Rendre la France compétitive : quelques propositions

Rendre les entreprises françaises compétitives suppose d’aligner leurs charges fiscales et sociales sur celles des entreprises allemandes.

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Rendre la France compétitive : quelques propositions

Publié le 19 septembre 2016
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Par Alain Mathieu.
Un article d’Emploi 2017

Rendre la France compétitive
Rendre la France compétitive-Coq By: alain cielasCC BY 2.0

Dans son livre La France pour la vie, Nicolas Sarkozy fixe un « objectif central » : la « convergence fiscale franco-allemande ».

Il déclare au journal Le Parisien le 21 juillet 2010 :

« Il ne peut y avoir de divergences entre la France et l’Allemagne pour les charges sur les entreprises ».

« Nous n’avons pas d’autre choix que celui d’une convergence économique avec l’Allemagne » écrit de son côté Valérie Pécresse.

Dans son livre Faire, François Fillon demande l’« harmonisation fiscale de la zone euro ».

Dans Une crise devenue française, Éric Woerth écrit :

« La convergence fiscale franco-allemande est plus que jamais une exigence. »

Bruno Le Maire est encore plus ambitieux : « Je veux que notre pays soit l’un des plus attractifs au monde en matière fiscale ».

 

Rendre la France compétitive avec une fiscalité moins insupportable

competition-rene-le-honzecIls ont raison : si les charges fiscales et sociales supportées par les entreprises françaises restent supérieures à celles des entreprises allemandes, qui sont leurs principales concurrentes en France et dans le monde, nos entreprises n’auront aucune chance de devenir compétitives, leurs ventes n’augmenteront pas, et la France ne retrouvera ni la croissance ni la baisse du chômage.

Comme par manque de marges bénéficiaires nos entreprises n’ont pas suffisamment investi depuis des années, leur compétitivité ne reviendra qu’avec des charges sensiblement inférieures à celles des allemandes.

En mars 2011 la Cour des comptes avait évalué à 3 % du PIB la différence des impôts sur les entreprises, et chiffré à 11 % du PIB les charges sociales patronales (à comparer à 5 % en Allemagne).

Depuis 2010, les charges sur les entreprises ont plus augmenté en France qu’en Allemagne. Une baisse de 170 milliards (8 % du PIB) des charges fiscales et sociales sur les entreprises est donc une estimation basse du minimum nécessaire pour avoir une France compétitive comme l’Allemagne.

Les entreprises allemandes sont soumises à des charges sociales sur les salaires moins élevées : pas de versements pour la formation (1,6 % des salaires bruts), le logement (0,55 %), les transports (6 milliards d’euros par an), la C3S (5,5 milliards) ; pour des salaires moyens les versements des entreprises allemandes sont inférieurs de 21 % des salaires brut aux versements des entreprises françaises : 5,5 % pour l’assurance-maladie, 4,5 % pour la retraite, 3 % pour l’assurance-chômage, 5,4% pour la famille, etc.

Les entreprises allemandes versent aussi moins d’impôts : pas de taxe professionnelle (CFE et CVAE), de taxe d’apprentissage, de taxe sur les salaires, des taux inférieurs pour la taxe foncière et l’impôt sur les bénéfices.

 

Rendre la France compétitive avec une baisse des dépenses publiques

La « convergence » exige que toutes ces différences soient supprimées, ce qui ne sera possible qu’avec une baisse importante des dépenses publiques.

À 57,5 % du PIB, nos dépenses publiques sont supérieures de 13,3 % du PIB (286 milliards) à celles de l’Allemagne : 5,6 % du PIB de différence sur les rémunérations publiques, 6,5 % pour les dépenses sociales (dont 3 % pour les pensions de retraite et 1,3 % pour l’indemnisation du chômage). Les dépenses publiques allemandes sont aussi inférieures pour la culture (0,7 % du PIB) et le logement (1,5% du PIB).

Pour rendre la France compétitive, pour que ses entreprises le soient, il faudra donc réduire fortement nos dépenses publiques.

En particulier, en ne mentionnant que les principales différences :

  • passer l’âge de départ à la retraite à 65 ans rapidement (en 2020 ?) pour tous
  • diminuer massivement le nombre de nos fonctionnaires

 

Certains pensent que ce n’est pas possible.

Alain Juppé explique (p. 140 de son livre Cinq ans pour l’emploi) :

« À ceux qui prétendent y arriver (à un taux de dépenses publiques de 50 % du PIB, soit une baisse de 7,5 %) en seulement un quinquennat, je dis que tous les pays qui avaient un défi comparable, la Suède et le Canada entre autres, ont mis dix ans pour y parvenir ».

Les chiffres de dépenses publiques (en % du PIB) publiés par l’OCDE sont pourtant les suivants :

Suède 

  • 1993 : 70,5 %
  • 1998 : 57,3, %

Soit une baisse de 13,2 % du PIB en 5 ans

Canada

  • 1992 : 52,4 ;
  • 1997 : 43,9,

Soit une baisse de 8,5 % en 5 ans

Une étude de France Stratégie sur « les leçons de l’expérience » montre que six pays développés ont réduit leurs dépenses publiques de 10 % ou plus de leur PIB en quelques années : Canada, Pays-Bas, Finlande, Irlande, Slovaquie, Suède.

Une baisse de 30 % du nombre de fonctionnaires pourrait être atteinte en passant leur horaire hebdomadaire à 39 heures (soit environ + 14 % d’heures de travail), et l’âge de départ à la retraite à 65 ans (soit environ + 12,5 % d’années de travail supplémentaires). On serait alors proche du nombre de fonctionnaires allemands, à population égale : 4,64 millions pour 80,6 millions d’habitants en Allemagne, contre 5,64 millions pour 66 millions d’habitants en France.

On y arriverait en gelant les embauches (400 000 par an) pendant 4 ans et demi. Bien entendu les syndicats de fonctionnaires s’y opposeront.

 

Une politique réalisable ?

Cette politique pour rendre la France compétitive ne sera réalisable que si elle a été annoncée à l’avance, et que la règlementation du droit de grève est alignée en France sur celle du Royaume-Uni et de l’Allemagne : interdiction des grèves pour motif politique ou de solidarité, vote des grèves à bulletins secrets, véritable service minimum (par exemple, pour les transports publics, sur le modèle italien : pas de grève pendant trois heures le matin et trois heures en fin d’après-midi).

Les réformes à mettre en œuvre pour enrayer le déclin économique de notre pays par rapport à l’Allemagne, au Royaume-Uni et aux pays de l’Europe du Nord sont donc des réformes structurelles, c’est-à-dire importantes. La majorité de la population y serait favorable. Mais les candidats à l’élection présidentielle, dont aucun n’a l’expérience du secteur privé, s’imaginent qu’en les annonçant ils ruineraient leurs chances d’être élus.

Pour les annoncer et ensuite les réaliser, il faudrait des dirigeants politiques convaincus, courageux et habiles.

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  • avant que notre pays soit compétitif , il va falloir réformer la société française , redéfinir le nombre de députés et sénateurs ainsi que le nombre de fonctionnaires qui ne servent à rien sinon mettre des bâtons dans les roues des entrepreneurs et autres lanceurs de projets divers et variés qui se voient taxés avant même d’avoir réussis à rendre leurs entreprises pérennes …. il est si facile de cumuler plusieurs mandats , et ensuite plusieurs retraites …. n’est-ce pas messieurs les députés et sénateurs ??? de plus il serait peut-être temps de réduire le nombre de députés qui sont en moyenne une grosse vingtaine pour voter des lois iniques qui vont à l’encontre des intérêts de leurs électeurs et souvent de leur circonscription ….de plus vu l’Age de nos sénateurs , et surtout du nombre de ceux ci qui siègent régulièrement …. encore une façon détournée de mettre le contribuable en coupe réglée et de piller les finances de notre pauvre pays ….je ne parle pas de tous les incompétents de tous poils cooptés dans les commissions diverses et variées qui sont aussi efficaces pour notre pays qu’un emplâtre sur une jambe de bois !!!! cessons de nous voiler la face !!!! nous sommes en guerre et nous chouchoutons nos ennemis , je n’ai jamais vu ça !!! si nous sommes en guerre faisons ce qu’il faut avant que nous le peuple ne décidions de le faire a la place de toute cette cohorte d’incapables !!!!

  • La diminution du nombre des fonctionnaires n’est pas tant une affaire de bloquer les embauches et de contenir les syndicats idéologiques que de faire disparaître les « tâches » dévolues aux administrations et au collectivités territoriales qui leur permettent de justifier l’existence de fonctionnaires.

    • C’est aussi un problème de status : on ne peut pas les virer même quand c’est indispensable. Regarder ce qui s’est passé lors de la réforme territoriale. Le Grand Lyon fusionne avec le département ? ce n’est pas grave, double personnel pour chaque poste !!!

      • Madogiwa zoku
        Vous leur donnez un siège près de la fenêtre, un titre ronflant, et ni bureau ni ordinateur ni téléphone. Il vous suffit ensuite de vérifier régulièrement qu’ils sont bien présents, et d’attendre qu’ils pantouflent d’eux mêmes.

    • Revoir la tâche des fonctionnaires nécessite des réformes de simplifications administratives, des programmes scolaires, des codes de procédure judiciaires dont la lourdeur pénalise aussi bien les entreprises que les particuliers…. Il y a certainement dans cette direction, des emplois à récupérer.
      Mais on ne peut pas imager rendre la France compétitive à partir de ces seules propositions.
      C’est surtout par la diminution du coût de travail global qu’on arrivera à rendre la France plus compétitive, ce qui nécessite des investissements et ne plus avoir peur des innovations techniques. Parmi celles-ci, il y a la nécessité de relancer l’énergie nucléaire et les recherches sur les générateurs de IV génération, mais aussi le gaz de schiste qui pourrait réduire notre dépendance vis à vis des énergies fossiles, les OGM… Sans cette réduction du coût du travail par les innovations technologies, impossible pour les entreprises de faire face à la concurrence des pays étrangers sans réduire les droits sociaux et les rémunérations. La dernière réforme du droit du travail, c’est aussi le prix que les français doivent maintenant payer faute d’avoir un gouvernement ayant la volonté de soutenir ces innovations technologiques qui auraient pu amené les ressources financières pour conserver les acquis.

  • Supprimer le Sénat et le statut politique des départements…

  • Ce matin Bruno Lemaire assumait supprimer x milliers de poste de fonctionnaire… Il a été totalement incapable de dire comment il comptait s’y prendre ( sauf le demander aux directeurs des administrations elle memes) ni fixer aucune stratégie à ce qu’il resterait de l’administration.

    Ultra courageux, il entend supprimer le statut public des emplois dans les collectivités territoriales … Mais pourquoi une personne qui instruit et accorde les permis de construire dans une mairie n’a t elle pas besoin d’une protection face aux pressions diverses, alors que rien ne justifie que les enseignants, les soignants les salariés des entreprises de transports : bus, métro, sncf… Étc soient fonctionnaires.

    Bref, ce n’est pas demain la veille que cela changera

    • Pourquoi faut-il demander un permis de construire à la mairie pour une maison, quand la simple obligation de répondre des nuisances éventuelles causées aux tiers par cette maison suffirait ?

  • Pour les annoncer et ensuite les réaliser, il faudrait des dirigeants politiques convaincus, courageux et habiles.

    Ou un événement extérieur du style faillite suite à une hausse des taux…
    La seule chose que l’on sent chez les socialos de droite, c’est de planter la TVA à 30%.
    Les touristes iront .. ailleurs 🙁

    • « Il faudrait des dirigeants politiques convaincus, courageux et habiles ».

      Certes, mais chacun sait que ces qualités sont antinomiques avec le carriérisme politique de nos dirigeants actuels et futurs.

      D’autre part, à partir du moment ou les français estiment que leur devenir doit être confié à un groupe restreint de personnes et à des élus issus majoritairement du secteur public, il ne faut pas attendre un quelconque allègement des charges étatiques pesant sur les entreprises.

      La France désindustrialisée est vouée presque exclusivement au tourisme; une activité qui deviendra à terme la seule activité privée d’importance.

  • Les commentaires sont fermés.

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L'auteur : Éric Pichet est professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School.

 

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