Alain Juppé, un libéralisme bien curieux

Le libéralisme, ce sont des principes et pas quelques mesures. Alors, Alain Juppé est-il vraiment libéral ?

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Alain Juppé, un libéralisme bien curieux

Publié le 23 mai 2016
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Un article de l’IREF par Emmanuel Martin.

Alain Juppé By: The Official CTBTO PhotostreamCC BY 2.0

 

Le programme d’Alain Juppé serait-il « résolument libéral » comme cela a été présenté dans plusieurs médias ? L’homme providentiel qui terrassera le fléau du chômage en 5 ans serait-il réellement arrivé ? Le réformiste d’une France repliée sur elle-même et sur ses petits privilèges corporatistes émergerait-il enfin ? Une analyse de ses premières propositions peut permettre de répondre à la question. Un petit détour par un rappel d’où vient l’homme pourra en outre aider à porter une appréciation plus précise.

Alain Juppé est-il libéral ?

Que Juppé « le technocrate » prône une France libérée, voilà une bonne nouvelle. Mettre un terme aux 35 heures ? Une bonne idée. Favoriser les accords d’entreprises ? Idem. Mais pourquoi ne pas aller plus loin et déboulonner le sacro-saint « modèle social français » de son piédestal, plutôt que vouloir le défendre ? Protéger le monopole de la Sécu dans un monde qui bouge, est-ce vraiment libéral ? De même, pourquoi maintenir les Français dans le carcan injuste de la retraite par répartition avec une énième réforme paramétrique en repoussant l’âge de départ à 65 ans ? Baisser encore les charges sociales ? Mais qui va les payer au final, d’autant qu’on ligote en même temps les Français à la Sécu ? Pourquoi ne pas revenir sur le SMIC national unique ?

Supprimer l’ISF, impôt improductif s’il en est ? Il était temps. Mais Monsieur Juppé avait lui-même institué le « plafonnement du plafonnement » de l’ISF en 1995. Baisser les impôts des entreprises ? Parfait. Mais pour ensuite augmenter la TVA et la taxe carbone alors qu’elles touchent les moins lotis ? Baisser de 300 000 le nombre de fonctionnaires ? Ce ne représenterait que 5% de la masse totale : pourquoi pas davantage d’audace, notamment dans le cadre d’une remise à plat approfondie et transparente des missions de l’État et des collectivités ? De même, pourquoi avoir peur de revenir sur le statut de la fonction publique ? Proposer certaines mesures allant dans le sens d’un léger desserrement de l’étau étatique dans un pays où l’État dépense 57 % des ressources nationales, voilà un libéralisme bien timide…

Le libéralisme, ce sont en réalité des principes, et pas quelques mesures. Être libéral, c’est une philosophie sociale cohérente. C’est défendre une société fondée sur la liberté et la responsabilité, qui fait confiance à l’homme, qui laisse la liberté du choix, notamment en matière de protection sociale, qui cherche à limiter le pouvoir politique afin de laisser s’épanouir la société civile. Ce n’est pas afficher une liste de propositions plus ou moins « pro-business » ou, pire, « pro-riches », compensées par le maintien du « modèle social français », et chiffrées avec plus ou moins de sérieux. Être libéral c’est aussi, dans la ligne de cette philosophie, une cohérence dans la vie d’un homme avec des valeurs d’état de droit, d’égalité devant la loi, de transparence et de justice. On n’a pas juste des idées libérales, on vit comme un libéral : être libéral c’est d’abord une attitude.

Or, que penser de ce point de vue d’un homme critiqué dans les années 90 pour avoir fait refaire son appartement, loué à un prix préférentiel aux frais des contribuables ? De quelqu’un qui avait ordonné aux services de la ville de Paris de diminuer le loyer de son fils, logé de manière préférentielle lui aussi ? Pour déclarer ensuite rester « droit dans ses bottes ». Que dire évidemment de sa condamnation pour avoir été au centre d’un financement occulte du RPR, condamné à 14 mois de prison avec sursis et un an d’inéligibilité ? Durant sa retraite au Canada où il enseignait à l’école nationale d’administration publique, certains s’étaient offusqués qu’après ces péripéties, l’homme politique français « à la diète » puisse enseigner à des futurs hauts fonctionnaires. En France, c’est normal.

On le voit, les valeurs libérales semblent encore assez lointaines chez Monsieur Juppé.

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  • Juppé reste ancré sur un socle marxiste même si il cherche à se démarquer un petit peu de Hollande, compte tenu des résultats catastrophiques de celui-ci. Il ne faut voir dans les mesurettes que de la tactique politicienne.N’oublions pas non plus dans le passé son délire écolo/bio qui dénote son absence totale de discernement et le fait qu’il prend une position sans connaître ses dossiers.C’est la même chose pour l’islam : il affirme son côté islamophile mais il admet qu’il n’a jamais rien lu du coran ou des haditth et il ne connaît pas l’histoire de ce système politique.Il a été un des décideurs de la guerre contre la Lybie sans rien comprendre à la géopolitique de cette zone et sans mesurer les impacts sur l’expansion du terrorisme.Il n’a jamais fait l’effort d’écouter les arguments de ceux qui voyaient l’importance stratégique de garder Khadafi.Il n’a pas brillé par sa pertinence sur le dossier Russe/Ukrainien ou le TAFTA .
    Quand en 50 ans de carrière on n’a rien réussi il y a peu de chances que cela change
    Juppé c’est une nouvelle version de Hollande : c’est pour cela que la gauche le plébiscite : ils le préfèrent même à Macron. Il est pire qu’Hollande car il cache son jeu ( en ratissant plus à droite qu’Hollande) et essaye de nous rouler dans la farine.

    • En effet, Juppé est le piège et la taupe de la gauche, d’où les sondages bienveillants mais grotesques.
      De plus, il fait parti des «Young Leaders»de la French American Foundation : »Son programme phare «Young Leaders» a été créé en 1981 pour renforcer les liens entre la France et les Etats-Unis, et comprend aujourd’hui plus de 450 dirigeants qui traduisent au plus haut niveau les relations entre les deux pays dans le domaine de l’entreprise, des médias, de la recherche, de la politique, du secteur militaire et de la culture. Ses participants incluent le Président de la République François Hollande et le Maire de Bordeaux Alain Juppé, ainsi que l’ancien Président des Etats – Unis Bill Clinton et l’ancienne Secrétaire d’Etat Hillary Clinton. » mais aussi, Fleur Pellerin, Emmanuel Macron, Valérie Pécresse, Nathalie Kosciusko-Morizet, Pierre Moscovici, Arnaud Montebourg, Marisol Touraine, Najat Vallaud-Belkacem, Mr Vallaud, Aquilino Morelle (plume du Président), etc…
      http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/hollande-et-sa-clique-de-young-138241
      La source officielle (et la listes par année) « http://french-american.org/actions/echanges/young-leaders/yl-list/ « a …disparu

    • prolux ,

      Je partage votre analyse sur Juppé, qui comme Hollande , vend su socialisme en effectuant des corrections paramètriques à la marge , pour se différencier de not’ bon président…

  • Et les médias depuis des mois essaient de nous persuader que c’est l’homme providentiel: l’élite a décidé que c’est Juppé qui gagnerait la primaire de droite (dnt on ne connaît ni les candidats, ni les électeurs) et que par conséquent, il gagnerait la présidentielle puisque Hollande est foutu et M. Le Pen incorrecte… C’est sûr que ce n’est pas Juppé qui remettra en cause le système qui vampirise le pays…

  • il fera ce que chaque élu fait une fois le pouvoir entre les mains : il travaillera pour sa caste ; aucun des précédents dirigeants français n’a était capable de travailler pour tout les français , il y a toujours un tri , et juppé ne déroguera pas à cette attitude ; menteur , profitteur et incompétent , comme les autres ;

  • Rien à redire sur l’article… On peut voir en Belgique ce qu’on peut attendre d’un gouvernement que les socialistes qualifient de « libéral ». Des réductions de dépenses, une attitude plus ferme face aux « mouvements sociaux », mais aucune réforme structurelle digne de ce nom. Rien qu’un gouvernement de l’autre bord ne puisse défaire en six mois. Ni simplification du système fiscal, ni remise en cause de la place des syndicats, ni privatisation même partielle de la « sécurité sociale », etc. Mais Juppé s’en fout: les libéraux voteront pour lui, faute de mieux.

  • Le seul Libéral sous la Vème République a été Alain Madelin; Ministre de l’Industrie dans le Gouvernement Chirac/Juppé en 1994. Et il a été licencié par Chirac et Juppé à cause de son libéralisme trop mis en avant.. Alors où se trouve le Libéralisme sous la 5ème République.? Nulle part et surtout nulle part chez aucun des candidats « Républicains » qui s’en réfèrent.

    • Le libéralisme il se trouve aux origines de la Vème dans le plan Rueff.

      • +1
        Ajoutons que les choses sont toujours plus compliqué qu’au premier abord : certes l’État est monté à 150% du PIB marchand, mais d’un autre coté on a privatisé le téléphone, Renault et les banques nationalisées en 45, éclaté l’ORTF, supprimé le contrôle des prix, remis du capitalisme dans la retraite (assurance-vie, contrat « Madelin »), etc.
        Il y a de l’espoir quand même

  • Alain JUPPÉ n’est-il pas « le meilleur d’entre nous » qui en…
    1969 a voté Alain KRIVINE, candidat de la Ligue communiste, au premier tour de l’élection présidentielle ?
    1970 a intégré l’Ena promoteur de la Médiocratie ?
    1972 a intégré l’Inspection Générale des Finances dont l’efficacité est connue de tous: aucun budget de l’État n’a été à l’équilibre depuis 1974 ?
    1995 a mis un terme à ses arrangements locatifs avec la Mairie de Paris pour lui et son Fils sous la pression en refusant de s’excuser ?
    1995 a poussé Alain MADELIN à démissionner ?
    1995 a supprimé le plafonnement de l’ISF, provoquant une fuite de capitaux et de talents à l’étranger ?
    1995 a capitulé devant la bronca des Fonctionnaires ?
    1996 a valorisé Thomson à un franc symbolique ?
    1996 a augmenté les divers prélèvements sans réformer ?
    1997 a dissout la Chambre ?
    1999 a été mis en examen pour « abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux, et prise illégale d’intérêt » ?
    2002 a liquidé sa retraite de la Fonction Publique à 57 ans ?
    2004 a été condamné en 1ère instance à 18 mois de prison avec sursis et à 10 ans d’inéligibilité ? Peine réduite en appel à 14 mois de prison avec sursis et un an d’inéligibilité.
    2007 et après, a mis en œuvre sa politique économique bordelaise « panem et circenses » ?
    2007 a déclaré ne briguer que le Mandat de Maire avant d’accepter promptement de devenir Ministre d’État ?
    2011 a décidé d’aller en guerre en LYBIE pour le résultat que nous connaissons ?
    2011 a signé le Contrat des Mistral ?
    2013 a hissé les impôts locaux à 794€/hab., soit +36,7% depuis 2001?
    2014 a dépensé 1.417€/hab. en dépenses courantes bordelaises ?
    2014 a présenté son projet bordelais de centre islamiste de 12000m2 ?
    2014 a refusé de livrer les Mistral, Contrat signé en 2011… par lui-même ?
    2014 a hissé BORDEAUX sur le podium des villes les plus embouteillées : 23mn/h. de conduite ?
    2015 a augmenté de 5% les impôts locaux bordelais?
    2015 a réussi son epic fail des accès au nouveau stade (cf. sa politique économique depuis 2007) ?
    2017 voudra être Président à 72 ans après 15 ans de retraite ? Cherchez l’erreur, place aux Jeunes !

    Bref, JUPPÉ le meilleur des impayables Thrombonnards®—sauf avec l’argent du Contribuable—qui sévissent dans les fromages du Pays de l’escargot lancé au galop contre le mur économique !

    Encore un « responsable mais pas coupable », et encore moins redevable de ses actes.

    Comme écrivait Charles-Louis de SECONDAT:
    « Un homme n’est pas malheureux parce qu’il a de l’ambition, mais parce qu’il en est dévoré ».

    Il était possible de voir le « meilleur d’entre nous »—retraité à 57 ans de la Fonction Publique… !—se faire moucher par un Communiste pragmatique.
    C’était par ici: http://www.dreuz.info/2014/09/23/video-alain-juppe-se-prend-une-lecon-de-morale-de-lambassadeur-de-chine/#sthash.cxmu3ltA.dpbs
    Depuis la vidéo a été censurée… comme il se doit dans un Pays démocratique tel que le nôtre!

    Nous Citoyens, limitons les Mandats pour que la Politique soit au Service du Bien commun et non un Métier.
    Et destituons les condamnés de leur/s Mandat/s…

    • Le nouveau stade à Bordeaux c’est collector les Girondins ont réussi a faire une affluence moyenne en baisse par rapport à l’année dernière ou ils jouaient encore à Lescure et l’Union Bordeaux Bègles résidant maintenant à Lescure fait une meilleure affluence que les Girondins.

      Le plus drôle c’est que la raison invoqué pour la construction d’un nouveau stade était notamment les difficultés d’accès à Lescure.
      C’est vrai qu’avec 200 000 personnes vivant à moins de 15 min à pied du Parc de Lescure et la desserte par les lignes de Tram A et B c’est vachement plus dur de s’y rendre qu’au Matmut perdu au milieu de nulle part dans le quartier de Le Lac.

      • Effectivement, avec son nouveau stade Alain JUPPÉ arrive même à « thromboser » la rocade comme mercredi 11-05-2016.
        Attendons de voir les restrictions de circulation dans le quartier des bassins à flot—à rebaptiser quartier « passe-moi le sel par la fenêtre » au vu des immeubles en vis-à-vis à quelques mètres les uns des autres— au mois de juin.

        Décidément, tout ce qu’il aura fait de bien il l’aura fait… mal.
        Et tout ce qu’il aura fait de mal il l’aura fait… bien.

        Donnons-lui tout de même crédit d’avoir rendu Bordeaux à son fleuve et inversement.
        Certes le coût à payer a été l’éradication de beaucoup de TPE le long des quais.
        Comme ce sera le cas sur l’axe Fondaudège—barrière du Médoc, avec le Tram.

        Alain JUPPÉ a aussi réussi le ravalement complet de la place de la Bourse et de la rue Daviaud entre autres.
        Mais que n’est-il pas facile n’est-il pas facile de faire avec l’argent des autres vu l’arrêté municipal qui rend obligatoire le ravalement des bâtiments privés une fois que la « Bureaucrature » locale l’a décidée?

  • Le libéralisme, ce sont des principes et pas … des (quelques) mesures concrètes.

    J’ai raté quelque chose dans ce que voulait dire l’auteur ou alors j’ai un peu l’impression que son message était de remplacer le culte de l’Etat par le culte de la liberté.

    Ca reste bien philosophique et intellectuel comme point de vue, assez loin des préoccupation des gens : on ne nourrit pas ses gosses avec des principes et ca valait bien la peine de faire la chasse aux curés, imams, rabbins etc… pour claironner des principes en principe politique..

  • « Être libéral, c’est une philosophie sociale cohérente ». Être énarque en est une autre tout aussi cohérente. Être un repris de justice est gage de professionnalisme pour un homme politique en France.

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