L’État-actionnaire : l’incompétence en matière de gestion d’entreprise (1)

Les chiffres sont clairs : les entreprises dont l’État est actionnaire font toujours moins bien que les autres entreprises cotées… et ce n’est pas nécessairement parce que l’État utilise ces entreprises comme des armes politiques.

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L’État-actionnaire : l’incompétence en matière de gestion d’entreprise (1)

Publié le 10 mars 2017
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Par Étienne Henri. 

L’investissement public est une vieille tradition française. Qu’il s’agisse de mener à bien d’importants projets d’infrastructure (construction d’autoroutes, de centrales nucléaires ou de voies ferrées) ou de soutenir des entreprises en difficulté, l’État français a toujours eu l’habitude d’utiliser les deniers publics comme un moyen d’intervention de poids dans la vie économique du pays.

Si toutes les nations industrielles ont recours de manière plus ou moins directe à l’investissement centralisé, la France est championne en la matière.

Déclin de l’investissement public

Comme dans tous les domaines, l’investissement public est soumis à la loi du déclin de l’utilité marginale. Un peu d’investissement permet de bâtir une société industrielle et d’y installer les infrastructures vitales. Les investissements suivants offrent aux citoyens un confort supplémentaire dont le prix augmente rapidement. In fine, le retour sur investissement pour le pays devient nul, voire négatif…

L’intervention de l’État dans les entreprises est un mode de fonctionnement aujourd’hui considéré comme normal par nos administrations. Cette absence de remise en question fait que la France est le pays développé dans lequel la part des entreprises à participation publique est la plus importante : une personne sur dix est employée par une entreprise dont l’État est au capital !

Le poids de l’État dans notre économie ne se manifeste donc pas uniquement par un taux de prélèvement et de redistribution record. Sa présence au capital des entreprises a des effets mesurables sur la gouvernance de ces dernières.

Si vous investissez dans des sociétés françaises, les effets des participations étatiques sont non négligeables.

Il faut donc en tenir compte lorsque vous décidez d’acquérir des actions ou obligations des entreprises concernées, et elles sont nombreuses.

Quand l’État collectionne les participations

L’État français est un boulimique de l’investissement. Un salarié sur dix travaille pour une entreprise à participation publique. Même en ne considérant que les entreprises dans lesquelles l’État est majoritaire au capital, notre pays se paye le luxe d’employer plus de 800 000 personnes… soit plus que les États-Unis !

Ces chiffres, déjà impressionnants, en cachent un autre : le montant des participations totales de l’État-actionnaire. Le mille-feuille administratif fait que ses participations sont réparties dans une demi-douzaine de structures. Les plus importantes sont l’APE, la Caisse des Dépôts et Consignations

Ces trois structures totalisent plus de 1 700 participations pour un montant total de près de 100 Md€.

La particularité française réside dans la répartition de ces investissements. Alors que nos voisins concentrent les participations dans l’énergie et les réseaux (transport, électricité, réseaux postaux et télécommunications), la France investit dans tous les secteurs. Industrie manufacturière, automobile, assurances, santé et logement : aucune activité n’échappe à l’intervention de l’État.

L’impossible conciliation de l’investissement et de la politique

Le problème est que la position d’investisseur est intrinsèquement conflictuelle pour l’État. Dans notre pays, l’État a pour mission d’organiser de la société et de mener à bien divers chantiers politiques.

Un actionnaire a pour mission de faire fructifier son capital.

Il est facile de trouver des exemples où ces objectifs sont contradictoires. Considérons le cas de la lutte contre le chômage qui est un sujet d’actualité. L’objectif de l’État-stratège est de faire baisser le nombre de demandeurs d’emplois. Son intérêt est donc d’utiliser les sociétés dans lesquelles il possède des participations (qui sont, rappelons-le, nombreuses) et de les inciter à mettre en place une politique de recrutement massive.

Rentabilité de l’agent public

L’objectif de l’État-investisseur est d’assurer la rentabilité de l’agent public, ce qui revient à maximiser la rentabilité des entreprises dans lesquelles il a investi. Dans cette optique, la masse salariale doit être sous contrôle et les recrutements limités à leur strict nécessaire.

Ces deux positions sont clairement antagonistes. L’État doit donc arbitrer entre les deux stratégies, sachant que tout déplacement du curseur entre rentabilité et effet politique ne peut être qu’un changement gagnant/perdant. Les circonstances du moment font que l’État privilégie l’une ou l’autre des stratégies.

Cette situation schizophrène se retrouve à l’identique sur les problématiques de soutien à l’innovation ou aux industries stratégiques en perte de compétitivité.

Dans ces secteurs, la politique industrielle est en opposition avec un objectif de saine gestion patrimoniale.

Le casse-tête est complet lorsque l’État se retrouve également client des entreprises, comme c’est le cas dans le secteur de la défense. Tous les principes d’une saine économie de marché sont mis à mal.

Une efficacité contestable

L’expérience de l’après-guerre l’a montré : hors des périodes de forte croissance, l’État-actionnaire a tendance à privilégier l’effet politique plutôt que l’effet économique. Les participations sont utilisées comme une arme pour mener à bien la politique du moment aux frais du contribuable.

Les entreprises dans lesquelles l’État est majoritaire au conseil d’administration se retrouvent finalement à suivre des stratégies contraires à leur intérêt !

Les dégâts peuvent être immenses. Pensez à EDF et Areva, pour ne citer qu’elles. Ces entreprises possèdent une excellence technologique que le monde nous a longtemps enviée. Elles ont de brillants techniciens, scientifiques et ingénieurs. Elles opèrent dans l’économie réelle et produisent des services utiles.

Pourtant, des années de gestion étatique en ont fait des entreprises-zombies qui ne parviennent pas à gérer leur capital en bon père de famille et vont de crise en crise. Quel gâchis !

Des chiffres clairs

Si vous avez le moindre doute quant à l’ampleur du problème, regardez plutôt le retour sur fonds propres des participations détenues par l’APE et la CDC, par opposition a celui des entreprises du SBF 120.

Les chiffres sont clairs : les entreprises dont l’État est actionnaire font toujours moins bien que les autres entreprises cotées… et ce n’est pas nécessairement parce que l’État utilise ces entreprises comme des armes politiques.

Parfois, c’est tout simplement l’immobilisme qui prime. Les différentes facettes de l’État-actionnaire étant représentées par différents interlocuteurs au sein de l’entreprise, les conflits d’intérêt deviennent des conflits de personne. Au final, l’État ne tire plus réellement l’entreprise dans telle ou telle direction, mais devient un poids dans la gestion courante des affaires.

Or, vous le savez, l’efficacité est la clé de la rentabilité d’une entreprise ; que l’on parle des activités opérationnelles ou stratégiques.

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