Emprunts toxiques : nouvelle prime à l’irresponsabilité de la part du gouvernement

Faut-il encourager les collectivités locales empêtrées dans leurs emprunts toxiques ?

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Emprunts toxiques : nouvelle prime à l’irresponsabilité de la part du gouvernement

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 11 mars 2015
- A +

Par Romain Ryon.

toxic credits Daniel Go  (CC BY-NC 2.0)
toxic credits Daniel Go (CC BY-NC 2.0)

 

L’assemblée nationale a voté le 4 mars dernier l’augmentation du fonds d’aide aux collectivités territoriales ayant souscrit des emprunts « toxiques », afin de secourir celles qui sont touchées pas la hausse du franc suisse.

L’article 92 de la loi de finances pour 2014 avait créé un fonds de compensation pour aider ces collectivités. Ce fonds s’élevait à 1,5 milliard d’euros, soit 100 millions d’euros par an sur quinze ans. Ce fonds était financé d’une part, par les banques et d’autre part par l’État (les contribuables).

Voilà que jeudi dernier, on apprend que les députés ont voté une augmentation de ce fonds qui verra ainsi son montant doubler à 3 milliards d’euros sur 15 ans. C’est une nouvelle prime à l’irresponsabilité de la part du gouvernement.

Les emprunts toxiques sont des produits financiers « structurés » reposant non sur des intérêts fixes, mais sur des taux variables car indexé sur des valeurs fluctuantes, comme la monnaie, le franc suisse par exemple. Ce taux variable permet ainsi à la collectivité d’emprunter à des conditions avantageuses durant les premières années. Cette bonification du taux d’intérêt dépend de deux choses :

  • Les anticipations d’évolution future du marché
  • La volatilité de ce même marché

Il s’agit d’un véritable pari avec le banquier, basé sur l’extrapolation de situations relevées sur les marchés à un instant donné.

Depuis quelques semaines, la valeur du franc suisse servant de base à un nombre important d’emprunts, s’est envolé suite à la décision de suppression du taux plancher de 1,2 CHF pour 1 euro de la banque nationale suisse.

Ainsi, les emprunts souscrits à un taux variable dont le calcul est assis sur la parité euro/franc suisse ont vu leurs taux d’intérêts augmentés de manière importante. Il est (très) difficile de prévoir les variations d’une monnaie par rapport à une autre sur une longue période, ce qui fait de ces emprunts des produits financiers à hauts risques.

Cela n’a pourtant pas empêché un certain nombres d’élus locaux de contracter ces emprunts au profit de leurs collectivités. Ce faisant, ils ont fait preuve d’irresponsabilité et d’incompétence.

Comment des personnes responsables peuvent engager leur collectivité pendant des années avec des produits financiers aussi risqués ? Il est vrai qu’il est plus aisé de jouer avec l’argent du contribuable, surtout lorsque qu’aucun risque de sanction ne se profile.

Malgré tout l’État vient une nouvelle fois aider des gestionnaires incompétents en provisionnant 1,5 milliard d’euros supplémentaire au fonds existant. C’est une double sanction :

  • Pour les contribuables qui devront supporter une charge supplémentaire de 750 millions d’euros !
  • Pour les banques, qui devront supporter une nouvelle charge fiscale en plus de la non-déductibilité de la taxe sur le risque systémique prévue par la loi de finance rectificative de 2014. Ce qui à terme peut pénaliser la capacité de ces établissements à financer l’économie, car malgré leur accord commun les banques sont aussi des entreprises !

Le gouvernement martèle sans cesse qu’il faut réaliser des économies supplémentaires, mais la première économie ne consiste-t-elle pas en la responsabilisation des acteurs publics ?

Voir les commentaires (20)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (20)
  • La première réaction du gouvernement aurait dû être un projet de loi promulgant l’interdiction totale faite aux organismes ou établissements publics ou assimilés d’emprunter (de manière directe ou par l’intermédiaire d’indexation) dans une autre monnaie que la monnaie nationale. Interdiction faite aussi aux établissements bancaires de proposer ces prêts. Les particuliers pourront toujours aller en Suisse par exemple souscrire un tel prêt, mais ils ne pourront pas prétendre qu’ils ne savent pas ce qu’ils font.

