
D’abord une satisfaction. Nous avons vu et entendu, pour l’entretien du 14 juillet avec le président de la République, deux journalistes vifs et pugnaces. Sans être grossiers.
Gilles Bouleau a été excellent et même David Pujadas n’a pas démérité (TF1).
Durant les échanges qui ont duré 45 minutes, François Hollande en général toujours courtois avec les médias s’est arrêté une ou deux fois au bord de l’énervement. Mais il s’est dominé et a répondu calmement.
J’ai relevé au moins trois sophismes de la part du président. Trois moments où son argumentation aurait dû être sinon battue en brèche du moins davantage poussée dans ses retranchements.
Le premier sophisme
Il concerne l’épisode ridicule des cheveux, la gabegie capillaire, la coiffure somptuaire. Navrant de devoir consacrer du temps à une péripétie qui a fait rire la France et couvert de honte les citoyens. Dans ce monde troublé, dans notre pays, un président a été suffisamment préoccupé de lui-même pour nous faire payer un coiffeur permanent à quasiment 10 000 euros par mois, exploité au point d’avoir engagé une instance prud’homale. Parce que François Hollande a fait réduire le budget de l’Élysée et diminué d’emblée son traitement, on ne devrait pas lui chercher des noises pour cette indécence ?
C’est un sophisme.
Car le scandale demeure. Son agacement en l’occurrence ne démontre que sa gêne face à son indélicatesse. Ses cheveux que pour une fois il n’avait pas teints ne sont certes pas une affaire d’État. Mais une minable goutte de plus dans des éléments à charge. Les talonnettes de Nicolas Sarkozy ne nous avaient rien coûté.
Deuxième sophisme
Il a perdu son pari sur le chômage mais affirme que sa politique est la bonne.
Alors que si elle l’avait été, il l’aurait gagné. Comme cette condition était de pure forme – pour faire croire à un sens du devoir et des responsabilités, même non remplie, elle ne l’entravera pas dans son désir de se représenter, fût-ce au prix d’une primaire dont la tenue ne fera que dégrader la fonction présidentielle et révéler ce à quoi il doit se résoudre pour être accepté par une fraction de la gauche.
Dernier sophisme
Il a son passage obligé contre le FN et les populismes. Il aurait manqué à la tradition. Comme sa caricature des projets de la droite qui aurait pour seule ambition de détruire ce qu’il a si bien accompli ! La fin de son quinquennat, logiquement, incite François Hollande à l’autosatisfaction puisqu’il n’a plus celle des autres.
À juste titre, les journalistes lui ont rappelé que le FN n’avait cessé de progresser durant son mandat et que donc sa politique pouvait être considérée comme responsable de ces avancées. Et lui-même coupable de n’avoir pas écouté ni convaincu cette masse de citoyens qui militaient au FN. Pas une seconde François Hollande n’a accepté de faire le lien entre l’impuissance de son quinquennat et le FN annoncé présent au second tour de l’élection présidentielle. Une posture facile de dénonciation plus qu’une lucidité sur le pouvoir et ses égarements.
Trois sophismes donc.
On pourrait soutenir que l’ensemble de l’exercice relève de la poudre à l’esprit puisqu’il consiste à changer l’eau en vin, le mauvais en mieux et le crépuscule en aurore.
Cette démarche est malheureusement trop souvent le lot des responsables politiques qui ont oublié l’exigence de vérité et de sincérité si chère à un Michel Rocard pourtant honoré par tous. Son intégrité a été d’autant plus célébrée qu’ainsi elle les dispensait de faire preuve de la même vertu, de la même éthique.
Mais trois sophismes pour François Hollande, ce n’est pas un si mauvais bilan !
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