Par Philippe Guglielmetti
Je suis ressorti mitigé de la séance d’« Interstellar ». C’est un beau spectacle, on ne s’ennuie pas, on en a pour son argent, rien à dire. C’est un film de science-fiction, donc il peut y avoir plus de fiction que de science, ce n’est pas ce qui m’a dérangé outre mesure.
Ce qui m’a déçu, c’est le peu d’attention apporté à la partie « science ». C’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup : quand on chasse un drone solaire parce que « ces panneaux solaires peuvent fournir de l’énergie à toute une ferme », il faut que le drone ait plus d’1m² de cellules, sinon même avec un rendement de 100%, il ne collectera que 1000 watts, pas un rayon de plus. Et quand un vaisseau spatial a besoin d’une énorme fusée genre Saturn-V pour quitter la Terre, il ne peut pas ensuite se poser et redécoller de deux planètes sans me faire mal à la physique. Et lorsqu’une vague énorme approche, le creux de la vague n’est ni plat ni calme : l’eau reflue vers la vague et cette dernière déferle si la profondeur est insuffisante. Ce genre de faute me choque autant qu’un « faux raccord » où la robe de l’héroïne passerait instantanément du vert pomme au rose bonbon : ça relève d’un manque d’attention.
C’est d’autant plus dommage que d’autres scènes du film sont très bien documentées. Comme l’ont noté beaucoup de critiques, la visualisation du trou noir est l’une des plus réalistes dont on dispose actuellement. Élaborée avec la collaboration de Kip Thorne, elle montre le disque d’accrétion de matière orbitant autour du trou à une vitesse telle qu’elle est chauffée à blanc et devient lumineuse. L’effet de lentille gravitationnelle du trou permet de voir la partie du disque d’accrétion qui se trouve derrière le trou autour de celui-ci. Vivement Interstellar 2 avec Effet Doppler et jets relativistes !
Voilà d’ailleurs un autre aspect qui m’a dérangé dans Interstellar : j’ai eu l’impression d’assister aux quatre premiers épisodes d’une série tant les sujets abordés étaient différents et séquencés :
- La survie sur une planète en ruine (mais où il y a toujours du pétrole pour les pick-ups des fermiers et de l’eau pour leur maïs) ;
- Le voyage spatial, avec hibernation, trou de ver bien placé et paradoxe des jumeaux ;
- La survie de l’espèce vs la survie de l’individu – je crois que c’est le thème que j’ai préféré, en définitive ;
- Le voyage temporel – en tant que fan du genre, j’ai apprécié à sa juste valeur (univers bloc avec paradoxe du grand-père).
En fin de compte, il y a juste trop de sujets dans ce film, trop de sujets traités trop superficiellement, ce qui dessert le message optimiste que j’ai cru déceler dans « Interstellar » : « vers l’infini et au-delà ! »
- Interstellar, film de science-fiction américain de Christopher Nolan (5 novembre 2014), avec Matthew McConaughey, Anne Hathaway, Michael Caine, durée 2h49.
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Sur le web.
Le but d’un film n’est pas de « traiter » des « sujets ». Encore heureux. Et Interstellar est un film de science-fiction. Un peu relou de toujours retrouver un scientifique de service pour nous faire un couplet sur le manque de « rigueur » d’un film de fiction.
Je vous renvoie à cette passe d’armes comique entre Marc Andreessen et Neil DeGrasse Tyson:
https://twitter.com/pmarca/status/533533123724591105
https://twitter.com/pmarca/status/533556038406926339
https://twitter.com/pmarca/status/533560918370574336
Moui. Votre plaidoyer me convient moyennement dans la mesure où vous reprenez la posture des scientifiques : si vous trouvez ça bon, c’est que vous êtes des « gogos » qui ne comprenez rien à la science.
Pourquoi avez-vous l’impression d’être pris pour un âne ? Peut-être parce que vous attendez d’un film quelque chose qu’il ne vous a jamais promis. Si vous trouvez Gravity incohérent, je vous recommande d’éviter les films de David Lynch.
Par ailleurs, est-il incohérent que des humains soient… incohérents ? Ce n’est pas ce qu’enseigne la psychologie, ni l’économie comportementale, ni, à vrai dire, l’expérience de tous les jours.
