Présidentielle : comment éviter d’être déçu ?

N’attendons-nous pas trop de nos dirigeants et plus que ce qu’ils ne pourront jamais délivrer ?

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Facepalm (Crédits : Alex Proimos, licence CC-BY 2.0). Image publiée initialement sur Flickr.

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Présidentielle : comment éviter d’être déçu ?

Publié le 18 février 2017
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Par Cécile Philippe.
Un article de l’Institut économique Molinari

Présidentielle : comment se prémunir contre toute déception ?
Facepalm (Crédits : Alex Proimos, licence CC-BY 2.0). Image publiée initialement sur Flickr.

Alors que la campagne présidentielle bat son plein, les yeux sont rivés sur les candidats qui se prêteront à cet 11e exercice électoral au titre de la Ve République. Comme lors des élections précédentes – au moins celles dont je peux me souvenir – les attentes sont d’autant plus importantes que le Président actuel a suscité des déceptions.

On se souviendra peut-être de François Hollande comme du président ayant enregistré le niveau de popularité le plus bas, mais il n’est pas dit que son successeur ne fera pas pire. Et je pense que cette possibilité ne doit pas être écartée. D’où la nécessité de s’interroger sur cette insatisfaction et voir s’il n’est pas possible de la diminuer.

Désirs insatiables

Satisfaction, insatisfaction, bonheur, il existe aujourd’hui toute une littérature qui met ou remet ces questions au goût du jour. Elle a probablement beaucoup à nous apprendre dans le domaine politique. On peut commencer par citer le bouddhisme et le regain d’intérêt que suscite cette philosophie auprès du grand public grâce à la méditation, la pleine conscience, les thérapies cognitives, etc.

Un élément fondamental de ces courants, c’est que nos insatisfactions viennent de nos désirs insatiables. Un bon moyen de lutter contre notre insatisfaction chronique résiderait dans le travail sur nos désirs – qui concernent toujours l’obtention de quelque chose dans le futur – par des exercices mentaux qui nous focalisent sur le présent plutôt que sur le futur.

Il s’agit, comme l’explique le psychologue Jonathan Haidt, de dompter l’éléphant qui est en nous, celui qui nous fait désirer des milliers de choses sans jamais nous satisfaire complètement. Par des techniques comme la méditation, nous pourrions faire en sorte que notre mode de pensée plus logique et réfléchi prenne le pas sur notre mode de pensée émotionnel, impulsif, instinctif. Ces différences dans nos modes de pensées ont été largement documentées par nombre d’intellectuels, de Platon au lauréat du prix Nobel d’économie Daniel Kahneman et à ses systèmes 1 et 2.

Le cas des Danois

Nous pourrions limiter nos désirs et donc nos insatisfactions. Une des clés du bonheur serait de se donner la possibilité d’avoir des attentes inférieures à ce qu’on peut espérer. À ce titre, le cas des Danois est particulièrement intéressant. En effet, ils arrivent très régulièrement en tête du classement mondial du bonheur. Pourquoi les habitants d’un petit pays, somme toute assez banal, se distinguent-ils ainsi ?

C’est à cette question que le professeur d’épidémiologie Kaare Christensen de l’université Southern Denmark a répondu dans un article publié en 2006 dans le British Médical Journal (« Why Danes are smug : comparative study of life satisfaction in the European Union »). Son constat est le suivant : si les Danois sont plus heureux que la moyenne, c’est parce que leurs attentes sont moindres. Selon les sondages, ils manifestent peu d’attentes quant à l’avenir, si bien qu’ils sont agréablement surpris de voir que les choses se déroulent aussi bien ou mieux que prévu. Une philosophie de la vie que ne renieraient pas les bouddhistes et spécialistes de cette fameuse question du bonheur.

Des croyances erronées en matière de bonheur

Sur le sujet, le psychologue d’Harvard Daniel Gilbert souligne combien nos croyances en matière de bonheur peuvent être erronées. Elles nous amènent à poursuivre des buts – argent, pouvoir, célébrité, enfants – qui loin d’accroître notre bonheur, pourraient le diminuer. Plus précisément, nos attentes à l’égard de ces différents objectifs pourraient être erronées, comme l’expliquent Rufus Griscom et Alisa Volkman dans un Ted talk aussi intéressant que divertissant.