    • Allons directement au fond du problème, votons une loi pour interdire la connerie !
      Interdire une connerie n’a aucun effet : le nombre de conneries potentielles est infini. Il n’y a qu’une solution, c’est de former les décideurs à exercer leur discernement, et pour ce faire la bonne vieille méthode du bâton de la responsabilisation n’a pas trouvé d’égale.

    • pourquoi interdire ? interdire, c’est supprimer une liberté.
      j’ai fait dans le passé plusieurs prêts en devises dans des banques françaises, j’y avais mon intérêt, et il y avait bien évidement certains risques.
      jamais je n’aurais pu emprunter en chf en allant dans une banque suisse, car il est trop difficile pour une banque de traverser la frontière pour aller faire valoir ses droits au tribunal sur un prêt qui a financé un bien immobilier qui n’est pas en suisse. la solution que vous proposez est en réalité l’interdiction du prêt en devises pour tous pour toujours et ce, quelque soient les circonstances.
      si vous n’êtes pas personnellement intéressé, ce n’est pas un motif pour en empêcher l’accès aux autres.

      • Lorsqu’on prend des risques avec l’argent des autres (et à plus forte raison avec l’argent des contribuables qui n’ont pas choisi de le donner mais qui ont été forcè de s’en séparer sous la contrainte) on se doit d’exercer d’avantages de prudence que lorsque l’on met en jeu sont propres argent.
        La seule solution dans ce cas de figure consiste évidemment à limoger les maires incompétent et à confisquer leur biens jusqu’à la hauteur du préjudice subit. Ils serviront ainsi ‘exemple pour les autres qui seront moins tentés de jouer au casino avec l’argent du contribuable.

        • je pense que les élus municipaux qui votent l’emprunt devraient en prendre une proportion symbolique mais néanmoins significative à leur charge en leur nom propre, peut être 1 % du moment du prêt… quelque chose me dit qu’ils seraient plus imaginatifs pour trouver de réelles économies et emprunter beaucoup moins,
          et ceci pour tous les prêts, en euros ou en devises, à taux fixes ou à taux variables, à 5 ans ou à 50 ans…

  • Ce n’est sûrement pas avec des experts en populisme que nous résoudrons cette question. Le coup du bâton populaire, ils ont réussi à nous le mettre dans le fondement rien qu’avec cette attitude « responsable mais pas coupable ». Chers électeurs, qui est au gouvernement actuellement? Bravo, vous pouvez continuer à jouir de votre bâton, mais sans vaseline s’il vous plaît.

  • Vous avez dit irresponsabilité? C’est peut être pire. La chronique de Philippe Manière hier matin sur France Culture résume une étude de chercheurs de Harvard et HEC. D’où il ressort que:
    – La plupart des prêts toxiques des municipalités ont été souscrits peu de temps avant les municipales de 2008
    – Les villes en difficulté financière sont plus nombreuses parmi celles dont le maire sortant était en difficulté électorale
    – Les économies de frais financiers que ces emprunts ont permis (au début) ont été traduits en baisses d’impôts annoncées juste avant les élections
    – Les maires dont les villes sont en difficulté étaient en moyenne plus aptes à comprendre les risques qu’ils prenaient (plutôt des maires chefs d’entreprise ou hauts fonctionnaires qu’ouvriers ou paysans)

    Alors si certains de ces élus ce sont faits piéger et peuvent être qualifiés d’irresponsables, d’autres sont directement responsables, voire coupables.

    http://www.franceculture.fr/emission-le-monde-selon-philippe-maniere-les-faux-naifs-des-emprunts-toxiques-2015-03-10

  • Responsabilisons ces élus : des retraites indexées sur la dette et difficultés financières des communes, départements et régions. Les dettes augmentent de 10% ? Les retraites et salaires de ces personnes diminuent d’autant. Ils feront moins les gens qui ne savaient pas.

