Il y a 52 ans, Milton Friedman déboulonnait déjà la RSE

La Responsabilité sociale des entreprises est à la mode, mais elle n’a rien de bien nouveau. En 1970, dans un retentissant article publié par le New York Times, Milton Friedman en faisait déjà une analyse intensément dubitative.

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Milton Friedman (Crédits : The Friedman Foundation for Educational Choice, licence Creative Commons)

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Il y a 52 ans, Milton Friedman déboulonnait déjà la RSE

Publié le 1 novembre 2022
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Comme il était fier, le PDG de Danone Emmanuel Faber, en juin 2020, lorsque ses actionnaires, les premiers de tout le CAC 40, ont voté à 99,4 % le nouveau statut d’entreprise « à mission » de leur groupe, conformément aux dispositions de la loi PACTE concoctées par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire dans le but d’intégrer les enjeux sociaux et environnementaux dans l’objet et le statut des entreprises !

« Vous venez de déboulonner une statue de Milton Friedman ! » leur a-t-il même lancé dans un assaut de satisfaction anti-libérale non dissimulée.

Sa façon à lui, j’imagine, de « fêter » le cinquantième anniversaire du célèbre article de l’économiste de l’université de Chicago publié dans le New York Times le 13 septembre 1970 et intitulé The Social Responsibility Of Business Is to Increase Its Profitsautrement dit,  la responsabilité sociale de l’entreprise (ou RSE) consiste à augmenter ses profits.

Mal lui en prit car il y a seulement trois semaines, le groupe Danone annonçait un plan de licenciement de 2000 personnes dans le monde, dont 400 à 500 en France. Oubliées les envolées lyrico-vertueuses sur la responsabilité sociale des entreprises. Chez Danone, dans le contexte d’une activité sévèrement bousculée par les conséquences des confinements anti-Covid, il n’est plus question maintenant que de restaurer les marges et de « remettre l’entreprise sur le chemin de la croissance rentable ».

Milton Friedman aurait-il raison ? Se pourrait-il finalement que les individus qui composent la société, qu’ils soient salariés, consommateurs ou investisseurs, soient mieux servis et plus libres de leurs choix si les entreprises se consacrent entièrement à leur mission de création de richesse à long terme plutôt que de faire étalage de leur « conscience sociale » en important en leur sein les politiques publiques à la mode du moment telles que les luttes contre le chômage, les discriminations ou la pollution ?

Ces trois exemples, cités par Friedman dès le début de son article, montrent à quel point les cinquante années qui nous séparent de son texte n’ont rien altéré de sa prodigieuse actualité – raison de plus pour s’y intéresser.

Mais avant d’entrer dans le dur du sujet, quelques mots sur l’auteur.

Milton Friedman (1912-2006) est né à Brooklyn (New York) dans une famille d’immigrants juifs originaires d’Europe centrale. Après sa scolarité, il commence des études de mathématiques en vue de devenir actuaire puis se tourne vers l’économie et les statistiques.

Entre 1935 et 1945, il trouve ses premiers emplois au sein de l’administration fédérale américaine, au Trésor notamment, où, de son propre aveu, il se montre très keynésien. Il faut dire qu’on était en plein New Deal. Mais rapidement, il va en venir à critiquer tout ce qui ressemble à un contrôle des prix, des loyers, etc. dans la mesure où cela revient à fausser le jeu de la rencontre entre l’offre et la demande.

Il obtient son doctorat en économie en 1946 et entre la même année comme professeur à l’université de Chicago. Il y rejoint le courant économique connu sous le nom d’école de Chicago en compagnie d’autres économistes libéraux de renom tels que Ronald Coase, Gary Becker ou James Buchanan (théorie du choix public). L’année suivante, à l’instigation de Friedrich Hayek, il participe à la création de la Société du Mont-Pèlerin qui se donne pour but de promouvoir le libéralisme. Il reçoit le prix Nobel d’économie en 1976.

