Alerte démocratique en Italie

Depuis les vents qui ont soufflé de la Péninsule italienne, le navire Europe paraît bien peu préparé pour affronter les mers agitées de l’économie mondiale.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
crise de l'euro union européenne

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Alerte démocratique en Italie

Publié le 13 mars 2013
- A +

Depuis les vents qui ont soufflé de la Péninsule italienne, le navire Europe semble bien peu préparé pour affronter les mers agitées de l’économie mondiale.

Par Sophie Quintin-Adali, depuis Istanbul, Turquie.

Panique à Bruxelles où décidément la démocratie fait des vagues dont l’élite européenne se passerait bien. Les résultats des élections et l’incertitude politique qui en résulte n’en finissent pas de menacer le vaste plan technocratique mis en place pour « sauver » l’euro. C’est au tour des italiens de se rebiffer. Avis de tempête sur l’Eurozone…

S’exprimant récemment devant les députés européens à Strasbourg, le président Hollande avait déclaré avec emphase que la crise était « derrière nous ». Ce qui fut dit avec le plus grand sérieux apparaît maintenant comme une grossière plaisanterie, même si les gloussements sont bien rares. Paris observe avec une nervosité grandissante le dernier acte de rébellion dans l’hôpital du « Club Med ». La contagion guette l’Hexagone mais sur le pont du pédalo France, aucun signe de branle-bas de combat. La réponse du gouvernement socialiste a été, sans surprise, bien molle : réformettes et nouvelles taxes. L’économie continue de péricliter.

Pour l’instant, tous les yeux sont tournés vers Rome pour tenter de comprendre les conséquences politiques d’un vote inattendu. La formation d’un gouvernement de coalition sera-t-elle possible ? Sera-t-il en mesure de gouverner ? Les leaders européens exhortent l’Italie de maintenir vaille que vaille ses engagements pour contenir une dette souveraine galopante.

Le retour de Berlusconi était prévisible mais pas le score important (20%) du Mouvement 5 Étoiles (M5E) sous la houlette du ‘comédien-reconverti-politicien’, Beppe Grillo. Son programme économique est, au mieux, brumeux mais on peut assez facilement en distinguer l’idée maîtresse : un retour à la Lire pour accroître la compétitivité de l’économie et une restructuration de la dette publique. Des économistes reconnus ont défendu cette option mais elle va à l’encontre du consensus « berlinois ». La remise en cause de l’Euro est considérée comme une « hérésie ».

Malgré les sommes pharaoniques qui sont dépensées pour répandre la bonne parole européenne (les institutions européennes travaillent pour votre bien), l’Europe sombre dans la récession. Le très haut en couleurs M5E, parti populiste ‘anti-establishment’, est devenu la troisième force politique dans la 4ème puissance économique européenne. Les Italiens sont généralement considérés comme des europhiles. Toutefois, leur vote démontre sans ambiguïté qu’ils rejettent fermement l’austérité imposée par la nébuleuse européenne du pouvoir. En outre il est évident que la confiance en la ‘politique traditionnelle’, qu’elle soit nationale ou supranationale, est tombée au plus bas.

Les résultats sont une véritable « catastrophe pour l’Euro et l’UE », annonçait le ministre des affaires étrangères luxembourgeois Jean Asselborn. Quand un leadership pondéré impose, jeter de l’huile sur le feu n’est guère utile… Cependant il est clair qu’avec un Parlement sans majorité les choses ne sont pas prêtes de s’améliorer. La guerre des mots entre presses italienne et allemande a déjà commencé. Le journal allemand Bild a rapidement affiché la couleur avec un titre provocateur à souhait – « Les politiciens saltimbanques italiens vont-ils détruire l’Euro ? » avec en prime des photos de Grillo et Berlusconi arborant des nez rouges de clowns.

Dans les hauteurs du pouvoir bruxellois, le moral des constructivistes doit être au plus bas. Mario Monti, le technocrate soutenu par la Commission, a pris ce qu’il convient d’appeler une raclée (10% des voix). Le message envoyé par l’électorat italien n’est pas difficile à comprendre. Il n’apprécie pas l’activisme politique de l’administration européenne et ses ingérences dans les affaires intérieures du pays.

L’UE a un besoin urgent de perestroïka. La problématique est la suivante : existe-t-il encore quelqu’un, dans les nimbes de l’administration européenne, capable de penser  au-delà des étroites limites du très « politiquement correct » dogme fédéraliste ?

