En France, faire des efforts, c’est mal et ce sera puni

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En France, faire des efforts, c’est mal et ce sera puni

Publié le 1 juin 2015
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Bien que GDF-Suez ait récemment troqué son nom à rallonge pour celui d’une maladie de gorge d’Engie, le mastodonte français de l’énergie a bien du mal à modifier ses réflexes de vieux monopole parfaitement obtus à toute remise en question, dont la dernière manifestation laisse plus que perplexe.

Tout se passe à Plessis-Pâté, petite commune de 4000 habitants située au sud de Paris, dans l’Essonne. En 1992 (il y a donc plus de vingt ans), le maire d’alors signe un contrat avec le monopole du moment, GDF, pour une fourniture de gaz à l’école communale, dans lequel il s’engage à consommer 334 500 kWh par an.

Les années passent, les normes aussi, et l’envie d’isoler l’école en question gagne naturellement le maire actuel, Sylvain Tanguy. Bonne idée écologique et surtout économique, puisqu’en lieu et place des 300.000 kWh prévus, l’école une fois isolée n’a consommé que 89.856 kWh (trois fois moins). La surprise est donc grande lorsque le maire découvre que l’opérateur gazier facture à la ville 5.985 € de gaz, dont 4.824 € de pénalité, pour n’avoir pas consommé autant que prévu en 2014. Une facture d’un peu plus de 1.000€ transformée en une facture de près de 6.000€ grâce à une pénalité, voilà qui revigorerait les comptes de n’importe quel Enron.

Devant l’absurdité de la demande, le maire a cherché à contacter son fournisseur, normalement puis via le médiateur de l’entreprise, en vain. Le maire avait pourtant non seulement prévenu Engie, ex GDF-Suez, des travaux qui allaient avoir lieu sur l’installation scolaire, sans recevoir la moindre remarque de leur part. En outre, lorsqu’il a cherché dans les archives municipales les traces du fameux contrat, ses recherches n’ayant rien donné, il s’est retourné à nouveau vers Engie pour lui demander la copie qu’ils conservaient par devers eux. Malheureusement, comme le maire l’explique :

« Ce contrat, on ne l’a jamais retrouvé dans nos archives. Nous avons demandé à GDF Suez une copie, mais ils ne nous l’ont pas fourni. »

foutralys

Voilà qui est particulièrement cocasse (et, pour le contribuable, coûteux).

Devant une telle absurdité, on ne peut s’empêcher de poser quelques questions, à commencer par se demander où est passée la nécessaire révision régulière de contrat. Il semble donc que ce soit un contrat signé il y a plus de vingt ans qui pilote cette facturation, et que personne n’ait trouvé nécessaire d’en revoir les termes pendant toute cette période.

À ceci s’ajoute l’autre question, évidente : où est passé le contrat ? Si personne n’en a plus trace, il va devenir délicat pour le fournisseur de prouver qu’il a bien existé en premier lieu et, à plus forte raison, de se baser dessus pour établir une pénalité.

Pénalités qui ont tout de l’arbitraire, ici, et pourront facilement se voir rejetées en justice ; et si elles ne sont pas arbitraires (et donc, contractualisées dans un document lisible par les deux parties), on doit se demander qui a autorisé la signature d’une telle aberration. De loin, un maire qui signe un contrat qui l’engage de façon aussi hallucinante (un gros x5 de pénalité sur une facture, tout de même), sans en prendre la mesure, cela ressemblerait presque à certaines habitudes en matières de prêts bancaires que d’aucuns qualifiaient de toxiques il n’y a encore pas si longtemps…

Quoi qu’il en soit, une impression désagréable surnage de cette histoire dont on espère que la publicité permette une renégociation du contrat dans des termes plus favorables à la mairie, et par ricochet, au contribuable local. Difficile de se séparer de cette idée qu’en France, une fois encore, faire des efforts assez organisés pour réduire ses factures, notamment d’énergie, est particulièrement mal accueilli, et ce d’autant plus qu’on est une collectivité, qu’il s’agit avant tout d’argent des autres, et que le tout a été contractualisé il y a suffisamment de temps pour que ce soit rentré dans les bonnes habitudes, c’est-à-dire le robinet public ouvert en grand.

