haïr la libre entreprise et les profits, pourchasser les riches de sa vindicte fiscale jusqu’en enfer, distribuer généreusement salaires et pensions à la ronde comme si l’argent poussait dans les arbres – et soutenir invariablement les pires régimes de la planète, de Cuba à la Chine et du Venezuela de Chávez et Maduro à la Russie de Poutine (un point d’accord tout trouvé avec Marine Le Pen).

Déjà l’on sent que Macron et Le Pen sont tout ouïe. Pour l’un comme pour l’autre, il s’agit de réaliser un grand écart délicat entre différentes nuances de droite et différentes nuances de gauche, mais la victoire est à ce prix. C’est ainsi que le président sortant est en train de revenir sur son projet de reculer l’âge de départ en retraite à 65 ans – pas pour faire plaisir à M. Mélenchon, certainement pas ; mais pour prendre en compte la voix de la France…

De la même façon, dès les résultats du premier tour connus, le porte-parole du Rassemblement national Sébastien Chenu s’est empressé de lancer un appel sur mesure aux électeurs d’extrême gauche. Tous les bons mots-clefs y sont :

Je dis aux électeurs de Jean-Luc Mélenchon, soyez de vrais insoumis, […] n’allez pas sauver la tête d’Emmanuel Macron, n’allez pas signer pour la retraite à 65 ans, ou pour la casse sociale du service public.

De son côté, Marine Le Pen a fait sienne l’opposition de la France insoumise à la contrepartie travail d’intérêt général que Macron avait évoquée à propos du RSA.

Ni la réforme des retraites uniquement fondée sur un départ légal à 65 ans ni la contrepartie travail du RSA ne sont des projets que je soutiens en tant que tels. C’est plutôt vers l’ouverture du système de retraite à des possibilités de capitalisation et vers une libéralisation accrue du marché du travail qu’il faudrait aller pour redynamiser le pouvoir d’achat. Il serait même urgent de s’y mettre.

Mais en l’occurrence, nos candidats en campagne ont surtout à cœur de montrer combien ils sont attachés à notre système social et respectueux de nos précieux acquis sociaux.

Autrement dit, quoi qu’il arrive le 24 avril, l’hologramme de Mélenchon planera sur l’Élysée. Ce n’est pas une bonne nouvelle.

Voir les commentaires (9)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (9)
  • CPEF?
    Ne soyez pas déprimée Nathalie. Pâques dans quelques jours avec son message éternel d’espérance.

  • Son ombre va planer le temps de l’ élection, et ce petit monde nous ramènera aux douces amères réalités de la situation du pays, ce qui ne sera pas sans augmenter sensiblement le feu sous la marmite sociale. Bon alors quoi, il ne manque à Macron qu’ un bon gros attentat islamiste bien cradingue et tout le monde sera calmé.

  • J’ai l’impression qu’Alain Madelin a été le dernier politicien français libéral. Aujourd’hui personne pour incarner le libéralisme

    • Exact. Alternative libérale.
      Ca aurait pu marcher avec Koenig, mais hélas, pas encore assez connu.
      Il faut un jour ou l’autre avoir eu un poste ministériel (comme Macron ou Madelin) ou avoir gagné une élection.
      Sinon la crédibilité n’est pas là.

  • Mon analyse :
    Présidentielles 2022 : prendre le système à contre-pied (22 mars 2022)
    https://blog-conte.blogspot.com/2022/03/presidentielles-2022-prendre-le-systeme.html

  • « un projet de démocratie plus libérale avec François Fillon »
    Faut arrêter avec ça. Fillon n’a jamais été libéral ! Son seul fait d’arme a été de vouloir réformer drastiquement la Sécu, mais il a vite, devant l’opposition, effacé ce point de son programme. Carpette un jour, carpette toujours.
    Et la droite actuelle (Pecresse et cie) n’a rien de libéral non plus.
    N’oubliez pas que toute cette droite était favorable au pass sanitaire.
    De toute façon, cette droite est morte et enterrée. Sa partie gaulliste sociale est soluble dans le macronisme et sa partie nationaliste conservatrice est très attirée par Zemmour-Le Pen.
    LR vient de vivre la déliquescence du PS, avec 5 ans de retard, écartelé entre deux courants « irréconciliables ».
    Les libéraux vont devoir inventer un autre chemin que l’impasse « droite conservatrice » et « gauche collectiviste ».
    Ce n’est pas en se lamentant sans fin sur Fillon et consorts qu’on va y arriver.

  • Tout ça est tellement insignifiant….. L’ue est au bord du suicide et rien ne peut la sauver ni personne, surtout pas le macreux. Les usa sont au bord du gouffre, ils detruieront le monde occidental avant de mourir.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don
7
Sauvegarder cet article

Notre nouveau et brillant Premier ministre se trouve propulsé à la tête d’un gouvernement chargé de gérer un pays qui s’est habitué à vivre au-dessus de ses moyens. Depuis une quarantaine d’années notre économie est à la peine et elle ne produit pas suffisamment de richesses pour satisfaire les besoins de la population : le pays, en conséquence, vit à crédit. Aussi, notre dette extérieure ne cesse-t-elle de croître et elle atteint maintenant un niveau qui inquiète les agences de notation. La tâche de notre Premier ministre est donc loin d’êtr... Poursuivre la lecture

Le fait pour un gouvernement de solliciter et d’obtenir la confiance de l'Assemblée contribue à la prévisibilité, la stabilité et la sincérité de l’action publique, et cela devrait être reconnu comme indispensable.

Le 30 janvier dernier, Gabriel Attal a prononcé son discours de politique générale, sans solliciter la confiance de l’Assemblée, avant qu’une motion de censure soit soumise, puis rejetée le 5 février. Le gouvernement Attal, comme le gouvernement Borne avant lui, a donc le droit d’exister, mais sans soutien de la chambre.

... Poursuivre la lecture
8
Sauvegarder cet article
« Je déteste tous les Français »

Le 3 février dernier, un immigré malien de 32 ans, Sagou Gouno Kassogue, a attaqué au couteau et blessé grièvement des passagers de la Gare de Lyon. Finalement maîtrisé par l’action conjuguée des passants, des agents de sécurité et des membres de la police ferroviaire, l’homme en garde à vue a été mis en examen pour tentative d’assassinat aggravée et violence avec armes aggravée.

Les premiers éléments de l’enquête dévoilés par le préfet de police de Paris révèlent les discours conspirationnistes d’un in... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles