Présidentielle : quel est le meilleur candidat pour l’école ?

Tout oppose Marine Le Pen et Emmanuel Macron, mais l’un des deux programmes est sensiblement plus intéressant pour sa réforme de l’éducation.

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Présidentielle : quel est le meilleur candidat pour l’école ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 5 mai 2017
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Par Nelly Guet.

Quel débat présidentiel que celui de 2017 ! 4 petites minutes consacrées à l’éducation ! Des remarques éparses sur le dédoublement de classes à l’école primaire dans les REP, sur la formation professionnelle, pour le candidat d’En Marche, aucune perspective chez Marine Le Pen, consacrant toute son énergie à détruire le programme de l’adversaire.

Un vrai programme pour l’éducation

Creusons un peu le sujet qu’ils ont préféré laisser de côté, tant il est risqué, à J-3, de perdre des électeurs, car dans notre douce France, si mal classée dans les expertises internationales en matière d’éducation, chaque Français compte dans sa famille au moins un ministre de l’Éducation qui s’ignore. Un véritable jeu de massacre donc si l’on esquisse une politique d’ensemble à mettre en œuvre dans les cinq années ! Mieux vaut s’en tenir à deux ou trois mesurettes, qui, avec un peu de chance, pourraient devenir le plus petit dénominateur commun !

Et pourtant ! N’était-ce pas le seul sujet prioritaire, qui décidera de l’avenir du chômage dans notre pays, de la compétitivité économique de la France, peut-être même de notre efficacité contre le terrorisme ?

J’ai publié en 2014 un livre intitulé Virage européen ou mirage républicain ? Quel avenir voulons-nous ? qui contient 5 propositions permettant de transformer notre « système pyramidal, hiérarchique, inopérant, en une gouvernance décentralisée efficiente ». Depuis trois ans, j’ai présenté ces propositions dans de nombreux pays (Chine, Finlande, Suisse…) à des publics de professionnels du monde entier. Ces cadres éducatifs seraient bien étonnés de voir comment est traité le sujet dans notre pays, en haut lieu !

Certes, Madame Vallaud-Belkacem m’a répondu à trois reprises que la réforme du collège s’inspirerait de mes préconisations, certes Monsieur Fillon a également réagi – après semble-t’il une lecture attentive… Était-ce Pénélope ? –  aux conseils que j’expose à partir d’une expérience de bientôt 20 ans aux côtés de chefs d’établissements et autres cadres éducatifs d’Europe et du monde entier. Bruno Le Maire, Arnaud Montebourg… tous trouvent intéressant de s’inspirer des pratiques que je décris !

Qu’en est-il de nos deux candidats à la présidence de la République ?

Les 5 leviers clef pour l’éducation

1er levier : la régionalisation. Sans elle, pas de progrès possible. Un préalable toutefois : revoir les contours des nouvelles Régions, lorsqu’ils ne correspondent pas aux vœux des habitants.

Emmanuel Macron semble ouvert à la demande de réunification de la Bretagne. En tout cas davantage que Bruno Retailleau.

Marine Le Pen veut supprimer les Régions ! Dont acte ! Inutile d’aller plus loin !

2ème levier : l’autonomie des établissements. Cette terminologie française floue – reprise par Emmanuel Macron et par beaucoup d’autres – permet de masquer un terme honni en France : le « leadership ». Or c’est bien de leadership, qu’il doit s’agir : fusion des Académies et des Régions en charge de gouverner. Seuls les diplômes, les objectifs généraux et l’évaluation restent du ressort de la rue de Grenelle.

Rien de tel chez Marine Le Pen – Jacobine convaincue – qui veut exercer la mainmise de l’État sur l’éducation.

3ème levier : la transformation des modalités de recrutement des enseignants et de leur formation initiale et continue. Les compétences attendues en 2017 ne sont pas celles de 1977 or les oraux de CAPES se ressemblent à s’y méprendre ! Il convient de revoir l’ensemble du dispositif, car il est non seulement indispensable de modifier le statut des nouveaux recrutés (et donc de la fonction publique), d’organiser leur formation en alternance, mais aussi de redéfinir le rôle de l’Inspection générale, des syndicats enseignants…

Sujet à peine effleuré par les deux candidats et pour cause… Danger en vue !