François BaroinEt cette impression d’une habitude de dépenses sans freins, enkystée comme indispensable voire normale, n’est en rien amoindrie par les récentes déclarations du président de l’Association des Maires de France (AMF), François Baroin, qui a récemment pleurniché auprès du premier ministre et sur les micros de RTL.

« On a une mise en coupe réglée par l’État sans précédent en réalité depuis 40 ou 50 ans. Certes, la situation est difficile, naturellement il faut réduire la dette publique, évidemment chacun doit apporter sa contribution à la réduction des déficits publics mais dans des proportions qui soient acceptables et tenables. Là, elles ne le sont pas. »

Pour le pauvret et d’après les calculs diaboliquement précis et commodes de son association lucrative sans but, il faut prévoir « 25 à 30% d’investissement public en moins d’ici à 2017. C’est 0,6% de croissance, 60.000 à 80.000 emplois dans les bâtiments et travaux publics. », ce qui occulte très habilement que c’est aussi toute une ponction correspondante que le contribuable n’aura pas à supporter, ou une dette supplémentaire à court, moyen, et long terme qu’on ne crée pas sur le dos des générations futures.

Mais voilà, Baroin, il s’en contrefiche, du contribuable, et il n’a rien à cirer des générations futures. Comme Engie qui invente des pénalités pour s’éviter des pertes sur un vieux contrat, il veut son pognon pour ne pas avoir à remettre en question son mode de pensée et de dépenses.

L’ancien ministre qui avait surtout brillé par son absence de talent, de saveur, de couleur et d’odeur, se permet donc de pleurer sur la baisse prévue de dotation de l’État aux collectivités locales, qui devrait s’établir à 3,67 milliards par an jusqu’en 2017, en oubliant que ces 11 milliards d’euros resteront donc dans la poche du contribuable qui pourra, peut-être enfin, commencer à mettre de l’argent de côté pour ses vieux jours, rembourser ses prêts, acheter des biens de consommation dont il a besoin plutôt que financer des sens giratoires luxuriants, des médiathèques baroques et des complexes sportifs à la con dans lesquels il ne met jamais les pieds.

D’autant que, et c’est le plus comique de cette histoire, la Cour des Comptes a, quant à elle, expliqué dans son rapport annuel sur le budget de l’État que ces fameuses collectivités territoriales n’ont justement pas encore été frappées par l’austérité et indique qu’en moyenne, la baisse des dotations a été plus que compensée par d’autres mesures, notamment des transferts de fiscalité.

Les petits moutontribuablesEn réalité, la mésaventure du maire de Plessis-Pâté n’est pas fortuite. En fait, il a clairement contrevenu à un pacte tacite, mal connu mais évident lorsqu’on voit les déclarations lacrymales de Baroin : une collectivité, en France, devra dépenser toujours plus, devra toujours se débrouiller pour fournir le plus de laine aux myriades d’acteurs qui tournent autour, cette laine étant prélevée sur les tendres moutontribuables locaux.

Dès lors, pour ces collectivités françaises, faire des efforts sera puni.
—-
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  • je crois que le maire a la mémoire courte et ne dit pas tout .il n’a pas calculé le cout de son opération de séduction de son électorat écolo..trop tard , faut payer 😉

  • C’est tellement vrai ! Le problème vient qu’on voit ça tous les jours dans les petites collectivités locales. alors quoi faire quand des moutons suivent le maire aveuglément pour les emplois promis et sa gentillesse, et surtout quand ces derniers ne paient rien mais sont des assistés Hors catégories ?

  • M. Baroin devrait se demander pourquoi certaines communes en profitent pour se réorganiser, rationnaliser les dépenses sans augmenter la fiscalité, alors que d’autres passent leur temps à se plaindre… Les élus locaux raisonnables et responsables, pour toute récompense, voient leurs efforts taxés pour venir au secours des mauvais gestionnaires à travers des fonds de péréquation déresponsabilisants et budgétivores!
    Il devrait aussi se mettre dans la tête que les investissements publics soutiennent moins l’emploi que les investissements privés, car une partie des sommes dépensées se perd dans les méandres administratifs. Cela demande de sortir du logiciel socialiste employé par la plupart des politiques de droite comme de gauche. Trop difficile?

    • Pour sortir du logiciel socialiste il faudrait juste que tout le monde commence par payer des impôts locaux et sur le revenu (et pas seulement moins de 1 français sur 2) histoire que tout le monde se sente concerné par l’argent public et la façon dont il est dépensé et redistribué.