Avec leurs votes, les Italiens ont voulu exprimer leur colère envers une classe politique nationale et une technocratie européenne qu’ils tiennent pour responsables du désordre présent. En nombre grandissant, ils osent le « politiquement incorrect » en évoquant un retour possible de la Lire. Pour ceux qui souffrent et tentent de survivre au lent déraillement économique et social de l’Europe, l’idée de se réapproprier la souveraineté économique et monétaire représente une lumière au bout du tunnel.

Le décalage entre les élites et les peuples européens n’en finit plus de grandir. Le navire Europe apparaît bien peu préparé pour affronter les mers agitées de l’économie mondiale. Qui sait où les vents qui soufflent maintenant de la Péninsule Italienne l’emporteront ?


Une première version de cet article a été publiée en anglais par le Hürriyet Daily News.

Voir les commentaires (3)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (3)
  • Ne prêtons pas aux italiens plus de cerveau qu’ils n’en ont !

    La réalité les emm…, et comme on leur dit que c’est l’Europe qui fait barrage à la cansonetta, que Monti est “méchant”, etc, ils se ruent sur les prometteurs de beaux jours.

    Rien d’autre à tirer de ces péripéties.

  • Ayant toujours voté contre ces traités mortifères ( tel que celui de Maastrich ) ou ceux qui sont censés gouverner les peuples prétendent seuls savoir ce qui est bon pour eux ,l’état inquiétant des pays concernés et la dégradation économique que connaissent la plupart d’entre eux n’est pas pour me surprendre En l’état actuel de l’Europe , c’est le “sauve qui peut” général IL y a une autre solution dont ne parlent pas ceux qui sont censés nous “gouverner” ce serait l a sortie de cet euro et de cette Europe là , comme nous y sommes entrés : contraints et forcés , pour des lendemains qui chantent , parait- il “” Cette “sortie” concertée n’empêche pas de construire une autre Europe , et la coordination libre des peuples ! FH aura-t-il le courage ? Il faudrait qu’il soit un “homme d’état ” ce qu’il n’est pas !

  • Assez d’accord avec ce constat … et je connais les arcanes U.E. d’assez près !
    Réseau d’incapacités , des excès de pouvoirs , une bureaucratie essouflée.
    Le tout mériterait cette perestroïka. Mais nous n’en sommes qu’à des signes précurseurs. Même après élections de mi-2014 cela ne se résoudra que trop lentement !

    Concevriez-vous la même opération au sein des multiples branches de p.ex. l’ONU et tout organe aux prétentions de gouvernance “supra” ? Bernique !

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Bologne, ville du nord de l'Italie, est considérée par de nombreux spécialistes comme la plus ancienne ville universitaire du monde occidental. Son université, l'Alma Mater Studiorum, remonte à l'an 1088. Dès le début, l'université de Bologne s'est spécialisée dans l'analyse du droit, en particulier dans l'étude du droit canonique (l'ensemble des lois et des décrets concernant le clergé et les questions religieuses). Bologne devint la patrie de juristes célèbres qui étudiaient et analysaient les lois émises à Rome par le pape. Plus tard, au c... Poursuivre la lecture

Alors que son voisinage du Sahel a été secoué ces dernières années par une série de coups d’État militaire et que son voisin sénégalais a opté pour un net changement d’orientation, la Mauritanie, elle, a renouvelé le mandat de son président en place depuis 2019. L’un des principaux succès fut d’écarter la menace djihadiste qui n’a cessé de gonfler dans cette région sensible à la jointure entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne.

En reconduisant Mohamed El Ghazouani, qui a emporté l’élection présidentielle du 29 juin avec 56,1... Poursuivre la lecture

L'Espagne sous le socialiste Pedro Sánchez

L'économie espagnole est la 55e plus libre selon l'indice de liberté économique 2024, et l'Espagne se classe 30e sur 44 pays de la région Europe.

Dans son évaluation, la Heritage Foundation écrit :

« Les progrès de l'Espagne vers une plus grande liberté économique ont été inégaux. L'efficacité réglementaire et l'État de droit sont relativement bien maintenus, mais les gains à long terme ont été modestes. Les défis en matière de liberté fiscale, de dépenses publiques et de liberté financ... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles