Par Jean-Yves Naudet.
Il semblerait que le Pape bashing soit devenu un sport à la mode.
Dans une société libérale, la liberté d’opinion est primordiale et chacun peut critiquer l’opinion des autres. Encore faut-il respecter les personnes et donc les croyances, savoir les analyser et chercher à convaincre en connaissance de cause.
Si elle indique que « la République ne reconnait et ne subventionne aucun culte » (article 2), la loi de séparation de 1905 précise que « La République assure la liberté de conscience » (Article 1).
Chaque religion a ses propres règles
Dans une société libre, personne n’est obligé de les partager. Le catholicisme n’y échappe pas, y compris pour les règles d’élection du pape : laissons chacun s’organiser selon ses croyances et mieux vaut, si on veut convaincre, argumenter que dénigrer.
Dans le catholicisme, on distingue ce qui est doctrinal (ce que les croyants doivent donc croire) et ce qui est prudentiel (domaine d’application qui relève plus des laïcs que des clercs mais pour lequel le pape ou les évêques peuvent donner leur analyse).
Dans le domaine prudentiel, chaque pape a sa personnalité et son histoire et chacun comprendra qu’un Jean-Paul II, confronté au totalitarisme communiste, soit spontanément plus en phase avec le libre marché qu’un François, qui n’a connu que le capitalisme de connivence, qui est une version fort peu libérale du marché.
Beaucoup de commentateurs s’étonnent des critiques violentes de François contre l’argent, qui peut être, selon lui, une idole. La réalité est plus subtile et le Christ lui-même, puis l’Église, ont considéré l’argent comme un bon serviteur et un mauvais maître. L’Évangile multiplie les exemples du bon usage de l’argent, depuis l’obole de la veuve jusqu’au bon Samaritain qui laisse de l’argent pour soigner le blessé, en passant par la parabole des talents.
Les critiques de l’Église et de François contre l’idolâtrie de l’argent signifient en revanche que l’horizon humain ne s’arrête pas à la matière, puisque « l’Homme ne vit pas seulement de pain », et que l’argent n’est pas le stade indépassable de l’Homme qui est aussi un être culturel, spirituel, affectif. Ainsi, il n’est pas besoin d’être croyant pour partager l’idée de Jean-Paul II suivant laquelle l’histoire de l’Homme n’est pas celle de la lutte des classes mais du « besoin d’aimer et d’être aimé ». L’argent est un moyen indispensable, il n’est pas la finalité unique des Hommes. L’idolâtrie n’est jamais bonne, celle de l’argent comme celle des people ou des leaders politiques, y compris celle des posters de Che Guevara, sauf à devenir l’homme unidimensionnel…
Sur le fond, il faut comprendre qu’un pape se situe dans une tradition, une doctrine, en l’occurrence ici une doctrine sociale dont il accepte les principes. Il n’est donc pas un homme politique qui, dans une alternance démocratiquement souhaitable, viendrait avec un programme neuf. De ce point de vue, François dit bien qu’il est un fils de l’Église et qu’il n’entend pas modifier sa doctrine sociale mais y ajouter des éléments, comme on le voit avec son intérêt pour la nature et l’écologie. Or cette doctrine sociale a des principes essentiels, de la dignité de la personne à la subsidiarité, du rôle de la société civile (les groupes intermédiaires comme les associations ou les entreprises) à la propriété privée, qui conduisent tout naturellement vers l’économie de marché.
La subsidiarité notamment écarte de facto toute tentation collectiviste et nécessite que les choses se fassent au niveau le plus bas possible : ce qu’une entreprise peut faire, ce n’est pas à une collectivité publique de le faire ; aux libéraux, aux économistes de montrer que l’entreprise et le marché peuvent à peu près tout faire. Quand Jean-Paul II dans Centesimus annus affirme que le marché libre est « l’instrument le plus approprié pour répartir les ressources et répondre efficacement aux besoins » cela vaut pour ses successeurs aussi.
