Un impôt s’éteint, une taxe s’éveille et la dette grossit

Youpi, la taxe d'habitation va disparaître. Youpi, les dépenses ne changent pas. Youpi, il faudra trouver d'autres recettes. Youpi, rien ne change.
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Ces impôts qui façonnent nos comportements By: Images Money - CC BY 2.0

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Un impôt s’éteint, une taxe s’éveille et la dette grossit

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 15 septembre 2017
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Entre deux serrages de pognes et la découpe photogénique de quelques plants de canne à sucre, notre jeune, grand, beau et dynamique Président au sourire Pepsodent™ turbine quand même pour réformer ce pays à grands coups de discours musclés et de réformettes microdosées dont la dernière en date déclenche déjà des petits gloussements de satisfaction d’une presse béate d’admiration pour lui : apparemment, la promesse emblématique d’Emmanuel Macron de supprimer la taxe d’habitation est sur les rails !

Alors bon, soit, ce n’est pas exactement comme prévu au départ, à savoir la suppression pure et simple de cette taxe dans un horizon très restreint (on chuchotait 2019 voire 2018 !). Rassurez-vous, tout ira bien plus lentement (qui va piano va sano, surtout en République française) puisqu’apparemment, cette suppression sera progressive et prendra trois ans. D’ici là et d’après Gérald Darmanin, le ministre en charge de ce projet ainsi que de l’Inaction et des Trous publics, 80 % des ménages n’auront plus à s’acquitter de cette taxe.

La presse s’est jetée comme une affamée sur les différents seuils d’exonération qui permettront de s’affranchir de cet impôt : en substance, pour un revenu réel de référence de 30 000 euros, une personne seule sera exonérée. On pourra monter jusqu’à 48 000 euros de revenu réel pour un couple, 54 000 euros pour un couple avec un enfant et il faudra rajouter 6 000 euros au revenu fiscal de référence pour chaque enfant supplémentaire.

Moyennant quoi, 80 % de ceux qui paient actuellement cette taxe rejoindront les 12 millions de personnes qui en sont déjà exonérées. C’est magique : avec cette loi fiscale, l’État français se sépare subitement d’un nouveau tronçon de contribuables qui auront le bonheur sucré de ne plus participer à l’impôt local.

Enfin, « subitement », c’est façon de parler puisque, je le rappelle, il faudra donc trois ans pour aboutir à ce résultat. Espérons que le gouvernement tienne bon d’ici là.

Car tout peut arriver. Y compris un abandon en rase campagne ou des gros coups de rabots politiquement corrects. Ce ne serait guère surprenant lorsqu’on voit les subtils rétropédalages de l’actuelle équipe lorsqu’il s’agit d’abandonner les contrats aidés dont sont malheureusement trop férus les communes et les collectivités territoriales. Leur grogne, que la presse relayait complaisamment, a fini par payer puisque le gouvernement a finalement repris une louchée de ces contrats qu’il avait pourtant décidé, scrogneugneu et mordicus, qu’il les arrêtait une fois pour toutes (ou presque).

Mais ne boudons pas notre plaisir : dans trois ans, c’est dit, la taxe d’habitation a disparu, et cochon qui s’en dédit.

Malheureusement, quelques jolies bosses et quelques beaux trous semblent s’accumuler sur le chemin printanier (pensez printemps, les amis !) tracé par notre jeune, grand, beau et dynamique Président au sourire Pepsodent™ : faire sauter la taxe d’habitation, c’est très bien, mais personne ne sait exactement comment les communes vont financer le différentiel.

Eh oui. N’oublions pas le fameux Mankagagner !

Parce que, voyez-vous ma brave dame, il faut compenser cette belle taxe qu’on vient de sucrer ! D’un côté, vous avez des dépenses, souvent aussi « utiles » qu’ « indispensables », et de l’autre, vous aviez cette jolie taxe pour les financer. Maintenant, comme il est absolument impossible d’envisager même de loin la moindre diminution des dépenses, on risque bien de se retrouver avec un trou causé par cette évaporation rapide des entrées.

Oh, certes, je n’écarterais pas complètement la possibilité que l’une ou l’autre commune se décide à faire des efforts drastiques pour réduire ses dépenses ; un coup de lucidité folie du maire est toujours envisageable. Cependant, compte tenu des annonces entourant cette évaporation fiscale médiatique, je doute que ces collectivités fassent spontanément des efforts. En effet, d’après Macron et sa fine brochette de clowns ministres, la diminution des rentrées fiscales sera compensée « à l’euro près » par l’État.

Tax DayQui peut tout, apparemment. Y compris trouver 22 milliards d’euros sur son budget sans déclencher de petits mouvements nerveux dans la population qui pourrait estimer qu’on vient encore une fois de l’enfumer.

Pour éviter cela et comme pour le plumage des oies, il faudra procéder doucement. Par exemple en augmentant discrètement la collecte de la CSG (assiette, quotité, on a le choix). Eh oui : on a tabassé une tranche de population qui finissait par se plaindre, on va à présent en tabasser une autre et pas de bol pour ceux qui sont dans les deux populations à la fois ; leur sort ne va pas s’améliorer, mais que voulez-vous, en France, on ne peut pas toujours bien tomber.

L’avantage de la manœuvre est peut-être que ça modifie la perception de la douleur, j’imagine…

Oh et puis attendez un peu ! Il y a une autre façon, évidente, de trouver ces 22 milliards qui pourraient faire défaut ! Que pensez-vous par exemple de contracter de la bonne grosse dette bien dodue ?

Évidemment, cela reviendrait à transformer une taxe immédiate en impôt futur dans une espèce de jeu de vase communicants (et communiquer, ça, nos gourdes ministérielles savent le faire), mais est-ce vraiment un gain pour le contribuable lambda ?

Une fois qu’on a compris que cette disparition de la taxe d’habitation n’est qu’un report des impôts d’une population à une autre ou, pire, d’une génération à une autre, en quoi tout ceci est-il une réforme fondamentale, un changement structurel dans la façon d’envisager la ponction fiscale dans le pays ?

En rien.

C’est, en définitive, la même démarche que pour le Code du travail : on part d’un principe intéressant et qui pourrait contenir une vraie révolution (fiscale ici, contractuelle dans le cas de la Loi Travail), et, d’enfumages en compromissions, on aboutit à quelques petits bricolages sans absolument rien de fondamental. On fait des ajustements, on repeint les murs de la triste Maison France, on arrange les moulures et on remet un peu de dorure, mais on ne touche pas au gros-oeuvre, surtout pas ! On ne répare surtout pas les grosses fissures, on n’abat pas les murs vermoulus qui menacent de s’effondrer sur le peuple qui dort de moins en moins sereinement à ses pieds.

On refuse d’envisager de vraies économies, de vraies coupes claires et massives dans les dépenses, de vraies changements fondamentaux dans la façon dont tous les étages de l’État, depuis le sommet jusqu’à la commune, envisagent leur rapport avec l’argent du contribuable.

Pourtant, économiser 110 milliards par an, c’est possible, mais ça demande un courage autrement plus impressionnant qu’aller découper deux plans de canne sur une île tropicale. Pourtant, économiser 600 millions d’euros et faire 65 millions d’heureux, c’est possible et même souhaitable !

Mais apparemment, le moment n’est pas venu.


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Voir les commentaires (27)

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  • « 80% des ménages n’auront plus à s’acquitter de cette taxe »
    Allons, un peu d’optimisme ! Avec l’appauvrissement des Français que nous concocte ce gouvernement, mécaniquement, très bientôt ce seront 90%, dans la joie et les remerciements envers nos Zélites qui prennent si bien soin de nous !

  • cette réforme aboutira surtout à déresponsabiliser les collectivités locales, et supprimer leur autonomie de gestion. Les 80% de contribuables locaux exonérés éliront des conseils municipaux atteints de dépensomanie galopante et les 20% de cochons de payeurs iront se regrouper dans des communes de riches où ils seront majoritaires pour contrôler leur budget au grand dam des vivrensemblistes

  • Cette soit disant suppression de taxe n’est qu’une astuce pour que l’état puisse redistribuer le grizbi des communes opposantes vers les communes amies.
    C’est beau la démocratie quand même.

    • – Quand on a 1 Dette aussi énorme en France on ne peut faire de cadeaux à personne ! C’est 1 promesse de campagne qui relève d’1 jeu de bonneteau fiscal. Les législatives dans la foulée des Présidentielles ont favorisé « l’effet bandwagon ».. mais qui ne marchera plus avec les élus locaux pour les Sénatoriales !

