Après la loi Macron, la loi Travail : est-ce le moment social-libéral ?

Sommes-nous en train d’assister au retour en force des libertés économiques ? Le PS est-il en train de changer ?

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Emmanuel Macron à La French Tech Night en janvier 2016 (Crédits : Christophe Pelletier, CC-BY-NC-SA 2.0)

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Après la loi Macron, la loi Travail : est-ce le moment social-libéral ?

Publié le 13 avril 2016
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Par Nicolas Marques.
Un article de l’Institut économique Molinari

Emmanuel Macron à La French Tech Night en janvier 2016
Emmanuel Macron à La French Tech Night en janvier 2016 (Crédits : Christophe Pelletier, CC-BY-NC-SA 2.0)

Nous vivons un moment intéressant, riche d’enseignements. Il y a quelques semaines, une partie des commentateurs se mettait à espérer. Et si les choses continuaient à bouger ? Et si, après la Loi Macron, le projet de Loi El Khomri confirmait le changement réformiste, la révolution au sens propre du terme, avec un retour en force des libertés économiques ? Un moment historique, comme en 1789, avec l’abolition des corporations qui corsetaient l’activité, ou en 1986 avec la remise en avant des idées de concurrence.

Le projet de Loi « travail » apparaissait comme l’étendard d’une France qui bouge et, en son sein, d’un Parti socialiste faisant sa mue. Il semblait marquer une rupture avec son inclination à penser les rapports sociaux sous le prisme de la lutte des classes, avec des employeurs ennemis de leurs salariés. Pour reprendre une image fréquemment commentée, le PS ferait son « Bad Godesberg », à l’image du SPD en 1959, ce qui permettrait d’espérer une approche bien plus pragmatique des questions économiques.

La rupture attendue

Au lieu de continuer à prétendre que « tout avait essayé » pour juguler le chômage, on acceptait enfin de penser différemment et de reprendre des recettes ayant fait leurs preuves chez nos voisins, de droite comme de gauche. Une rupture attendue dans une France caractérisée par une fiscalité forte, une réglementation élevée, des sujets formations non résolus, des déficits sociaux récurrents.

La rationalité économique plaidait pour la réforme. Mais que voit-on ? Il aura suffi d’une pétition ingénieuse d’un point de vue marketing et de quelques cortèges pour que le gouvernement recule et ampute son projet. On aura beau s’exclamer sur le cynisme d’une situation où quelques centaines de milliers de personnes enrayent un processus de réforme fondamental, il est certain que l’immense majorité des pétitionnaires ou manifestants ne s’est jamais trouvée devant la nécessité de licencier un salarié. Elle ne peut pas comprendre tout l’intérêt d’un assouplissement du marché du travail, pour les employeurs comme pour les chômeurs.

Mais le vrai sujet est ailleurs. Dans une société démocratique complexe, la réforme économique est, par essence, difficile car elle suscite des craintes. Les défenseurs du « statu quo » peuvent s’en remettre à des arguments rodés. Ils bénéficient d’une rente de situation, tandis que les promoteurs du changement doivent faire leurs preuves en faisant valoir son caractère « gagnant-gagnant ». D’où la « tyrannie du statu quo » dépeinte par Milton et Rose Friedman.

Le consensus libéral

C’est pourquoi la libéralisation économique ne s’improvise pas. Dans une démocratie, le débat est ouvert. Il est normal que tout le monde s’exprime, y compris ceux qui n’ont ni l’expérience ni le recul permettant de comprendre l’intérêt du changement. Pour réformer, il faut au préalable créer des consensus sur lesquels s’appuyer. Cette étape est fondamentale car, avant de se décréter, la liberté est un état d’esprit. C’est une revendication qui prend sa force dans la base, le fameux laissez-nous faire.

Certes, à un moment elle peut se matérialiser par une loi, mais la législation ne fait qu’avaliser, ou non, une aspiration plus ou moins comprise et partagée. L’expérience montre qu’au-delà de circonstances dramatiques exceptionnelles, cette revendication n’émerge pas sans travail préalable. Les réformes des années 1980 et 1990, conduites par des gouvernements libéraux (Angleterre, Canada) ou travaillistes (Nouvelle-Zélande) ont été précédées de plusieurs années, voire décennies, de diffusion d’idées en direction de l’opinion publique et des corps intermédiaires.

Plus le système est centralisé, plus les décisions sont prises loin des acteurs, plus les interactions sont complexes à appréhender et plus ce travail des idées sera ardu et décisif. C’est ce qui a manqué cruellement aujourd’hui. On pourrait penser que ce travail de fond sera fait par les hommes politiques, mais c’est un leurre. Prisonniers d’une multiplicité d’échéances, ils en sont de plus en plus réduits à faire avec l’opinion publique, en se résignant à mettre en avant des changements limités.

La clef du succès est ailleurs. Elle réside dans la capacité à faire émerger dans la société civile des organisations capables de faire bouger le statu quo, en diffusant des idées innovantes challengeant les idées reçues. D’où l’importance des « think-tanks » dans les processus réformistes. Ils peuvent faire le travail de fond rendant possible le changement durable.

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