Certes, on ne peut pas nier que dans ses textes majeurs (Evangelii Gaudium et Laudato si’) François a des propos très critiques vis-à - vis du marché, qui ont pu heurter non seulement le libéraux non catholiques mais aussi les catholiques attachés à la liberté économique.
Pas de marché sans règles morales
Je comprends donc parfaitement ces réactions légitimes. Mais il faut comprendre aussi le sens de ce que dit François. Par exemple, la « dictature de l’économie sans visage » vise l’irresponsabilité. Or, pour un libéral, la liberté est indissociable de la responsabilité et cette responsabilité étant celle de personnes, elle doit donc avoir un visage. Mais tous les discours des papes sur le marché, y compris de François, ont une finalité éthique : rappeler qu’il n’existe pas de marché sans règles morales, à commencer par l’honnêteté, comme le soulignait Hayek ; le marché repose sur la confiance dans le contrat signé, la parole donnée. Cette confiance nécessite des règles morales, à commencer par la loyauté dans les contrats. C’est cela d’abord le cœur du message du pape.
Critiquer le marché « sauvage », sans règles, n’est pas critiquer l’économie de marché mais rappeler qu’il nécessite justement des institutions, un État de droit et notamment des droits de propriété exclusifs et transférables, clairement définis.
Pour prendre un exemple concret, les libéraux seraient beaucoup plus pertinents s’ils expliquaient au pape et aux autres qu’en matière d’environnement, de gestion des ressources rares, des déchets ou des espèces animales ou végétales, le problème majeur est de définir clairement des droits de propriété qui éviteraient tout gaspillage et règleraient ces problèmes bien mieux qu’une réglementation étatique.
Quand on veut convaincre et faire avancer les idées de liberté, il vaut bien mieux une argumentation convaincante qu’une ironie qui braque au lieu de convaincre. Et il faut choisir des arguments justes. On ne peut pas par exemple reprocher aux catholiques de critiquer le microcrédit en prenant l’exemple des mollahs afghans alors que les derniers papes ont tous soutenu le micro-crédit.
Il faut donc replacer les propos du pape François dans la perspective de l’ensemble de la doctrine sociale d’Église que les libéraux devraient mieux étudier et connaître1et dont ils verraient qu’elle n’est en rien contraire à l’économie de marché. Qu’elle insiste sur les dimensions morales est pour l’Église l’un de ses rôles.
En revanche, il est tout à fait vrai que les économistes et les libéraux en général seraient beaucoup plus utiles en argumentant pour expliquer, avec des exemples concrets, comment le marché et la liberté économique, ce que Jean-Paul II avait fort bien compris, ont fait sortir des peuples entier de la misère et que la lutte contre la pauvreté passe plus par la liberté économique que par le seul partage. Mais l’un n’empêche pas l’autre et la doctrine sociale de l’Église insiste sur le double devoir des catholiques et des autres, « créez et partagez », augmenter la taille du gâteau et de manière volontaire soutenir ceux qui en ont besoin.
Pour achever de convertir totalement les gens, y compris les papes, à l’économie de marché, il vaut mieux argumenter que critiquer, montrer les effets positifs du marché plus que dénigrer l’autre. Le libéral convaincu n’a pas besoin d’utiliser d’autres arguments que la raison, qui elle aussi est l’un des piliers, à côté de la foi, de la doctrine sociale de l’Église.
- Voir Jean-Yves Naudet La doctrine sociale de l’Église, tome I, une éthique économique pour notre temps » (PUAM 2012) et La doctrine sociale de l’Église, Tome II, les choses nouvelles d’aujourd’hui » (PUAM 2015). ↩
Je ne suis pas d’accord, le Pape François est né en Argentine, et il devrait s’avoir que l’histoire de son pays n’est pas très glorieuse. Dans les années 20 l’Argentine était la 5° puissance économique du monde, le PIB par habitant était plus élevé que l’Allemagne. C’est bien les politiques de gauches qui ont dégrader le développements depuis. Le Chili en 2012, suite à 40 ans de politique libéral, est passé en tête sur l’indice de développement humain par rapport à tous les pays de l’Amérique du Sud.
Le Pape participe à la propagande Marxiste.
Que le Pape critique le capitalisme dans ces excès, je veux bien, mais dans son encyclique Laudato Si, c’est une critique insidieuse sous-jacente et peu constructive. Le capitalisme est présenté comme la source de tous les maux, ce qui est complètement faux. La misère la faim, la violence sont bien moindres dans les pays capitalistes que les autres (Moyen orient, Afrique, …). Si le monde évolue vers le bien, ce n’est pas par le socialisme pour ne pas dire communisme.
Le plus choquant, c’est que dans le même temps, le Pape félicite des pays particulièrement répugnants comme Cuba de leur succès (?), sans un mot pour les opposants. Ne parlons pas de sa visite choquante en Bolivie avec ce cadeau de Christ en croix sur la faucille et le marteau.
Ce Pape est communiste.
Sa parole ou son avis influence vraiment des gens ?
Si c’est le cas, je les plains.
Le Pape.. humm.. devient un rapporteur officiel des enviro-menteurs climatiques, un vendeur de collectivisme et ses bienfaits,
en fin de compte par ses propos il nuit a la classe pauvre et ouvrière , ne sait-il pas que tout les régimes collectivistes , socialistes ,communistes et dictatoriaux ne font que perpétuer la pauvreté et la perte des libertés individuelles. mais un peuple soumis est plus facile a endoctriner. de la son choix.
Belle tentative pour défendre ce pape. Perso, je m en tiens à ses récents ecrits : une prose malhabile pétrie de gloubiboulga marxiste, zéro absolu spirituel, 20/20 propagande. Pour les actes posés ça démarre bizarre , j attends et jugerai sur pièce et résultats.
Vous avez raison sur le faut qu’il vaut mieux une argumentation construite que la critique pure et simple.
Il n’empêche que dans la lecture de la récente encyclique, on peut être très gêné (pour ne pas dire plus) que l’analyse de la réalité soit passée au filtre des idéologies marxiste et écologiste. Une fois lue cette analyse biaisée du réel, on n’a plus tellement envie de lire la suite (qui est censée s’appuyer sur cette analyse)
Après tout le respect et toute l’admiration que Saint Jean-Paul II et benoît XVI avaient réussi a susciter dans mon esprit et dans mon cÅ“ur de parpaillot, je dois dire que je suis extrêmement partagé sur la façon dont François promeut la doctrine sociale de l’Eglise. Bien que je comprenne et approuve la façon dont M. Naudet essaie de concilier la forme et le fond de l’action de François, il n’en reste pas moins que le fait que ce pape suscite tant de réserves à l’intérieur même de la chrétienté n’est pas sain. D’autant plus que ces réserves tombent au plus mauvais moment de l’histoire de l’Occident dont j’ai le sentiment qu’il joue actuellement sa survie face aux attaques d’un nouveau totalitarisme à l’échelle planétaire.
+1 à Philippe perso je suis bien content d’être ds un mouvement chretien oecuménique.
+1 L’Å“cuménisme est une des rare lumières qui brille encore dans ces temps sombres
L’Occident est mal parti, j’en viens même à me demander si l’Eglise n’est pas en train d’effectuer un replis stratégique face au nihilisme et au dogmatisme qui règne sur ce continent. Quand je vois les libéraux tirer à ce point sur un texte qui dénonce le consumérisme et le matérialisme, j’en vient à douter de la capacité pour ce continent à se relever des ravages marxistes.
Il va falloir du temps pour casser la propagande socialiste qui a fait le holdup gauchiste habituel sur cette encyclique (que personne n’a lu bien évidemment)
Juste un passage :
« Rappelons le principe de subsidiarité qui donne la liberté au développement des capacités présentes à tous les niveaux, mais qui exige en même temps plus de responsabilité pour le bien commun de la part de celui qui détient plus de pouvoir. »
Deux options :
Soit c’est du marxisme parce que les gauchistes ont dit que c’est du marxisme … (soupir)
Soit le Pape ne se donne même pas la peine de défendre les principes fondamentaux du libéralisme (la subsidiarité, la liberté et la responsabilité) il les pose carrément comme axiomes, comme principe.
Amusez vous à trouver le passage où le Pape explique qu’il ne fallait pas sauver les banques après la crise de 2009 mais laisser agir le principe de Schumpeter ou ce passage qui semble sortir directement de Contrepoint : « Souvent la politique elle-même est responsable de son propre discrédit, à cause de la corruption et du manque de bonnes politiques publiques. »
etc, etc, etc…
Ca fait une dizaine d’article que je vois sur cette encyclique et je commence à vraiment me demander si quelqu’un l’a lu …
Je l’ai lue et relue, je confirme ce que j’ai écrit plus haut, ce Pape est communiste.
Citez moi des passages : tout le texte est contradictoire, ce qui en fait un message pratiquement impossible à juger de prime abord.
« les progrès scientifiques les plus extraordinaires, les prouesses techniques les plus étonnantes, la croissance économique la plus prodigieuse, si elles ne s’accompagnent d’un authentique progrès social et moral, se retournent en définitive contre l’homme »
Soit vous lisez cela comme un ode au communisme et une attaque contre la « société de consommation »
Soit vous mettez cela en rapport avec la doctrine marxiste : pour Marx, le progrès se définit dans l’évolution de l’activité humaine : ce sont pour lui les conditions économiques et matérielles qui déterminent entièrement l’évolution de la société et donc le progrès. Le pape dit exactement le contraire de Marx : qu’il faut séparer les pouvoirs : le pouvoir spirituel d’un coté (social et moral), le pouvoir temporel de l’autre, ce qui est une des bases du libéralisme classique : la séparation des pouvoir.
« Le soin des âmes n’appartient pas au Magistrat » – Locke
La Pape à longueur de pages accuse le capitalisme, qu’il se garde bien de nommer, de tous les maux de la planète, ce qui est faux.
Par contre, pas un mot sur les pauvres créés par ses amis de Cuba, de Bolivie, du Venezuela, sans parler de la Corée du Nord, seul pays où la famine de masse existe encore.
Aller complimenter Castro pour ses réalisations, et dire une messe sous le portrait du Che, c’est quoi si ce n’est une ode au communisme.
Le communisme a perdu. La chute du mur c’était il y a 25 ans. Il ne reste plus que des micro états qui ne représentent rien dans le monde (Cuba, Corée …) et des zones de chaos où les gens sont complétement perdus ou font des expériences bizarres comme en Amérique latine.
Son nouvel avatar, c’est la social-démocratie et le capitalisme de connivence. C’est cela que la Pape dénonce : consumérisme, productivisme etc…
La doctrine sociale de l’Etat n’a jamais été d’imputer aux riches et au capitalisme les causes des malheurs des pauvres. François exhorte en plus les Etats à prendre des mesures permettant de changer totalement de système économique et l’orienter vers un contrôle plus intense des libertés économiques. J’ai lu ses discours en espagnol c’est très clair.
Quand il va à Cuba il rencontre les hommes d’Eglise qui soutiennent le régime, il ne fait aucun discours à l’encontre du régime et ne rencontre pas les opposants.
Quand il va en Bolivie il marche main dans la main avec Evo Morales et fait dans le nationalisme ethnique où l’Homme blanc est coupable de tous les malheurs du continent.
Par contre quand il va aux Etats-Unis, il balance sur le système économique et politique américain, qui, s’il a de nombreux défauts est largement moins liberticide que ceux précédemment cités. Il se permet même de critiquer le port d’armes. Ca aussi c’est dans la doctrine sociale de l’Eglise?!
Les catholiques devraient arrêter de soutenir tout le temps le pape ou relativiser ce qu’il dit. Il faut sortir de cette attitude suiviste, prendre de la hauteur et regarder vraiment ce qu’il dit. Et ce qu’il dit est monstrueux, n’a rien à voir avec la doctrine sociale de l’Eglise mais se rapproche très clairement des régimes populistes d’Amerique latine.
La doctrine sociale de l’Eglise! Tout le monde aura compris
Bien dit.