Lever les entraves à la libre circulation intra-africaine

Une plus grande liberté de mouvement encouragerait le commerce, le tourisme et les investissements entre eux.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Barrières et barbelés By: Frédéric BISSON - CC BY 2.0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Lever les entraves à la libre circulation intra-africaine

Publié le 30 octobre 2018
- A +

Par Alan Hirsch.
Un article de Libre Afrique

Le projet d’intégration africaine a franchi plusieurs étapes majeures en 2018. L’une d’elles était l’adoption par l’Union africaine (UA) d’un protocole sur la libre circulation des personnes, qui pourrait  incontestablement booster la croissance entre les pays africains. Une plus grande liberté de mouvement encouragerait le commerce, le tourisme et les investissements entre eux ; et permettrait aux étudiants d’étudier dans d’autres pays africains. L’ouverture du marché de l’emploi multiplierait les possibilités.

L’ouverture des frontières a eu des effets positifs dans d’autres parties du monde. Par exemple, la croissance de nombreux pays asiatiques est largement imputable à la libéralisation des relations inter-asiatiques, notamment par le biais d’un accord entre les pays de l’Asie du sud-est qui favorisait une plus grande mobilité des travailleurs. Certains pays africains ont eux aussi bénéficié des avantages de la libre circulation des personnes.

Les Seychelles, Maurice et le Rwanda ont réduit les exigences en matière de visa. L’un des effets a été une augmentation significative du nombre de touristes en provenance d’autres pays africains. Ensuite, la suppression des exigences de visa et même de passeport dans les blocs commerciaux régionaux en Afrique de l’Est comme en Afrique de l’Ouest aurait largement contribué à une augmentation de l’activité économique.

Quels obstacles à la libre circulation ?

Cependant, il reste des obstacles majeurs à surmonter avant d’atteindre la libre circulation sur le continent. Le plus grand frein provient des préoccupations des grandes économies du continent, telles que l’Afrique du Sud et les pays d’Afrique du Nord, où le taux de chômage est élevé et où on craint que l’immigration accrue ne contribue à accroître les tensions internes. On craint également que la libre circulation, si elle n’est pas bien gérée, puisse aggraver la fuite des cerveaux des pays les plus pauvres. En raison de ces préoccupations, entre autres, seuls 30 pays ont signé le protocole. C’est beaucoup moins que les 44 ayant signé l’accord de libre-échange continental africain.

L’UA reconnaît le manque de préparation de nombreux accords nationaux et continentaux qui permettraient une mise en œuvre immédiate et complète du protocole. Certains pays ont des systèmes d’enregistrement de la population et de passeport peu intègres, d’autres ont une gestion des frontières faible et d’autres des services de renseignements généraux insuffisants. Pour cette raison, la mise en œuvre a été divisée en trois phases :

  • droit d’entrée et suppression des conditions d’obtention de visas ;
  • droit de séjour ;
  • droit de résidence, qui comprend l’investissement et la création d’entreprise.

Les phases 2 et 3 ne seront pas mises en œuvre avant que celle de la première phase ait été évaluée. Mais de nombreux pays, en particulier les plus riches, hésitent même à entrer dans la première phase sans que certaines conditions soient remplies.

Les principales préoccupations concernent l’absence de mesures de coopération entre les États concernant les procédures d’immigration, la gestion des frontières, les systèmes éducatifs et la reconnaissance mutuelle des qualifications, des normes communes pour les conditions de travail et l’accès aux prestations de sécurité sociale.

L’Afrique du Sud, en particulier, a des problèmes avec toute une gamme d’exigences. Une note du ministère de l’Intérieur sud-africain identifie 12 conditions préalables à la mise en œuvre du protocole. Certaines d’entre elles sont irréalistes et idéalistes, comme la condition de « paix, sécurité et stabilité sur le continent ». Par contre, la moitié des conditions préalables semblent tout à fait raisonnables et compréhensibles.