  • u lieu de puiser dans la poche du contribuable pour aider le bandit DEXA, toutes les collectivités locales avec l’aide de notre ministre des finances devraient refuser de payer. Avant que les toxiques gagnent leur procès de l’eau s’écoulera sous les ponts et notre fausse banque de France sautera !!

    • Sans aucun doute. A noter que la BdF en a vu d’autres, mais que ça aurait l’avantage que les fonctionnaires territoriaux cesseraient a priori d’être payés, que les biens des collectivités locales seraient mis aux enchères, et que probablement les édiles locaux seraient emprisonnés pour les protéger de la foule en colère, sauf qu’il n’y a pas assez de places dans les prisons françaises. En fait, ce serait merveilleux, mais je ne crois pas que ce soit ce que vous imaginez.
      Ah oui, vous êtes au courant que Dexia, c’est l’état français et l’état belge pour les têtes (de belles têtes de bandits, comme vous dites), et les contribuables belges et français pour les poches et les garanties ?

  • Houla… Ne pointons pas la responsabilité des héros qui embrassent le sacerdosse de s’occuper des affaires publiques… Cette mise en accusation permanente est une attaque de la démocratie et fait le jeu du front national.

    • Assez d’angélisme, c’est l’Etat qui tue la France et non le Front National !! Un peu d’histoire, bien que ce ne soit pas celle de mes ancêtres Savoyard : ‘lors de la terreur Monsieur de Saint-Just a dit : « Plus les fonctionnaires se mettent à la place du Peuple, moins il y a de démocratie » C’était en 1793 je crois et, il y avait 300000 fonctionnaires !!

  • Il s’ agit bien d’ emprunts SPECULATIFS il faut comprendre que le mot  » toxique  » inverse la responsabilité en transformant le responsable en victime
    Des hopitaux publiques ont plongé selon une information ils ont souscrit sur ordre

    • le choix et l’utilisation du mot toxique ad nauseam dans tous média est en effet édifiante…

      c’est assez hallucinant d’imaginer que des élus empruntent avec moins de précaution que le quidam moyen…

      • Bah on est dans la novlangue la plus baveuse, nos « élites » jouent avec les mots pour arranger la sauce en leur faveur. Évidemment quand un personne ou une entreprise réalise ce genre d’opération ce sont des emprunt spéculatifs, quand c’est l’état ce sont des prêts toxique. par définition l’état c’est le bien, les entreprises et les individus c’est le mal. La rhétorique étatiste dans toute sa splendeur….

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Nommé ministre du logement jeudi 8 février, Guillaume Kasbarian avait accordé un entretien à Contrepoints en novembre dernier en tant que député Renaissance de la première circonscription d'Eure-et-Loir et président de la Commission des affaires économiques.

 

Contrepoints : Bonjour Monsieur le Député, merci d’avoir accepté de nous accorder cet entretien. Pour nos lecteurs qui ne vous connaissent peut-être pas, pourriez-vous nous parler de votre parcours et nous raconter ce qui vous a amené à vous engager en politique et à ... Poursuivre la lecture

Depuis plusieurs mois, de nombreux départements subissent des inondations particulièrement destructrices. Mais nos impôts sont censés protéger leurs habitants.

En effet, depuis 2014 existe une nouvelle taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, aussi intitulée GEMAPI ou « taxe inondation ».

La particularité de cette taxe facultative est de relever de la compétence exclusive des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui ne votent pas un taux mais un produit final attendu ré... Poursuivre la lecture

Aujourd'hui 20 novembre, le septennat fête ses 150 ans. Bien qu'il ait été remplacé depuis plus de vingt ans par le quinquennat, il suscite toujours des nostalgies. Or, l'idée singulière de confier le pouvoir à quelqu'un pendant sept ans, ce qui est long dans une démocratie, est le résultat d'une loi conçue comme provisoire. Un provisoire qui devait durer 127 ans !

L'adoption du quinquennat en 2000 a pourtant laissé des inconsolables du septennat si on en juge par des propositions récurrentes de le rétablir sous la forme d'un mandat pr... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles