Ketanji Jackson à la Cour suprême : plus libérale que prévu

La nomination de la juge Ketanji Brown Jackson à la Cour suprême américaine peut réserver des surprises.

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Ketanji Jackson à la Cour suprême : plus libérale que prévu

Publié le 31 mars 2022
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Suite à la démission du juge Stephen Breyer, le président Biden a élevé la juge d’appel Ketanji Brown Jackson à la Cour suprême.

Cette dernière vient de terminer son audience au Sénat, qui doit encore statuer sur son sort à la majorité simple. Si le Sénat la confirme, la juge Jackson sera l’un des huit membres de la plus haute juridiction du pays qui a le dernier mot pour toutes les affaires légales du pays.

Ceci appelle une question immédiate qui est celle de savoir s’il faut craindre un coup de barre à gauche avec cette nomination.

Pour répondre à cette question, il convient de faire un retour sur les 42 ans passés par le juge Breyer à rendre la justice.

Le juge Stephen Breyer

Après ses études de droit aux universités de Harvard, de Stanford et d’Oxford (en Angleterre), le juge Breyer a été clerc auprès du juge Arthur Goldberg de la Cour suprême des États-Unis pendant la session de 1964.

Il a ensuite rejoint le personnel du procureur général des États-Unis en tant qu’assistant spécial pour l’antitrust, où il a travaillé de 1965 à 1967. Après un bref passage dans le monde universitaire, il a été nommé à la Cour d’appel fédérale pour le premier circuit (États du nord-est).

En 1994, le président Bill Clinton l’élève à la Cour suprême où il siège toujours en attendant la confirmation de sa successeur.

Au fil des ans, en tant que chargé de cours dans de nombreuses universités, le juge Breyer a contribué à de nombreux articles dans des revues juridiques.

La première remarque que l’on peut faire sur son travail académique est qu’il traite presque exclusivement de questions de droit administratif et de réglementation économique. Son passage par le département antitrust dans les années 1960 a laissé des traces indélébiles et il n’y a guère d’intervention étatique dans les affaires économiques du pays qu’il n’ait pas applaudie. Son livre de 1984, Regulation and Its Reform, consacre des chapitres entiers à la façon dont l’État devrait fixer toutes sortes de prix dans les industries où il a donné des monopoles à certains opérateurs…

Ses décisions de justice – si on peut les appeler ainsi – sont à l’image de ses travaux académiques.

Quant à ses livres grand public – Making Our Democracy Work et Active Liberty: Interpreting Our Democratic Constitution –, ils sont aux antipodes de la philosophie des Pères fondateurs qui étaient à juste titre effrayés à l’idée que la majorité de la population puisse imposer sa volonté aux différentes minorités.

Plutôt que décider si le juge Breyer est plus ou moins à gauche que la juge Jackson, il conviendrait donc de se demander à quel point il est étatiste.

En fait, à part en France, dans les couloirs de l’ENA, il est difficile de trouver un homme de l’État qui serve avec plus de fidélité l’organisation qui le nourrit depuis plus de 50 ans…

Sur toutes les questions économiques, en particulier lorsqu’elles doivent décider des limites de l’État administratif – celui des circulaires et des formulaires – le juge a systématiquement donné raison aux petits hommes gris qui peuplent les bureaux de Washington, DC.

Quels que soient les dommages causés par l’arbitraire de la puissance publique, il n’y trouve pas grand-chose à redire.

Ou plutôt, pour être tout à fait honnête avec les lecteurs de Contrepoints, lorsqu’il est confronté aux catastrophes d’administrations en roue libre, il le met sur le compte d’une combinaison d’ignorance du public, d’irrationalité des fonctionnaires et d’actions incohérentes des administrations.

Sans rire, dans son livre Breaking the Vicious Circle (de 1994), pour régler le problème il préconise la création d’une sorte de super-administration d’experts, dont la tâche serait de réglementer les autres réglementateurs. Loin d’être cohérent avec lui-même, l’auteur de Making Our Democracy Work pense que cette super-administration devrait bénéficier d’une grande protection contre les pressions politiques, y compris celles de l’opinion publique majoritaire… Et quis custodiet ipsos custodes ? Quelqu’un comme lui, bien sûr !

