Par Mathieu Bédard.
Un article de l’Institut économique de Montréal
Une nouvelle étude du Fonds monétaire international (FMI) vient encore davantage discréditer le livre Le capital au XXIe siècle de Thomas Piketty. Cette fois-ci, c’est la vérification statistique de sa théorie qui ne fonctionne pas. Sa théorie est directement contredite par les faits. Ce grief s’ajoute à une liste qui ne finit plus de s’allonger.
Dans son livre publié en 2013 (ou 2014 pour la version anglaise), il proposait une théorie selon laquelle les inégalités empirent. Lorsque les revenus du capital, c’est-à-dire des investissements, sont plus importants que la croissance économique, les inégalités deviennent plus prononcées. Or, toujours selon Piketty, la croissance du capital a été plus rapide que la croissance de l’économie depuis les années 1940. Pour appuyer cette théorie il avait amassé une base de données impressionnante, utilisait de nombreux exemples historiques de la politique américaine, ainsi que des exemples historiques de la littérature pour illustrer ses propos.
Les abus du livre de Piketty
Dans un article précédent, j’ai expliqué comment les données présentées par Thomas Piketty avaient été manipulées pour abuser de la confiance de ses lecteurs en fabricant une courbe qui colle à sa théorie.
Par exemple, quand le chiffre pour la décennie de 1910 contredit sa thèse, qui voudrait que le début du siècle ait été une période d’inégalité croissante, il invente tout simplement un nouveau chiffre.
Ailleurs, il utilise plusieurs sources contradictoires pour construire, comme un Frankenstein, une courbe qui valide sa théorie, mais qui n’est fidèle à aucune des sources. Et ce n’est là que quelques-uns des nombreux exemples.
À cela, on pourrait ajouter la nonchalance avec laquelle il mélange les événements historiques, qu’il cite comme soutenant ses politiques publiques. Il présente par exemple certaines baisses du taux d’imposition pour les ménages riches comme ayant accentué les inégalités. Le problème, c’est que les dates et les variations ne sont pas les bonnes.
Même chose pour l’impôt sur l’héritage et les variations du salaire minimum américain, dont il mélange les dates, les augmentations et les politiciens responsables de ces augmentations. La chronologie de ces événements et de la mise en vigueur de ces politiques publiques est pourtant essentielle pour un livre dont la force est censée être les données historiques et leur interprétation.
Piketty et la littérature
Thomas Piketty utilise aussi dans son livre beaucoup d’exemples issue de la littérature. Il défend leur «pouvoir évocateur», qui révèle mieux les conditions économiques d’une époque que «l’analyse statistique ou théorique». C’est une affirmation difficilement défendable, surtout venant d’un spécialiste de la collecte de données. Mais en plus, les exemples utilisés s’avèrent avoir été picorés à gauche et à droite et n’être pas du tout représentatifs de la littérature en général.
Finalement, cette étude récente du FMI nous apprenait que la théorie centrale du livre de Piketty n’est pas validée par les faits. Bien que Thomas Piketty ait amassé un nombre impressionnant de données, il n’y a pas vraiment dans son livre de validation statistique de sa théorie. L’étude du FMI se prête au même exercice et montre qu’en réalité, lorsque le capital croît plus vite que l’économie, cela fait diminuer les inégalités dans 75 % des pays étudiés. Exactement l’inverse de ce que prétend Piketty !
L’étude souligne aussi le fait que les théories dominantes expliquant les inégalités, qui sont moins présentes dans le discours public, ont l’avantage d’être validées par l’analyse statistique. Elles font plutôt appel au changement dans le marché du travail, soulignant par exemple le fait que les travailleurs avec des habiletés en demande sont aujourd’hui beaucoup mieux payés que les autres, ou encore les changements dans l’appartenance aux syndicats, l’effet de l’innovation, une plus faible mixité sociale entre les différents classes sociales, etc.
Lorsqu’on fait le bilan de ces critiques, on se demande quelle partie du livre résiste à un examen minutieux. À cela, on doit ajouter la vision tronquée qu’il a des «riches» et son recyclage de théories marxistes maintes fois discréditées.
Finalement, deux ou trois ans plus tard, y a-t-il une partie du livre de Thomas Piketty qui soit toujours valable ?
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« en fabricant une courbe »
en fabriquant une courbe, please, le participe présent du verbe fabriquer n’a rien à voir avec le substantif fabricant : un fabricant de briques, fabriquant des briques dans son usine…
Il me semble avoir entendu ce genre de critique au sujet d’une courbe « climatique » dite « Hockey Stick » (Crosse de hockey), par un certain Michael Mann.
Données de base tout à fait valables, mais sur-pondération démentielle des chiffres « qui allaient dans le bon sens ».
« Finalement, deux ou trois ans plus tard, y a-t-il une partie du livre de Thomas Piketty qui soit toujours valable ? »
Les gens ne sont pas tant influencés par ce qui est vrai que par le groupe. Ce n’est pas ce qui est correct qui est déterminant, c’est là où est l’idéologie dominante (les valeurs dans le zeitgeist) du groupe d’appartenance.
Socialement et pour la plupart des crétins qui nous entourent, ce qui compte c’est tout d’abord qu’elle est cette idéologie dominante véhiculée par les détenteurs de la force normative et du pouvoir médiatique, politique, spirituel (etc…le pouvoir qui fait référence pour les gens peu importe la dimension concernée); et ensuite, c’est de savoir si le contenu présenté est compatible avec l’idéologie dominante.
Et il s’avère que Piketty est fortement compatible avec l’idéologie dominante.
Dès lors, Piketty fera comme Marx, alors que dans les milieux d’experts en économie on l’aura rangé au placard depuis longtemps, la société continuera à véhiculer sa théorie comme si c’était une vérité qui a tenu l’épreuve des faits, même si c’est faux.
Pas mieux.
Ecologie, libéralisme, port d’arme, féminisme, la masse beugle contre l’élite alors qu’elle répète son message point par point.
La bullshit fait le tour du monde plusieurs fois pendant que la vérité met ses souliers.
Aussi, il faut rappeler qu’il faut moins d’énergie pour produire et entretenir la bullshit que pour la démonter.
Je doute que cela change quelque chose : ceux qui s’intéressent vraiment à l’économie savent qu’il a écrit des faussetés, parmi ceux qui savent il y a des fans qui fermeront les yeux (dur d’avouer avoir été trompé), et les grands médias continueront à tresser des louanges à cet économiste. Les gens ne veulent malheureusement pas prendre le temps de s’informer, les résumés des médias sont plus intéressants pour eux. Mais persévérez, et à nous lecteurs de partager ces infos !
Je ne comprend toujours pas comment les « revenus du capital » peuvent être plus importants que l’Economie générale ???
En effet, « les revenus du capital » (dividendes d’investissements) ne sont jamais qu’une fraction de l’Economie générale !!!
As-t-on déjà vue une partie être supérieure à la somme de toutes les parties ???
Rien que ceci rend caduque tout le discours de Piketty !!!
On parle de croissance et pas de revenus brut
Une critique exacerbée du livre de Piketty par Monsieur Bledard sans arguments.
Entre Klugman/ Stiglitz qui soutiennent le livre de Piketty et qui verraient bien ce dernier en Prix Nobel, et l opinion (=jugement que l on porte sans démonstration) de monsieur Bledard, je prends l option 1, plus sure.
Question arguments, cliquez sur les liens et vous les aurez.. Si cela ne vous suffit pas, lisez « Anti-Piketty : Vive le Capital au XXIe siècle ! » de J-P Delsol qui est un recueil d’articles (argumentés!) démontant Picketty. Mais c’est un peu trop long et rébarbatif peut-être…
Quant à Stiglitz et Klugman, la lecture de leur pédigré est édifiant. Le fait d’avoir un prix Nobel d’économie n’en fait pas des omniscients et pour cause: Nobel dans le domaine de l’économie de l’information pour Stiglitz et du commerce international pour Klugman. Mais un titre de Nobel, cela est bien utile pour renforcer les convictions des convaincus…
Stiglitz, qui fut conseiller de Bill Clinton (!!), est considéré comme un néo-keynésien et collabore avec de nombreuses structures proches du courant aletrmondialiste.
Klugman s’affiche comme néo-keynésien, économiste « liberal » (ce qui veut dire « de gauche » aux US) et un grand pourfendeur des inégalités croissantes (selon lui évidemment) produites par le méchant capitalisme.
Il aurait été plutôt inquiétant que Stiglitz et Klugman ne soutiennent pas Picketty! :-)))
Pas sûr que cet excellent argumentaire suffise à contrebalancer le biais cognitif dénoncé dans l’article…
Monde de faquins…
Tiens j ai appris un mot. Merci Phil Zof.