Vous dites qu’une « incohérence » (je rappelle que ce n’est qu’une incohérence par rapport au cadre que *vous* avez défini a priori) dans Gravity ne gâche pas le film mais ne contribue pas à l’améliorer.
Pourquoi le réalisateur aurait-il fait ce choix dans ce cas ? Eh bien, pour des raisons narratives, dramatiques, artistiques, etc. Comme pour n’importe quel film.
Le réalisme, comme vous semblez le comprendre sans pousser votre raisonnement, c’est un outil. Que le réalisateur peut utiliser par touches pour faire ce qu’il veut. C’est ce que Barthes appelle « effet de réel » en littérature.
Je crois surtout que le mot science fiction est un mauvais choix . car il place le mot science en avant. En italien on dit fantascienza ce qui evite la confusion. Il faudrait parler de fantastique dans ce film, qui exprime le surnaturel dons peu crèdible. Dans Gravity c est pas facile de juger les incoherences car tout les corps se dèplacent a des milliers de km7 IL semblerait que lorsque que la force de gravitatiom est negligeable,les autres forces deviennent beaucoup plus prèsentent. Ce qui est finalement l’attraction film… Le film Interstellar est lourd , long, du genre des années 50 dans les dialogues pseudo scientifiques.
le film est là pour divertir. rien d’étonnant qu’il ne fasse pas preuve de rigueur scientifique après tout cela n’est pas le but
Donc vouloir un divertissement à peu près cohérent c’est trop demander? Dire qu’on aurait préféré un film plus cohérent et scientifiquement éprouver c’est exprimer des goûts incongrus? Pourquoi?
Vous avez le droit de vouloir ce que vous voulez, mais pourquoi attendre d’un artiste qu’il compromette sa vision pour satisfaire à des critères arbitraires ?
« mais pourquoi attendre d’un artiste qu’il compromette sa vision »
Ça ne compromettrais en rien sa vision bien au contraire.
Rasoir, c’est le mot qui me vient quand je lis ce genre de chronique, qui n’a pour seule intention celle de ce faire un petit moment de plaisir individualiste et « c’la raconter » ( on peut aussi appeler cela de l’onanisme intellectuel….) Quand je paye ma place pour aller voir un film comme Interstellar, un film de science-fiction je le rappelle, je n’attends pas une analyse, un traitement de sujet… Mon fils de 10 ans m’a accompagné, heureux d’avoir la tête dans les étoiles. C’est ce que j’attendais d’un film comme cela, nous l’avons eu. Ras le bol de ces critiques « téléramesques » qui ne satisfont que ceux qui les écrivent.
Stop Goulu-bashing ! Moi aussi ce film m’a laissé une impression décevante et pour les mêmes raisons.
« qui n’a pour seule intention celle de ce faire un petit moment de plaisir individualiste »
Quelle horreur. Cela pourrait même être… un petit moment de plaisir… néolibéral. 🙂
Et UltraMégaNeoTurbo libéral, de quoi faire dans le pantalon …
Télérama serait incapable de faire preuve de la sensibilité scientifique nécéssaire pour pondre ce genre d’article. Télérama c’est au contraire le genre de magazine qui appellera Star Wars de la science fiction parce que ces crétins sont incapables de comprendre le mot science.
« il faut que le drone ait plus d’1m² de cellules, sinon même avec un rendement de 100%, il ne collectera que 1000 watts »
Seulement si il ne capte que le rayonnement visible…
« mais où il y a toujours du pétrole pour les pick-ups des fermiers »
Il m’a au contraire semblé que leurs véhicules sont tous électriques.
« Seulement si il ne capte que le rayonnement visible… »
OK, 1361 watts, en dehors de l’atmosphère et bien perpendiculairement à l’émission. Mais on peut aussi faire appel à la magie.
Ah mince moi j’ai pensé que c’était un film d’amour 🙂
Oui il y a des approximations scientifiques mais ca n’enlève rien au fait que ce soit un film de SF distrayant et bien !