Pour résumer, le juge Breyer fait partie de ces Américains éclairés qui, contrairement à l’auteur de ces lignes, ont compris que le bonheur d’un pays passe par la nomination d’un François Bayrou à la tête d’un Haut-Commissariat au plan.

Même s’il a participé à la déréglementation du transport aérien – avant de devenir juge ! – il a toujours eu une dent contre le laissez faire dont il fustige les prétendus effets délétères.

Pour ce qui est des libertés civiles, les juristes qui tiennent la chronique judiciaire de Reason font remarquer :

« C’est une erreur de supposer qu’un juge plus jeune et de gauche reproduirait la jurisprudence et le modèle de vote du juge Breyer dans tous les domaines. Dans au moins un domaine – la justice pénale – [on] soupçonne qu’un nouveau juge […] serait très différent du juge Breyer. Tout au long de son mandat à la Cour, le juge Breyer a été un juge particulièrement pro-gouvernemental. Cela a signifié un soutien aux réglementations gouvernementales, mais cela a également signifié plus de sympathie pour les policiers et les procureurs qu’un juge de gauche typique. Même si, [au fil du temps], le juge Breyer s’est retourné contre la peine de mort, son pragmatisme l’a également rendu plus ouvert aux arguments du gouvernement selon lesquels les droits des suspects et des accusés doivent être mis en balance avec des considérations pratiques. Lorsque la Cour se divise selon des lignes formalistes-pragmatistes sur la procédure pénale, Breyer se range généralement du côté des [étatistes]. »

Un bon exemple est celui où le juge a écrit la décision majoritaire rejetant la conclusion de la cour fédérale d’appel du neuvième circuit (côte ouest) selon laquelle un détenu de Guantanamo pouvait avoir le droit de mentionner l’endroit où il a été torturé par la CIA. Bien que les faits se soient produits il y a presque deux décennies et bien qu’ils aient été déclassifiés, le juge Breyer a donné raison à la CIA et a interdit l’accès de l’accusé à cette information !

Même sur des questions moins sensibles, le juge Breyer a écrit une série de décisions de justice qui portent atteinte aux droits fondamentaux des Américains tels qu’ils sont énoncés dans la Constitution.

En particulier, il n’a pas montré un grand respect pour le quatrième amendement de la Constitution qui protège les personnes contre les perquisitions et les saisies abusives par le gouvernement. De façon répétée, dans tous ces cas célèbres qui horrifient les libéraux, le juge Breyer a donné raison à la police même en cas d’intervention sans mandat… Son collègue, le juge conservateur Antonin Scalia nommait ces attendus un « cocktail destructeur de liberté ».

Sur les questions de liberté d’expression, le juge Breyer a parfois rendu des attendus parvenant à donner raison aux administrations même lorsque la loi est clairement en leur défaveur.

Enfin, sur la brûlante question des armes à feu, le juge Breyer interprète le second amendement comme un droit collectif. Il ne concernerait que le droit des milices, qui sont aujourd’hui la garde nationale. Ainsi donc, les Pères fondateurs auraient ajouté cet amendement de façon à ne pas oublier de donner le droit de porter des armes aux militaires…

Même quand il est libéral, comme sur la question de l’avortement ou celle de la peine de mort, il est quand même centralisateur : au lieu de reconnaître que ces questions sont essentiellement du ressort des 50 États, il tord la Constitution pour en faire des sujets fédéraux.

Conservateur sur les questions sociétales et socialiste sur les questions économiques, le juge Breyer approche donc la vie en société selon le modèle des énarques français les plus à droite. Il serait parfaitement à l’aise dans un monde suranné, géré à grands coups de Cerfa multi-feuillets, et où la Constitution inclurait les détails immuables de la recette des crêpes à la confiture de fraise.

La juge Ketanji Brown Jackson

Comme à l’accoutumée, le président Biden a commis une de ses gaffes habituelles et regrettables avant la nomination de la juge Ketanji Brown Jackson en déclarant qu’il allait choisir une femme noire : même s’il avait une telle intention, il aurait simplement dû dire qu’il allait nommer la personne la plus compétente à ce poste sans préciser ces critères hors sujet qui intéressent tant la gauche de nos jours…

Ceci est d’autant plus vrai que le passé de l’actuel président est entaché d’autres déclarations racistes choquantes, en particulier comme il l’a dit en 1991 :

« Si [le juge de la Cour suprême Clarence] Thomas avait été blanc, il n’aurait jamais été nommé et la seule raison pour laquelle il est juge, c’est parce qu’il est noir. »

S’il avait eu du tact, il n’aurait rien dit de raciste, se serait contenté de parler de philosophie judiciaire, et aurait finalement choisi la juge Ketanji Brown Jackson parce qu’elle est définitivement compétente. Tout le monde aurait été ravi et l’Amérique aurait évité une énième discussion sur la question raciale.