Dans son ouvrage le plus connu du grand public, Capitalisme et Liberté (1962), Friedman s’oppose à Keynes à une époque où les États providence sont en vogue. Il plaide pour un État limité et défend l’idée que la liberté économique est une condition indispensable de la liberté politique. Ses émissions de télévision Free to choose (Libre de choisir) sont également très populaires. Il a notamment consacré l’une d’elles à l’Histoire du crayon de Leonard Read pour illustrer la supériorité du marché libre sur tout autre forme d’organisation économique pour garantir la prospérité et la paix.

 

Ce que pense Friedman de la RSE

Dans son article de 1970, l’économiste s’attache à montrer combien les chefs d’entreprises se trompent quand ils pensent défendre la libre entreprise en prétendant que la responsabilité sociale des entreprises est au moins aussi importante que le profit. Pour lui, ce type de discours sympathique au premier abord revient ni plus ni moins à « prêcher en faveur d’un socialisme pur et dur ».

L’entreprise étant une « personne artificielle », Milton Friedman commence par remarquer que dès lors qu’on parle de responsabilité, on parle forcément de la responsabilité des individus qui font marcher l’entreprise, qu’ils soient entrepreneurs indépendants ou cadres dirigeants appointés par les actionnaires des grands groupes.

Laissant de côté le cas des premiers qui, en tant que propriétaires de leur entreprise, ont tout loisir d’y exercer leur « responsabilité sociale » à leur guise (jusqu’à ce qu’ils s’aperçoivent qu’en réalité ils lui causent du tort1 en lésant leurs salariés et/ou leurs clients), Friedman rappelle que le cadre dirigeant d’un grand groupe est l’employé des actionnaires. Sa responsabilité consiste à faire ce qu’ils lui demandent, ceci signifiant généralement de dégager le plus d’argent possible dans le cadre de la loi en vigueur et des règles éthiques communément partagées par la société.

Non pas que le cadre dirigeant ne soit pas aussi une personne à part entière qui se sent des responsabilités à l’égard de sa famille, de ses voisins, d’une cause chère à son cœur, etc. Il se peut qu’il choisisse de consacrer une part de son revenu personnel au bénéfice de l’une de ces causes, mais comme le dit Friedman, ce sera son argent, pas celui de son employeur.

Dès lors que ce même dirigeant décide de consacrer de l’argent qui ne lui appartient pas, l’argent des actionnaires, pour remplir un but social particulier – embaucher des chômeurs de longue durée pas forcément bien profilés pour les postes offerts au lieu de salariés expérimentés, par exemple – il affecte les revenus des parties prenantes de l’entreprise, à savoir, selon les cas, les actionnaires, les clients et/ou les salariés, sans leur avoir demandé leur avis sur l’utilisation de ces fonds.

Rien ne dit que ces montants laissés à l’appréciation des parties prenantes auraient été utilisés de cette façon – dans notre exemple, la lutte contre le chômage – et à supposer qu’ils aient été utilisés ainsi, rien ne dit non plus qu’ils n’auraient pas créé plus de valeur pour les chômeurs en venant directement des individus plutôt que de l’entreprise.

C’est en cela que Milton Friedman voit dans la RSE une forme de taxation imposée aux parties prenantes de l’entreprise. C’est en cela qu’il y voit une façon du pouvoir politique de s’immiscer dans le domaine de la liberté d’entreprendre et de le collectiviser de façon rampante :

This is the basic reason why the doctrine of ‘social responsibility’ involves the acceptance of the socialist view that political mechanisms, not market mechanisms, are the appropriate way to determine the allocation of scarce resources to alternative uses.
C’est la raison fondamentale pour laquelle la doctrine de la responsabilité sociale implique l’acceptation du point de vue socialiste selon lequel les mécanismes politiques, et non les mécanismes de marché, sont le moyen approprié pour déterminer l’allocation de ressources rares à des utilisations alternatives.

