University of the People : l’université en ligne gratuite de Shai Reshef

Une université en ligne, ce n’est pas une révolution, mais une fois encore internet permet de contourner les obstacles matériels ou culturels.

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Shai Reshef - Credits : TED Conferences via Flickr (CC BY-NC 2.0

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University of the People : l’université en ligne gratuite de Shai Reshef

Publié le 11 mai 2015
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Par Farid Gueham
Un article de Trop Libre

Shai Reshef - TED Conferences (CC BY-NC 2.0)
Shai Reshef – Credits : TED Conferences via Flickr (CC BY-NC 2.0)

 

Partager un nouveau modèle d’enseignement supérieur avec des millions d’individus qui n’avaient pas vocation à en bénéficier. C’était le rêve de Shai Reshef, président de l’université en ligne gratuite « University of the People » et c’est aujourd’hui une réalité. À l’occasion d’une récente conférence Ted Talk, le directeur, nous raconte les parcours qui ont inspiré son projet : c’est l’histoire de Patrick, un jeune homme issu d’une famille de réfugiés du Liberia et qui aspirait à poursuivre ses études supérieures coûte que coûte. Celle de Debbie, jeune fille d’une famille modeste de Floride qui, même si elle avait travaillé toute sa vie, n’avait jamais eu les économies suffisantes pour aller à l’université. University of the People, c’est aussi l’histoire de Wael, jeune Syrien qui voyait non seulement dans les études la clé de sa réussite professionnelle mais aussi celle de sa survie. « Patrick, Debbie et Wael sont les laissés pour compte du système universitaire traditionnel. Ils sont plusieurs millions chaque année à quitter le train de l’enseignement supérieur, non par choix, mais par obligation » ajoute Shai Reshef.

Dans de nombreux pays, l’université reste un luxe inaccessible pour le citoyen moyen

Et si l’enseignement supérieur n’est pas un droit universel, il n’en demeure pas moins un privilège. Outre la barrière financière, l’obstacle culturel est réel : les femmes sont encore moins nombreuses à s’engager dans un cursus supérieur. Sur le continent africain notamment, d’innombrables femmes sont privées du droit à l’éducation et à la formation. Selon l’UNESCO en 2025, 100 millions d’étudiants seront privés d’accès à la formation supérieure, tout simplement parce qu’il n’y aura pas assez de place pour les accueillir et répondre à la demande. Ces étudiants passeront un test de classement, le réussiront, mais ne seront pas admis, par manque de place.

C’est pour toutes ces raisons que Shai Reshef a décidé de mettre en place sa propre université. Un établissement à but non lucratif et sans frais de scolarité qui délivre un diplôme à tous les étudiants qualifiés, sans distinction de revenu ou d’origine. Patrick, Debbie et Wael font aujourd’hui partie des 1700 étudiants admis provenant de plus de 143 pays. Non, une université en ligne, ce n’est pas une révolution, mais une fois encore internet permet de contourner les obstacles matériels ou culturels.

Pas de millions d’euros de frais de construction, pas de coûts de fonctionnement  exponentiels et donc, pas de facture pour les étudiants

C’est la force de cette université : les dépenses des universités physiques n’existent presque pas, la capacité d’accueil est quasi illimitée. Fini les amphis bondés avec des étudiants assis sur les marches ou dans les escaliers. Toutes les ressources sont entièrement gratuites. Quant au personnel, les effectifs de l’université populaire comptent près de 3000 volontaires, dont des recteurs, des vice-chanceliers, des professeurs. Ses conseillers pédagogiques sont issus des plus grandes universités comme la NYU, Yale, Berkeley et Oxford.

Les moteurs de l’université populaire ? L’interaction et l’échange

L’entraide est au cœur du modèle pédagogique qui encourage les étudiants à interagir et à étudier ensemble, peu importe leur lieu de résidence. Un renfort de choix pour les professeurs qui consacrent moins de temps à la correction des copies. Pour l’heure, l’université ne propose que deux programmes, « management-gestion des affaires » et « informatique ». Ces deux spécialités sont les plus demandées à travers le monde car elles aideront les étudiants à se vendre sur le marché du travail plus facilement.

Dans cette formation à distance, les étudiants sont regroupés en groupes de 20 à 30 personnes. À l’issue d’un cycle de 9 semaines, chaque groupe est mis en relation avec un autre groupe, pour générer de nouveaux échanges, de nouvelles synergies. La semaine du cyber-étudiant est aussi marquée par des recommandations et des obligations : notes de cours, lectures annexes, devoirs, mais aussi des questions d’actualité et un sujet de « discussion », centrale pour favoriser un échange plus informel. Les étudiants passent un test hebdomadaire, évalué par leurs pairs et leurs résultats conditionnent le passage à la semaine suivante.

Et pas besoin du haut débit pour se connecter à l’université en ligne, le site sans vidéo ni audio est allégé au maximum. Sans frais de scolarité, l’université demande toutefois de couvrir des dépenses minimums : le coût des examens, c’est-à-dire 100 dollars par examen. Un étudiant à temps plein au niveau « Bachelor degree » payera 1 000 dollars par an, 4 000 dollars au total pour son diplôme. Et pour ceux qui ne peuvent pas s’acquitter  de ces droits, l’Université propose des bourses d’études.

« Nous avons pour mission de ne laisser personne pour compte pour des raisons financières », S. Reshef

Avec ses 5 000 étudiants en 2015, le modèle semble économiquement viable. Il y a quelque mois, l’université a obtenu les agréments officiels, un cap franchi dans la crédibilité de l’institution, mais surtout une nécessité pour la reconnaissance des formations. Les diplômes de l’University of the People sont maintenant pleinement reconnus. Fort de son succès, l’université cherche de nouveaux partenariats.

« Nous avons prouvé que notre modèle fonctionne. J’invite les universités et, plus important encore, les gouvernements des pays en développement, à adopter ce modèle afin de s’assurer que les portes de l’enseignement supérieur soient grandes ouvertes. Une nouvelle ère débute, une ère qui verra se bouleverser le modèle classique de l’éducation que nous connaissons aujourd’hui, pour passer d’un privilège à un droit fondamental, abordable et accessible pour tous », déclare Shaif Reshef.

Il y a encore 5 ans, l’université se demandait si elle obtiendrait les accréditations pour délivrer un diplôme reconnu par les instances américaines. C’est chose faite. « Les diplômes américains sont ceux qui sont les plus demandés et les plus reconnus dans le monde entier », explique M. Reshef. Mais le projet se veut universel et rassembleur. Une invitation à élargir les partenariats à d’autres pays et d’autres diplômes.

Pour aller plus loin :


Sur le web.

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  • Quel plaisir de lire une personne compétente expliquer ce que je pense depuis longtemps. Grand merci . Je pense aussi aux personnes habitant des coins reculés ( banlieue , montagne, .. etc) aux immigrés , , aux handicapés ( longs séjours en hôpital durant l’enfance ) et surtout aux femmes ayant interrompu leur carrière et désirant remettre à jour leur connaissances, sans trop déranger leurs proches et sans devoir gréver leur budget.
    Le contact personnel reste indispensable pour éviter que l’étudiant ne prenne une fausse route et sache quel niveau il a atteint, mais un peu d’imagination ( skype , courrier électronique…) permettrait de fournir ce complément à peu de frais et de dérangement.
    J’espère aussi que cela pourra s’étendre à tous les niveaux et aux étudiants lents ou ayant peu de temps – sans baisser le niveau atteint. Et rêvons un peu , avant que les BOBOS ne mettent un frein à tout ça (par une forme de népotisme peut être) , par le moyen habituel de règlements compliqués et en fin de comptes , discriminatoire . Toute la connaissance pourrait être mise à la portée d’une multitude, même illettrisme pourrait en profiter .
    Bonne chance et merci encore

  • Superbe initiative. Cela ressemble à la Khan Academy 🙂

    Vive la liberté

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