De fait, la juge Ketanji Brown Jackson a reçu sa commission de juge d’appel en juin 2021. De 2013 à 2021, elle a été juge de district fédéral. Auparavant, elle a été défendeur public, c’est-à-dire avocate commise d’office.

Contrairement au juge Breyer, elle a donc défendu des accusés contre la police et les procureurs. C’est probablement là la plus grande différence entre les deux personnages.

Pour le reste, on ne sait pas grand-chose de sa philosophie : ses décisions n’ont été annulées que 14 % du temps en appel, ce qui représente un taux plus faible que celui de ses collègues. Pour le moment, elle a donc appliqué la loi de façon particulièrement prudente, conformément aux canons de la profession.

Toutes les fois qu’une instance juridique supérieure lui a donné tort, les décisions portaient sur d’obscurs désaccords techniques.

Effectivement, sur les questions de libertés civiles, il semblerait qu’elle soit plus à gauche que le juge Breyer. Bien évidemment, ceci signifie qu’elle est donc probablement plus libérale et moins prête à donner raison à toutes les nombreuses atteintes des libertés.

Même sur la question des armes à feu, lorsque le sénateur Chuck Grassley (de l’Iowa) lui a demandé si elle pensait que « le droit individuel de détenir et de porter des armes est un droit fondamental », la juge a répondu que « la Cour suprême a établi que le droit individuel de détenir et de porter des armes est un droit fondamental ».

Contrairement à son éventuel prédécesseur, elle « croit que la Constitution est figée dans son sens » comme elle l’a expliqué au sénateur Ben Sasse (du Nebraska) au cours de son audition au Sénat. Elle ne « croit pas qu’il existe une Constitution vivante » : ses mots ont un sens, qui est celui qui leur aurait été donné en 1787, par ses auteurs.

Il faut avouer qu’après trois jours de débats, et à part quelques rares fausses notes, elle est sortie indemne de son audition par le Sénat.

Comparaison

Alors, pour revenir à notre question de savoir s’il faut craindre un coup de barre à gauche avec cette nomination, il est difficile d’y répondre.

En revanche, nous pourrions nous demander s’il faut craindre un coup de barre vers davantage d’étatisme. Sous cet angle, il est probable que les États-Unis vont bénéficier d’un léger recul de l’État administratif dans tout ce qu’il a de plus destructeur.

La réponse à la question repose sur l’idée que l’on se fait – à tort ou à raison – des philosophies juridiques des deux juges. Pour les libéraux, qui devraient mesurer les choses sur un axe allant de la liberté à la contrainte, il est probablement plus facile de se faire une opinion que pour tous les initiés de la politique qui essaient d’interpréter la vie au travers d’une dichotomie droite-gauche que nous croyons artificielle.

Rétrospectivement, lorsque le président Obama a nommé les juges Elena Kagan et Sonia Maria Sotomayor en remplacement de John Paul Stevens et David Souter, il n’a pas fondamentalement altéré le microcosme politique, ni changé le curseur droite-gauche de la vie politique américaine.

En revanche, il est certain que, sans jamais penser au pourcentage d’électeurs qui vote libertarien d’élection en élection, il a définitivement affaibli l’État en permettant aux juges Kagan et Sotomayor de rendre des décisions importantes et salutaires (J. D. B. v. North Carolina, United States v. Alvarez, Missouri v. McNeely, Navarette v. California) qui auraient été inconcevables à l’ère de leurs prédécesseurs.

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  • J’ai cru a un article du gorafi… Désolé, mais il n’y a pas plus progressiste et woke que cette juge… Elle ne sait même pas donner une définition de ce qu’est une femme… Ca promet. ^^

  • Merci à l’Auteur des éclairage & analyse.
    Ils permettent une meilleur compréhension de cette nomination.
    Le dernier paragraphe ne mériterait-il pas une version développée ?

