CumEx : des « révélations » sur la finance mondialisée, vraiment ?

Après le « Panama Papers », CumCum et CumEx débarquent à grands renforts de « la finance, tous des pourris ». Le point sur la réalité.

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CumEx : des « révélations » sur la finance mondialisée, vraiment ?

Publié le 22 octobre 2018
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Par Eddie Willers.

À la manière du marronnier de TF1 sur la rentrée scolaire, Le Monde nous sort chaque année, à l’automne, des révélations sur la finance mondialisée mangeuse de petits chatons. L’an dernier, les Panama Papers avaient fait pousser des cris d’orfraies à Pierre Moscovici, cette année les CumCum et CumEx débarquent à grands renforts de « la finance, tous des pourris ».

Que sont donc CumCum et CumEx ? CumCum est un système d’optimisation fiscale au travers duquel un actionnaire français transfère ses titres de propriété juste avant la tombée d’un dividende à un prête-nom étranger et le récupère, accompagné du montant du dividende, après le versement. De cette manière un actionnaire français évite de payer les 30 % de prèlèvement forfaitaire unique.

CumCum est donc une pratique légale qui s’appuie sur la complexité du maelström fiscal français pour en trouver des failles. La non-imposition sur les dividendes de certains actionnaires étrangers constitue une forme de niche fiscale. De la même manière que certains contribuables diminuent leur assiette imposable en réalisant des travaux de rénovation de leurs biens immobiliers, certains actionnaires français cherchent à optimiser leur paiement de l’impôt.

CumEx constitue lui, en revanche, une pratique illégale. Au moment du versement du dividende, trois personnes s’entendent pour procéder à de très nombreux transferts de propriété d’un même titre. De cette manière l’administration fiscale est relativement dans le flou quant à savoir qui est le réel actionnaire au moment du versement du dividende.

En tant qu’investisseurs étrangers, certains peuvent demander un remboursement de leurs taxes sur les distribution de dividendes. Ils vont donc tous les trois demander le remboursement de leurs taxes sur les dividendes. L’administration fiscale étant dans l’incapacité de suivre qui est le réel actionnaire, elle va rembourser trois fois le montant des taxes.

La complexité de cette opération est tout de même relativement faible et s’apparente grandement à une forme de fraude à la TVA : on crée une société et l’on reçoit des paiements de prix HT + TVA, on vit à grand train sur le dos de sa société et on se met en liquidation pour éviter de devoir payer la TVA à l’État. Cette pratique est malheureusement connue et de très nombreux dirigeants sans scrupules y ont recours.

Pour ma part, je trouve donc ces révélations très décevantes : elles entretiennent la confusion entre optimisation et fraude fiscale, les mécanismes d’optimisation et de fraude sont d’une relative simplicité et nous parlons de sommes dérisoires.

Pour CumCum qui est, encore une fois, une pratique légale née de l’incapacité des pays européens à créer un système fiscal simple et cohérent : 42 milliards d’euros. Pour CumEx qui est la réelle pratique mafieuse dénoncée par Le Monde : une dizaine de milliards répartis entre plusieurs pays européens sur plusieurs années. Bien que les montants des fraudes fiscales soient par nature difficile à évaluer, une note fiscale de Bercy publiée en 2015 nous indiquait que la fraude à la TVA atteignait 17 milliards d’euros par an rien qu’en France !

Loin de moi l’idée de vouloir banaliser une pratique mafieuse, je souhaitais simplement mettre en perspective les « révélations » du Monde qui me paraissent un peu trop montées en épingle afin d’entretenir le rythme régulier des publications contre la « finance mondialisée ».

Quand on sait que la France vient de dépasser le cap symbolique des 1 000 milliards d’euros de prélèvements obligatoires cette année, chercher à réduire ces prélèvements constitue presque une mesure de salubrité publique ; une manière de lutter contre un État qui mange à tous les râteliers et dépense sans compter.