  • Et je plains ceux qui seront en limite, ainsi 43000 vous êtes exonérés et avec un euro de plus vous payez votre taxe d’habitation ! J’espère que des placements à temps permettent de redescendre en dessous de 43001. Nous sommes gouvernés par des incapables, injustes, intolérants et qui ne peuvent agir rapidement à corriger de tels dysfonctionnements. Si les gouvernements et acolytes précédents ont chuté, c’est à cause en partie de telles attitudes de fonctionnaires sans discernements. Et il en va ainsi de toute la répression routière.

  • Bravo, après la vignette, la taxe professionnelle maintenant la taxe d’habitation, l’état centrale s’occupe de supprimer des impôts locaux, pour que les élus dépensent à tour de bras puis viennent chouiner que l’état ne leur donne pas assez de moyens ! On marche sur la tête !

  • j’attend toujours de réduire les dépense de L’ÉTAT. …
    là ,ça coince…pas très électoral. ….

  • de la com ,des mots….et surtout gardent leurs avantages…voir la CSG…la moralisation de nos députés. ..
    Et pourtant la loi était simple à faire..
    le casier judiciaire n°2 vierge point barre…
    Et si un était condamné ENILIGIBLE À VIE…
    faire croire que l’on change…

  • Il suffit de lire les premiers mots de cet article pour me dire que je ne veux pas le lire. J’en ai assez de ce langage racoleur de spectacle, au lieu de traiter sérieusement les sujets au fond, en pesant le pour et le contre de tout argument de manière honnête, car le monde est complexe et les solutions simplistes ne marchent jamais.

    • Le principe d’un éditorial, c’est de sortir du langage équilibré où l’on s’efforce de trouver une contradiction à chaque affirmation, l’une fut-elle particulièrement sensée et l’autre parfaitement farfelue. Vous prônez le sérieux pour sortir d’une absurdité, je préfère l’ironie mordante à l’égard de ceux qui la défendent. A long terme, je crois que c’est plus efficace.

      • chacun ses goûts. Dans ce cas restez entre vous. C’est dommage, il y a parfois des articles qui sont bien et font réfléchir. Mais dès que ce ton d’ironie mordante est affiché, on rentre des domaines où il n’y a plus de place pour le débat serein et équilibré. Donc pas pour moi.

        • @Frederic

          Ce ton est encore loin d’atteindre le niveau de foutage de gueule de nos politiques, et de tous les parasites qui détournent les ressources de par le monde…

          • Pour agir, il faut être crédible et écouté. Pour être crédible et écouté il ne faut pas braquer les gens dès les premières lignes mais être capable d’exposer les choses de manière à toucher le maximum de gens qui ont du pouvoir, et non le maximum de gens qui s’agitent facilement sans réfléchir

        • Personne ne vous oblige à aimer cet article, ni à venir sur ce site! Si vous manquez d’humour inutile de le faire remarquer. Lorsque l’état français se conduit de manière aussi grotesque nous n’avons malheureusement aucun recours, autre que celui d’ironiser!

    • Franchement, vous avez vu la courbe à la fin de l’article ? Vous n’avez pas un petit peu le sentiment que l’on se moque violemment de nous ?

      • @ Stéphane Boulots

        Si, si! Évidemment que, je ne sais si on se moque de vous, mais qu’on vous raconte ce que vous voulez entendre, ça c’est certain, même si rien ne suit!

        Mais le « verbe » est si important, chez vous! Ensuite, ce sont bien les citoyens électeurs qui ont sélectionné tous les élus. Et chaque famille connait un proche fonctionnaire privilégié (central ou local): personne n’oblige la France à dépenser plus que ce qu’elle ne produit!

        • @ mikylux
          « personne n’oblige la France à dépenser plus que ce qu’elle ne produit! »

          En êtes vous sûr? La Grèce y est parvenu et s’y maintient. La France a pris le même chemin, c’est juste un peu plus long pour grimper la côte des bosseurs encore présents.

        • Justement, personne ne manie vraiment le verbe dans ce pays, personne n’ose dire son vrai point de vue : même Fillon avec ses 500 000 milles suppression de postes de fonctionnaires savait pertinemment que ce qu’il faudrait faire, c’est en supprimer 4 millions.

          Ce pays vit dans la peur et dans l’arrogance : so far, so good …

  • j’adore le ton et le parti pris de cet article, pour mettre en perspective ce que va être l’action minimale durant ce quinquennat. De quinquennat en quinquennat la chute continue et rien ne semble pouvoir l’arrêter.

  • Le Président s’appelle Micron, pas Gargantua.
    Ses réformes seront à l’image de ses convictions.

  • Les commentaires sont fermés.

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