  • Avatar
    Philippe Lacoude
    5 avril 2022 at 16 h 31 min

    (1 / 4) Les commentaires étant l’espace des lecteurs, j’évite autant que possible d’y répondre sauf lorsqu’on me demande une source.
    Ici, ‘Mandataire’ se demande si le dernier paragraphe mériterait une version développée et je suis d’accord avec lui. Je ne l’ai pas fait car l’article était déjà trop long, juste au-delà de 2000 mots.
    Ainsi, donc, revenons sur les 4 cas emblématiques que je cite en commençant par « J. D. B. versus North Carolina ». Un jeune mineur, avec des retards mentaux, est soupçonné par la police d’avoir commis deux vols. Un enquêteur de la police rend alors visite à J.D.B. à son école, où interrogé par l’enquêteur, par un policier en uniforme et par des responsables de l’école, J.D.B. avoue ses deux crimes. Le problème est triple. Le premier est que l’enfant n’est pas en état d’arrestation, il n’a pas reçu le traditionnel avertissement « Miranda* » lors de l’interrogatoire, et on lui a refusé la possibilité de contacter son tuteur légal.
    Le cas va jusqu’á la Cour suprême de Caroline du Nord qui juge qu’un « adulte raisonnable (!!) se serait senti libre de partir » ; par conséquent, J.D.B., pourtant mineur, pourtant attardé mental, n’était pas en garde à vue. Il n’y avait pas besoin de lui rappeler ses droits. Un des juges de Caroline a même écrit dans ses attendus que puisqu’il ne les aurait pas compris, c’était inutile de toute façon ! Ainsi, la Cour suprême de Caroline du Nord a confirmé la décision du tribunal de première instance.
    La Cour suprême, avec une majorité de 5 (Sotomayor, Kennedy, Ginsburg, Breyer, Kagan) contre 4, a jugé qu’il n’est pas du tout raisonnable de supposer que parce que l’accusé est de toute façon mineur et de toute façon simple d’esprit, il serait inutile de lui dire ses droits.
    Clairement, les juges Sotomayor et Kagan ont joué un rôle clef dans la décision, qui restreint les droits de l’Etat en matière de procédure criminelle comme l’entend explicitement le quatrième amendement de la Constitution. Si personne ne sait ce qu’auraient fait leurs deux prédécesseurs, de gauche, mais conservateurs sur ces questions, il y a fort à parier qu’ils auraient soutenu la police contre l’accusé.
    * Comme dans les films américains, si je puis dire. « You have the right to remain silent. Anything you say can and will be used against you in a court of law. You have the right to an attorney. If you cannot afford an attorney,… »

  • Avatar
    Philippe Lacoude
    5 avril 2022 at 16 h 44 min

    (2 / 4) United States v. Alvarez est très intéressant. Mr Alvarez se promenait un peu partout en disant à qui voulait bien l’écouter qu’il avait de nombreuses distinctions militaires. Il n’en tirait pas matériellement parti – en essayant d’utiliser le traditionnel discount de 10% au magasin de bricolage ou en obtenant des subsides gouvernementaux pour les vétérans – mais il violait quand même le « Stolen Valor Act of 2005 », une loi fédérale qui interdit de porter une médaille militaire qu’on n’a pas reçu, ou de se dire Navy SEAL si on est civil, etc.
    Au nom du premier amendement – qui fixe la liberté d’expression (entre autres libertés) – la Cour suprême a jugé que Mr Alvarez était seulement un personnage répréhensible mais pas un criminel. (Je pense que c’en aurait été tout-à-fait différent s’il avait touché de l’argent privé ou public du fait de son faux statut de militaire.)
    Là aussi, les juges Sotomayor et Kagan ont été dans la majorité qui n’en a été une que par leur présence. Là encore, même si personne ne sait ce qu’auraient fait leurs deux prédécesseurs, les juges John Paul Stevens et David Souter, il aurait suffi que ses deux étatistes changent la donne pour que Mr Alvarez soit coupable au lieu d’être innocent.

