Un article de Philbert Carbon.
L’IREF le clame depuis sa création en 2002 : une réglementation excessive nuit à la croissance économique. Nos collègues danois du think tank CEPOS montrent qu’en limitant l’inflation réglementaire, le PIB pourrait augmenter d’environ 14 % en dix ans.
Une réglementation débordante
CEPOS déplore la croissance de l’État réglementariste au Danemark. En 1989, il y avait 7,5 millions de mots dans l’ensemble de la législation. Il y en avait 19,3 millions en 2022. Le volume a presque triplé en 30 ans. Il a augmenté, en moyenne, de 1,4 % par an au cours des dix dernières années.
Beaucoup de ces textes sont inutiles et entravent la croissance. C’est le cas, par exemple, de la loi qui interdit aux cars de proposer des trajets inférieurs à 75 km, ou de celle qui interdit à des services comme Uber d’opérer au Danemark.
La France est sur la même trajectoire que le Danemark, ce qui n’est guère étonnant étant donné que les deux pays sont membres de l’Union européenne, grande productrice de normes. Les gouvernants français ont cependant une spécificité : ils « surtransposent » la réglementation européenne. C’est ainsi qu’il y avait 45,3 millions de mots pour dire le droit français au début de l’année 2023, soit deux fois plus qu’il y a 20 ans. Et plus de deux fois plus qu’au Danemark.
Comment limiter, sinon empêcher, cette inflation réglementaire qui entrave le progrès économique comme l’a montré l’analyse, par CEPOS, de 68 études internationales traitant du lien entre la réglementation et la croissance ?
Un « budget de maîtrise réglementaire »
La solution pour nos confrères danois est le « budget de maîtrise réglementaire » (regulatory budget, en anglais). En effet, même si le gouvernement français en repousse constamment les limites, il arrive nécessairement un moment où il devient difficile de taxer et d’emprunter davantage pour accroître les dépenses publiques. En revanche, la réglementation ne semble soumise à aucune limite, pas plus que les coûts qu’elle entraîne pour la société.
CEPOS a notamment étudié de près l’expérience de la Colombie-Britannique. Au début des années 2000, le Parti libéral de cet État canadien s’est fait élire en promettant une réduction de 33 % du fardeau réglementaire. Au bout de trois ans, en appliquant la règle du « 1-in, 2-out », qui revient à instaurer une réglementation nouvelle à la condition que deux anciennes soient supprimées, l’objectif fut dépassé puisque le fardeau réglementaire a été réduit de 37 %.
Si le Danemark appliquait la règle du « 1-in, 1-out », qui consiste donc à supprimer un texte réglementaire pour un nouveau texte voté, il verrait son PIB augmenter dans une fourchette de 2,3 % à 13,8 % sur une période de 10 ans.
Certes, cette fourchette est large. Néanmoins, quelle que soit la méthode de calcul adoptée, l’arrêt de l’inflation réglementaire entraîne une croissance du PIB.
De plus, la productivité serait ainsi stimulée et elle entraînerait, à son tour, une augmentation des salaires. Selon CEPOS, un budget de maîtrise réglementaire sur dix ans pourrait signifier une augmentation des revenus annuels avant impôts de 2700 à 16 000 euros pour une famille danoise moyenne.
Des gains beaucoup plus importants pour la France ?
Dans son étude, CEPOS reste cependant prudent. Il estime, en effet, que les gains de croissance calculés à partir de l’expérience de Colombie-Britannique pourraient être moindres au Danemark car l’État canadien était réputé pour la mauvaise qualité de sa réglementation avant la réforme, ce qui expliquait en partie les performances médiocres de son économie.
Au contraire, selon CEPOS, le Danemark dispose d’une réglementation de qualité relativement élevée. Il est classé à la 4e place dans l’indicateur de la facilité à faire des affaires de la Banque mondiale (Doing Business) et à la 3e dans l’indicateur de la réglementation des marchés de produits de l’OCDE. Par conséquent, les économistes de CEPOS se demandent si appliquer les calculs canadiens au contexte danois ne conduirait pas à une surestimation des résultats.
En revanche, on peut sérieusement envisager que les gains d’une réglementation qui ne s’accroîtrait plus soient très importants en France. Contrairement au Danemark, la réglementation du pays est de mauvaise qualité. Si l’on reprend les indicateurs déjà cités, la France est 22e dans le classement Doing Business et 33e dans celui de l’OCDE !
Pour CEPOS, même si les résultats sont entachés d’une grande incertitude, ils suggèrent que l’introduction d’un budget de maîtrise réglementaire – c’est-à -dire une stagnation du niveau de la réglementation – sur une période de dix ans, recèlerait un potentiel économique considérable. En effet, la richesse d’un pays s’en trouverait immédiatement augmentée. Même si c’est l’hypothèse la plus basse – ici 2,3 % – qui se révèle la bonne, cela est bien plus bénéfique que la plupart des politiques de croissance menées couramment.
Le gouvernement français vient de lancer une grande consultation publique auprès des chefs d’entreprise pour la simplification administrative. C’est assurément une bonne idée, même si l’on sait à peu près ce qu’il faudrait faire en la matière. Mais il ne faudrait pas que ce ne soit, comme souvent, qu’un coup d’épée dans l’eau. Comme nous venons de le voir, c’est en faisant preuve de constance qu’une politique de limitation réglementaire peut avoir des effets notables.
Étant donné l’état de la réglementation française, il nous semble que la règle du « 1-in, 2-out », comme en Colombie-Britannique, devrait être adoptée.
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Je propose plutôt la règle du “2-out et on verra après”.
Que feraient notre armée mexicaine de députés et de fonctionnaires si elle arrêtait de créer et d’empiler des textes de loi inutiles ?
Cela reviendrait à se séparer de plus de 50% de ces parasites qui se nourrissent sur la bête.
Il a même été créé un ministère de la simplification sans aucun possibilité de trier et d’évacuer l’inutile. Ça, c’est de la simplification…