La liberté d’entreprendre est-elle menacée en France ?

La liberté d’entreprendre reste fragile en France, menacée par les taxes, les réglementations et l’écologie.

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La liberté d’entreprendre est-elle menacée en France ?

Publié le 1 février 2022
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Par Philbert Carbon.
Un article de l’IREF Europe

Une grande enquête mondiale (44 400 personnes interrogées dans 55 pays) menée par sept organisations dont, pour la France, la Fondapol, un think tank proche du parti Les Républicains, vient de paraître. Intitulée « Libertés : l’épreuve du siècle », elle traite d’une multitude de sujets : des menaces extérieures (notamment chinoise, russe et turque) aux enjeux sécuritaires intérieurs (délinquance, terrorisme, immigration, islamisme), en passant par la peur du déclassement économique ou celle des Gafam, mais aussi la solidité de l’idéal démocratique, le rejet des partis politiques, etc.

 

Près d’un million d’entreprises créées en France en 2021

Chez les Français interrogés, la proposition en faveur de la liberté des entreprises recueille 57 %. Un chiffre qui n’est pas une surprise quand on voit combien l’entrepreneuriat a du succès dans notre pays. En effet, l’Insee a révélé vendredi 14 janvier que le total des créations d’entreprises s’est élevé, en 2021, à 995 868, soit 17,4 % de plus qu’en 2020. Un nouveau record historique.

Parallèlement, le président de la République a célébré sur Twitter la 25ème licorne française, s’en attribuant presque le mérite. L’objectif d’avoir 25 licornes en France fixé par Emmanuel Macron pour 2025 a donc été atteint avec trois ans d’avance. À cela doivent être ajoutés les 11,6 milliards d’euros levés par les startups françaises en 2021, selon le baromètre EY du capital-risque. Un chiffre en hausse de 115 % par rapport à 2020. Enfin, n’oublions pas les 4 milliards d’euros d’investissements étrangers, pour 21 projets, annoncés, là encore, par Emmanuel Macron la semaine dernière.

La France serait devenue un paradis pour les entrepreneurs, une véritable « startup nation » pour reprendre les propos présidentiels. Certes, Emmanuel Macron et ses gouvernements ont mis en œuvre des réformes favorables aux entreprises – ordonnances travail, réforme de l’assurance chômage, baisse de l’impôt sur les sociétés et des impôts de production – mais celles-ci sont encore insuffisantes pour transformer réellement le pays.

Des chiffres en trompe-l’œil

Par ailleurs, sans vouloir jouer les rabat-joie, force est de constater que les chiffres mis en exergue par l’Élysée doivent être relativisés.

À propos des créations d’entreprises, il faut préciser que près des deux tiers d’entre elles (641 543) sont le fait d’autoentrepreneurs. Avant la pandémie, en 2019, 68,4 % des autoentrepreneurs généraient un chiffre d’affaires et parmi ceux-ci, près de 25 % ne dégageait que 1000 euros de revenus de leur activité. Le revenu moyen des autoentrepreneurs était, toujours en 2019, de 6082 euros ! Autant dire que beaucoup  ne vivent pas de leur activité et rien ne dit qu’ils y arriveront un jour, ni qu’ils créeront des emplois.

Concernant les licornes, précisons d’abord que le terme a été inventé en 2013 par Aileen Lee pour désigner une startup, non cotée en bourse et non filiale d’un grand groupe, valorisée à plus d’un milliard de dollars. Il conviendrait de tenir compte de l’inflation et d’augmenter le chiffre de 20 %. Si l’on ne prend donc en compte que les licornes françaises valorisées plus de 1,2 milliard de dollars, il n’en reste plus que 17.

Par ailleurs, si les licornes se multiplient en France (et en Europe), c’est en partie sous l’effet des milliards dépensés pour soutenir l’économie pendant la pandémie et de ceux qui ont été injectés par la Banque centrale européenne depuis des années. Toutefois, s’il semble que nous ayons désormais dépassé l’Allemagne en nombre de licornes (tout en restant derrière le Royaume-Uni), n’oublions pas que notre voisine d’outre-Rhin a 2,6 fois plus d’ETI (entreprises de taille intermédiaire) que la France, des entreprises à l’actionnariat familial solide et ayant fait la preuve de leur résistance, ce qui n’est pas encore le cas des licornes.

Sur les levées de fonds – 11,6 milliards d’euros en 2021 –, précisons qu’au Royaume-Uni les startups ont levé 32,4 milliards (+155 % vs 2020) et en Allemagne, 16,2 milliards (+209 %). Par ailleurs, les montants investis ont été de 7,61 milliards d’euros en Suède (soit 1,5 fois moins que la France pour 6,5 fois moins d’habitants) et de 5,86 milliards aux Pays-Bas (soit 1,9 fois moins que la France pour 3,8 fois moins d’habitants).

Enfin, à propos des investissements étrangers, il est vrai que la France est le pays le plus attractif d’Europe. Cependant, il est aussi moins résilient que ses principaux rivaux : en 2020, 60 % des projets annoncés en France étaient européens, contre 41 % au Royaume-Uni ; seulement 8 % provenaient des pays émergents, contre 17 % au Royaume-Uni et 25 % en Allemagne ; 15 % des projets concernaient le secteur technologique contre 31 % au Royaume-Uni ; un projet d’implantation générait en moyenne 34 emplois en France, contre 48 en Allemagne et 61 au Royaume-Uni.

La liberté de l’entrepreneur reste fragile

Bref, si l’entrepreneuriat se porte plutôt bien en France, il convient de ne pas faire dire aux chiffres ce qu’ils ne disent pas et de se montrer d’autant plus modeste que ces bonnes nouvelles restent fragiles.

Elles le sont d’autant plus, en cette période électorale, que nombre de candidats avancent des propositions néfastes pour l’entreprise.

En effet, Roussel veut nationaliser de grandes entreprises, bloquer certains prix et augmenter le smic, mais aussi tous les salaires du privé (et du public).

Mélenchon veut rétablir l’ISF, bloquer les prix des produits et services de première nécessité, augmenter les salaires, ramener l’âge de la retraite à 60 ans, taxer les transactions financières, geler les dividendes, capturer les héritages importants.

Hidalgo entend créer un ISF « climatique », augmenter tous les salaires de 15 %, limiter le montant des hauts salaires, taxer davantage les successions, augmenter la taxe carbone.

Jadot défend également l’idée d’un ISF « climatique », tout comme il souhaite augmenter le smic, réduire le temps de travail, donner un droit de regard aux salariés sur la rémunération de leurs dirigeants.

Le Pen veut abaisser l’âge de la retraite, rétablir l’ISF, nationaliser les autoroutes.

Même Emmanuel Macron rêve de s’en prendre à l’héritage, si l’on se fie à la série de rapports publics publiés ces derniers mois sur le sujet.

On voit même des entrepreneurs attaquer la liberté d’entreprendre.

C’est le cas de Joseph Sournac, Lucas Deutsch et Yoan Brazy, fondateurs du cabinet de conseil « en redirection écologique » (sic) Sinonvirgule, qui n’ont pas peur d’affirmer que « la liberté d’entreprendre n’est pas un droit inaliénable ». Certes, ils n’osent pas demander son abolition pure et simple, mais voudraient « la subordonner complètement à une autre obligation, elle aussi inscrite dans la Constitution française, à savoir la protection de l’environnement ».

Par conséquent, pour Sournac, Deutsch et Brazy, mieux vaudrait cesser de considérer l’émergence de startups comme un fait forcément positif et, au contraire, « mettre en place des dispositifs filtrants ne laissant plus passer que les projets compatibles avec l’urgence écologique ». Pour eux, la naissance de nouvelles entreprises doit être rare et soumise à l’autorisation de « tribunaux d’existence » (re-sic), composés de représentants de la société civile, des humains concernés par le produit ou service et, surtout de « représentants des non-humains et des générations futures » !

Toujours selon Sournac, Deutsch et Brazy, il n’est pas naturel que l’homme entreprenne et se constitue « dans des rapports marchands ». L’homo oeconomicus n’est qu’une construction sociale « subjectivement libérale ». Il faut le remplacer par l’homo habi-tabi-lis, qui vit pour maintenir l’habitabilité de la Terre. Renoncer à la liberté d’entreprendre ne serait pas une perte, car « chaque projet en moins compte ».

La libre entreprise connaît désormais ses Fouquier-Tinville, d’anciens consultants qui ont créé leur entreprise en 2021, après les confinements. Manifestement le virus du Covid-19 s’est aussi attaqué à quelques cerveaux !

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  • Au stade où l’on en est actuellement, avec des médias complètement partisans et alignés, l’état d’urgence sanitaire toujours actif et le pass vaccinal comme épée de Damoclès, les lois ayant augmenté la surveillance des citoyens et restreint leur droit à la libre circulation, et tout le reste, je crois que la question dans le titre de ce billet pourrait tout bonnement être « La liberté est-elle menacée en France ? ».

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