Depuis début septembre 2008, la Fed a créé deux fois plus de dollars qu’elle n’en avait créés depuis sa fondation en 1913. Pourtant, cela ne se traduit pas par une inflation galopante. Pourquoi ?
Par Georges Kaplan
Plus je discute avec des gens dont tout laisse à supposer qu’ils connaissent ces petites choses parfaitement, plus je réalise qu’il n’en est rien. J’en conclus donc qu’un petit point sur les ordres de grandeur de la politique de la Federal Reserve des États-Unis ces 3 dernières années n’est pas inutile.
Depuis début septembre 2008, la Fed a créé deux fois plus de dollars qu’elle n’en avait créés depuis sa fondation en 1913. D’environ 851 milliards de dollars juste avant la faillite de Lehman Brothers, la base monétaire (M0) étasunienne frôle désormais les 2 600 milliards de dollars. Ce petit graphique illustre assez bien l’ampleur du mouvement (en milliards de dollars US) :
Mais pourquoi donc n’observons nous pas un effondrement du dollar sur le marché des changes et une inflation galopante aux États-Unis ? Eh bien c’est très simple : environ 84% de cette gigantesque injection monétaire est aujourd’hui détenue par les banques sous formes de réserves excédentaires. En d’autres termes, contrairement à ce qu’espéraient les banquiers centraux, les banques n’ont pas utilisé ces dollars pour les prêter mais les ont immédiatement replacés à la Fed.
On peut avancer au moins trois raisons à cela. La première, c’est que les banques cherchent à tout prix à se déleverager et à assurer leur liquidité en cas de nouveau coup dur (et l’instabilité règlementaire US n’arrange rien à l’affaire). La seconde, c’est qu’il n’y a pas de demande : entre les particuliers qui subissent encore les conséquences de l’explosion de la bulle immobilière et les entreprises qui ont accumulé des montagnes de dollars pour parer à l’éventualité d’un nouveau credit crunch, il n’y a tout simplement personne qui souhaite s’endetter. Enfin, le fait que la Fed rémunère désormais les réserves des banques à hauteur de 0,25% – c’est-à-dire mieux que le taux d’un bon du Trésor US à 2 ans à l’heure où j’écris ces lignes – n’est probablement pas étranger au phénomène. Bref, le multiplicateur monétaire est cassé. Depuis 1995, le rapport M2/M0 oscillait autour de 8,3 ; aujourd’hui, il s’est effondré à 3,7.
Et maintenant, voici le problème : tôt ou tard – à moins, bien sûr, que l’administration Obama ne trouve une nouvelle méthode pour prolonger la récession dans la plus pure tradition du New Deal – les banques vont se remettre à prêter et donc, le multiplicateur devrait se remettre à fonctionner. Or, avec la base monétaire actuelle et un multiplicateur au niveau de ce qu’il était durant la période 1995-2005, M2 devrait plus que doubler.
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Sur le web
J’aime bien le terme “montagne de cash”…c’est bien le cas. La FED, avec ses “QE1″ et QE2” a engendré une quantité phénoménale de dollars. Pourtant, pas d’inflation en vue, et même, malgré leur situation économique désastreuse, les USA sont toujours le marché préférentiel et le dollar la monnaie d’échange quasi exclusive.
Voilà qui démontrerait à quiconque est persuadé que la monétisation de la dette engendrerait systématiquement de l’inflation, en particulier en présence de récession.
En le cas d’espèce les banquiers l’ont utilisé pour augmenter leurs réserves excédentaires, ils n’ont donc pas désendetté le pays. En revanche, en accumulant de l’argent, ils ont dilué la dette, ce qui revient au même puisque leur capacité à désendetter reste la même.
Mais, finalement, la dette c’est ça : il ne faut pas la voir comme une somme fixe déterminée, mais comme un montant au ratio du PNB. De même que si vous gagnez 1 million d’Euros par an et que vous avez 10’000€ de dettes, ce n’est rien du tout, alors que si vous êtes smicards, vous êtes surendetté, plus on augmente le PNB, plus la dette se dilue et le ratio s’affaiblit. Vous continuez de la payer, mais tout en souffrant moins.
La première des recettes (sauf erreur également proposée par Etienne Chouard, si je dis une connerie, il me corrigera) est donc d’améliorer la performance économique par de la croissance.
Un audit de la dette (pas forcément citoyen, la frange de la population ayant la capacité de comprendre de quoi il retourne et de prendre une décision en conséquence ne doit pas dépasser 1%, même les politiques n’y comprennent rien) qui permettrait d’annuler purement et simplement certaines parties peu contraignantes pour le marché, une croissance économique brutale, un rien de rigueur (à ne pas confondre avec l’austérité, qui est un moteur de modulation de la récession, donc de l’inflation)….et de la monétisation, et voilà, question réglée….
http://www.contrepoints.org/2012/01/13/64557-fed-la-montagne-de-cash
Bien sûr, me direz-vous, où allez-vous trouver la croissance économique? Et moi, je vous répondrai : dans la démocratie et la PME! Allez visiter l’AMI et voyez vous-même : http://soyons-AMI.fr
Invoquer la croissance est un peu facile je trouve, même si je suis d’accord avec votre analyse. Dans les faits la possibilité de croissance est inversement proportionnelle au coût du pétrole, qui malheureusement ne vas pas faire que baisser dans les années qui viennent…
Le problème c’est que contrairement au millionaire et au smicard, le PIB n’est pas une liquidité disponible a volonté. La dette se rembourse avec un budget équilibré ou un excedent, pas seulement avec de la croissance.
Et c’est bien le problème, on avait beau avoir une croissance plus élevée que le taux de la dette, (avant la crise), la dette a continué de croitre parceque chaque année, on a 40+ milliards d’euro de deficit depuis les années 70.
C’est quoi un M2 ? (M0 c’est bon, mais M2 ???) En passant : quid du M1 ?
http://fr.wikipedia.org/wiki/Agrégat_monétaire
Alors qu’un revenu de base inconditionnel est évidemment non seulement le pendant fondamental de la création monétaire arbitraire mais aussi légitime le crédit avec intérêt. Tandis que l’absence du RBI permet l’appropriation illégitime de tout et n’importe quoi par assèchement ou explosion arbitrairement décidée de la quantité de monnaie dans l’économie.
la création monétaire, ça n’existe pas. Ce n’est pas de la “création”. Ou alors c’est du pur faux monnayage, mais c’est pas de ça dont parle.
Depuis début septembre 2008, la Fed a créé deux fois plus de dollars qu’elle n’en avait créés depuis sa fondation en 1913. Pourtant, cela ne se traduit pas par une inflation galopante. Pourquoi ?
http://www.contrepoints.org/2012/01/13/64557-fed-la-montagne-de-cash
C’est ce qu’on appelle une “liquidity trap” non ?
Qu’en est-il de la BCE ? Auriez-vous un graphique récapitulant ces 10 dernières années ?
Un petit rappel sur les masses monétaires ne serait pas inutile,j’ai du mal à suivre et je crois que je ne suis pas le seul.
Effectivement, c’est logiquement vrai.
Mais dans les faits, c’est pas la première fois que l’administration étasunienne manipule l’économie mondiale à ses fins. Les États-Unis et leurs alliés trouveront assurément un nouveau moyen de faire perdurer ce non-sens. Il en faut pas attendre “le grand effondrement”, il faut dès aujourd’hui informer, mais surtout réclamer de fortes modifications de l’économie mondiale.
Merci à vous pour ce suivi…