Par Jean Rochn.
L’Éducation nationale en France est une corporation qui se désintéresse de sa mission. Les chiffres le montrent clairement.
En 2020, selon le ministère, l’Éducation nationale c’est, en chiffres :
- Nombre d’élèves…………………………………………. 12 352 200
- Nombre d’enseignants………………………………….   1 162 850
- Nombre d’enseignants en poste……………………..     866 500
Pour un budget annuel de 153 milliards pour 15 Ã 18 heures hebdomadaires d’enseignement.
Il n’y a pas assez d’enseignants
Une première analyse nous montre que sur 1 162 850 fonctionnaires, seulement 866 500 enseignent. Restent donc 296 350 fonctionnaires, soit 25,5 % qui n’enseignent pas. Cela fait beaucoup d’encadrement et de contrôle !
Une deuxième analyse nous montre que 866 500 fonctionnaires enseignent à 12 352 200 élèves.
En moyenne, il devrait donc y avoir :
12 352 200/866 500 = 14,3 élèves par classe si les enseignants donnaient des cours 100 % de leur temps. Ce chiffre tombe à 12,2 élèves par classe si 50 % des 296 350 fonctionnaires non enseignants sont transférés à l’enseignement.
D’autres tâches liées à l’enseignement doivent être comptabilisées :
- Correction des contrôles de connaissances : 5,5 % du temps, 1 heure pour 18 heures de cours.
- Formation pédagogique : 5,5 % du temps (soit 5 jours par an comme dans le privé)
- Préparation des cours : 11 % du temps. 2 heures hebdomadaires semblent suffisantes pour quelqu’un qui enseigne depuis au moins 4 ans.
- Tâches administratives (réunions avec les parents d’élèves, conseils de classe trimestriels…) : 11 % du temps, soient 9 heures par mois.
On obtient ainsi une moyenne de 33 % du temps pour les activités hors enseignement. Le nombre d’élèves par classe passe ainsi de 14,3 à 19.
Or, selon l’Éducation nationale, le nombre d’élèves par classe s’élève à :
- Pré élémentaire………….. 24
- Élémentaire……………….. 22,1
- Collège………………………. 25,6
- Lycée professionnel…….  18,3
- Autre lycée…………………  29,7
En dehors des lycées professionnels, on est très loin du compte.
On peut ainsi déduire le temps moyen passé par un enseignant à faire autre chose que les activités pour lesquelles il est rémunéré :
- Pré-élémentaire………. 21 %
- Élémentaire……………. 14 %
- Collège…………………… 25,7 %
- Lycée professionnel….. 0 %
- Autre lycée………………. 36 %
Et une des revendications de la corporation est le manque d’enseignants ! Toujours entendue par les gouvernements socialistes, François Hollande a augmenté leurs effectifs de 60 000 personnes.
Les enseignants ne sont pas assez payés
Selon les chiffres de l’Éducation nationale, les enseignants exercent leur métier entre 15 et 18 heures par semaine. Si on ajoute les 33 % de tâches supplémentaires précédemment calculées (préparation, correction…), ils travaillent 23,9 heures par semaine en moyenne pour 18 heures de cours donnés, loin des 35 heures légales.
Selon le calendrier, il y a eu 35 semaines de cours en 2020.
Les enseignants travaillent ainsi 35 x 23,9 = 838 heures par an.
En comparaison, un jeune ingénieur qui entre dans le privé travaille 1950 heures par an hors heures supplémentaires non payées car il est au forfait cadre. Son salaire de débutant est de 3000 euros (décile supérieur) brut par mois dans une grande entreprise et hors primes (qui est pour information de 8 %), soit 2250 euros net.
Nombre d’heures travaillées par an
- Enseignant…….  838
- Ingénieur………. 1950
Salaire débutant net mensuel
- Enseignant agrégé *…………. 1984 euros
- Enseignant non agrégé*…… 1757 euros
- Ingénieur……………………….. 2250 euros
Salaire horaire
- Enseignant agrégé*…………… 28,4 euros
- Enseignant non agrégé*…….. 25,2 euros
- Ingénieur…………………………. 13,84 euros
* Année de la titularisation et hors prime. Écart de 15 % entre les salaires brut et net dans le public, et de 25 % dans le privé.
Un enseignant a donc un salaire horaire près du double de celui d’un ingénieur. Nos enseignants sont-ils vraiment mal payés ?
Contrairement à un ingénieur, on notera que même « mal payés », nos enseignants ne quitteraient pour rien au monde leur corporation. Les ingénieurs sont davantage motivés par l’intérêt du travail qu’ils ont choisi qu’en faire le moins possible.
Pour l’anecdote, évoquons les enseignants-chercheurs qui tiennent le haut du pavé : 288 heures de cours par an, soit sur 35 semaines, huit heures de cours hebdomadaire. Il est vrai que le reste du temps, ils cherchent. Le seul problème, c’est que comparativement à leurs homologues américains, chinois ou coréens, ils ne trouvent rien. Ce système est la risée du monde entier :
« En France on trouve beaucoup de chercheurs mais on cherche les trouveurs ».
Les enseignants travaillent dans l’intérêt des enfants et les résultats sont bons
Tous les quatre ans, les performances de l’enseignement de chaque pays sont relevées via trois tests au niveau mondial :
- Le PIRLS maîtrise de la langue
- Le TIMSS mathématiques
- Le TIMSS sciences
À l’issue de ces évaluations, chaque pays reçoit une note représentative du niveau des élèves. La moyenne mondiale des notes est de 500. Plus la note se situe au-dessus de 500, plus le niveau des élèves est élevé.
