Par Louis-Marie Kakdeu.
Un article de Libre Afrique
Dans l’imaginaire politique, il est très répandu qu’il faut octroyer des subventions aux agriculteurs pour soutenir la production. Ainsi, d’un pays à l’autre, l’on subventionne l’agriculture sous plusieurs formes, mais toujours en vain. Dans les faits, l’agriculteur n’est pas le principal bénéficiaire des subventions et l’agriculture africaine n’est toujours pas compétitive.
Par conséquent, le continent dépend massivement des importations alimentaires. Les projections de la FAO situaient en 2017 le coût des importations africaines à quelques 41 milliards de dollars, soit une hausse de 11 % par rapport au montant enregistré en 2016. De sont côté, la BAD estime que la facture pourrait grimper à 110 milliards à l’horizon 2025. Pourquoi les subventions ne marchent-elles pas ?
Des approches centralisées inadéquates
Beaucoup de bailleurs de fonds choisissent de subventionner les études préalables, ce qui s’est révélé inadéquat. Par exemple en 2013, la BAD a mis sur pied un Fonds pour l’accélération du développement agricole (FADA) qui octroie des subventions pour couvrir les coûts de conception des projets (études de faisabilité, études de marché, modélisation financière, développement de plan d’affaires et études d’impact environnemental et social).
Or, cela a très peu d’impact sur la productivité pour la simple raison que le marché africain, même à l’intérieur de chaque pays, n’est pas une réalité homogène qui nécessite une approche globale. En l’état, les bailleurs de fonds ont la prétention de remplacer les chambres consulaires des différents pays (chambre de commerce, chambre d’agriculture) qui ont la compétence au niveau local de mener des études pertinentes. Leurs études macro-économiques sont inadéquates pour la création des entreprises au niveau local.
Il convient plutôt de soutenir la structuration et l’autonomisation des chambres consulaires afin qu’elles puissent fournir des informations actualisées et pertinentes sur l’activité économique dans leurs localités respectives.
Des incitations à la recherche de rente
Au Cameroun par exemple, L’État fait de la concurrence aux chambres consulaires, ce qui les empêche de se déployer. En plus, de l’agence de promotion des investissements (API) et de l’agence de promotion des PME (A-PME), le gouvernement a créé au niveau central une quarantaine de projets chargés d’appuyer ou mieux, de « subventionner » un volet ou l’autre de l’agriculture africaine.
Au bout du compte, les agriculteurs boudent les chambres consulaires, adoptant le comportement rentier en réaction aux incitations de l’État. Ces projets ont complètement altéré le sens de l’entrepreneuriat dans la mesure où ils ont créé une dépendance des producteurs à vivre au rythme des financements.
En l’état, les agriculteurs sont devenus des « fonctionnaires » des différents projets au lieu d’être des entrepreneurs. Aussi, ils ne se rendent qu’aux ateliers de renforcement des capacités où ils sont payés (prise en charge totale) pour la simple raison que les bailleurs de fonds les ont habitués à faire de la participation aux ateliers un réel métier plus rentable que le travail de production. Au bout du compte, les producteurs les mieux formés ne produisent plus ; ils vivent au rythme de multiples sollicitations de projets qui les éloignent de leurs exploitations.
Il convient de mettre fin au paiement de la rente (perdiems) et de favoriser la participation des producteurs à leur propre croissance. L’idée de la gratuité de l’entreprise doit être remplacée par celle de l’autofinancement. Pourquoi ? Parce que de nos jours, la gratuité a poussé les participants à s’attendre à être payés même pour l’application des résolutions des ateliers auxquels ils participent. En clair, un projet de production subventionné s’arrête le lendemain de l’arrêt de la subvention. D’où la nécessité d’autonomiser les producteurs et de les responsabiliser pour voir décoller l’agriculture.
Des subventions nourrissant le clientélisme et la contrebande
De nos jours, les projets de production sont financés en amont. Cela veut dire que la subvention est versée au début de l’activité économique, créant des effets pervers dans la mesure où elle ne vient pas comme une bouffée d’oxygène mais, comme une rente. Au lieu de soutenir l’existant et d’agir sur les goulots d’étranglement, l’on développe plutôt un système de clientélisme qui conditionne l’obtention des facilités à l’octroie d’une contrepartie.
Ainsi, le producteur qui reçoit une subvention reverse une partie aux agents véreux, ce qui dans certains cas alimente des réseaux de trafics sur le marché. Cette pratique de clientélisme est la solution trouvée par les corrupteurs pour blanchir leurs pratiques de détournement de tout ou partie des subventions accordées. Pis, les subventions localisées sont une pratique de concurrence déloyale dans la mesure où elles créent le déséquilibre dans les échanges commerciaux.
Par exemple en 2014, la subvention d’engrais au Mali alimentait le trafic vers le Burkina Faso, ou encore au Ghana où les subventions des engrais ont nourri la contrebande frontalière. En 2018, c’est le Burkina Faso qui se retrouve dans ce cercle vicieux selon le Syndicat national des travailleurs de l’agriculture (Synatrag) : un détournement de 105 tonnes d’engrais et 31 tonnes de semences observé.
