Grèce : L’imposture jusqu’à quand ? (soutien à Christine Lagarde)

Christine Lagarde a conseillé aux Grecs de payer leurs impôts plutôt que de se plaindre. Cette déclaration a provoqué une nuée d’indignations

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Grèce : L’imposture jusqu’à quand ? (soutien à Christine Lagarde)

Publié le 29 mai 2012
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Dans une interview accordée au Guardian, Christine Lagarde, directrice générale du FMI, a déclaré que les Grecs portaient une part de responsabilité dans le drame financier qui affecte leur pays, et leur a conseillé de payer leurs impôts plutôt que de se plaindre. Cette déclaration a provoqué une nuée d’indignations. Que faut-il en penser ?

Par le Parisien libéral.

Vous vous souvenez que nous n’étions pas tendre [1] envers la nomination de Christine Lagarde (une avocate en droit social, pas une économiste) à la tête du FMI (une institution qui aurait dû fermer en août 1971) ?  Vous vous rappelez également que nous avions critiqué le fait que Christine Lagarde dénonce l’excédent commercial allemand [2].

Alors, allons-nous suivre toute la blogosphère, mais aussi Jacques Myard et la Droite Populaire, François Bayrou, les socialistes grecs ou leurs collègues français dont la très démagogique Najat Belkacem (dont nous avons déjà mentionné les sulfureux propos tenus à Lyon en 2009) qui sont tombés, dans un bel élan unanime, sur Christine Lagarde ?

Qu’a t-elle donc dit de si insultant envers les Grecs ? Que les Grecs devaient d’abord s’aider eux-mêmes et commencer par payer leurs impôts. Est-ce si insultant ?

La Grèce subit une crise économique majeure, liée à son mensonge sur ses chiffres, à la fin des années 90, afin de pouvoir rentrer dans la zone Euro. La dette du pays est de plus de 300 milliards d’euros ou 160% du PIB [3] et le déficit de 13% du budget public. Autrement dit, la Grèce emprunte pour faire fonctionner son État.

D’où vient cette dette ?

  • D’une part, des dépenses publiques excessives liées aux avantages acquis de la fonction publique grecque, qu’il faut bien financer. Les 800 000 fonctionnaires grecs sont à rapprocher du nombre de 10 millions de Grecs. La Grèce est pire que la France.
  • D’autre part, des recettes minorées par le swap de Goldman Sachs (titrisation des recettes futures pour faire baisser la dette affichée à la fin des années 90). Ce swap était voulu par les politiciens grecs.
  • La faible compétitivité des services et des industries non délocalisables de Grèce, à commencer par le tourisme ou l’agriculture, ce qui fait que la Grèce est en plus en déficit commercial.
  • Le financement d’infrastructures comme les Jeux Olympiques de 2004, que les Grecs ont voulu.
  • Enfin, l’état de guerre avec la Turquie n’aide pas.

Or, l’Euro, la monnaie grecque, empêche les industries grecques de faire la course au moins cher, et de concurrencer par exemple la « feta » Danoise ou le tourisme en Turquie ou en Égypte. Comme l’ensemble de la zone Euro, la Grèce ne peut tenter de jouer que sur le haut de gamme, ce qui suppose une productivité forte. Il est clair que les Grecs n’auraient jamais dû rejoindre la zone Euro, mais celle ci n’est pas prévue comme une zone monétaire optimale. La zone Euro est un projet politique auquel les Grecs aussi ont adhéré et qui leur a donné des avantages :

  • Pendant 10 ans, ils ont bénéficié de faibles taux d’intérêts liés à l’appartenance à la zone Euro

Dans ce contexte, est-ce trop demander aux Grecs, soit de baisser massivement le nombre de fonctionnaires et d’avantages acquis, soit de payer eux-mêmes pour ces fonctionnaires ? Non, ça ne l’est pas, et Lagarde a donc raison [4].

La crise est là, il ne sert plus à rien de stigmatiser les Grecs, même si Christine Lagarde a intrinsèquement raison. Il convient maintenant soit d’aider les Grecs à rester dans la zone Euro, soit à les en virer au moindre coût pour tous les contribuables européens, sachant que les banques (françaises, allemandes ou britanniques) ont déjà lâché 107 milliards d’euros.

Proposition : Il faut un referendum mené directement auprès des 500 millions de citoyens européens, dont les 300 millions d’électeurs, posant la question suivante : « Acceptez vous de donner tout de suite 650 euros pour régler la dette publique grecque, ce pays acceptant désormais de voter des budgets publics en équilibre, sous contrôle de l’UE ? »

Note : ce point de vue ne reflète que l’opinion du seul auteur de cet article, et en aucun cas la rédaction de Contrepoints ni l’ensemble de la sphère centriste, libérale et démocrate, dont le point de vue serait néanmoins apprécié.