      Cela supposerai aussi qu’on tienne compte dans l’assiette de l’impôt des sommes versées par les CAF notamment.

  • Tout le pitoyable d’un gars comme Baroin apparaît dans ses nouvelles fonctions de Chef des Maires : pleurnicheur, défenseur de l’immobilisme, partisan bête et aveugle, bref le politicien français dans toute sa splendeur. Surtout, que l’on évite de se demander comment faire des économies (en fermant des piscines gratuites par exemple – là encore, pas gentil l’Etat qui arrête de payer aveuglément pour nos lubies locales)

  • Je n’étais pas au courant de cette affaire…à gerber.

  • Vu les perspectives qui nous attendent (Juppé ou Sarkozy), on voit bien qu’il n’y a vraiment pas de quoi être optimiste…

    Si on imagine une seconde qu’ils vont changer quoique ce soit…du coup je ne vois pas trop comment ce pays peut s’en sortir.

  • « en oubliant que ces 11 milliards d’euros resteront donc dans la poche du contribuable »… Ah bon ? Là, je vous prends, exceptionnellement, en défaut de sagacité : l’état prélèvera toujours dans la poche du contribuable des sommes de plus élevées. LA seule différence, c’est que les collectivités locales en recevront moins en redistribution.
    Et l’utilisation que fait l’état de ce qu’il ponctionne tous azimuts est loin d’être une compensation, encore moins une économie pour qui se lève le matin pour aller travailler, rentre le soir fatigué, peine à payer ses factures mais n’est jamais oublié par le fisc !

  • Un petit tour du côté des actionnaires
    http://www.gdfsuez.com/actionnaires/action-gdf-suez/structure-de-lactionnariat/
    Bizarre, l’État possède 33% des actions.

    un petit tour du coté des dividendes
    http://www.gdfsuez.com/actionnaires/dividende/

    Le grand gagnant est …

    Le grand perdant est …

  • Pour aller dans votre sens:
    J’ai fait mon service sur le Porte Avions Foch. En fin d’année on envoyait les avions gavés de kérosène en l’air et ils revenaient 1/2 h plus tard vide …
    Dans une caserne du génie près de chez moi les moteurs des camions tournaient en fin d’année jour et nuit.

    La raison:
    la dotation de carburant. Si le corps d’armée avait été économe la dotation de l’année suivante était revue à la baisse

    C’était il y a plus de 40 ans mais je ne vois pas au nom de quoi les bonnes habitudes auraient subitement disparues

    • Ils auraient du revendre ce carburant…

    • Je confirme, j’ai fait mon sévice militaire au ministère de l’air à Balard et j’ai vu des ordres de mission de transports de vin de Bordeaux dans des avions vides vers la capitale ou l’organisation de matchs de rugby entre des base aériennes juste dans le but de cramer du kérosène.
      Pour l’anecdote, j’ai pu me prendre 5 semaines de congés pendant mes 12 mois au lieu des 2 réglementaires au vu et su de la hiérarchie qui ne pouvait pas me punir sans envoyer en taule tout le bureau d’active qui mettait en place ce système de vacances gratuite pendant les congés des officiers.

    • Idem dans un labo de recherche il y a un peu plus de 10 ans, il fallait cramer le budget pour retrouver le même l’année suivante …. entre autres magouilles étatiques !

  • tous les élus et hommes politiques souhaite faire quelque chose pendant le mandat: c’est en fait assez normal. Le problème c’est qu’en france ils sont tes nombreux, ce qui induit forcément beaucoup de dépenses.

    Un maire aura peu de chance d’être réélu si il dit: voila mon bilan: je n’ai pas fleuri le rond point, ni agrandi la cour d’école, ni rénové la mairie , ni accordé de subventions aux associations, ni…….

  • Petite erreur dans moutontribuables, il s’agit en fait de mouxcontribuables
    Hi! Hi!

  • En plus, normalement une école, c’est comme une étable, ça ne consomme pas d’énergie. C’est chauffé par le bétail. Un bon menu à la cantine, genre choucroute aux fayots, et vous avez la production de gaz gratuite.

  • Rappelons que les contrats doivent etre précieusement conservés et ne pas etre utilisés à l’ usage de papier toilette

  • Et les écolos qui enquiquinent toute l’Ile de France par autophobie de malades, ne trouve rien à redire, ils sont vraiment bons pour le bucher.

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