Et c’est là que nous retrouvons la loi PACTE dans toute sa splendeur – du moins pour ce qui concerne son volet sur l’évolution de l’objet social des entreprises : derrière les bons sentiments, derrière la prétendue considération pour les hommes et les femmes qui travaillent et l’attention aux désordres environnementaux – étant entendu que les entreprises laissées à elles-mêmes n’ont que mépris pour tout cela – c’est bien une soumission à l’agenda politique du moment qui est demandé au monde de l’entreprise.

Beaucoup de chefs d’entreprise gagnés par les arguments de la RSE (ou tout simplement en plein accès de virtue-signalling) pensent qu’elle permettra de réconcilier l’opinion publique avec l’entreprise. Je pense au contraire avec Milton Friedman que cette façon d’éloigner les entreprises de leur fonctionnement initial est un signal négatif sur la libre entreprise, une façon de dire à la société que l’entrepreneur naturellement mû par le profit serait par essence un profiteur sans foi ni loi à encadrer d’urgence dans une définition politiquement correct de l’entreprise qui se rapprocherait de l’association ou de la fondation à but social mais surtout pas lucratif.

Milton Friedman reconnait volontiers que dans ce contexte de dénigrement perpétuel du secteur marchand, l’affichage de la RSE sert souvent de couverture présentable, voire aimable, pour des décisions qui répondent parfaitement aux intérêts de l’entreprise mais qui seraient moins bien acceptées sans ce déguisement.

Malheureusement, ainsi qu’il le souligne à la fin de son article, que la RSE soit pratiquée de bonne foi ou de façon plus stratégique par les entreprises, elle conduit nombre de dirigeants de premier plan, le PDG de Danone pour n’en citer qu’un, à débiter une quantité impressionnante de « nonsense » à son sujet, avec pour conséquence immédiate et inéluctable de mettre en danger leur entreprise et d’endommager considérablement les fondations nécessaires à la constitution d’une société libre.

Entre Emmanuel Faber et Milton Friedman, qui déboulonne qui ? Le débat est ouvert !

Sur le web

 

Un article publié initialement le 14 décembre 2020.

  1. Je peux vous citer l’exemple d’un patron qui avait décidé de payer des salaires au-dessus du prix de marché de son secteur. Au début, tout le monde est content. Jusqu’à ce que le chef comptable débarque avec des calculs montrant que vu le niveau des salaires, l’acquisition d’une certaine machine couplée à quelques licenciements devenait très rentable…
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  • « ’intégrer les enjeux sociaux et environnementaux dans l’objet et le statut des entreprises  » moi pas comprendre…

  • Le gros avantage de la RSE, c’est que cela permet à un dirigeant d’entreprise de pouvoir justifier ses échecs ou ses absences de résultats auprès de ses actionnaires en arguant que les objectifs RSE auront été tenus.
    De la même manière que le socialisme ne dure que le temps que dure l’argent des autres, la RSE ne durera que le temps que durera la prospérité de l’entreprise.
    L’avantage des entreprises (les vraies pas celles qui bénéficient d’une rente de situation quelconque), c’est que les bons sentiments s’arrêtent assez vite lorsque le mauvais temps se lève.

  • Près de chez moi existent la CCB : immense carrière émettant énormément de poussières, induisant un très important charroi de lourds camions et provoquant vibrations (et fissures) dans des habitations lors des explosions quasi quotidiennes. Cette entreprise a, de par ses activités, un impact important sur la société/l’environnement immédiat : elle a beaucoup de « parties intéressées » externes (au sens norme ISO 14001). Une RSE est indispensable.
    Ayant travaillé sur le sujet des politiques drogues et alcool en milieu professionnel, j’étais tombé sur la phrase « il fût un temps où l’on considérait que la vie personnelle s’arrêtait aux portes de l’entreprise et inversement » : l’entreprise ne peut/doit pas tout prendre sur son dos mais elle a un impact sur la vie de ses travailleurs bien au delà des heures de travail.

    -3
      • Bonjour MichelC. Vu qu’il n’y a pas de question dans mon commentaire, à quoi dites-vous « non » ?
        Si l’exemple réel que je donne vous fait dire « cette société devrait ne pas devoir tenir compte de son impact », n’hésitez pas à l’expliquer, le justifier et établir un plan de communication pour tous les riverains forcés par les nuisances de déménager.