Ce couple – étonné de constater nombre de tabous existants à propos de la paternité et de la maternité – ont créé une plateforme destinée aux parents comprenant mal ce qu’il leur arrive quand bébé fait son apparition et que tout n’est pas rose. En démystifiant le sujet, leur objectif est d’ajuster les attentes des parents à des réalités plus prosaïques, leur permettant de profiter davantage de leur situation. Des attentes irréalistes, voilà ce qui brouillerait selon eux le bonheur d’être parent.

La tentation d’élire des leaders autoritaires

Et en politique, ne souffre-t-on pas du même mal ? Les insatisfactions de plus en plus marquées des citoyens à l’égard de leurs dirigeants et leur tentation d’élire des leaders autoritaires ne sont-elles pas les symptômes du même problème ? N’attendons-nous pas trop de nos dirigeants et plus que ce qu’ils ne pourront jamais délivrer ?

Il me semble probable que nous surestimons beaucoup le pouvoir de nos dirigeants, tout en sous-estimant dans une ampleur encore plus grande le pouvoir qui existe au sein de toute la structure institutionnelle composant notre société. C’est au sein de cette dernière – composée aussi bien des structures politiques et économiques formelles que des codes de conduite, normes ou conventions informels – que se situe le pouvoir.

Profitons de cette période électorale pour exercer notre pleine conscience. Plutôt que de rechercher un homme providentiel qui n’existe que dans nos attentes, essayons de comprendre nos institutions et de remédier à notre insatisfaction chronique par des programmes plus réalistes et des attentes modérées.

rien

Sur le web. Texte d’opinion publié le 16 février 2017 dans La Tribune.

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  • Comment ne pas être déçu …… le VOTE BLANC c’est tout ce que ces guignols méritent.

  • Merci pour cet article qui redonne sa parole au bon sens ! A titre personnel, je n’attend qu’une chose de ces pantins, c’est qu’ils fassent le moins de dégâts possibles ! A cette égard, je reprendrai le titre du dernier ouvrage de Charles Gave « Sire ! Surtout ne faites rien ! ». Sincèrement, je pense que c’est aujourd’hui le mieux qu’on puisse en attendre.

    J’ai arrêté d’espérer que la clique de parasites qui nous dirige comprenne qu’il fallait laisser le peuple faire seul comme un grand plutôt que de chercher son bonheur malgré lui (sur quelles bases ? quelles valeurs ?). A mon sens, le plus gros problème c’est que 40 ans de socialisme et d’intervention de plus en plus profonde de l’état (au sens large) dans des domaines qui ne le concerne absolument pas ont profondément changé le paradigme d’une large partie de la population. Cette partie de la population ne peut même plus envisager que l’état ne soit pas là pour la « protéger, la « guider », l' »assister ». Il suffit de discuter de la possibilité de remplacer la Sécu par une assurance privée pour tomber dans les poncifs et voir la terreur naître dans les yeux de votre interlocuteur (quand vous n’êtes pas traité de néo-libéral fasciste).

    Par ailleurs, cette intervention tous azimuts et les discours de plus en plus démagogiques et ubuesques de soi-disant responsables politiques ont également profondément ancré l’idée de « droits » toujours plus vastes. Il n’est donc pas étonnant qu’une partie de la population ne soit (et ne sera) jamais satisfaite puisqu’elle a toujours « droit à » plus, toujours, tout le temps ! Se contenter de ce que l’on a est considéré comme un manque d’ambition ou vous fait passer pour un marginal. La notion de suppression des inégalités financières et sociales est devenu un totem alors que la seule notion qui vaille c’est l’égalité devant la loi.

    Quand la réalité va nous rattraper, car les faits sont têtus et les chiffres ne mentent pas, beaucoup de gens vont être complétement sidérés au sens psychiatrique du terme car ayant perdu toute capacité d’adaptation et d’action par eux-mêmes. Et généralement les réactions qui suivent cet état sont malheureusement extrêmement primaires et violentes.

  • Pour compléter cet article, il faudrait souligner que si nos dirigeants ont moins de pouvoir que ce que l’on pense, c’est aussi en raison du poids, de l’influence, voire des pressions qui s’exercent au niveau international. Dès lors, un bon président de la République sera d’abord celui qui saura préserver un minimum d’indépendance de notre pays en plus d’un programme cohérent.

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