Ce film m’a déçu à la base parce qu’il est avant tout construit sur une thèse GIECo-compatible, aujourd’hui totalement dénuée de tout fondement scientifique. Et puis, en version originale, voir un ancien pilote de la NASA (Matthew, excellent acteur dans cette interprétation par ailleurs) parler de manière trainante comme un fermier du middle-west mangeant la moitié de ses syllabes, a quelque chose de perturbant et de peu crédible, surtout quand on voit qu’il en connait plus que les plupart des scientifiques ou professeurs (de sa fille) réunis. Tant de décalages avec des réalités et des prospectives réalistes m’a fait décrocher bien avant l’heure de spectacle malgré certaines images époustouflantes.
A ce propos il commence à être amusant de visionner des films anciens qui nous prédisaient un futur catastrophique genre soleil vert, blade runner…j’imagine nos descendants dans un siècles ou deux visionner ces films catastrophe « GIEC compatibles » et se marrer en se foutant de notre gueule et de notre naïveté d’alors.
The Day After est déjà ridicule, pourtant j’avais adoré…
Le postulat du film était ridicule mais la réalisation au top!
C’est pour ça que j’ai toujours préféré les films de pure fantaisie ne cherchant pas à « faire vrai » du type guerre des étoiles car dans ces films pas de pseudo scientifique à la mord moi le machin la science n’est qu’un décor servant de support à une histoire.
Lisez « révolte sur la Lune » et dites moi qu’un bon film à partir de ce roman ne vous fait pas rêver…
J’ai bien aimé le film, mais j’avoue que les erreurs étranges de physique m’ont dérangé. Quand t’as joué à KSP c’est encore pire.
L’idée du robot monolithe est particulièrement intéressante.
C’est un film, et non un documentaire. C’est donc romancé et ça il faut savoir l’accepter ou alors il faut passer à un autre registre cinématographique où il ne faut pas s’attendre à trop chercher une quelconque vraisemblance…
Ce que je trouve génial, c’est la notion d’amour qui défie l’espace et le temps; la relativité du temps qui ne passe pas de la même manière pour tous (même sur terre, nous n’avons pas la même perception du temps qui passe, en dehors de toute explication scientifique !)… Le discours scientifique du film n’est que le support d’une histoire dont le but est de magnifier les sentiments et les émotions. C’est l’intérêt de la science-fiction qui interroge en ouvrant l’imaginaire de tous les possibles sur la base de connaissances scientifiques probables mais pas nécessairement exactes. D’autant que, quelqu’un d’un tant soit peu scientifique et objectif doit accepter que les théories sont vraies tant qu’aucune nouvelle observation ne vient dire qu’elles sont fausses. Ainsi, tant que personne n’aura visité un trou noir et n’en sera revenu pour nous en expliquer la nature, tout n’est que calcul et fantasmes… Donc, quitte à rêver, autant faire des films !
Cette mode du « Interstellar bashing » au niveau du vécu et de la science… nous vient d’outre Atlantique.
Interstellar est un film, un divertissement, pas un documentaire. On l’a dit et redit.
Je ne comprends même pas pourquoi j’écris ce commentaire.
😉
Au final, c’est un beau film, on passe 2h sans les voir, la musique est travaillée, les acteurs formid’, on rêve, on verse une petite larme.
Le GIEC, la science, le rendement de la cellule photovoltaïque, l’art de couper les cheveux en 18… eh merde à Vauban !
Je suis d’accord, pas vraiment de longueur. Le seul truc que dirait [alerte nitpicking, passez en defcon1] c’est que le film me paraît parfois couper les coins rond, j’ai l’impression que 3h est insuffisant pour bien raconter le film.
À propos des panneaux solaires, l’histoire se passe dans le futur, qui te dit que les panneaux solaires du drone n’ont pas un meilleur rendement que les panneaux solaires actuels ?
Ensuite tu parles du décollage depuis les planètes visitées qui serait impossible sans fusée : dans le film le vaisseau se sépare en deux avant d’arriver sur la planète, une partie reste en orbite tandis que l’autre atterrit. Comme ça dès qu’il veulent partir, ils rejoignent la partie en orbite et ils n’ont qu’à accélérer un peu pour sortir de l’orbite.
S’arracher de l’attraction d’une planète est toujours aussi difficile au vue des planètes visités qui semble aussi voir plus grande que la terre il devrait utiliser la même fusée de départ (énorme).