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  • A partir d’un constat que plus l’impôt et taxes ect…sont élevés et automatiquement vous creer la fraude et les paradis fiscaux …Que certains lorsqu’ils sont dans l’opposition le constate et le dit :..ex :: bruno le maire et lorsqu’il est ministre en fonction des finances et fait le contraire , c’est prendre les
    gens pour des imbéciles… Il est complice de ce systeme maffia…et que des fonctionnaires de Bercy qui deviennent des avocats experts en finance … même un menbre de la Cour des Comptes qui donne un avis et conseil devient un ministre des finances et fait les même travers !! la connerie a de l’avenir …. moscovisi le redresseur des économies de l’Europe …. quel est son bilan au finance en france ??? nul…. l’incompétence atteint un sommet !!! je ne vois pas d’ autres mots … usurpateur de la fonction.. ils devraient être condannés !!

  • Cumcum est également illégal aux yeux de la législation fiscale, s’agissant d’ « un montage financier destiné exclusivement à éluder l’impôt », ce qui est très différent de la recherche de la voie la moins imposée ( par exemple, vente des titres un ou deux mois avant la date ex-dividende pour racheter d’autres titres, ce qui conserve donc une part de risque ). Le succès de Cumcum tient à la difficulté, pour le fisc, de repérer ces manoeuvres, hors contrôles fiscaux approfondis. Pour Cumex, c’est plutôt le temps et les moyens de réaction de l’administration qui sont en cause.

    • On n’a pas le droit de monter un système légal pour échapper à l’impôt. Réfléchissez à l’absurdité de cette loi…

    • le fisc peut toujours juger que c’est de l’abus de droit et redresser ! Pouvoir exorbitant (mais bien français).

    • Trop cogner sur Cumcum aura des effets négatifs et non bénéfiques.
      Certaines sociétés ne distribuent pas les bénéfices. Les GAFA par exemple ❗
      Vous voulez aider ceux que vous décriez ❓ Fastoche : cognez dur sur Cumcum, et les actionnaires feront le tri dans leurs actions.
      Messieurs les polytocards, voilà un défi : se battre contre les GAFA ou contre Cumcum, il faut choisir. Quel est votre choix « éclairé » ❓ Et veuillez justifier votre action ❗
      Je sens que l’on va rire 🙂

  • Même le fameux Keynes, référence des étatistes, a écrit :

     » Éviter de payer des impôts est la seule recherche intellectuelle gratifiante. « 

  • Le grand mathématicien arabe Al Khwarizmi » (Al Juarismi) sur la valeur de l’être humain, il a répondu: Si cette personne a une éthique, sa valeur est égale à 1. Si elle est intelligente, ajoutez un zéro et sa valeur sera de 10 …. Si en plus, elle est riche, ajoutez un autre zéro et ce sera de 100 … Si en plus de tout ça, c’est une belle personne, ajouter un autre zéro et sa valeur sera de 1000 … Mais si elle vient à perdre le 1, qui correspond à l’éthique, elle perdra alors toute sa valeur, elle n’aura plus rien … seuls les zéros 000 resteront….

  • L’évasion fiscale préserve la liberté des citoyens en asphyxiant le budget de l’État. Ceux qui la pratiquent n’en profitent pas seulement eux-mêmes, ils rendent service à toute la collectivité en freinant la prolifération des bureaucraties. – Christian Michel

  • Je suis ingénieur Fi, et ai bossé 3 ans dans un hedge Funds. Je peux vous assurer qu’il est impossible de ne pas savoir qui est éligible au dividende. Un trade entre deux parties fait intervenir tellement d’intermédiaires qu’il est très peu probable de pouvoir corrompre toute la chaîne. Aussi, le paiement n’a jamais lieu le jour même de l’Ex-date, mais facilement deux semaines plus tard, histoire que suffisamment de temps soit laissé pour déterminer qui est propriétaire de quoi.

    Toutes les informations sont là, pour déterminer qui est le propriétaire de l’action qui paie un dividende à la clôture du marché. Les Fiscs font preuve d’un certain laxisme ici, probablement non volontaire. Une simple mise à jour de leurs systèmes d’information résoudra le problème.

    Un simple calcul révèle que CumEx a généré un manque à gagner fiscal d’environ 50 millions par état (10 états) et par an (9 milliards, sur 10 états, sur 17 ans). Une paille, et le fisc français ne s’en cache pas, en annonçant que le phénomène n’a pas d’ampleur inquiétante.

    Bref, rien de nouveau sous le soleil. Le fisc a des outils vétustes, et des margoulins en profitent. La réalité étant certainement que la mise à jour des systèmes coûtera davantage que le pécule que ça rapporterait. Un tapage médiatique est sans doute plus efficace pour enrailler la méthode.

  • Explication intéressante. Mais:
    1-Je note en passant que l’intérêt général bafoué illégalement à grande échelle au niveau européen par les « tiers de confiance » que sont les banques ne fait pas sourciller la classe politico-médiatique. Mais qui donc manipule l’Union Européenne ?
    2-Cela dit, il est abusif de comparer l’optimisation fiscale, pratiquée par des banques et leur armée d’avocats fiscalistes en vue de gagner de l’argent sans être taxé, avec la réduction d’impôt pour économies d’énergie où le particulier investit sans jamais rentrer dans ses frais.

    • Quel est l’intérêt général ? Avant de parler de l’avoir bafoué, il conviendrait de l’identifier précisément. Or si la fiscalité allait dans le sens de l’intérêt général, ça se saurait et ça se verrait, en particulier en France où nous serions donc les champions de l’intérêt général…
      En ce qui concerne l’imposition des dividendes, l’intérêt général serait manifestement qu’ils soient exonérés : la contribution aux charges communes est payée par la société avant que les profits soient distribués en dividendes, et le remploi que font les actionnaires des dividendes qu’ils perçoivent est incomparablement plus utile que celui qu’en fait l’état.

      • N’oublions pas qu’un dividende n’est qu’ un transfert de valeur, d’une source non fiat : la valeur de l’action, reflet de celle de l’entreprise, vers une médium de change, le fiat.

        L’individu qui reçoit un dividende ne s’enrichit donc pas. Ce qu’il gagne en dividende, il le perd sur le cours de l’action. Sachant cela, taxer un dividende devient aberrent.

        • Tout à fait !
          C’est même taxer la liberté, puisque si la société conserve l’argent et décide à votre place de ce qu’elle en fait, vous ne payez rien, mais si vous recevez le droit d’en décider vous-même, vous payez l’impôt.

        • Le dividende qui n’est pas versé se transforme en plus-value latente qui sera aussi amputée de 30% au moment de la cession.
          Quoiqu’on fasse l’Etat finit toujours par empocher bien assez pour casser l’industrie et le commerce.

    • En analysant le contexte de la convocation de l’intérêt général dans les propos de Vudubar, on comprend mieux à quoi correspond la notion d’intérêt général pour les bureaucrates et autres ponctionnaires.

      Pour eux, tout ce qui est collectivisé est strictement égal à l’intérêt général. Ce qui entre dans le domaine public, c’est l’intérêt général. Ce qui reste dans le domaine privé, ce n’est plus l’intérêt général. Ainsi, l’intérêt général se réduit-il à la spoliation étatique, ni plus ni moins.

      Effet secondaire, ce qui est collectivisé devient immédiatement sacré au nom de l’intérêt général. Hors de question de jamais renoncer, de jamais reculer. C’est l’équivalent fiscal de l’effet cliquet en politique. Par conséquent, la collectivisation ne peut que progresser, étape après étape, jusqu’à concerner 100% de la richesse produite un jour prochain.

      En revanche, dans cette vision du monde merveilleusement simpliste, savoir d’où viennent les richesses produites, richesses que l’Etat pourra ensuite taxer, n’a vraiment aucune importance puisque les individus sont contraints de produire s’ils veulent vivre. Du fait de la contrainte de la nature humaine, il y aura toujours quelque chose à spolier.

  • j’avoue ne pas comprendre
    une société qui attribue un dividende est automatiquement taxé forfaitairement sur celui-ci
    le bénéficiaire reçoit également une attestation de la taxe payée, qui ,une fois le dividende incorporé à sa déclaration d’impots, ou pas d’ailleurs, lui laissera ou pas le choix de demander le remboursement du « trop perçu »
    si le dividende est payé à l’étranger,par un déclarant du pays, il sera soumis aux lois fiscales du pays;
    pour toucher le dividende net, et obtenir le remboursement il faudra donc que le pays choisi exonère les dividendes?
    Mais je ne connais pas de cas, où le dividende attribué n’est pas taxé au départ?

    • Il existe des accords entre pays.

      Exemple : une entreprise de trading UK détenant des actions HK ne paiera pas de withholding tax sur ses dividendes. Du coup, l’entreprise UK sera uniquement taxée sur ses profits en fin d’année. Idem pour le Canada, dans la taxe est de 25% de manière générale, et réduite à 15% pour les entreprises anglaises. Vous pouvez donc réclamer 10%.

      L’Australie propose aussi un système à part entière, ou le dividende est plus ou moins exonéré de taxe (30%/50%/100% franked dividend), etc. Il existe moult systèmes, et moult arrangements entre états.

      Demander un remboursement de la withholding tax (car c’est de ça dont il est question) est un processus relativement long, pouvant varier de qq semaines, à plusieurs mois, voire années dans certains cas (Italie, par exemple). Il est très facile d’y perdre son latin ; une bonne gestion de cette arborescence de possibilités nécessite donc 1/ une connaissance des différentes législations 2/ un système d’information robuste.

      J’ai ma petite idée concernant les fiscs sur ces deux points.

      • bien sur, les dispositions fiscales changent suivant les pays, mais ici, on parle du fisc français, qui taxe des dividendes de sociétés déclarantes en France non?
        si en tant que français, vous avez des actions de sociétés dans des pays étrangers, les dividendes seront taxés dans ces pays, suivant leur réglement, mais le fisc français se bornera à vous obliger à déclarer ces revenus, les taxes perçues ou non à l’étranger ne reviennent pas dans le giron français.
        Et que je sache, lorsque vous vous présentez dans une banque européenne , pour encaisser des dividendes, vous serez clairement identifié, société ou pas
        A part tenter de demander le remboursement des précomptes établis, je voispas très bien comment un dividende établi à partir d’une société imposable en France pourrait échapper à l’impôt?

        • Certaines sociétés à statuts particuliers peuvent sans doute bénéficier d’exemptions. Par exemple, les entreprises de market making UK sont exemptées de stamp duty sur chaque trade.

          Ou bien un montage financier via CFD impliquant une entreprise dans une pays ayant un accord fiscal avantageux vis-à-vis des dividendes français.

          Par exemple : https://www.info.gov.hk/gia/general/201010/21/P201010210162.htm

          Passer de 30% à 10%, c’est déjà pas mal.

        • J’ai cru comprendre qu’une des astuces était d’acheter des titres étrangers le jour du détachement du dividende (trop tard pour le toucher), puis de demander le remboursement du de la part d’impôt (supérieure à 15 % au nom des conventions limitant les doubles impositions). Pour cette demande vous fournissez un décompte de vos titres ; et donc vous prouvez qu’à la date du dividende vous étiez en possession des dits titres, et bien que vous n’ayez pas perçu les dividendes le fisc étranger vous verse la part dépassant les 15 %…

          • Ceux qui versent les dividendes savent très bien trouver les bons destinataires. Mais les administrations, elles, n’en sont pas capables. Une solution évidente : les administrations fiscales cessent de se mêler des versements de dividendes !

            • les administrations les plus pragmatiques se « contentent » de ne pas taxer au dessus de 15 % et s’évitent la paperasse des remboursements.

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