Cuba : la visite du Pape a-t-elle transformé Raúl Castro en enfant de choeur ?

La dictature castriste a cherché à instrumentaliser la visite du Pape. Tous les Cubains ne sont pas dupes.

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Raul Castro - caricature - Crédit image : DonkeyHotey via Flickr (CC BY 2.0

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Cuba : la visite du Pape a-t-elle transformé Raúl Castro en enfant de choeur ?

Publié le 24 septembre 2015
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Par Yoani Sánchez, depuis Cuba

Raul Castro - caricature - DonkeyHotey (CC BY 2.0)
Raul Castro – caricature – Crédit image : DonkeyHotey via Flickr (CC BY 2.0)

 

Le chef du régime cubain, Raúl Castro, a accompagné le Pape François à toutes ses messes durant sa visite sur l’île : de celle célébrée sur la Place de la Révolution de La Havane au discours prononcé à la cathédrale de Santiago de Cuba. Comme s’il cherchait l’absolution pour une longue liste de péchés, le Président Général a suivi pas à pas l’entourage du Pape, de la capitale à l’est du pays.

Ainsi, Castro a semblé tenir l’engagement qu’il s’était donné à Rome en mai dernier. Il avait alors déclaré : « Si le Pape continue de tenir de tels propos, je reviendrais prier et retournerais à l’Église ; je ne plaisante pas. » Il ne semble pas être le seul concerné par ce retour de foi ; une partie de sa famille qui l’a accompagné aussi, de même que les membres de l’exécutif de l’île et des représentants de la presse d’État.

Castro enfant de choeur rené le honzecMalgré la ferveur mystique soudaine, la télévision nationale a tout de même soigneusement évité de montrer des images du président cubain lorsque les fidèles récitaient la messe, faisaient le signe de paix, ou reprenaient certaines prières en sa présence. Les caméras sont restées uniquement focalisées sur ses arrivées et ses sorties des églises et des places.

Certains animateurs de télévision qui ont participé aux éditions spéciales diffusées durant ces trois jours ont dû affronter une situation particulière. Plusieurs figures connues pour leur discours idéologique acharné ont été contraintes de modérer leur vocabulaire, et de saupoudrer leurs commentaires de psaumes, d’allusions bibliques et de déférences envers les personnalités religieuses.

Les pirouettes effectuées par ces présentateurs et ces journalistes pour éviter des mots comme « révolution », « communiste » ou « camarades » ont été à la hauteur de ce cirque politique dont ils ont été les dignes représentants. Il ne manquait plus que les crucifix et la Bible dans les studios, mais ceux-ci n’ont pas été nécessaires.

L’enfumage excessif de ces derniers jours n’a pas été très apprécié. « On est passé du sublime au ridicule », m’a dit un militant du Parti communiste de 63 ans qui vit dans mon immeuble. « De l’athéisme à la servilité religieuse », a-t-il ajouté, se référant à l’attitude des autorités cubaines et à la diffusion intégrale des messes dans les médias nationaux.

Désormais, il sera intéressant d’écouter le prochain discours public de Raúl Castro, pour savoir s’il aura également remplacé la belliqueuse sentence « La patrie ou la mort ! » par une autre plus concise : « Amen ! »


Sur le web. Traduction : Contrepoints.

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Nicolas Quénel est journaliste indépendant. Il travaille principalement sur le développement des organisations terroristes en Asie du Sud-Est, les questions liées au renseignement et les opérations d’influence. Membre du collectif de journalistes Longshot, il collabore régulièrement avec Les Jours, le magazine Marianne, Libération. Son dernier livre, Allô, Paris ? Ici Moscou: Plongée au cœur de la guerre de l'information, est paru aux éditions Denoël en novembre 2023. Grand entretien pour Contrepoints.

 

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