Emmanuel Macron prévoit 3 jours de formation obligatoires par an… c’est bien peu.

Le sujet n’est pas évoqué par Marine Le Pen.

4ème levier : l’auto-évaluation de l’établissement scolaire par les parents, les élèves, les enseignants et la direction. Cette pratique, largement ignorée en France, est pourtant le seul moyen de mettre en place ce que d’aucuns appellent pudiquement « l’autonomie ». Doit-on en déduire que 25 millions de parents souhaitent délibérément n’exercer aucune fonction à l’école ?

5ème levier : les relations École-Entreprise. L’entreprise doit devenir un partenaire à part entière de l’école. Nous avons beaucoup de retard sur ce plan.

Il est toutefois permis d’espérer, car c’est au ministère de l’Économie que l’on est le plus conscient des urgences. Christine Lagarde avait fait du CODICE une instance de concertation interministérielle qui aurait dû permettre de profondément remanier l’enseignement de l’économie au lycée mais aussi de rapprocher le monde entrepreneurial du monde de l’éducation, à tous les niveaux de la formation. J’ai participé pendant deux ans à ces travaux et je considère qu’ils n’ont pas abouti.

Si le sujet semble bien loin des préoccupations de Marine Le Pen, il est permis d’espérer qu’Emmanuel Macron, fort de son expérience à Bercy, reprenne le flambeau, car il est à l’origine de la mission confiée en août 2015 à de hauts fonctionnaires de 3 ministères (Économie, Supérieur et MEN), chargés de remettre un rapport d’étape dans les deux mois… sur l’expérience des Européens mettant l’entreprise au service des établissements scolaires en matière de STEM (Sciences, Technologies, Ingénierie, Maths). Depuis son départ de Bercy, les deux autres ministres signataires ont semblé ignorer cette mission qui aurait pu déboucher sur un engagement déterminant de la France à « rattraper » son retard.

Lors de la prochaine rencontre de la « Coalition UE en faveur des STEM », dans 10 jours, j’espère pouvoir découvrir autour de la table celle ou celui que le nouveau président aura mandaté… Si pour certains le vote de dimanche sera « un vote contre », le mien sera « un vote pour ».

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  • En-dehors de l’anti-lepenisme de base, comment évaluer les capacités des enseignants en place (26% des écoliers entrant en sixième ne savent pas lire ou calculer. ), comment sanctionner les incompétents, comment former des enseignants sachant lire et écrire et compter? Comment réformer les programmes scolaires genre Najat-Belkacem et prédécesseurs ? Comment persuader les parents de s’intéresser à la scolarité de leurs enfants, en-dehors du » c’est pas de leur faute »? Un peu de terrain ne ferait pas de mal: dans toutes les conversations « privées », il y a un abîme avec les doxas officiels et médiatiques.

    • …« enseignants sachant lire et écrire et compter » C’est peut-être un peu dur ! Le problème vient certainement aujourd’hui du fait que les deux parents travaillent à l’extérieur (comment faire autrement ?).
      Les mômes sont aussi victime de l’hyper connectivité et du jargon SMS ; c’est peut-être aux instituteurs là d’essayer d’organiser des concours pour inciter à faire des vrais phrases ; les jeunes se corrigent entre-eux et celui qui a trouver la plus grosse bourde gagne s’il l’a corrigée correctement. Organiser des travaux et des recherches judicieuses en binôme, en groupe de 4 et de 8 sur Internet/encyclopédie, presse papier ou livres pour faire ressortir les avantages et inconvénients. À l’issue de leurs études les jeunes ne sont habitués qu’à bachoter seul pas doués pour faire des états d’avancement et les présenter à un groupe, par exemple.
      La limitation d’accès aux réseaux doit être à la charge des parents. Mais les instituteurs et ou plutôt les professeurs peuvent forcer un peu à une utilisation profitable de ces réseaux dans un travail de groupe mais à distance encore une fois pour pouvoir disserter sur les avantages et inconvénients du télétravail.
      Quant à l’orthographe au minimum c’est d’enseigner l’usage des correcteurs orthographiques associés à tout traitement de texte, mais peut-être aussi de questionner les anciens à la retraite comment le français était-il enseigné dans les années 50 et comment s’adapter dans le contexte actuel. Ça ne n’est pas un boulot de ministre mais des vrais gens confrontés aux problèmes !

