Un lundi d’après élections

Si l’on oublie les législatives françaises, épiphénomène anecdotique, la situation n’est pas rose en Europe…

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Un lundi d’après élections

Publié le 18 juin 2012
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Le dimanche est passé, les élections aussi. Il ne reste maintenant plus la place qu’aux petites analyses d’après scrutin, et la presse francophone se fait donc un plaisir de disséquer les résultats circonscription par circonscription… Il est vrai que la France entre maintenant dans un monde totalement inconnu, où tout peut arriver, où le changement, c’est maintenant et tout ça : celui du socialisme officiel, à tous les étages, avec du câlin et des volées de bisous qui cognent pour tout le monde.

Tout comme les élections présidentielles qui aboutirent à une victoire de Hollande bien plus banale, prévisible et médiocre que « normale », la victoire des socialistes à ces législatives était donc prévisible, prévue, et obtenue avec la même mollesse et la même médiocrité que pour le président. Nous nageons maintenant dans les eaux normales du socialisme normal avec de vrais morceaux de catastrophe économique dedans sans qu’au final personne ne semble s’en inquiéter réellement.

Je dis ça parce que la situation économique générale va nettement amoindrir le plaisir qu’on aura pu avoir à constater les gamelles mémorables et réjouissantes des frétillants suceurs d’impôts habituels qui ne furent pas réélus. Et avant de revenir un peu sur, justement, ce qui nous attend maintenant que le mimodrame politique est terminé, j’aimerais prendre quelques lignes pour évoquer les pimpants clowns à roulettes qui n’auront plus de siège à l’Assemblée et qui nous feront ainsi grâce d’autant de vacances.

Je pense bien sûr ici à la bayroute totale de François Du Modem, qui aura sabordé son parti, son mandat et sa carrière dans un manque consternant de lucidité politique, et nous aura permis de voir clairement que la France n’est pas encore assez mûre pour le gloubiboulga du centre, et préfère de loin le gloubiboulga socialiste officiel à l’édulcorant.

À cette lamentable déconfiture, il faut ajouter la réjouissante mise en orbite basse de Rama Yade à coups de pied électoraux au cul dès le premier tour, éjection qu’elle méritait amplement depuis un moment pour pipeautages massifs, retournements de veste et ouvrage intempestif de clapet au mauvais moment.

Évidemment, le camouflet d’un dissident UMP à Claude Guéant ne peut empêcher de faire sourire : dès lors que le patron, Sarkozy, n’est plus là, les souris dansent et se volent les morceaux de fromage les unes aux autres. Là encore, on a bien du mal à ne pas s’écrier, sourire au lèvre, « Bien Fait ! » tant le parachutage était visible.

Et à propos de parachutage, il est difficile de ne pas terminer cette liste de gamelles aussi joyeuses que retentissantes par ceux de Jack Lang et de Ségolène Royal, magnifiques avatars de la mondanité socialiste parisienne et calculatrice, déboulant dans le paysage avec un petit air de « Poussez-vous que je m’y mette » autoritaire et particulièrement irritant pour tout électeur attaché à une représentation un peu fidèle de lui-même à l’Assemblée Nationale. Il n’était que justice que ces deux arrogants routiers de la politique et de l’arrangement électoral en leur faveur exclusive se prennent une bonne taule qui les remette un peu à leur place : ça ne leur arrive pas assez souvent, mais, soyons francs, quand ça arrive, ne boudons pas notre plaisir !

Ces instants de franche poilade évoqués, revenons un peu sur terre où, pour les gens vraiment normaux, ces élections n’auront finalement qu’un impact très modéré. En comparaison, le résultat des élections grecques aura, lui, des effets bien plus sensibles sur tout un chacun.

Et pendant que la France, somnolente, votait pour renouveler la brochette de clowns qui allait occuper la galerie pendant les prochaines semaines avant des vacances aussi anesthésiantes qu’imméritées, le reste de l’Europe et du monde a continué son jogging sur le petit chemin caillouteux de la servitude, en s’offrant même le luxe de prendre quelques raccourcis sans que la moindre crampe ne vienne ralentir le rythme général de progression vers la catastrophe.

C’est ainsi que Normal Hollande proposait une nouvelle distribution d’argent gratuit des autres, à hauteur de 120 milliards tout de même (sachons vivre), probablement pas tout à fait au courant des dettes monstrueuses accumulées par son pays et, en fait, tous les autres auxquels il s’adressait de sa voix à la fermeté et limpidité légendaire.

À la lecture de ce genre de propositions, il faut comprendre qu’on a quitté depuis longtemps le domaine du « A Côté De La Plaque » qu’affectionne tendrement nos élites politiques, pour entrer de plain-pied dans celui du « Carrément Dangereux ». Hollande, sans même s’en rendre compte, sautille donc joyeusement dans un champ de mine en espérant le traverser sans problème. On lui souhaite bien du plaisir, surtout lorsqu’on se rappelle que la petite agence de notation Egan Jones, la seule encore vaguement crédible tant les autres sont politisées jusqu’au point de non retour, vient de dégrader la France en la passant de A- à BBB+ …

euro-vision

Parallèlement aux petits sauts de cabris de la Normalité Incarnée, la Grèce bouclait donc son scrutin sur un non-gouvernement, aucun parti n’ayant une majorité franche pour former un gouvernement. L’arrivée en tête de Nouvelle Démocratie permettra d’obtenir une alliance avec les socialistes du Pasok, ce qui veut dire que la Grèce continuera donc son chemin vers une austérité calculée, pendant que la France prendra l’autre, résolument plus fun, de la dépense joyeuse, dans l’euphorie générale. Avec un tel constat, on comprend que la semaine qui s’ouvre à présent va être riche en sueurs froides, rien n’ayant changé d’un cachou.

D’autant que si l’avenir de l’euro en Grèce est très incertain, celui de l’euro espagnol continue de prendre une sale tournure : on ne compte plus les articles qui font la part des choses et qui concluent que, tout compte fait, l’Espagne n’a plus guère d’intérêt à conserver la monnaie unique et aurait même avantage à s’en séparer prochainement, indépendamment de la débâcle financière que ça pourrait créer.

Ce tableau serait incomplet si l’on oubliait les tensions internationales qui s’accumulent aussi autour de la Syrie, puisqu’on apprend (pas des journaux français, je vous rassure tout de suite, leur médiocrité les oblige à se concentrer sur leur cœur de métier, la branlette électorale franco-franchouille) que la Russie avait préparé plusieurs navires de guerre pour prendre la mer en direction de la Syrie.

Bref : la nouvelle assemblée française aura fort à faire pour occuper les médias et détourner les yeux des Français des énormes mouvements de fonds qui s’organisent pour tenter à tout prix de sauver l’euro, quitte à faire marcher les rotatives des banques centrales à un rythme jamais vu auparavant. Et ces mêmes nouveaux députés vont devoir rivaliser d’inventivité pour faire passer sans trop de douleurs l’avalanche d’impôts, de taxes et de mauvaises nouvelles que Hollande et son gouvernement Ayrault vont faire pleuvoir sur le peuple…

Mais pour ces buts-là, je reste optimiste : nos nouveaux députés, j’en suis sûr, les rempliront sans problème.

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