—-
Sur le web.

Lire aussi :

Notes :

  1. Lire Toute la France soutient Christine Lagarde Toute ? Non, un billet du 28 mai 2011.
  2. Lire Avec Christine Lagarde, les victimes sont coupables, un billet du 16 mars 2010.
  3. Consultez les chiffres sur le Blog à Lupus.
  4. La polémique sur les impôts que Lagarde ne paye pas n’a aucun sens : elle n’est pas citoyenne grecque, de toutes façons.
Voir les commentaires (39)

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  • Soyons clairs, je ne suis pas du tout d’accord avec cet article.

    Lagarde met sur le dos des contribuables grecs les problèmes de le Grèce en les accsuant de ne pas payer leurs impôts. La seule chose dont le peuple grec est coupable c’est d’avoir voulu davantage de redistribution, de droits acquis etc…Et encore il ne s’agit pas de tous les grecs, car si bon nombre ne paie pas ses impôts c’est bien parce qu’ils ne veulent plus voir leurs revenus et leur épargne être dilapidés par les politiciens grecs. L’oligarchie grecque, au pouvoir de père en fils depuis plus d’un siècle est bien responsable de la mauvaise gestion de ce pays, c’est bien elle qui s’endette.
    Si Lagarde est en colère parce que le FMI ne reverra pas son argent, et bien elle était prévenue, il ne fallait pas leur venir en aide, on savait comment ça allait finir.

  • Tous les artifices politiciens reposent sur une erreur logique qui consiste à assimiler un peuple à son gouvernement. On entend systématiquement dire que « Les Grecs » sont responsables de ceci ou de cela, alors qu’il s’agit exclusivement du « gouvernement grec ». C’est un tic de langage que nous autres, anarchistes individualistes, devons dénoncer à chaque fois qu’on l’entend. Lagarde a raison de dire que le « gouvernement grec » doit faire des efforts, elle a tort d’assimiler cela au payement des impôts par « les grecs ». (ET son allusion aux bébés africains étaient une imbécillité)

  • Oui mais : En finale, ce sont bien les politiques qui ont le pouvoir sur l’argent public et qui dépensent plus qu’ils n’encaissent ! Ce sont eux les vrais responsables ! – – –
    Pour bien le comprendre : http://www.objectifeco.com/economie/economie-politique/article/vincent-benard-l-economie-du-bon-sens-croissance-plus-contre-croissance-mieux-ou-l-erreur

  • Affirmer que « payer leurs impôts » sortira l’état grec de sa situation est doublement criminel. D’une, on inflige aux victimes d’un immense racket socialiste un second préjudice, et de deux on récompense les coupables.

    Si les recettes fiscales grecques augmentent, les dépenses publiques augmenteront aussi.

  • Lisez cet article ou sautez directement au graphique et vous comprendrez à quel point cette histoire d’impôts est une fumisterie, une propagande savamment entretenue dans un dessein obscur : http://www.les-crises.fr/lagarde-aux-grecs/

    Et d’accord avec les commentaires qui reprochent cet amalgame entre population et gouvernement, là encore savamment entretenu par les sphères oligarchiques pour maintenir un état d’attrition des peuples et échapper à toute remise en cause.

  • Personne n’a forcé la main aux politiques grecs pour dépenser autant. Personne n’a obligé 800 000 grecs à devenir fonctionnaire. Personne n’a forcé les grecs à croire au Père Noël et à la vie à crédit. Par contre moi en tant que Français on me demande de régler l’addition et en plus on me force la main dans le sens où on ne me demande pas mon avis.

  • http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2012/05/29/20002-20120529ARTFIG00404-lagarde-ne-paie-pas-d-impots-sur-le-revenu.php

    Nouveau tollé pour Christine Lagarde. Trois jours après avoir choqué la classe politique en exhortant les Grecs à payer leurs impôts, la directrice générale du Fonds monétaire international subit les foudres des internautes.

    La plupart dénoncent le fait que l’ancienne ministre de l’Économie, qui gagne actuellement 380.939 euros par an, ne paie pas d’impôts sur le revenu. L’explication est donnée par la convention de Vienne sur les relations diplomatiques datant de 1961: en qualité de fonctionnaire internationale, Christine Lagarde bénéfice d’un statut fiscal spécifique. L’article 34 affirme que «l’agent diplomatique est exempt de tous impôts et taxes, personnels ou réels, nationaux, régionaux et communaux».

    En revanche, l’article ajoute que l’agent diplomatique est redevable de certains autres impôts tels que les «taxes sur les biens immeubles privés situés sur le territoire de l’État accréditaire, à moins que l’agent diplomatique ne les possède pour le compte de l’État accréditant, aux fins de la mission».

    • HA ! ces politiciens, faites ce que je vous dis mais ….

      Il n’empêche que vous baignez dans la mauvaise foi et le déni quand vous dites que les grecs ont eu raisons de ne pas payer leurs impots.

      • Quand l’impôt devient vexatoire, non proportionnée, inégalitaire et confiscatoire, oui c’est parfaitement légitime de frauder le fisc. Sans cela, ça fait longtemps que ces pays auraient coulé (et je ne parle pas de l’Etat, je parle du peuple grec). Le black a toujours été une soupape de sécurité, une manière de respirer pour des millions de familles qui sont étouffées par la fiscalité et les réglementations.

    • En même temps, c’est idiot de parler de fonctionnaire qui parle d’impôt, vu que son salaire vient du contribuable.

  • On aurait du faire omme les grecs et ne jamais accepter un tel racket fiscal. Mais Lagarde qui vit de l’impot et pense que les gens ont besoin d’elle et de sa supreme sagesse n’estpas capable de comprendre qu’elle est economiquement autant (sinon plus) un boulet que les fonctionnaires grecs…

  • Mission accomplie pour Lagarde et les autres (par exemple la BCE qui a temporairement stoppé ses rachats de dettes souveraines pour faire flamber les taux des piigs) qui vont réussir à faire basculer le vote grec (et avant lui, celui des Irlandais de jeudi) vers ce qu’ils souhaitaient dès le début : maintenir la Grèce dans la zone euro, coûte que coûte. Efficace, pour l’instant…

  • Ce qui me fait rire, ce sont les contorsions idéologiques de Contrepoints: de manière générale, l’impôt est une spoliation et la fraude fiscale serait totalement légitime. Sauf, apparemment, quand il s’agit des Grecs qui pourraient un peu cesser de la ramener, fermer leur clapet et payer. Comprenne qui pourra…

    • Les libéraux ne forment pas une pensée unique, il y a divers courants, que ce soient les libéraux de gauche, les anarcaps, minarchistes, libertariens, agoriste, libéraux classiques,…
      Techniquement, l’impôt est bel et bien une extorsion, mais un mal nécessaire et certains libéraux ne sont pas contre l’infraction lorsqu’une loi est illégitime, mais aux risques et périls de l’auteur de l’infraction.

      Dans le cas grec, la situation est complexe, car les Grecs veulent plus d’état, mais ne refusent d’en assumer le coût. Ils veulent le beurre et l’argent du beurre, ce qui les mènera tôt ou tard à la ruine et sont juste des crétins qui méritent que du mépris.

      De toutes façons, le problème grec n’est pas une question d’impôts, mais surtout de déséquilibre entre leur niveau de vie et leur productivité.

      • « les Grecs veulent plus d’état, mais ne refusent d’en assumer le coût. Ils veulent le beurre et l’argent du beurre, ce qui les mènera tôt ou tard à la ruine et sont juste des crétins qui méritent que du mépris. »

        bien résumé

    • il n’y a aucune contorsion, Gonzague. Il y a un objectif, moins d’impots, et une realité, la certitude de se faire tondre pour renflouer la Grece. Minimisons ce cout, car m^me si nous ne voulons rien faire, nous serons rackettés.

      • L’objectif des libéraux est l’application du droit et de la justice, plutôt que « moins d’impôts ».

        • @ Nick de Cusa,

          Vous devez vous sentir bien seul dans la communauté idéologique libérale !

          • Que nenni : l’immense majorité des libéraux considère le libéralisme comme une philosophie du droit.

            Le différence avec les étatistes de tous poils, c’est que les libéraux, luttant pour la justice, ne peuvent cautionner le vol.
            Or l’impôt étant l’acte d’accaparer la propriété d’autrui contre son consentement, les libéraux ne peuvent cautionner cet acte immoral.

  • Quid de l’effet domino ? 650 euro de nouvelle monnaie ce n’est rien. Par contre si la Grèce, l’Espagne, le Portugal et l’Irlande sortait aussi. Que serait la position française ? L’euro existerait-il toujours après ça ? Combien couterait une explosion de la zone ?

    Il faudrait prolonger la question du référendum par : si vous ne donnez pas vos 650 euros, toutes vos économies à la banque vont disparaitre, et votre banque aussi d’ailleurs.

  • Bien que Christine Lagarde aie raison sur le fond du propos, le publier juste avant les élections Grecques qui auront des conséquences pour toute la zone euro est d’une stupidité incroyable en terme de stratégie.
    c’est comme si Sarkozy avait dit que les fonctionnaires français étaient des petits batards de profiteurs juste avant les élections !

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