Deux mythes politiques français à démolir

Trois nouvelles études scientifiques apportent un démenti cinglant à deux mythes politiques qui ont cours actuellement et qu’il est important de pulvériser.

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Deux mythes politiques français à démolir

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 5 juin 2018
- A +

Par Claude Robert.

Abandonnons toute langue de bois et observons ce qui se passe concernant la réputation des deux derniers présidents français, Hollande et Macron. Tous deux sont taxés d’être ultra-libéraux par les électeurs de gauche et d’extrême gauche, tandis qu’ils sont accusés de poursuivre une politique socialiste (étatique) par les électeurs de sensibilité libérale. La situation est même encore un peu plus floue pour l’actuel locataire de l’Élysée dans la mesure où, bien que se disant du centre, une majorité de Français le classifie plutôt à droite.

De tels quiproquos ne sont-ils pas révélateurs d’un véritable embrouillamini politique si ce n’est moral ? Ne sont-ils pas la signature de messages volontairement flous de la part de nos gouvernants ? Ne trahissent-ils pas aussi et surtout une ignorance qui confine à la naïveté chez de nombreux citoyens ? Et d’ailleurs, qui est dans l’erreur ? Les gens de gauche ? Les centristes ? Les libéraux ?

Qui a raison, qui a tort ? Que disent les faits économiques ?

Tels qu’ils sont mesurés par la science économique, hélas tant décriée, les faits disent ceci :

  • Avec plus de 57% du PIB redistribué par l’État, non, la France ne peut pas être un pays libéral. Objectivement, positivement, concrètement, sans aucune hésitation possible et de manière indiscutable, l’hexagone est un pays étatisé, et visiblement le plus étatisé des pays riches de la planète. Et tant qu’un gouvernement se satisfait, voire aggrave cet état de fait, il ne peut être taxé de libéralisme, bien au contraire !
  • Justement, avec un taux de prélèvements obligatoires1 qui continue d’augmenter (chiffres INSEE 2017 récemment publiés), ni Hollande ni Macron ne se sont attaqués à la baisse de la pression fiscale2. Les gouvernements Hollande et Macron se comportent donc objectivement en gouvernements socialistes.

Après le double discours de Hollande, très axé sur les réformes sans les entreprendre (mais inévitablement liées au paradigme libéral dans l’inconscient collectif de la gauche), et très porté sur le social, en augmentant les dépenses keynésiennes (travers typiquement socialiste) ce qui permet de se draper dans le rôle si facile d’homme d’État généreux et social, le positionnement soi-disant centriste de Macron s’est avéré tout aussi trompeur.

À ce sujet, Luc Ferry répète à l’envi combien le centre constitue un danger, celui d’ensevelir les grands débats que la France devrait au contraire lancer en toute transparence sur :

  • d’une part le comportement à adopter dans un monde économique devenu ouvertement libéral,
  • d’autre part en matière de société face à des flux migratoires, une vague terroriste et une sorte d’idéologie d’autoflagellation vis-à-vis de cette chose honteuse qu’est devenue la culture et la nation judéo-chrétienne françaises…

Ainsi, pour résumer, d’un côté, les gens de gauche ostracisent tout ce qui ressemble à des réformes libérales, sous couvert que celles-ci sont violentes et inhumaines. De l’autre, les gens du centre se laissent manœuvrer dans une sorte de déni des problèmes économiques et sociétaux : ni libéralisme, ni conservatisme sociétal semble être leur devise par défaut.

Heureusement, dans ce concert de mystifications et de diabolisations, dans ce tintamarre de postures condamnatrices, dans cette course à la moraline et au déni qui caractérise le climat politique français actuel, certaines études scientifiques apportent un éclairage tout à fait salvateur.

À l’instar du sondage sorti des urnes en 2012 qui avait démontré noir sur blanc le tropisme politique des journalistes français, ce qui avait immédiatement stoppé les accusations de paranoïa vis-à-vis de ceux qui l’affirmaient depuis longtemps sans en avoir encore la preuve, ces études objectives sont une aubaine pour les personnes qui appréhendaient ce phénomène sans pouvoir l’étayer de façon tangible. Voilà qui est fait. Au passage, il est même permis de se délecter avec de telles analyses car elles remettent deux mythes puissants à leur juste place.

Intolérance et égoïsme à gauche !

Anne Muxel, directrice de recherche en sociologie au CNRS résume ainsi ce qui, à sa grande surprise, est ressorti de ses travaux publiés dans son livre : Toi, moi et la politique, amour et conviction :

Il y a une plus grande difficulté pour les personnes qui se classent à gauche d’accepter la divergence politique dans leur sphère privée, dans leur sphère intime, dans les échanges affectifs qu’ils ont avec les autres. (France Inter, 2/10/08)

L’auteure d’ajouter :

La culture de la droite suppose la liberté, la liberté de l’autre, la liberté à chacun de penser, de vivre et d’être comme il veut, davantage sans doute, et cela effectivement suppose une certaine, peut-être une plus grande ouverture.

