Mathieu Bock-Côté à Bruxelles

Mathieu Bock-Côté a débattu du « politiquement correct » au siège du Mouvement réformateur. Thierry Godefridi nous en livre un compte-rendu.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Manneken Pis By: Francisco Antunes - CC BY 2.0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Mathieu Bock-Côté à Bruxelles

Publié le 15 décembre 2017
- A +

Par Thierry Godefridi.

Le sénateur belge et député bruxellois Alain Destexhe avait invité Mathieu Bock-Côté, intellectuel canadien, pardon québécois, à s’exprimer vendredi au siège du Mouvement réformateur à Bruxelles sur le thème de l’un de ses derniers livres, Le multiculturalisme comme religion politique, thème qui suscite le débat tant en Europe qu’en Amérique du Nord.

Quelques dizaines de personnes étaient attendues, Mathieu Bock-Côté fit presque salle comble.

 

Questions sur le nouveau régime

Chargé de cours à HEC Montréal, chroniqueur au Journal de Montréal et au Figaro, auteur du livre cité ci-avant, en 2016, et d’un essai sur les enjeux démocratiques actuels, Le nouveau régime, en 2017, Mathieu Bock-Côté est un intellectuel jeune, passionné et passionnant.

Sa présence physique, son débit bouillonnant (entrecoupé d’une toux impatiente et récalcitrante), sa gestuelle à grands tours de bras, sa clarté de vue, la syntaxe et la cohérence de l’exposé rappelèrent à certains, entre les murs de ce qui fut le Parti réformateur libéral, la fougue oratoire d’un grand tribun du parti, l’un, le tribun, trop tôt disparu, l’autre, le parti, regrettablement « reformaté » en mouvance sociale-libérale.

 

La question du politiquement correct

À la demande d’Alain Destexhe, qui en avertit le public présent au moment d’amorcer la conférence, Mathieu Bock-Côté fut prié d’élargir le débat à la question du « politiquement correct », thématique qui fait l’objet actuel des travaux du sociologue et essayiste québécois et qui englobe la question du multiculturalisme comme religion politique.

Mathieu Bock-Côté s’insurge contre tout ce qui appauvrit le débat public et dénonce les apôtres de l’idéologie dominante qui dénaturent et réduisent ledit débat en en excluant leurs contradicteurs qu’ils n’hésitent pas à affubler d’étiquettes en phobe relevant de la morbidité psychopathologique (homophobe ou islamophobe, à titre d’exemple).

Rejetant la dichotomie caricaturale droite-gauche comme non pertinente dès lors que tout ce qui n’adhère pas à ses idées est disqualifié par la gauche de toutes tendances comme étant de droite, Mathieu Bock-Côté dit, par contre, se retrouver dans l’appellation de « conservateur » dans le sens où il est attaché à une appartenance identitaire commune.

 

L’émergence de l’égalitarisme identitaire

Ce qui l’agace profondément dans la question du multiculturalisme, c’est précisément l’émergence d’un projet d’égalitarisme identitaire qui, sous couvert de modernité, substitue à l’identité commune une diversité d’identités particulières et s’accompagne d’une auto-flagellation de l’Occident ainsi que d’une déconstruction de ses traditions et de ses valeurs et de la promulgation de lois mémorielles qui sacralisent l’idéologie anti-discriminatoire.

Constatant l’effondrement du communisme, une certaine gauche a, selon Bock-Côté, ainsi repris son projet de confiscation autoritaire du débat public par une minorité et partant, de la démocratie.

L’essayiste québécois ne réfute bien entendu pas la diversité des opinions, au contraire il entend s’en prévaloir, mais il récuse ceux qui visent à psychiatriser le débat public et à l’enfermer.

Au grand dam des trumpistes présents dans l’auditoire (il y en avait au moins un et, paraît-il, d’autres), Mathieu Bock-Côté, tout conservateur qu’il soit, ne partage toutefois pas leur enthousiasme pour le président twitteur-en-chef qu’il juge rogue et bourru. Entre Trump et Trudeau, il doit exister une autre voie, confie-t-il.

 

Une définition du conservatisme

Qu’est-ce alors que le conservatisme selon Mathieu Bock-Côté ?

C’est une idée de l’Homme et de la civilisation à laquelle il appartient, l’assertion de ce que l’Homme a besoin d’ancrages, d’un rapport à l’Histoire et à un héritage qu’il doit préserver pour le transmettre à son tour.