        -2
        • Il y a une carrière avec une autorisation d’exploiter.
          Exploiter, ce n’est pas creuser à la petite cuillère, il faut des moyens lourds.
          Si gêne il y a, c’est à l’autorité de réagir.
          Ou de proposer des solutions autre que des mots genre RSE.
          L’état encaisse bien moult taxes sur l’exploitation de cette carrière, non?
          Elles pourraient inclure les indemnités pour nuisances aux riverains, et ceux-ci être indemnisés. Expulsez l’Obèse.

          • J’ai régulièrement fait la critique à l’égard de gens comme vous : la société est un système interconnecté. L’action volontaire, involontaire, l’inaction volontaire ou involontaire : tous les 4 ont des conséquences directes et indirectes. Et cela, vous ne voulez pas l’admettre.. ou pire, vous l’admettez en vous disant « ben tant pis pour ceux qui sont au mauvais endroit au mauvais moment ».

            -4
            • Le pb c’est que cette rhétorique sert toujours et exclusivement dans votre cas d’excuse pour plus coercition, plus de taxes, plus de règlements plus de contraintes plus de caca législatif.
              Vos théories qui se veulent inclusives des externalités (Polanyi c’est quand même pas nouveau) vont chercher très loin des justifications à toujours plus coercition. Trop s’occuper des responsabilité indirectes, c’est doublement pervers. Ca crée des barrières énormes à l’entrée des parchés pour plus grand bonheur de l’oligarchie et de la connivence grosses entreprises/milieu politique. Ca crée aussi une dilution de l’action de l’Etat qui ne poursuit donc plus aussi bien les fraudes, les spoliations directes et les dommages directs.

              CONTREPOINTS -> Commentaire modéré : les insultes ne sont pas tolérées.

        • Et vous dites ça sans savoir de quoi je parle.. ridicule…
          C’est la carrière de la CCB à Gaurain et Antoing.
          Allez accuser gratuitement ailleurs au lieu de dire des âneries sans fondements.

          -4
          • En même temps vous lui reprochez de vous répondre sans savoir alors que vous n’aviez pas précisé. Vous trouvez ça honnête de votre part?
            Par ailleurs ces carrières Belges ont bien une autorisation d’exploitation elles aussi. Donc je ne vois pas en quoi cet « argument » s’oppose à ce qu’a dit MichelC.

    • ce n’ets pas un rse qui est indispensable mais des indemnisations pour les dommages causés par l’activité… du moins à mon opinion…

    • Ce que vous ne nous dites pas, c’est si la CCB est venue s’installer près de chez vous. Ou si c’est vous qui êtes venu vous installer près de la CCB ?

      • Ce n’est pas moi (j’habite à plus de 10km) et renseigne-vous un minimum au lieu de dire n’importe quoi svp.

        -3
        • Si vous n’êtes pas personnellement concerné, comment pouvez-vous prétendre contribuer efficacement à résoudre les problèmes avec un acronyme passe-partout de 3 lettres ?

    • C’est maintenant bien connu : beaucoup souhaitent la réindustrialisation de la France pour son indépendance à certains produits, pour les emplois, etc. Mais personne ne veut une usine dans sa commune…

    • Les carrières sont des ICPE, autorisées à fonctionner après dépose de dossier, enquête publique, avis des directions concernées et arrêté préfectoral.
      S’il y a des nuisances, l’Etat pourra déterminer si celles-ci sont manifestes (risque d’éboulement de terrains, d’écroulement de maisons…) ou si elles restent mineures et circonscrites à ce qui était prévu dans le dossier déposé (par exemple accroissement du trafic routier).
      Dans ce type d’entreprises, dont le fonctionnement est strictement réglementé par l’Etat, on peut affirmer que certains aspects du RSE (notamment les points sur l’environnement et sur les conditions de travail) sont déjà intégrés par le législateur.

      • En effet, c’est en partie intégré directement dans le permis d’environnement ( = permis d’exploiter en gros, c’est un terme administratif) pour que l’entreprise ne puisse pas se déroger à ces obligations bien compréhensibles.

  • Au « Welfare State » à la Française vous ajouter aussi la loi PACTE de Avril 2019 et nous serons en pleine Economie Socialiste.!!!

    • Pacte : le mot préféré des truands.

      • A égalité avec les suivants:
        Les adjectifs « Social » « Solidaire » et souvent « juste », qui mis derrière n’importe quel notion signifient en général éxactement le contraire de la notion d’origine: Ex: Taxe solidaire, justice sociale, impôt juste etc…
        Les noms communs « Grenelle », (qui signifie un supposé accord alors qu’en fait c’est juste une décision entre potes pour taxer ceux qui ne participent pas vraiment au « Grenelle »; et « responsabilité » (car souvent ça signifie le contraire, un truc précisément irresponsable ou qui taxe des personnes pour compenser une situation difficile de certains dont ils ne sont pas vraiment responsables. )

        Bref, la « left langue » la langue de bois des truands étatistes façon « ganster moderne » dans la chanson de Solar.

  • « Comme il était fier, le PDG de Danone Emmanuel Faber, en juin dernier, lorsque ses actionnaires, les premiers de tout le CAC 40, ont voté à 99,4 % le nouveau statut d’entreprise « à mission » »
    Attention, la vertu, c’est comme la confiture, moins on en a plus on l’étale! Et quand la tartine tombe du mauvais côté, eh bien on est dans la m***e. Commentaire du Canard ( déchaîné): PAN SUR LE BEC!

  • « Mal lui en prit car il y a seulement trois semaines, le groupe Danone annonçait un plan de licenciement de 2000 personnes dans le monde, dont 400 à 500 en France. »

    Voilà ce qui se passe quand on se focalise sur la « fin du monde » avant de se focaliser sur la « fin du mois » !

    En même temps, et plus généralement, je voudrais faire deux remarques…

    1. L’entreprise est une personne morale (et non artificielle, et le terme « moral » n’est pas choisi au hasard) ; en ce sens, elle a des droits et des devoirs ; des devoirs, notamment, vis à vis de ceux qui la font, cad ses actionnaires et ses salariés. D’où l’importance, à mon sens, de privilégier ceux-ci, avant de s’occuper d’environnement ou de réchauffement climatique (au delà, bien sûr des réglements existants qui s’appliquent à son fonctionnement).

    2. L’entreprise n’est pas un objet qui peut vivre longtemps en dehors de son temps, ni se désintéresser totalement des externalités négatives que son fonctionnement produit. La tendance actuelle, développée tant par l’opinion publique que par le législateur, est justement de rapatrier ces externalités au sein même de l’entreprise. Et d’une certaine manière, les entrepreneurs sont piégés par leur propre discours : ils ne peuvent d’un côté, prétendre qu’ils sont (les seuls) créateurs de richesse – externalité positive – de nos sociétés, et dans le même temps, fermer les yeux sur leurs externalités négatives.

    Bref, le but premier d’une entreprise est bien de faire du profit, pour être en mesure de fonctionner durablement. Mais elle ne peut s’abstraire de son environnement, social ou écologique, dont la prise en compte est imposée par le législateur. Ce qui, selon moi est critiquable, c’est la tendance de certains chefs d’entreprise de vouloir se faire plus royaliste que le roi, d’anticiper exagérément la demande de l’opinion publique ou du législateur (*), et de tenter de se mettre en avant par le biais d’opérations de green-washing douteuses.

    (*) cette manie de tendre le bâton pour se faire battre, source inépuisable de problèmes, est hélas de plus en plus répandue dans nos sociétés ; ainsi, notre ministre de l’écologie vient de décider d’étendre le dispositif des Zones à circulation restreinte à 35 villes supplémentaires au motif, qu’un jour, peut-être, la commission européenne le demandera !

  • Je me découvre de plus en plus une pensée libérale, mais j’ai quand même une question qui persiste.

    La course au profit débridée comme unique objectif des entreprises peut être bien responsable de problèmes dont les individus seul et atomisé que sont les clients ne peuvent éviter.

    Je prends l’exemple de l’industrie agro alimentaire, comment un individu seul peut il lutter pour mieux manger si il est lui même entrepreneur et à un autre travail qu’agriculteur ?

    D’autant plus que cet article sous tends une bienveillance des actionnaires (ou au moins une non malveillance) dans l’utilisation qu’ils feront de l’argent que les RSE taxe. Mais on sait aussi que ces même actionnaires peuvent parfaitement mépriser la vie humaine, concourir à sa destruction à grande échelle et s’acheter un yacht avec l’argent ainsi gagné.

    Qu’en pensez vous ?

    • « Je prends l’exemple de l’industrie agro alimentaire, comment un individu seul peut il lutter pour mieux manger si il est lui même entrepreneur et à un autre travail qu’agriculteur ? »
      Le consommateur n’est pas obligé d’être seul. Il peut se regrouper en associations de consommateurs. Les consommateurs peuvent aussi prendre l’initiative de se concerte pour tous envoyer une lettre avec accusé de réception au service de communication de l’entreprise pour leur faire part de leur mécontentement. Dans l’ensemble il est quand même bon de se rappeler que le client est roi et que les médias (pas tous malheureusment) représentent un contre pouvoir. Prenez l’huile de palme par exemple: Ce sont bel et bien les consommateurs qui ont demandé à ce que ça change. L’Etat a voulu se faire plus royaliste que le roi en légiférant mais dans l’ensemble les consommateurs n’en veulent plus et évitent ce produit dans la mesure du possible. Je ne parle pas de l’aspect rationnel ou pas des objections à l’huile de palme mais du pouvoir des consommateurs.

      La moralité des actionnaires n’est pas au delà de tout soupçon. Je ne pense pas qu’on vous soutienne le contraire. Mais ils sont à priori innocents comme tout le monde. A l’inverse les hommes politiques qui mettent en place les taxes sous couvert de responsabilité sociale des entreprises ne devraient pas bénéficier du même à priori à mon sens puisque déjà ils réclament de la coercition (tu payes les taxes ou j’envoie la police) contre des personnes ou des personnes morales sans même pouvoir trouver une victime directe de leurs actions.

      Parce que quand il y a des victimes directes, pas besoin de taxes. Une simple plainte au commissariat suffit à lancer une procédure judiciaire si la plainte est suivie par le parquet.

      Il y a beaucoup à dire sur la responsabilité réelle des entrepreneurs, sur lorsqu’ils avancent dans des milieux extrêmement régulés et légiférés comme aujourd’hui.
      Prenez la norme ACS par exemple (Accreditation de conformité sanitaire, une norme qui s’applique aux pièces de plomberie en contact avec l’eau potable pour soit disant éviter l’empoisonnement des consommateurs). Pour obtenir un ceertificat ACS « accessoire » (par opposition à un ACS « matériau ».) il faut que plus de 50% de la surface des pièces en contact avec l’eau potable soit faite de matériaux certifiés ACS. Suite à quoi on peut procéder au test de « migration » où on vérifiera la quantité et la qualité du transfert de matière depuis l’accessoire vers l’eau q’il contient.
      Pour que cette surface soit de plus de 50% de matériau certifié, certains industriels ont rajouté des pièces biscornues, faites de matériau certifiés qui amènent la surface en contact avec l’eau au niveau minimum requis. Cette pièce ne peut apporter QUE des problèmes. Elle ne peut pas rendre l’accessoire certifié moins dangereux. Elle augmente la contamination de l’eau par les matériaux de synthèse même si ce n’est que d’un niveau epsilonesque (les matériaux certifiés sont en général certifiés pour de bonnes raisons). Mais au final, l’entreprise a conçu une pièce plus chère, et moins qualitative précisément pour entrer dans les normes de l’Etat. Peut on reprocher aux industriels d’avoir fait ce choix au lieu d’avoir produit un produit encore plus cher et constituée uniquement de matériaux certifiés? La concurrence leur laisse elle le choix? Les consommateurs savent ils que ces choix discutables sont justement guidés par les décisions de l’Etat?