Le ministère de l’Intérieur, par mesure de prudence, déconseille même d’adopter la phase 1 du protocole – le droit d’entrée et la suppression des visas pour les compatriotes africains – tant que certaines conditions ne sont pas remplies. Il est impératif d’améliorer les systèmes d’enregistrement de la population, d’établir des systèmes de gestion intégrée des frontières, de conclure des accords bilatéraux de retour et de renforcer l’application des lois au niveau national dans toute l’Afrique avant que la phase 1 ne soit appliquée. Notons que l’Afrique du Sud n’est pas la seule à adopter cette position.

Plusieurs autres pays d’Afrique du Nord et un ou deux autres pays africains plus riches font preuve des mêmes craintes et exigences. À l’instar de l’Afrique du Sud, la plupart des pays d’Afrique du Nord ont un taux de chômage relativement élevé et craignent d’aggraver la situation en accueillant massivement des citoyens de pays plus pauvres. Cela pourrait nourrir des tensions à l’égard des « étrangers » et renforcer des sentiments xénophobes. Il est peu probable que le Protocole progresse si les craintes ne sont pas réglées. Alors, comment l’UA peut-elle convaincre les pays sceptiques ?

Prochaines étapes pour des avancées concrètes

Une suggestion est que l’UA crée un comité technique pour traiter les problèmes soulevés et proposer des solutions concrètes. Une coordination africaine renforcée autour de l’enregistrement de la population, aboutissant finalement à une carte d’identité africaine ou à une carte d’identité standard africaine, constituerait un excellent moyen de résoudre ces problèmes techniques. Le comité technique pourrait se concentrer en premier lieu sur les obstacles à la mise en œuvre de la phase 1. Une fois cet obstacle franchi, il pourrait passer à la phase 2 et éventuellement à la phase 3.

Le comité technique doit disposer de ressources suffisantes en fonctionnaires et experts, à la fois pour atteindre ses objectifs et pour faire en sorte que les pays les plus riches croient que le comité progressera avec ou sans eux. Alors, ils ne voudront pas être laissés pour compte.

Sur le web

Voir le commentaire (1)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (1)
  • D’abord enrayer la corruption au lieu de l’alimenter et assurer une sécurité de fait quitte à être en contradiction avec certaines coutumes . Ne pas vouloir reconnaître que l’esclavage existe toujours sur le continent est une faute majeure . Les droits de l’homme – et de la femme – sont un et indivisibles .

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don
Origine de la querelle

À la toute fin du XIXe siècle, l’Afrique du Sud se compose de quatre colonies : le Cap, l’Orange, le Natal, et le Transvaal ; y vivent 2 700 000 indigènes, 311 000 Anglais, et 391 000 Hollandais.

Les rapports entre les différents groupes n’avaient, sans doute, jamais été simples. Les Hollandais s’étaient établis en 1652 au Cap. Vers la fin du XVIIe siècle, ils avaient été rejoints par quelques huguenots français réfugiés. En étendant sa domination, cette population bigarrée, pas toujours pacifique, s’opposa aussi... Poursuivre la lecture

Fin mai, près de 28 millions d’électeurs sud-africains se rendront aux urnes pour élire leurs représentants aux Parlements provinciaux et national. Cette septième élection générale démocratique pourrait marquer un tournant historique, avec la possibilité pour l’African National Congress (ANC) de ne pas atteindre la majorité absolue pour la première fois en trois décennies.

 

Le 29 mai, l’Afrique du Sud est appelée à renouveler son Parlement national et ses assemblées provinciales. Pour la première fois depuis la fin de l’ap... Poursuivre la lecture

En Afrique du Sud, dans la ville d'Ogies, située près de Johannesburg, se trouve une réserve de pétrole brut longtemps oubliée, appartenant à l'État sud-africain. Six à huit millions de barils y sont encore enfouis sous terre, dans une ancienne mine à charbon, après avoir été stockés par le régime de l'apartheid à la fin des années 1960. Cette réserve pourrait rapporter environ 500 millions de dollars américains à l’État. S’il arrivait à remettre la main dessus…

 

Retour sur l'affaire d'Ogies

Le South Africa’s Strategic Fue... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles