Privilégier l’assistanat ne réduit pas la pauvreté

L’augmentation constante des dépenses sociales n’a pas fait disparaitre la pauvreté ; il est temps d’essayer autre chose.

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Le capitalisme profite aux pauvres By: Mike Maguire - CC BY 2.0

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Privilégier l’assistanat ne réduit pas la pauvreté

Publié le 13 juin 2018
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Par Daniel Hannan, depuis la Grande-Bretagne.

Comment en sommes-nous arrivés au point où il est devenu polémique de suggérer que le travail doit rapporter plus que les allocations ? Comment se fait-il que des aides supposées être limitées dans le temps et avoir un effet ponctuel soient devenues structurelles, plongeant des millions de personnes dans la dépendance ? Pourquoi les dépenses sociales ont-elles augmenté de manière soutenue durant plus d’un demi siècle tandis que des millions de personnes de tous les continents venaient travailler en Grande Bretagne ?

En bref, la réponse est que les classes ouvrières furent laissées à la gauche durant la plus grande partie de cette période. Les rares conservateurs pour qui la lutte contre la pauvreté était la principale préoccupation, ceux suivant les pas de Wilberforce, Shaftesbury, Disraeli et Montgomerie1, se sont rendus compte qu’ils œuvraient d’un contexte étatiste, dans lequel l’interventionnisme de l’État et la redistribution des richesses sont perçus comme les seuls moyens de tirer les gens de la pauvreté.

Iain Duncan Smith est le premier secrétaire d’État au travail à avoir reconnu l’échec d’une augmentation constante du budget social. Depuis la Seconde Guerre mondiale, le coût des allocations et des retraites a atteint des montants vertigineux sans qu’il n’y ait eu d’impact notable ni sur la pauvreté ni sur la réduction des inégalités. La raison de cet échec, bien qu’évidente une fois reconnue, contredit la vieille doxa de gauche : la pauvreté ne se réduit pas à un manque d’argent. Elle est en effet plutôt due à d’autres facteurs, par exemple un faible niveau d’instruction, le chômage, la drogue, un contexte familial difficile, un manque d’ambition. Il s’ensuit qu’on ne réduit pas la pauvreté en distribuant de l’argent aux pauvres. Pour prendre un exemple extrême, donner 1 000 £ à un accro à l’héroïne ne va pas améliorer sa situation. Iain Duncan Smith semble comprendre que, pour réduire efficacement la pauvreté, il est nécessaire de traiter ses causes profondes ; une partie de la solution est d’inciter les gens à trouver du travail. Comme John F. Kennedy l’avait remarqué il y a plus de cinquante ans, le chemin le plus sûr pour sortir de la misère est d’avoir un emploi stable.

David Cameron a signé il y a quelques années une superbe défense de ses réformes dans le Huffington Post, dans lequel il tire son chapeau au propos moral de Iain D. Smith. Il n’est pas fréquent de voir en politique de telles déclarations, mais Iain D. Smith est un ancien chef de parti qui ne cherche pas de futurs postes au gouvernement. Il souhaite simplement réparer un système en décomposition.

Il y a maintenant quelque chose de difficile à dire. Quel que soit le régime de protection sociale en place, il y aura des conséquences imprévues. Il y aura des gens méritants qui y perdront, et des gens sans mérite qui y gagneront. De plus, comme l’a observé Paul Goodman, nul n’aime réellement dépendre d’un système informatique de la rue Whitehall2. Mais, comme le dit le dicton, « hard cases make bad law »3, et citer des exceptions, aussi douloureuses soient-elles, ne discrédite pas une réforme. Cette semaine, c’était la première fois qu’un gouvernement britannique tentait réellement de restaurer un peu de décence, de responsabilité et, oui, de morale dans notre système de protection sociale.


Sur le web

Traduction : MXI pour Contrepoints.

Cet article a été publié une première fois en 2012.

  1. William Joseph Wilberforce fut un parlementaire anglais de 1784 à 1812 ; Anthony Ashley-Cooper, 7e comte de Shaftesbury, fut élu membre du Parlement en 1826 ; Benjamin Disraeli fut Premier ministre en 1868, puis de 1874 à 1880.
  2. Whitehall est une rue de Londres qui comprend plusieurs sièges de ministères ; c’est une façon de désigner le gouvernement. Un équivalent français serait « Bercy » pour désigner le ministère de l’économie.
  3. Littéralement : les cas extrêmes/difficiles font de mauvaises lois.
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  • Comment mesurer le travail quand le salariat est malade ?
    Je conviens de l’obsolescence des aides sociales, au moins dans leur format actuel, mais elles sont cohérentes avec le reste de la société. Nous vivons des moments remarquables, de nombreuses opportunités s’offrent à nous. Pourtant nous voyons nos élites fantasmer des années 50, c’est navrant.

  • Ce n’est pas tout à fait ce que conclut cette étude du Trésor Public: https://www.tresor.economie.gouv.fr/File/338143

    • Alors, si c’est le Trésor Public qui le dit, ben alors c’est qu’c’est vrai, alors !
      Y’en a encore qui croient aux publications officielles ?

  • « une partie de la solution est d’inciter les gens à trouver du travail »
    Oula, il a inventé la poudre celui-là. 30 ans de politiques sociales d’inclusion, depuis la prime pour l’emploi au Rsa… quel bilan ?

  • supprimer les sudventions aux entreprises..nous ne payons pas des impôts pour cela !!!! aussi bien par L’ÉTAT et les RÉGIONS. …que L’ÉTAT baisse l’impôt sur les sociétés au niveau de la moyenne en Europe…et revoir l’installation des entreprises en France …et ne pas continuer dans le système actuel qui créer une disparité. ..regions riche et Régions pauvre..

  • Ce que veut Macron et tous ces petits camarades ultra-capitalistes, ce sont des gens qui acceptent de travailler pour un salaire de misère parce qu’ils n’auront plus le choix, qu’ils devront rembourser leurs prêts, continuer de payer la maison, la voiture, les produits high tech, etc. L’idée étant de satisfaire grands patrons et actionnaires en trouvant des esclaves, mais des esclaves volontaires, beaucoup moins réfractaires à obéir, beaucoup moins subversifs. Tout le reste c’est du pipeau pour les masses endormies.

    • Les pauvres esclaves qui remboursent des crédit pour rembourser des prêts, acheter des produits HighTech et soyons fous, se nourrir et se loger. C est troporible.
      Ce serait effectivement mieux si les maisons et les voitures, les produits high-tech, la nourriture et le logement étaient gratuits.
      Le problème est que pour arriver à cela, il faut que les ressources soit gratuites, que les personnes qui produisent ne soit pas rémunérer. Bref il faut des esclaves.
      Vous la voyez la grosse incohérence de vos propos ?

  • « Inciter les gens à trouver du travail » ? Eh bien j’aimerai savoir où se trouve le travail pour que des millions de chômeurs dans la détresse ne l’aient pas encore trouvé.
    Que l’auteur de l’article aille se faire embaucher à Pôle Emploi et aide les chômeurs (« les incite ») à trouver du travail. S’il réussit cette prouesse je lui tirerai mon chapeau.

    • Le travail se trouve dans les entreprises, et il se trouve en se demandant ce qu’elles cherchent sans le trouver. Si les millions de chômeurs étaient effectivement dans la détresse, ça ne devrait pas leur échapper. Non que je souhaite les mettre dans la détresse pour qu’ils s’en rendent compte, mais on finit par se demander à quelle autre méthode ils voudront bien un jour être réceptifs.

    • Besoin de pôle emploi pour trouver un travail ? Quelle curieuse idée.

      • . »S’il réussit cette prouesse je lui tirerai mon chapeau. »

        En effet. Pôle emploi ne sert à rien, vous le dites vous même, trouver un emploi par ce biais est une prouesse.

        Par conséquent Êtes vous d accord avec moi pour dire que Pôle emploi ne sert à rien ?

        J’ai comme un doute….

  • Les commentaires sont fermés.

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