      Ce que j’essaye d’expliquer c’est que l’action de l’Etat est contre productive sur plusieurs niveaux:

      1.les consommateurs s’endorment et oublient leur responsabilité de consommateurs en imaginant que Saint Etat fait le boulot à leur place. En toute chose l’attentisme est néfaste.
      2.Les entreprises focalisent leur efforts sur le fait de jouer avec les règles légales plutôt que sur la satisfaction réelle du consommateur.
      3.Les normes ont de fortes chances de profiter aux acteurs déjà établis qui ont les clés de ces normes et la capacité financière de payer l’investissement administratif et de R&D pour s’y conformer. C’est donc une barrière supplémentaire à la création de nouveaux concurrents. Ces normes sont donc très inflationnistes et représentent une quasi-taxe. Peu importe que l’on justifie ça par des bonnes intentions de santé publiques ou de compensation des externalités négatives. La vérité c’est que ces dépenses ne sont pas justifiées par des négociations entre individus libres. Ce sont des dépenses issues de la spoliation. Et croire que la spoliation peut servir « le bien collectif » est une opinion m’a l’air naïve et je laisse aux dragons de vertu-morale-appliquée-au-pognon-des-autres. Les hommes politiques et les hauts fonctionnaires ne sont pas plus moraux que les actionnaires des entreprises. J’aurai même tendance à croire qu’ils le sont moins.

  • Je me permet une analogie; la France est une grande entreprise qui n’applique plus que la responsabilité sociale en priorité sans s’intéresser à remplir ses caisses par le travail. Lorsque la France fonctionnera comme une entreprise cherchant à faire d’abord du bénéfice et seulement après du sociale au pro rata, alors, nous serons rassurés pour l’avenir de nos enfants et petits enfants. Malheureusement, le RSE est en train de tuer nos entreprises et donc la France…

  • C’est à la fin du marché…

    En ce moment, je lis des articles enflammés sur l’lectionde lula au brésil sauveur de planete et tout et tout…
    j’aode ..
    d’abord, les conferences de presse qui promettent la lune.. grace à des mesures dites anticapitalistes..
    puis…un constat qui débouche sur l ‘incomprehension des enthousiastes initiaux..
    mais qu’est ce qui a pu foirer?
    à quel moment les capitalistes ont ils fait foirer le plan par méchanceté?

    ah! si moi! j’avais été pdg de DANONE (ou en charge de la politique environnementale du brésil..ou du plan quinquennal..)

    on entend moins parler du vénézuela…
    1981.. nationalisation on ne peut pas faire plus anticapitaliste et entreprise à mission..
    sri lanka.. qui coche toutes les bonnes cases idéologiques..
    ben zut alors..

    AU cas ou un anticapitaliste vient sur contrepoint..
    le capitalisme c’est des paysans qui élèvent des vaches pour vendre le lait.. ils ont de l’experience et donc un capital humain..
    les vaches constituent une autre ne part de leur capital…la terre et le savoir faire enfin..
    le paysan s’occupe de la vache car il en tire un profit personnel, son amour de la vache est secondaire.. mais le fait qu’il soit paysan prouve son savoir faire.. ce n’ets pa sun idéologue..il n ‘obéit à aucun système si ce n’est de nourrir au mieux sa famille…

    vient la fée collectiviste méluchine.. si le lait est cher c’est que le paysan nous escroque..
    la vache n’est plus la vache du paysan… la terre. lui est confisquée..son savoir faire méprisé..
    d’après vous ami anticapitaliste ( privé)
    que va til se passer?

    le système laitier collectiviste va il faire MIEUX?

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Par Patrick Carroll.

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Par Michel Villette.

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