  • Avatar
    Philippe Lacoude
    5 avril 2022 at 16 h 46 min

    (3 / 4) Dans Missouri v. McNeely, Tyler McNeely a été arrêté après qu’un agent l’ait soit-disant vu dépasser la limite de vitesse affichée et franchir la ligne médiane. McNeely a refusé de souffler dans un alcootest portatif et déclaré qu’il refuserait un alcootest au poste de police. L’officier a conduit McNeely directement à l’hopital au lieu du poste pour faire un test sanguin. L’officier n’a pas ***demandé de mandat*** pour effectuer le test sanguin, qui s’est révélé positif à 1,5 g au lieu de la limite légale de 0,8 g.
    McNeely a été accusé de conduite en état d’ébriété. Ses avocats ont essayé d’interdire l’utilisation des résultats de son test sanguin lors du procès, en faisant valoir que cela avait été fait de manière inconstitutionnelle en tant que « perquisition et saisie déraisonnables » (qui sont interdites par le quatrième amendement).
    Les juges Sotomayor, Scalia, Kennedy, Ginsburg, et Kagan ont jugé que les avocats de McNeely avaient raison et qu’il faut un mandat d’un juge pour procéder à un examen médical forcé. Les juges Roberts, Alito, Thomas et Breyer était du côte du policier voulant forcer une procédure médicale sans avoir de mandat. (Note : dans tous les États, il y a de nombreux juges d’astreinte et obtenir un mandat aurait été facile… Le policier était simplement fainéant…)
    Dans ce cas, Sotomayor et Kagan – les nominées du président Obama – sont clairement dans le camp opposé à celui de Breyer, le juge nommé par Bill Clinton, qui sera probablement remplacé par la juge Ketanji Brown Jackson.

  • Avatar
    Philippe Lacoude
    5 avril 2022 at 17 h 03 min

    (4 / 4) Navarette v. California, 572 U.S. 393 (2014), était une affaire dans laquelle la Cour suprême des États-Unis a précisé quand les policiers peuvent procéder à des arrestations ou à des détentions temporaires sur la base d’informations fournies par des informations anonymes.
    En 2008, la police de Californie reçoit un appel au 911 indiquant qu’une camionnette roulait imprudemment sur une route rurale. Les agents ont repéré un camion correspondant à la description fournie dans l’appel au 911 et ont suivi le camion pendant cinq minutes, mais n’ont observé aucun comportement suspect.
    Tout libéral devrait immédiatement espérer que l’affaire est close. Définitivement.
    Néanmoins, les agents effectuent un contrôle routier. Au cours du contrôle, ils décident de faire perquisition du véhicule, sans mandat bien-sûr, et découvrent, comme par hasard 15 kg de marijuana dans la camionnette.
    Au procès, les occupants de la camionnette ont fait valoir que leur arrêt, puis la perquisition, violait le quatrième amendement de la Constitution des États-Unis, car la dénonciation anonyme n’était pas fiable ou vérifiable et que les policiers n’avaient pas personnellement observé d’activité criminelle.
    Je note que l’appel anonyme aurait très bien pu avoir été fait par la police elle-même. Si on commence à accepter les dénonciations anonymes pour justifier des perquisitions, il n’y a plus besoin de mandat…
    Bref, en tout état de cause, la Cour suprême n’a PAS donné raison à Navarette (ce qui, je pense, est une erreur grossière, qui sera un jour corrigée, par une prochaine décision sur un autre cas.)
    Mais, les juges Scalia, Ginsburg, Sotomayor, et Kagan – encore ces deux-là – étaient dans la minorité pour donner tort à la police dans ce cas. Le juge Breyer était dans la majorité qui a donné raison à l’État.
    C’est à mon avis le cas le plus emblématique des quatre cas. Les deux nominées du président Obama s’opposent au juge Breyer, le juge nommé par Bill Clinton.
    Je ne sais pas s’il y a 50 nuances de gauchisme mais il y a définitivement des nuances de libéralisme économique ou sociétal chez les gens de gauche. C’est la raison, un peu compliquée, soit, pour laquelle la juge Ketanji Brown Jackson sera probablement une amélioration tant il est vrai que la personne qu’elle va remplacer est la plus aux antipodes des valeurs du libéralisme classique, à mon sens.
    Voilà, Mr ‘Mandataire’. C’est un peu long mais, comme disait Voltaire, « je n’ai fait ces commentaires plus longs que parce que je n’ai pas eu le loisir de les faire plus courts ».

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