À l’issue de ses travaux qu’il relate dans son livre Who really care, le spécialiste des sciences sociales Arthur Brooks a décelé quant à lui trois dimensions importantes qui déterminent le niveau de générosité des individus (en l’occurrence des Américains) : la fidélité à la religion, le nombre d’enfants, et la croyance en la suprématie du rôle de l’État en tant que re-distributeur de richesses. Cette phrase résume cette troisième dimension de façon très claire :

Ceux qui pensent que le gouvernement doit distribuer une plus grande part du revenu sont moins enclins à donner à des œuvres caritatives, et ceux qui pensent que le gouvernement a un rôle moindre en matière de revenu sont plus portés à la générosité. (Arthur Brooks – Who really care)

Là aussi, il s’agit d’une étude sociologique, chiffrée, basée sur des faits…

Désintérêt politique et autoritarisme au centre !

Plus récemment, les travaux de David Adler, chercheur en sciences politiques (cités par l’universitaire Vincent Tournier dans Atlantico 05/18), travaux basés sur une quinzaine de pays (dont la France) indiquent que les personnes qui se disent du centre sont nettement plus en faveur des régimes autoritaires que celles se disant des autres courants politiques3. La notion de démocratie se trouve beaucoup plus incontournable chez les électeurs appartenant aux partis de gauche et de droite qu’auprès des centristes, telle est la conclusion de ces travaux.

Parmi les causes détaillées par Vincent Tournier dans l’article de Atlantico, le désintérêt pour la chose politique n’explique pas tout. Il n’est certes pas surprenant qu’une part non négligeable des électeurs qui se disent du centre se caractérise par un faible niveau d’intérêt et d’information pour la chose politique. Mais même parmi les centristes qui ont développé un niveau de connaissance plus élevé dans ce domaine, la propension à souhaiter un régime autoritaire apparaît tout aussi clairement.

Ces trois études scientifiques apportent donc un démenti cinglant à deux mythes politiques qui ont cours actuellement et qu’il est important de pulvériser. Non, la gauche n’est pas moralement supérieure, et cache au contraire des sentiments parfois diamétralement opposés. Non, en se désintéressant des grands débats et en négligeant la démocratie, le centre n’est pas sans danger pour notre pays.

Sur le web

  1. « Les prélèvements obligatoires correspondent à l’ensemble des « versements effectifs opérés par tous les agents économiques au secteur des administrations publiques (…) dès lors que ces versements résultent, non d’une décision de l’agent économique qui les acquitte, mais d’un processus collectif (…) et que ces versements sont sans contrepartie directe » (Vie-publique, administration française).
  2. Même si une partie de cette hausse du taux de prélèvement obligatoire provient de la reprise de la croissance, il est évident qu’un gouvernement qui aurait fait de la baisse de la pression fiscale sa priorité n’aurait pas laissé ce chiffre s’aggraver neuf mois après sa prise de fonction.
  3. À la seule exception de l’ultra-droite.
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  • Quel est le niveau de dépenses publiques partir duquel un pays ne peut pas être qualifié de « libéral » ?
    Si un pays n’exerce que les fonctions régaliennes mais y consacre 57% de son PIB, est-il libéral ?
    Bref, le niveau des dépenses publiques est-il un critère pertinent pour déterminer si un pays est libéral ou non ?

    • @xc l’économie libérale prône que l’intervention de l’état soit aussi minimale que possible et concentrée sur le régalien (wiki le libéralisme économique) . C’est un des fondamentaux du libéralisme. Avec 57% nous sommes techniquement communistes.

      • Attention ! Si un niveau très élevé de dépenses publiques permet à coup sûr de dire si un pays est libéral ou non, en revanche ça ne suffit pas du tout pour le qualifier de communiste.

        • Pourquoi pas quand on nous rebat les oreilles avec une égalité illusoire et dévastatrice, un partage de la chaussée, des vélos, des voitures, des appartements ou maisons, une mise à l’index des propriétaires de résidedence secondaire bientôt cloués au pilori car il y en a qui n’ont pas cette jouissance et que, si ça continue on va obliger les propriétaires, comme au « bon vieux temps de l’URSS! », à se satisfaire du nombre de pièces conforme à leur besoin propre et à offrir celles en plus à d’autres, alors oui, le communisme est bien là! Et encore j’ai omis de mentionner les retraités qui devraient avoir honte de percevoir ce qui, pour certains, ressemble à une rente et qui seraient bien inspirés de se précipiter le plus rapidement possible dans l’au-delà!

    • Tout ce qui n’est pas régalien est socialiste.

  • « Les personnes qui se disent du centre sont nettement plus en faveur des régimes autoritaires que celles se disant des autres courants politiques ». Intéressante remarque qui démasque l’autoritarisme centriste réel sous l’alibi d’une pseudo tolérance politique (« en même temps »), ou caché derrière un cadre réglementaire strict d’ apparence libérale (les ordo libéraux). Les centristes seraient finalement des faux culs….

    • j’ai un peu de mal avec cette idée ….quand on voit des mous du bulbe comme juppé, bayrou incapables de prendre des décisions et prônant chaud et froid j’ai du mal à croire qu’on peut les taxer d’autoritaires…

      • Il y a ici un éditorialiste qui a une superbe illustration « You really think it will be this obvious ? ». Plus un homme politique est mou, moins vous pouvez lui faire confiance pour garantir vos libertés…

  • Il y a des infos sourcées intéressantes dans ce billet. Merci à l’auteur.

    En revanche, alors que l’auteur prétend au début de l’article lutter contre les « quiproquos » et autre « embrouillamini politique », il est regrettable de constater qu’il tombe dans le même travers en mettant dans un même sac libéralisme économique et conservatisme sociétal.

    Avant de faire la leçon, l’auteur ferait bien d’avoir les idées claires là-dessus : le libéralisme et le conservatisme sont deux doctrines différentes.

    • L’auteur ne les met pas dans le même sac. Il les cite comme étant deux dimensions essentielles sur lesquelles on ne peut pas ne pas se positionner. Il faut soit ne pas s’y intéresser soit ne pas être honnête pour ne pas avoir quelque chose à dire sur ces deux sujets qui ne sont pas liés, mais qui politiquement, divisent gauche et droite. Les centristes sont trop neutres pour être crédibles là dessus

  • Vous faites une erreur, ce n’est pas un comportement de gouvernement socialiste, cela en a l’image mais c’est très loin de vos propos. C’est un gouvernement de sales et prétentieux individus qui ne sont là que pour s’en mettre plein les poches et vivre tranquillement et grassement aux frais de la société après un mandat de 5 ans. L’assistanat est uniquement fait pour ne pas avoir de révolte sur les bras. Nous sommes face à un terrorisme politique aussi bien sur le plan national que local. Tout tourne autour du fric pour cette mafia et cela en toute légalité, et si faute il y a ils se sont voté une loi « Droit à l’erreur » pour se dédouaner de toute responsabilité. Plus que de l’escroquerie, c’est du terrorisme politique.

  • Cet article manque de sérieux ! En résumé toutes les tendances sont autoritaires sauf la droite (au demeurant ce n’est pas ce qui est écrit dans l’article d’atlantico !!).
    En réalité tous sont autoritaires par la force, la loi ou les deux. Pour moi la démocratie c’est juste la pluralité des partis qui empêche par les forces d’opposition un autoritarisme excessif type dictature.

  • Ces études sont corroborees par d’autres plus anciennes qui montrent exactement la même chose : il est plus facile d’être généreux avec le pognon des autres que le sien.

  • La science économique n’existe pas ? Bastiat, c’est de la merde ?

  • « ces pseudo-libéraux qui s’abritent « bêtement » derrière des chiffres, des stats et des études »

    Ah bah oui, pourquoi se fier aux faits et aux études scientifiques, c’est tellement mieux de se vautrer dans le relativisme, ça permet de prendre son opinion de poivrot de bar pour de la « science » infuse.

    « Jusqu’à aujourd’hui, les grands économistes sont justes capables d’expliquer les crises et les krachs passés mais sont incapables de les anticiper. »
    Quand on ne sait pas de quoi on parle il vaut mieux se taire.

    • De grands économistes comme Joseph Stiglitz qui avait écrit en 2002 qu’il y avait une chance sur 500 000 à trois millions pour que Fanny Mae fasse faillite ?

  • la limite de la Dépense Publique dicter par la Commission Européenne est de 60%…Nos politiques en France ne veulent pas la diminuer !!! pour leur propre intérêt. ..Par contre augmentations de taxes bref d’impôts indirects là pas de probléme. ..ils sont pleins d’imagination….

    • Vous faites erreur : c’est l’endettement de l’Etat qui ne doit pas dépasser 60 % du PIB. Quand on voit les niveaux stratosphériques de certains Etats, le pouvoir de l’UE fait bien rigoler. D’autant plus que c’est l’UE qui a fait exploser celui de la Grèce.

  • « Etatisé » selon vous ne serait pas socialiste ? Le socialisme « moderne » (si l’on peut dire…) n’est pas celui du 19 è siècle. Il faut être capable de reconnaître l’évolution de son mode opératoire qui ne consiste pas tant à posséder les terres et le capital alors qu’il suffit d’en détenir le pouvoir d’administration: nul ne peut en effet contester qu’aujourd’hui 57% de nos richesses passent de manière quasi structurelle, entre les mains de l’Etat chaque année qui affiche par ailleurs un taux de recettes fiscales (donc de spoliation autoritaire et centralisée ) de 53 % du PIB (le reste du financement des dépenses étant de la dette donc de l »impôt différé). Si ça n’est pas socialiste, alors c’est quoi ??

  • « d’autre part en matière de société face à des flux migratoires, une vague terroriste et une sorte d’idéologie d’autoflagellation vis-à-vis de cette chose honteuse qu’est devenue la culture et la nation judéo-chrétienne françaises… »
    Tout çà est passé à la trappe…et cela va durer combien de temps ?
    On peut ajouter le régalien dont l’insécurité en banlieues ou zones sensibles.

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