    • … « (26% des écoliers entrant en sixième ne savent pas… calculer. ) » Et combien d’ingénieur savent aujourd’hui encore se servir d’une règle à calcul ? Y a des ordinateurs bien mais étant sur un chantier de brousse sans électricité depuis plus d’une semaine… C’est chômage technique ! (C’est la faute à l’informatique)

  • Bravo pour votre article et vote dévouement. ».. sacerdoce..
    Oui à la régionalisation « historique » et socio économique, qui parle aux habitants. ex la petite Bretagne versus la grande Bretagne historique.
    Oui à l’autonomie des établissements, leur donnant la possibilité d’offrir un parcours adapté aux spécificités locales. Je pense à l’option Internat : que j’ai connu depuis l’âge de 5/6 ans. dans les années 50/55 . Résultats selon des anciennes études.. les Internes issus à 80 % de milieux défavorisés ( parlant breton/à peine le français) obtenaient de meilleurs résultats que es externes à 80 % de milieux ++ favorisés .

    OUI aux échanges Enseignants / entreprises. Ayant vécu l’expérience allemande, je peux confirmer que souvent les  » lehrling  » que je côtoyais avaient en + de leur connaissances techniques, un bon nivaux de culture générale + musicale ect. Mais il faut revenir à 14 ans ..

    Le niveau des enseignants est certainement important. Pourtant, mes enseignants de primaire avaient à peine le bac : tous les élèves savaient bien lire écrire compter et les fondamentaux en 7 eme…
    Car jadis , les enseignants avaient motivation et foi dans leurs missions.

    • Moi j’ai eu plusieurs instituteurs recrutés après guerre qui avait le Certificat d’Étude mais qui ne faisait pas de fautes d’orthographe. Et les classes étaient un peu plus, disons, chargées 38 à 45 élèves et quand tu allais de travers tu t’en ramassait UNE et si tu te plaignais aux parents le soir tu t’en ramassait le double.

    • … « les enseignants avaient motivation et foi dans leurs missions » Mais ils étaient respectés ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

  • OUI tout à fait. Ils savaient aussi SE faire respecter.
    J’ai connu des classes « doubles » de 38/40 élèves…
    L’Etat de ce temps là n’ était pas « pachyderme », se concentrait plus sur ses missions régaliennes et réagissait. Si quelqu’un manquait .. les Gendarmes allaient le chercher …

  • Reforme de l’éducation 2 solutions radicales
    1 – autonomie totale des établissements en matière de recrutement et de salaire, le ministère de l’EN ne s’occupant que des programmes (et encore si ceux-ci ne sont pas tirés vers le bas : vrai culture classique, mathématiques et grammaire de bon niveau, bases de physique, pas de fausse matière qui disperse l’élève), avec chèque scolaire compris dans les allocations familiales puis libre choix des parents.

    2 – suppression du lycée unique en rendant le brevet des collèges sélectif comme le bon vieux certificat d’étude , avec en parallèle revalorisation massive de l’apprentissage et des filières techniques. Si tu réussi très bien tu finiras banquier ou médecin, si tu ne réussi pas, très bien aussi, tu seras dans un enseignement professionnel et technique de qualité comme en Suisse ou en Allemagne, pays avec plein de PME qui fabriquent du matériel à haute technicité mais qui se vend partout. On aura moins de hauts fonctionnaires et d’ingénieurs d’états généralistes déconnectés qui finissent gourous ou dans les banques, mais plus de techniciens et des vrais ingénieurs qui créent de la richesse. (PS je ne suis pas du tout technicien ou ingénieur mais j’admire tous ces gens là).
    Préalable à cela : courage politique d’affronter les syndicats de l’EN dont on change totalement le logiciel.

    • Attention à l’autonomie totale, il ne peux pas y avoir d’autonomie financière pour les établissements primaires/secondaires l’enseignement est sensé être gratuit et il y a des communes plus ou moins pauvre les charges de l’enseignement doivent rester à un échelon supérieur régional voir national… Tiens justement le national a réduit les dotations aux communes et les impôts nationaux n’ont pas baissés où est passé la différence???

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