Les résultats comparatifs de la France sont résumés dans le tableau suivant :
En 2016 (résultats obtenus en 2019) | France | Moyenne UEÂ
(27 pays) |
Moyenne OCDEÂ
(28 pays) |
Moyenne Monde |
PIRLS (langue) | 511Â | 540 | 541 | 500 |
TIMSS (mathématiques) | 488 | 527 | 528 | 500 |
TIMSS (sciences) | 487 | 525 | 527 | 500 |
Classement PIRLSÂ
La France est juste au-dessus de 500. La Pologne, la Hongrie, la Tchécoslovaquie, la Bulgarie, l’Espagne, le Portugal… et même le Kazakhstan sont plus performants. La France se place 34e sur 50.
Classement TIMSS (mathématiques et sciences)
La France est en dessous de la moyenne. Elle est le dernier pays d’Europe, loin derrière la Turquie, et se classe en dessous d’un pays sous-développé.
Certains analysent ce mauvais niveau à cause du problème dans les quartiers. Mais l’Espagne, l’Angleterre et l’Italie rencontrent les mêmes difficultés.
Belle réussite de notre notre système éducatif porté par nos enseignants et un budget annuel de 153 milliards d’euros !
Le budget est insuffisantÂ
Le budget de l’éducation est de 6,3 % du PIB, le sixième plus élevé au monde en pourcentage. Tous les autres pays européens dépensent beaucoup moins mais ont des meilleurs résultats PIRLS et TIMSS.
En ce qui concerne les périodes de la petite enfance, du primaire et du secondaire, la France dépense 8000 dollars pour la petite enfance et 8000 dollars pour le primaire soit deux fois plus que la Turquie, et n’atteint même pas son niveau.
Les élèvesÂ
Durant les années 1980, François Mitterrand a décidé qu’au minimum 80 % des élèves de terminale devaient avoir le baccalauréat.
Deux solutions s’offraient à son gouvernement :
Augmenter le niveau des élèves
Les enseignants doivent s’investir dans l’intérêt des élèves et les parents doivent faire prendre conscience à leurs enfants de l’intérêt d’étudier pour leur avenir. Ce processus mis en place dans les pays asiatiques (Corée du Sud, Chine…) fonctionne parfaitement et permet l’ascension sociale.
Baisser le niveau de l’enseignement
Cette méthode démagogique fait croire aux parents et aux enfants que ces derniers ont le niveau pour suivre des études supérieures.
Mitterrand a opté pour le deuxième choix, son vrai objectif étant de diminuer les chiffres du chômage de l’époque car un étudiant n’est pas un chômeur.
Les gouvernements successifs ont bien compris qu’il était inutile d’augmenter les places en enseignement supérieur puisque plus de 60 % des bacheliers n’ont pas le niveau. Ils ont donc créé l’usine à gaz Parcoursup pour gérer ces 60 % de bacheliers qui finiront avec un profond sentiment d’échec. Ce dispositif crée ainsi des bacs + 5 toujours en première année de faculté de droit, d’histoire-géo ou autre. Les étudiants adhèrent à des syndicats pour faire la promotion de la médiocrité du communisme ou du wokisme pour retourner leur dépit contre la société qui les a leurrés.
Et l’enseignement supérieur
Jean-Michel Blanquer vient de résoudre le problème de ces bacheliers qui n’ont pas le niveau en introduisant des quotas de cancres dans les écoles. On commence par Science Po en supprimant les épreuves écrites d’admission pour ceux qui ne maîtrisent ni l’écriture ni la lecture. La seconde étape est de réserver des places dites de boursiers hors concours dans les grandes écoles pour des minorités n’ayant pas le niveau.
Mais la vie professionnelle concurrentielle n’a que faire de cancres diplômés. Les recruteurs ne prendront jamais ces bac + 5 qui ne savent ni lire ni écrire, ni parler correctement : ils créeront des tests de sélection à l’entrée. Et ces recalés crieront à la discrimination et l’ostracisme à l’embauche… ou bien finiront fonctionnaires.
Pourquoi aucune reprise en main par les différents gouvernements
La réponse tient en deux points.
Le veto des syndicats de la corporation s’élève contre toute tentative de mettre les enseignants au travail ; souvenons nous du mammouth de Claude Allegre.
Cette corporation représente un million d’électeurs actifs auxquels s’ajoutent au moins deux millions d’électeurs retraités. Avec leurs conjoints, cela représente environ six millions d’électeurs à flatter ; Anne Hidalgo l’a très bien compris.
Seul Nicolas Sarkozy a réussi le petit tour de force de casser leurs grèves : les Français n’étant plus pris en otage, les grèves de la corporation ont nettement chuté depuis.
Conclusion
Tous les points évoqués ci-dessus démontrent que l’Éducation nationale est une corporation.
Casser cette corporation est le seul moyen de rentabiliser les 153 milliards d’euros alloués à l’enseignement et d’élever le niveau de nos élèves. Mais aucun de nos gouvernements présents ou futurs n’est prêt à s’y engager pour des raisons clientélistes.
Pourtant, affronter la réalité, c’est rendre service aux élèves :
- Privatiser la fonction d’enseignant avec une rémunération au mérite.
- Effectuer annuellement des contrôles nationaux pour chaque classe afin de piloter l’évolution des niveaux.
- Remettre les matières élémentaires au centre de l’enseignement et au niveau qui doivent être les leurs.
- Promouvoir l’excellence.
- Orienter les élèves uniquement en fonction de leur niveau.
- Ramener le niveau du baccalauréat au niveau d’entrée dans l’enseignement supérieur.
- Faire payer l’année d’étude supérieure à tout redoublant sans excuse valable à son échec.
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