Une agriculture africaine subventionnée
D’un pays à l’autre, le problème reste le même à savoir que l’on subventionne en amont. La subvention est utilisée comme un moyen de financer l’agriculture et donc, d’octroyer le capital aux potentiels producteurs, ce qui crée des comportements opportunistes sur le terrain. Certaines associations proposent de subventionner en aval ou mieux de soutenir les exploitations existantes afin d’améliorer leurs productivités.
L’Association Citoyenne de Défense des Intérêts Collectifs (ACDIC) propose de subventionner sous forme de primes à la production. Cela veut dire que l’on est subventionné proportionnellement aux résultats atteints. Quel que soit le cas, nous pensons que la gestion doit être décentralisée et assurée par les producteurs eux-mêmes dans la mesure où ils maîtrisent au mieux leurs besoins, se connaissent mutuellement et sont aptes à mieux se contrôler. C’est d’ailleurs ainsi que fonctionnent leurs systèmes de tontines qui sont des fonds qu’ils constituent eux-mêmes et gèrent de façon autonome sans l’assistance de l’État.
En somme, nous disons que la subvention ne fait pas décoller l’agriculture africiane parce qu’elle est une rente inadéquate et clientéliste qui crée des incitations perverses conduisant à des comportements déviants. Pour être pertinente, elle doit cesser d’être un capital pour redevenir une mesure incitative à investir gérer par les producteurs eux-mêmes.
—
il manque 2 matières essentiels en Afrique :
Eau courante et Électricité…Et surtout rien n’est fait dans ce sens là. pour des raisons économiques pour freiner la concurrence agricole …. Maintenant le danger ce sont les chinois , ils investissent en force pour les matières premières…
pas d’eau , pas ou peu d’électricité….en revanche le secteur de la téléphonie mobile explose…..
non… ça ne suffit pas à l’expliquer..
et voir un investissement comme un danger est curieux, il faut en dire plus…
en général des accords ont été signés..là vous pouvez avoir des pièges et des abus..mais c’est le fait des gouvernants..
certes en France un élu peut se plaindre des clauses d’un accord qu’il a signé en connaissance de cause..
on doit parler de l’etat de droit…
non pas de subventions.. on connait..
un agriculteur cherche à gagner sa vie de mieux en mieux pas à augmenter la production ,ce qui n’est qu’un moyen parmi d’autre de le faire .
les subventions sont la plaie de l’agriculture européenne.
si vous croyez dans le potentiel et la compétitivité possible de votre pays..investissez apprenez et bossez…
d’ailleurs un agriculteur peut avoir l’option de changer de production pas de augmenter…il voir son profit et c’est très bien ainsi. et pour gagner sa vie, il peut aussi arrêter d’etre agriculteur..
rien d’évident à penser que l’autonomie alimentaire est une « bonne chose en soi. singapour…
Peut-être qu’il y a trop longtemps que je n’ai pas mis les pieds en Afrique, « mais de mon temps », les plus gros freins au développement de l’agriculture en Afrique étaient la concurrence déloyale faite, avec l’agrément des pouvoirs publics et tout ce que cela induit, par les produits importés qui empêchaient émergence des cultures vivrières.
Ces produits arrivaient subventionnés en amont par les pays producteurs, comme par exemple le riz et la viande, ou encore la concurrence dans les magasins de produits donnés avec « l’interdiction d’être vendus » par des organisations humanitaires.
Il ne s’agit pas d’interdire les échanges entre pays africains, mais d’interdire la venue sur ces marchés de produits sous prétexte d’aide à nourrir les populations. Et à partir de la, les productions et les marchés africains s’équilibreront d’eux-mêmes et il n’y aura plus besoin de subventions.
Très juste, on voit que vous êtes allé en Afrique et que vous avez constaté où est le problème. On a l’impression que l’on fait tout, y compris les politiques idiotes de subventions des pays africains, pour ne pas développer l’agriculture et les maintenir dans la dépendance!
oui…MAIS..subventionnés ou pas les produits; il faut pouvoir les acheter… alors de deux choses l’une une caste du pays corrompue se débrouille pour brader des ressources du pays telles des ressources minières ou bien comble du ridicule les denrées sont achetée en partie avec des aides des pays qui vendent ..ou par dette.. il me semble qu’il y a une parallèle à faire avec nos propres déficits commerciaux…dans une économie saine une entité ne peut pas acheter contre rien…
les esprits les plus mal placés peuvent imaginer que les pays européens ont conçu un projet pour maintenir l’Afrique dans le sous développement.. avec forcement un pillage de ressource ( parce que sinon..??) .mais je penche plutôt pour la stupidité de type socialiste..celle qui maintient NOS pauvres dans la pauvreté, politique qui permet aux politique de se donner le beau rôle et la possibilité d’etre corrompu.
A une époque on disait aussi que les vêtements envoyés par charité contribuaient à tuer les tailleurs locaux…
J’en profite pour répéter ici ce vieux dicton:
‘L’aide à l’Afrique c’est de l’argent pris aux pauvres des pays riches donné aux riches des pays pauvres…’
qui le dépensent dans les palaces des pays riches..
La seule solution d’aider les Africains: les empêcher d’avoir plus de 2 enfants, ils seront bien chez eux, auront à manger et seront plus heureux que chez nous.