Le XXe siècle, explique le sociologue, a été celui de la tentation de l’Homme nouveau. Pour quelques ingénieurs sociaux prétendant avoir une connaissance scientifique du bien, il s’agissait d’arracher l’Homme à sa continuité et de le resocialiser de manière nouvelle en fonction d’une utopie de la société parfaite. Or, l’Histoire a démontré qu’une telle utopie aboutit toujours à la tyrannie.

Cette utopie de l’Homme nouveau, cette prétention de conditionner l’Homme de manière nouvelle en fonction d’une idéologie dominante, l’agit-prop marxisante sont de retour sous une nouvelle parure.

 

Préserver le monde

Au contraire, le conservatisme récuse cette prétention de l’Homme à jouer un rôle de démiurge et à recréer la société et l’Homme en façonnant ce dernier sur la base d’une vision utopique de la première. Il n’appartient pas à l’Homme de recréer ex nihilo l’Homme et le monde ; il lui appartient de le préserver, de l’aménager et de l’améliorer.

Il nous faut absolument nous opposer à tout ce qui nous priverait de notre liberté et de notre épanouissement personnel et aussi bien sûr nous méfier des populismes réducteurs qui se contentent de récupérer et d’instrumentaliser les inquiétudes de l’Homme déboussolé par le vide de sens.

Les promesses de la classe politique consistent habituellement en autant de miroirs aux alouettes. Puisse Alain Destexhe néanmoins tenir la sienne d’inviter régulièrement d’autres orateurs de même qualité, même si leur discours, comme celui de Mathieu Bock-Côté, diverge du politiquement correct.

Sur le web

Voir les commentaires (2)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (2)
  • Encore un type, qui n’aimant pas les arabes, se construit un système de pensée qu’il veut cohérent pour les fustiger, ce qui nécessite au passage, qu’il rende gorge au politiquement correct.
    A peu près du même tonneau que le mec qui n’aime pas les flics depuis qu’il s’est payé une prune de stationnement.
    Et puis, bon… « libéral conservateur »… pfff !

    • Réduire les idées de M.Bock-Côté a une simple haine des arabes… Alors là, bravo! Vous ne reculez devant rien.
      Vraiment bravo, vous venez simplement de nous montrer qu’il tape au bon endroit et que vous n’avez pas d’autre argument à lui opposer qu’une médiocre attaque ad hominem.
      Les « progressistes », gauchistes et autres bien-pensants supportent d’autant plus mal la critique qu’elle tombe juste.
      Merci de confirmer le discours de Bock-Côté dès le premier commentaire de cet article! Belle performance. ;-)))

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

L’articulation entre libéralisme et conservatisme est complexe à appréhender, à plus forte raison pour les libéraux eux-mêmes, souvent partagés entre la tentation d’une alliance de raison avec la droite conservatrice, la reconnaissance d’affinités intellectuelles, certes circonscrites, mais bel et bien possibles avec le conservatisme, ou, au contraire, le rejet de toute compatibilité entre ces deux courants philosophiques et politiques.

S’il n’est évidemment pas question ici de brosser un tableau général des relations alambiquées entre... Poursuivre la lecture

Un article de la Nouvelle Lettre

On l’a qualifié de tous les noms, en général pour le disqualifier d’avance : Javier Meili pourrait être élu président.

Avec 30 % des suffrages, il est le mieux placé à l’issue des primaires ouvertes et obligatoires qui se sont déroulées en Argentine dimanche dernier.

À tout prendre, c’est le quotidien Libération qui a proposé le portrait le plus complet du candidat : il s’agit d’un « économiste libéral d’extrême droite ».

Mais la presse française a pu aller plus loin : « ultralibéra... Poursuivre la lecture

Chères lectrices, chers lecteurs, à la suite de mes quelques lectures des livres de l'économiste Thomas Sowell, m'est venue l'envie de vous faire un petit résumé de ces quelques clichés de gauche que nous avons l'habitude d'entendre un peu partout dans nos médias, et que Sowell aborde abondamment dans ces différents ouvrages.

 

Il faut se dépêcher d’agir

C’est probablement un slogan très à la mode depuis deux ans, souvent associé avec celui consistant à ajouter « si cela peut sauver ne serait-ce qu'une seule vie. »

L... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles